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Benoît XVI : Réflexion préliminaire
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Le 7 février 2023 -
(E.S.M.)
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Dans le récit de la Passion, nous dit le pape Benoît XVI, une
multiplicité d'allusions à des textes vétérotestamentaires
s'entrecroisent. Deux d'entre elles sont d'une importance
fondamentale, parce qu'elles embrassent et illuminent
théologiquement, pour ainsi dire, l'ensemble de l'événement de la
Passion : il s'agit du Psaume 22 et d'Isaïe 53. Jetons donc dès
maintenant un regard rapide sur ces deux textes, qui sont
fondamentaux pour l'unité entre parole de l'Écriture (Ancien
Testament) et événement du Christ.
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Isaïe 53 -
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1. Réflexion préliminaire: parole et événement dans le
récit de la Passion
Les quatre évangélistes nous
parlent tous des heures de Jésus souffrant sur la Croix et de sa mort - ils
s'accordent sur les grandes lignes de l'événement, mais présentent diverses
accentuations dans les détails. La caractéristique de ces récits est d'être
pleins d'allusions à l'Ancien Testament et de citations extraites de
celui-ci : la Parole de Dieu et l'événement se
compénètrent l'une l'autre. Les faits sont,
pour ainsi dire, remplis de Parole - de signification ; et inversement: ce
qui jusqu'alors n'avait été que Parole - et souvent Parole incompréhensible
— devient réalité et ainsi seulement s'entrouvre à la compréhension.
Derrière cette manière particulière de raconter, nous avons
un processus d'apprentissage que l'Église naissante a parcouru et qui a été
constitutif de sa formation. Au premier abord, la fin de Jésus sur la Croix
avait été tout simplement un fait irrationnel, qui remettait en question
tout son message et ce que lui-même représentait. Le récit concernant les
disciples d'Emmaüs (cf. Lc 24,13-35) décrit le cheminement qu'ils
font ensemble, leur conversation dans une recherche commune. Elle est comme
un processus où l'obscurité enveloppant les âmes s'estompe peu à peu grâce à
l'accompagnement de Jésus (cf. v. 15). Il apparaît évident que Moïse et les
Prophètes, que « toutes les Ecritures » avaient parlé des événements de
cette Passion (cf. v. 26s.) : l'« absurdité
» se révèle à présent dans toute sa
signification profonde. Dans cet événement
apparemment dénué de sens, voilà que s'entrevoit en réalité le sens
véritable du cheminement humain; le sens remporte la victoire sur la
puissance de la destruction et du mal.
Ce qui est synthétisé dans ce grand dialogue entre Jésus et
deux disciples était un processus de recherche et de maturation dans
l'Église naissante. Dans la lumière de la Résurrection, dans la lumière du
don d'une nouvelle manière de marcher dans la communion avec le Seigneur, il
fallait apprendre à lire l'Ancien Testament d'une nouvelle manière : «
Personne, en effet, ne s'était attendu à une fin du Messie sur une croix. Ou
plutôt, jusqu'à ce moment-là, on avait simplement ignoré les allusions
correspondantes dans l'Ecriture sainte » (Reiser, Bibelkritik, p.
332). Ce ne sont pas les paroles de l'Écriture qui ont suscité le récit des
faits, mais les faits qui, dans un premier temps incompréhensibles, ont
conduit à une compréhension nouvelle de l'Écriture.
La concordance que nous trouvons ainsi entre fait et parole
détermine non seulement la structure des récits de l'événement de la Passion
(et des Évangiles en général), mais elle est constitutive pour la foi
chrétienne elle-même. Sans elle, on ne peut pas comprendre le développement
de l'Église, dont le message a reçu et reçoit toujours sa crédibilité et son
importance historique justement de cet
entrelacement de sens et d'histoire: là où
cette connexion est coupée, la structure de base de la foi chrétienne
elle-même se dissout.
Dans le récit de la Passion, une multiplicité d'allusions à
des textes vétérotestamentaires s'entrecroisent. Deux d'entre elles sont
d'une importance fondamentale, parce qu'elles embrassent et illuminent
théologiquement, pour ainsi dire, l'ensemble de l'événement de la Passion :
il s'agit du Psaume 22 et d'Isaïe 53. Jetons donc dès
maintenant un regard rapide sur ces deux textes, qui sont fondamentaux pour
l'unité entre parole de l'Écriture (Ancien Testament) et événement du Christ
(Nouveau Testament).
Le Psaume 22 est un grand
cri angoissé que l'Israël souffrant adresse au
Dieu qui apparemment se tait. Le mot « crier » qui, surtout chez Marc, prend
aussi dans le récit sur Jésus en Croix une importance centrale, caractérise
pour ainsi dire le ton de ce Psaume. « Insoucieux de me sauver, malgré les
mots que je rugis ! » y est-il dit, dès le début. Dans les versets 3 et 6,
il est encore question de ce cri. Toute la douleur de celui qui souffre
devant Dieu apparemment absent devient audible. Là, le simple fait d'appeler
ou de prier n'est pas suffisant. Dans
l'angoisse extrême, la prière devient nécessairement un cri.
Les versets 7-9 parlent du mépris qui
entoure le priant. Ce mépris devient un défi
lancé à Dieu et ainsi le souffrant est encore davantage tourné en dérision :
« II s'est remis à Dieu, qu'il le délivre ! Qu'il le libère, puisqu'il est
son ami ! » La souffrance innocente est interprétée comme preuve du fait que
Dieu véritablement n'aime pas celui qui est mis à la torture. Le verset 19
parle du tirage au sort des vêtements, comme cela est effectivement arrivé
au pied de la Croix.
Mais ensuite, le cri d'angoisse se transforme en une
profession de confiance, bien plus, c'est, sur trois versets, l'anticipation
et la célébration d'un grand exaucement. D'abord: « De toi vient ma louange
dans la grande assemblée, j'accomplirai mes vœux devant ceux qui le
craignent. » (v. 26). L'Église naissante sait qu'elle est la grande
assemblée où se célèbre l'exaucement de celui qui implore, son salut - la
Résurrection ! Puis suivent deux autres éléments surprenants. Le salut
concerne non seulement le priant, mais devient « rassasiement des pauvres »
(v. 27). Mieux encore : « Tous les lointains de la terre se souviendront et
reviendront vers le Seigneur ; toutes les familles des nations se
prosterneront devant lui » (v. 28).
Comment l'Église naissante aurait-elle pu ne pas reconnaître
en ces versets, d'une part, le « rassasiement des pauvres » grâce au
mystérieux banquet nouveau, qui lui est donné par le Seigneur dans
l'Eucharistie ? Et comment, d'autre part, aurait-elle pu ne pas y voir
l'événement inattendu que les peuples du monde se convertissaient au Dieu
d'Israël, au Dieu de Jésus Christ - c'est-à-dire que l'Église se formait en
puisant chez tous les peuples ? L'Eucharistie (la louange : verset 26 ; le
rassasiement : v. 27) et l'universalité du salut (v. 28) apparaissent comme
le grand exaucement par Dieu, qui répond au cri de Jésus. Il est important
de garder toujours présent à l'esprit le vaste cours des événements contenus
dans ce Psaume pour comprendre comment, dans le récit de la Croix, il a une
place aussi centrale.
En ce qui concerne le deuxième texte fondamental -
Isaïe 53 -, nous en avons déjà parlé
dans le contexte de la Prière sacerdotale de Jésus. Marius Reiser a présenté
sur ce texte mystérieux une analyse précise dont, en la lisant, on peut
saisir une fois encore l'émerveillement de la première chrétienté devant le
fait que le parcours de Jésus Christ ait pu être prédit pas à pas. Le
prophète - lu désormais avec tous les moyens modernes de l'analyse critique
du texte — parle comme un évangéliste.
Passons maintenant à une brève considération sur les éléments
essentiels dans le récit de la crucifixion.
Avant-propos - Jésus de
Nazareth Tome II
Et Table des chapitres 1 à 5 ►
Benoît XVI
Chapitre 6
1. En marche vers le Mont des Oliviers
►
Benoît XVI
2. La prière du Seigneur ►
Benoît XVI
3. La volonté de Jésus et la volonté du Père
►
Benoît XVI
4. La prière de Jésus sur le Mont des Oliviers, dans
la Lettre aux Hébreux ►
Benoît XVI
Chapitre 7
Le procès de Jésus ►
Benoît XVI 1. Le débat préliminaire au Sanhédrin ►
Benoît XVI
2. Jésus devant le Sanhédrin ►
Benoît XVI
3. Jésus devant Pilate ►
Benoît XVI
Chapitre 8
Le crucifiement et la mise au tombeau de Jésus
1. Réflexion préliminaire : parole et événement
dans le récit de la Passion
►
Benoît XVI
2. Jésus en Croix ►
La première parole de Jésus en
Croix :
« Père, pardonne-leur »
►
Jésus outragé
►
Le cri d'abandon de Jésus
►
Le tirage au sort des
vêtements ►
« J'ai soif »
Les femmes près de la Croix —
la Mère de Jésus ►
Jésus meurt sur la Croix
►
La mise au tombeau de Jésus
►
3. La mort de Jésus comme réconciliation
(expiation) et salut
►
Chapitre 9
La Résurrection de Jésus d'entre les morts
►
1. Ce qui est enjeu dans la Résurrection de Jésus
►
2. Les deux différents types de témoignage
de la Résurrection
►
2.1 La tradition sous forme de
profession ►
La mort de Jésus
►
La question du
tombeau vide ►
Le troisième
jour ►
Les témoins
►
2.2 La tradition sous forme de
narration ►
Les apparitions
de Jésus à Paul ►
Les apparitions
de Jésus dans les Évangiles ►
3. Résumé : la nature de la Résurrection
et sa signification historique
►
Perspective
II est monté au ciel - il siège à la droite
de Dieu le Père et il reviendra dans la gloire
►
- Prochainement la suite des liens -
Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 07.02.2023
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