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De l’Ukraine à l’Afrique. L’opération spéciale du cuisinier de
Cyrille
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Le 03 mai 2023 -
E.S.M.
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Le voyage du Pape François en Hongrie n’aura débouché
sur aucun printemps dans les rapports entre la papauté
et Moscou, ni sur le plan politique ni sur le plan
religieux.Sur le plan politique, lors de la conférence
de presse à bord du vol de retour de Kiev à Rome,
dimanche 30 avril, le Pape a déclaré qu’au Vatican,
« une mission de paix était en cours » et que « quand
elle sera publique, j’en parlerai ».
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Métropolite
Léonide de Vladikavkaz et à Alanie -
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De l’Ukraine à l’Afrique. L’opération spéciale du « cuisinier de Cyrille »
Le 03 mai 2023 -
E.S.M. -
Le voyage du Pape François en Hongrie n’aura débouché sur aucun
printemps dans les rapports entre la papauté et Moscou, ni sur le
plan politique ni sur le plan religieux.
Sur le plan politique, lors de la
conférence de presse à bord du vol de retour de Kiev à Rome,
dimanche 30 avril, le Pape a déclaré qu’au Vatican, « une mission de
paix était en cours » et que « quand elle sera publique, j’en
parlerai ».
Il est probable qu’il s’agisse de la même mission à laquelle le
ministre des Affaires étrangères du Vatican, Paul Richard Gallagher
a fait allusion le 24 avril au Liechtenstein, et dont le but
serait – a-t-il déclaré – de parvenir à « une paix concrète,
susceptible d’évoluer et en devenir entre les parties en conflit et
pas seulement une répartition entre les vainqueurs et les vaincus ».
Une proposition de négociation, donc, qui ne partirait pas du
prérequis d’exclure de concéder des avantages à la Russie,
c’est-à-dire à l’agresseur, ce qui semble difficilement réalisable
dans l’état actuel des choses.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a immédiatement
fait savoir que ce à quoi le Pape a fait allusion « se passe
sans que nous en soyons informés et sans notre bénédiction ». Aucun
objection en revanche à la confirmation faite par François que le
Saint-Siège continuera à faire office d’ « intermédiaire » pour
l’échange de prisonniers et le rapatriement d’enfants ukrainiens
déportés en Russie.
Sur le plan religieux, en revanche, le moment-clé a été, le 29
avril, la rencontre du Pape avec l’ex-ministre des Affaires
étrangères du patriarcat de Moscou, le métropolite Hilarion,
destitué et relégué à Budapest par le patriarche Cyrille pour s’être
ouvertement opposé à l’agression de l’Ukraine.
L’entretien entre eux deux n’a duré que 20 minutes à peine et
Hilarion a déclaré, dans un
communiqué, n’avoir parlé avec le Pape que de ses activités
apostoliques, sociales et éducatives. Mais dans l’avion, François a
tenu à dire qu’à Budapest « nous n’avons pas fait que parler du
petit Chaperon rouge » et que même sa rencontre tant désirée avec le
patriarche Cyrille a été « suspendue » à cause de la guerre mais
qu’elle « devra se faire ». Là aussi sans aucun signe d’avancée
perceptible.
En effet, l’agression de la Russie contre l’Ukraine, avec l’appui
idéologique sans limite donné par Cyrille à la guerre déchaînée par
Vladimir Poutine a causé un désastre dans les relations entre les
Églises, y compris au sein de l’Orthodoxie.
Déjà avant la guerre, une
ligne de fracture s’était ouverte en Ukraine entre le patriarcat
de Russie et de celui de Constantinople, à cause de la
reconnaissance canonique accordée par ce dernier à la naissance
d’une nouvelle Église orthodoxe ukrainienne indépendante de Moscou.
Et cette fracture s’est aujourd’hui encore élargie à cause des
mesures prises par le gouvernement de Kiev à l’encontre l’Église
orthodoxe ukrainienne liée par ses statuts au patriarcat russe, qui
s’est dissociée du bout des lèvres de l’agression mais au sein de
laquelle demeurent beaucoup d’irréductibles partisans de la
politique de Moscou.
Le conflit a pour épicentre la
Laure des Grottes de Kiev, le complexe d’églises et de
monastères qui est la « mère » de l’orthodoxie aussi bien
ukrainienne que russe.
Les bâtiments appartiennent au gouvernement de Kiev, qui depuis le
29 mars ne reconnaît plus à l’Église orthodoxe ukrainienne liée à
Moscou le droit d’occuper la Laure, qui a été réattribuée à l’Église
orthodoxe ukrainienne indépendante.
En outre, une proposition de loi visant à interdire toute Église en
Ukraine qui maintiendrait un « lien » avec l’Église de Moscou
pourrait bien arriver prochainement sur la table du parlement.
Plusieurs
protestations se sont élevées dénonçant une violation
potentielle de la liberté religieuse de la part d’une loi formulée
de manière aussi générale. Mais en attendant, à travers des décrets
administratifs immédiatement attaqués en justice, le gouvernement de
Kiev a demandé aux actuels occupants, dont 200 moines, de quitter la
Laure des Grottes, sans cependant les expulser par la force. Seul le
métropolite Pavel, qui est depuis 1994 la plus haute autorité du
monastère, un personnage à la réputation d’oligarque, très lié à
Cyrille et doté d’une solide fibre entrepreneuriale, a été assigné à
résidence dans une petite ville non loin de Kiev. Il était parvenu à
implanter dans la Laure des activités non seulement d’édition et
d’art sacré mais également des ateliers de meubles, des ateliers
mécaniques et des supermarchés alimentaires, qu’il justifiait par la
nécessité de financer les activités religieuses.
Celui qui a pris la place de Pavel aujourd’hui, c’est
l’archimandrite Abraham Lotysh, passé de l’Église orthodoxe
ukrainienne liée à Moscou à l’Église orthodoxe ukrainienne
indépendante, et donc excommunié par le métropolite de la première,
Onuphre, pour être accueilli les bras ouverts par le métropolite de
la seconde, Épiphane. Les deux cents moines, dont au moins un tiers
sont pro-russes, sont restés en place. Sans compter que l’archevêque
majeur de l’Église ukrainienne grecque catholique, Mgr Sviatoslav
Shevchuk, a demandé lui aussi de pouvoir célébrer dans la Laure,
tout comme les orthodoxes, en souvenir d’une antique unité
œcuménique à laquelle il voudrait rendre vie.
Mais ce n’est pas tout. Parce que si le patriarche Cyrille et
Poutine avec lui ont perdu en Ukraine l’une de leurs fidèles
« oligarques » ecclésiastiques en la personne de Pavel, ils en ont
entretemps placé un autre en Afrique, dans cette Afrique qui fait
depuis longtemps l’objet de toutes les convoitises de Moscou,
surtout grâce aux mercenaires du groupe Wagner, aux ordres du
« cuisinier de Poutine », Evgueni Prigojine dont la dernière terre
de conquête ces dernières jours est le Soudan.
En 2019 déjà, le patriarcat de Moscou avait soustrait six paroisses
africaines au patriarcat d’Alexandrie, en envahissant un territoire
étranger qui selon l’ecclésiologie orthodoxe aurait dû être
inviolable.
Mais quand, en 2021, le patriarche grec orthodoxe d’Alexandre et de
« toute l’Afrique » Théodore II a approuvé, en accord avec le
patriarcat œcuménique de Constantinople, la naissance en Ukraine
d’une Église orthodoxe indépendante de Moscou, Cyrille a réagi en
allant jusqu’à instituer son propre exarchat pour l’Afrique, au
risque de provoquer un schisme avec Alexandrie, comme cela n’a pas
manqué de se produire.
Et à qui Cyrille a-t-il confié le commandement de l’extension
africaine du patriarcat de Moscou ? Au métropolite Léonide de
Vladikavkaz et à Alanie (photo).
Àgé de 55 ans et, comme Mikhaïl Gorbatchev, natif de la région de
Stavropol dont il porte le patronyme, Léonide a servi dans l’Armée
rouge au grade de Major avant de se consacrer à la vie
ecclésiastique. Et il n’a jamais perdu sa première vocation, à tel
point qu’il a fondé en 1997 un Département synodal pour la fusion
spirituelle entre l’Église et l’armée, au nom de l’esprit
patriotique.
Il a toujours exercé son ministère sous cette forme hybride, d’abord
en tant que chapelain militaire des forces de paix de l’ONU en
Bosnie Herzégovine et ensuite dans d’autres zones de conflit,
ensuite comme chef de la mission russe à Jérusalem, comme délégué
patriarcal pour l’Arménie et pour le dialogue avec l’Église
malankare d’Inde, comme évêque russe pour l’Argentine et l’Amérique
latine, puis comme exarque de Klin dans la province de Moscou, pour
enfin être promu – toujours en conservant le diocèse de Klin – aux
commandes de la nouvelle extension du patriarcat de Moscou en
Afrique.
En décrivant son profil sur « Asia
News », Stefano Caprio, un spécialiste de l’histoire
ecclésiastique de la Russie, écrivait ceci : « Les compétences
martiales et spirituelles de Léonide permettent au patriarcat de
Moscou de s’aligner à la perfections sur les tactiques du groupe
Wagner, à tel point que beaucoup le comparent à Prigojine et lui
attribuent le titre de « cuisinier de Cyrille ».
En Argentine également, Léonide a fondé sa propre compagnie, non pas
militaire mais d’assistance, la « Mecenas Orthodoxos Rusos en
America Latina ». Mais aujourd’hui – écrit Caprio – « c’est le
financement des diocèses russo-africains qui est confié à ses
initiatives de ‘mécénat’ orthodoxe et, comme l’affirme Léonide
lui-même, au soutien généreux ‘d’hommes de foi qui ne sont pas
indifférents au sort de l’Église’ ».
À Moscou, on l’appelle « opération spéciale », mais cela aussi c’est
leur guerre.
Un article de
Sandro Magister, vaticaniste à
L’Espresso.
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Sources
: diakonos.be
-
Traduction
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 03.05.2023
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