Ci-dessus moteur de recherche


ACCUEIL

BENOÎT XVI

LÉON XIV

CHRIST MISERICORDIEUX

L'EVANGILE DU JOUR

LA FAMILLE

TEXTES DU VATICAN

JEAN PAUL II

FARNESE LOUIS-CHARLES

ACTUALITE DE L'EGLISE

CATECHESES

LITURGIE

LES JEUNES

FIDELES LAICS

JOUR DU SEIGNEUR

SERVANTS DE MESSE

SPIRITUALITE

THEOLOGIE

VOCATIONS

VOYAGE APOSTOLIQUE

GALERIE PHOTOS

TV VATICAN

MEDITATIONS

QUI SOMMES NOUS

NOUS CONTACTER
 
BIBLIOTHEQUE
.
STATISTIQUES
 
Ouverture du site
19 Avril 2005
 

Benoît XVI et le concept « peuple de Dieu »

Le 14 janvier 2025 - E.S.M. -  Dans cet extrait d'un entretien de Peter Seewald avec le Cardinal Ratzinger/Benoît XVI, le Saint-Père est interrogé sur le concept « peuple de Dieu » et nous rappelle la manière dont la Bible l'utilise et qui doit nous servir de norme quand nous l'utilisons nous aussi. Il figure tout d'abord et essentiellement dans l'Ancien Testament.

Pour agrandir l'image ► Cliquer  

Le chapitre qui suit est le prolongement d'un entretien de Peter Seewald avec le Cardinal Ratzinger/Benoît XVI, alors préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi et traduit de l'allemand par Nicole Cazanova

Pages précédentes:
    - Appartenir à l'Église a t'il encore un sens ?
    - Le bien de l'Église est plus important que ses biens
    - Les leitmotivs de la critique
        - 1) Les leitmotivs de la critique
        - 2) Le dogme de l'infaillibilité
        - 3) Mauvaise Nouvelle au lieu de Bonne Nouvelle
     

4) Nous sommes le peuple de Dieu

Le concept « peuple de Dieu » est entendu aujourd'hui comme une volonté d'autonomie envers l'institution de l'Église, selon le slogan « Nous sommes le peuple » et ce que dit le peuple doit se réaliser. D'autre part, un proverbe dit aussi : « La voix du peuple est la voix de Dieu. » Que pensez-vous de ce concept ?
    Si nous sommes des théologiens et des croyants, nous écoutons d'abord ce que dit la Bible. Nous ne pouvons certes pas inventer nous-mêmes les grands concepts « Qui est Dieu », « Qu'est-ce que l'Église ? », « la grâce », etc. Le don de la foi consiste précisément en ceci qu'il y a un don préalable. Le concept « peuple de Dieu » est biblique. La manière dont la Bible l'utilise doit nous servir de norme quand nous l'utilisons nous aussi. Il figure tout d'abord et essentiellement dans l'Ancien Testament, où le concept de « peuple » apparaît bien avant l'ère des nations et se rapporte davantage à la tribu, la famille.
    Mais c'est avant toute chose un concept de relation. La nouvelle exégèse l'a très nettement établi. Israël, quand il agit uniquement en tant que nation politique, n'est pas le peuple de Dieu. Il devient le peuple de Dieu quand il se tourne vers Dieu. Il n'est le peuple de Dieu que dans sa relation avec Dieu, quand il se tourne vers lui, et cette relation consiste en Israël en la soumission à la Thora. Dans l'Ancien Testament, le concept de « peuple de Dieu » inclut d'abord le fait que Dieu a élu Israël non pour ses mérites particuliers et bien que ce ne soit pas un grand peuple, un peuple important, mais l'un des plus petits, Dieu l'a élu par amour et afin que son amour s'y pose. D'autre part, ce concept inclut aussi l'acceptation de cet amour, c'est-à-dire concrètement la soumission à la Thora. C'est seulement dans cette soumission qui le met en relation avec Dieu qu'Israël est le peuple de Dieu.
    Dans le Nouveau Testament, le concept de « peuple de Dieu » (à une ou deux exceptions près peut-être) ne se rapporte qu'à Israël, au peuple de l'ancienne Alliance, ce n'est pas un concept qui désigne directement l'Église. L'Église est toutefois comprise comme la continuation d'Israël, bien que les chrétiens ne descendent pas d'Abraham et n'appartiennent pas au sens propre à ce peuple. Ils y entrent, dit le Nouveau Testament, par le fait qu'ils descendent du Christ et de cette façon deviennent aussi les enfants d'Abraham. Donc, appartient au peuple de Dieu celui qui appartient au Christ. On pourrait dire que le concept de « Thora » est remplacé par la personne du Christ, et dans cette mesure la catégorie « peuple de Dieu », dont ne fait pas directement partie le nouveau  peuple, désigne aussi la communauté du Christ et la vie à l'imitation du Christ et avec lui, ou comme le dit saint Paul : « Ayez entre vous les mêmes sentiments qui furent dans le Christ Jésus » (Phil., II, 5). Les « sentiments qui furent dans le Christ Jésus », il les décrit ainsi : II a été obéissant jusqu'à la mort sur une croix. C'est seulement quand on reprend le concept « peuple de Dieu » dans son acception biblique qu'on l'utilise chrétiennement. Tous les autres emplois sont des constructions hors christianisme, qui négligent l'essentiel. À mon avis, ce sont aussi des produits de l'orgueil. Qui peut dire de soi « nous sommes le peuple de Dieu » — déclarant ainsi que les autres ne le seraient peut-être pas.
    À propos de cette formule « Nous sommes le peuple », je voudrais ajouter une considération purement pratique. Du « Nous sommes le peuple » on déduit aussi : « C'est nous qui déterminons. » Si, par exemple, aujourd'hui en Allemagne tous les membres d'une certaine association se réunissaient et disaient : « Nous sommes le peuple et en conséquence nous décidons que maintenant les choses seront ainsi », les gens ne feraient qu'en rire. Chaque peuple a ses institutions, chacun sait que ce n'est pas le conseil municipal qui vote les lois fédérales, mais le Bundestag, le parlement, donc un organe qui représente vraiment l'ensemble de la population. Et, de même, n'importe qui ne peut pas représenter le « nous » exhaustif de l'Église et être ensuite habilité à prendre des décisions : elles ne peuvent être prises que par tout le monde ensemble, ou par un groupe particulier dans la mesure où il vit dans cet ensemble. Rien que du point de vue démocratique, déjà, ce serait absurde si des groupes eux-mêmes décidaient de l'ensemble. Une communauté paroissiale ou un forum diocésain devraient prendre en main leurs affaires. Mais en tant que tels, ils ne peuvent vouloir décider des affaires de l'Église.
    Dans l'Église s'ajoute encore à ces données du droit public (et qui ont aussi de l'importance pour l'Église) le fait qu'elle ne vit pas en synchronisme mais en diachronisme. C'est-à-dire que tous les êtres humains vivent toujours — même les morts — et qu'ils sont toute l'Église, que tous, ils appartiennent toujours à une majorité dans l'Église. Dans un État, nous avions, par exemple, hier une administration Reagan, aujourd'hui une administration Clinton, et chacune se débarrasse de ce que la précédente a fait et déclare que c'est aujourd'hui que tout commence. Cela n'existe pas dans l'Église. L'Église vit précisément de l'identité de toutes les générations, de leur identité qui envahit le temps, et les saints forment sa majorité proprement dite. Chaque génération tente de prendre place parmi les saints  et apporte sa contribution. Mais elle ne peut le faire qu'en acceptant cette grande continuité et en se familiarisant avec elle.

Mais naturellement, il y a aussi une continuité de l'État qui est indépendante de chaque Président.
    C'est juste, c'était dit un peu rapidement. Dans un État non plus, chaque gouvernement ne doit pas tout reprendre depuis le commencement. Il reste inclus dans la grande tradition nationale et, lié à la Constitution, ne peut pas reconstruire l'Etat à partir de zéro. Ce qui vaut dans un État vaut aussi dans l'Église, mais de façon encore plus stricte et plus profonde.

Il y a à présent des mouvements qui s'intitulent « Nous sommes le peuple » ; ils ne se soucient plus des réglementations traditionnelles, des lois, des parlements, et sautent tout simplement par-dessus les grilles.
    Dans l'État, vous voulez dire ? Oui, oui. Dans cette mesure le phénomène n'a rien non plus de particulier quand il touche l'Église. Mais que cela ne puisse pas fonctionner dans l'État, les mouvements démocratiques fondés uniquement sur la base nous le prouvent. L'Union soviétique a commencé ainsi. À travers les « conseils », la « base » devait prendre les décisions, tous devaient participer activement au gouvernement. Cette prétendue démocratie directe, que l'on opposait à la démocratie représentative (parlementaire), est devenue dans la réalité un pur mensonge. Il n'en irait pas autrement dans une Église faite de conseils.

Le slogan « Nous sommes le peuple » séduit aussi parce que, dans notre passé très récent, il a obtenu un immense succès quand les mouvements contestataires de l'ancienne République démocratique allemande l'ont adopté.
    C'est exact. Mais dans ce cas, le peuple tout entier était uni derrière lui. Entre-temps, ce consensus s'est dégradé à nouveau. Ce slogan suffisait pour rassembler un vaste mouvement de contestation, mais ce n'est pas ainsi que l'on peut diriger une communauté de manière positive.

5) Autorité sacrée et amour fraternel

Pourquoi l'Église doit-elle opérer aujourd'hui encore avec des méthodes autoritaires et être organisée selon des structures pour ainsi dire « totalitaires » ? Nombre de gens imaginent que dans l'Église aussi des modèles démocratiques seraient possibles. On ne peut pas exiger dans la société, disent-ils, démocratie et droits de l'homme, et les laisser ensuite devant la porte de sa propre boutique. On ne peut pas prêcher l'amour du prochain et agir essentiellement avec des mises en accusation, des lois, et l'index continuellement levé.
    Voyons d'abord le mot « hiérarchie ». La bonne traduction n'est vraisemblablement pas « autorité sacrée », mais « origine sacrée ». Si en grec ieros signifie « sacré », le mot arché a les deux sens, « origine » ou « autorité ». Mais la signification la plus vraisemblable est « origine sacrée ».
C'est la force d'une origine qui est ainsi transmise, et cette force originelle, qui est sacrée, se perpétue à l'arrivée de chaque génération dans l'Église. Elle ne vit pas de la seule continuité des générations, mais de la source elle-même, toujours réactualisée et transmise par le sacrement. Il faut donc procéder d'abord, je crois, à un important changement d'optique : la catégorie où entre le sacerdoce n'est pas celle de l'autorité. Le sacerdoce doit au contraire être passage, rappel d'un commencement, et mise à la disposition de ce service. Voir essentiellement une autorité dans le sacerdoce, la dignité épiscopale et le pontificat est réellement absurde et faux.
    Nous savons par l'Évangile qu'il y eut des conflits de préséance parmi les disciples, que la tentation de considérer le fait d'être disciple comme un signe d'autorité fut là dès le premier instant et dure encore. Il est donc indiscutable que cette tentation existe dans chaque génération, même dans celle d'aujourd'hui. Mais en même temps il y a le geste du Seigneur qui lave les pieds des disciples et les rend ainsi dignes de prendre place à la table commune avec Lui, avec Dieu. Par ce geste, II dit : C'est cela, le sacerdoce. Si cela ne vous plaît pas, alors vous n'êtes pas des prêtres. Ou encore, comme II le dit à la mère de Zébédée : La condition préalable, c'est de boire le calice, c'est-à-dire de souffrir avec le Christ. Qu'ils soient ensuite assis à droite ou à gauche ou n'importe où, là n'est pas la question. Et cela signifie aussi qu'être disciple, c'est boire le calice, entrer en communauté de destin avec le Seigneur, être un laveur de pieds, souffrir avant et avec les autres. Le premier point, donc, c'est que l'origine, le sens propre de la hiérarchie, n'est pas l'établissement d'une structure pourvue d'autorité, mais le maintien de quelque chose qui ne dépend pas du seul individu. Personne ne peut remettre des péchés de sa propre autorité, ni transmettre l'Esprit Saint, ni changer le pain en le corps du Christ ou l'y garder présent. Il s'agit donc de rendre un service, au sein d'une Église qui n'est pas une entreprise auto-administrée, mais vit toujours en référence à son origine.
    Une seconde remarque générale : le mot « fraternité » est beau, certes, mais il ne faudrait pas oublier son ambiguïté. Le premier couple de frères, selon la Bible, est Caïn et Abel, et l'un des deux a tué l'autre. C'est une représentation que l'on retrouve souvent dans l'histoire de la religion. La mythologie originelle de Rome a Romulus et Remus. Tout commence aussi avec deux frères, et l'un des deux tue l'autre. Donc, des frères ne sont pas forcément l'archétype de l'amour et de l'égalité. De même que la paternité peut dégénérer en tyrannie, nous avons suffisamment d'exemples de fraternité négative dans l'Histoire. La fraternité elle aussi doit pour ainsi dire être sauvée et passer par la croix, afin de trouver sa juste forme.
    Voyons maintenant les questions pratiques. Peut-être commande-t-on et régit-on trop en ce moment dans l'Église. En réalité, l'institution devrait, selon sa nature, assurer la célébration des sacrements, permettre la venue du Christ et faire que la parole de Dieu soit proclamée. Tout le reste est subordonné à cela. Elle ne devrait pas avoir constamment pour fonction de commander, mais revenir à l'obéissance envers son origine et revivre avec elle. L'homme revêtu de cette fonction devrait veiller à ne pas se proclamer et se produire lui-même, mais à être lieu de passage pour l'autre et rester lui-même en retrait — nous en avons déjà parlé. Il devrait ainsi être tout d'abord un homme qui obéit, qui ne dit pas « maintenant je voudrais dire cela », mais demande ce que dit le Christ et ce qu'est notre foi, et s'y soumet. Il devrait enfin être un servant, à la disposition des gens et à la suite du Christ, prêt à laver des pieds. Chez saint Augustin, on peut merveilleusement voir tout cela. Nous avons déjà dit qu'il était constamment occupé par des broutilles quotidiennes, à laver des pieds pour ainsi dire, et prêt à gâcher sa grande vie pour d'humbles besognes, si l'on veut, mais en sachant qu'ainsi il ne la gâchait pas. Voilà à quoi devrait ressembler vraiment le sacerdoce. S'il est bien vécu, cela ne signifie nullement que l'on arrive enfin aux guichets du pouvoir, mais que l'on renonce à ses propres projets de vie et que l'on se voue à servir.
    Cela entraîne aussi la nécessité, je cite de nouveau saint Augustin, de réprimander, de blâmer et donc de s'attirer des ennuis. Augustin l'explique ainsi dans un sermon : Tu veux, toi, vivre mal, tu veux courir à ta perte. Mais moi, je ne dois pas le vouloir, répond-il. Je dois malgré tout te blâmer, même si cela ne te convient pas. Il utilise ensuite l'exemple du père qui a la maladie du sommeil, et que son fils réveille tout le temps parce que c'est la seule chance de le guérir. Le père dit : Laisse-moi donc dormir, je suis mort de fatigue. Et le fils dit : Non, je ne dois pas te laisser dormir. Et c'est exactement là, dit saint Augustin, la fonction d'un évêque. Je ne dois pas vous laisser dormir. Je sais que vous aimeriez bien dormir, mais c'est justement cela que je ne peux pas permettre. Et c'est en ce sens que l'Église doit aussi lever l'index et devenir importune. Mais il faut que l'on sente toujours qu'elle ne veut pas brimer les hommes, que le bien est sa grande inquiétude. Je ne dois pas vous laisser dormir, parce que le sommeil serait mortel. Et elle doit, dans l'exercice de cette autorité, prendre aussi sur elle la souffrance du Christ. Ce qui, pour parler à présent d'un point de vue purement humain, authentifie le Christ, c'est bien qu'il a souffert. Et c'est cela aussi qui authentifie l'Église. Voilà pourquoi c'est là où elle a des martyrs et des confesseurs qu'elle est le plus authentique. Et là où tout est facile, elle perd son authenticité.

     
A suivre ...
     
       6) Le célibat des prêtres
       7) La contraception
       8) L'avortement

      9) Les divorcés remariés
    10) L'ordination des femmes

 

Les lecteurs qui désirent consulter les derniers articles publiés par le site Eucharistie Sacrement de la Miséricorde, peuvent cliquer sur le lien suivant  E.S.M. sur Google actualité


 

Sources :Texte original des pensées du Cardinal J. Ratzinger-  E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 14.01.2025

 

 » Sélection des derniers articles  
page précédente haut de page page suivante