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19 Avril 2005
 

La Parole de Dieu : De la lecture liturgique à la lecture personnelle de l’Écriture

 

Le 10 janvier 2009 - (E.S.M.) - La communauté de Taizé a décidé de faire imprimer et de distribuer un million de Bibles en chinois pendant l’année 2009. Fr. Alois Loser, le prieur de la communauté, a diffusé cette nouvelle le 28 décembre lors de la clôture de la 31° assemblée européenne des jeunes. C’est la version du Studium Biblicum Franciscanum de Hong Kong qui sera imprimée.

Dans le silence du scriptorium - Pour agrandir l'image Cliquer

La Parole de Dieu : De la lecture liturgique à la lecture personnelle de l’Écriture

Frédéric Manns, ofm

Le 10 janvier 2009 -  Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - C’est là sans doute un des fruits du synode 2008 - "la Parole de Dieu dans la vie et la mission de l'Église" qui nous encourage à reprendre notre réflexion sur la Parole de Dieu.

Le christianisme n’est pas une religion du Livre, mais une religion de la révélation de Dieu, un Dieu qui parle et fait alliance avec les hommes. C’est cependant grâce au texte que le chrétien entre en relation avec Dieu, un Dieu qui s’intéresse à l’histoire des hommes.
 (Ces trois ou quatre points forts qui sont l'héritage du synode sur la "Parole de Dieu")]

L’Évangile de Luc se conclut sur la scène des disciples d’Emmaüs. Deux hommes quittent Jérusalem après la mort de Jésus et rentrent chez eux. Ils sont déçus parce qu’ils espéraient que Jésus serait celui qui délivrerait Israël des Romains. Jésus les rejoint sur la route et « ouvrit pour eux les Écritures ». Il explique, commente et interprète. Jésus part de Moïse, des prophètes et des autres écrits. L’exégète est Jésus, Dieu fait homme, mort et ressuscité.

Dans la suite du récit, les deux hommes font halte au village d’Emmaüs. Jésus prend le pain et le distribue. « Alors, leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent », dit Luc. En d’autres mots l’eucharistie est le haut lieu de réception et de compréhension des Écritures. Le Livre est une nourriture. Il renferme la parole, une parole appelée à s’épanouir à l’intérieur des esprits et des corps.

Le principe d’interprétation du texte ne doit pas dépendre seulement de la critique historique ou de la subjectivité de l’interprète. Il doit s’ancrer dans la tradition de l’Église. C’est la lecture christologique qui rend raison de la richesse de l’Écriture. Sinon le lecteur risque de tomber dans l’arbitraire subjectif ou dans le fanatisme fondamentaliste.

Vatican II a relié fortement la Bible, la parole de Dieu, la tradition et le magistère : l’Église reconnaît ainsi qu’il y a une source unique, la révélation de Dieu, qui passe à travers des canaux multiples, qu’on ne peut isoler les uns des autres. C’est pourquoi l’Église encourage à lire et à méditer la parole de Dieu, comme l’a fait le dernier synode des évêques à Rome, en octobre. La Bible est sur la place publique. Il ne faut pas la séparer de sa source, qui est le Dieu vivant. Il faut la recevoir pour la mettre en pratique.

Aux premiers siècles de notre ère, pour les communautés chrétiennes naissantes, les « Écritures » désignent la Bible hébraïque et il n’est pas question de leur adjoindre un deuxième livre.

Des écrits sur Jésus apparaissent très tôt. Les lettres de l’apôtre Paul sont les textes les plus anciens. L’ancien persécuteur des chrétiens se met à proclamer le kérygme : « Le Christ est mort pour nous et il est ressuscité pour notre justification ». Celui qui reçoit le baptême obtient le pardon de ses péchés. Paul avait cependant mis en garde les chrétiens de Corinthe : « La lettre tue, l’esprit vivifie ».

Les quatre Évangiles furent rédigés après avoir connu une période de tradition orale. Leur origine est liturgique. Mais le noyau de ces écrits accompagnant les enseignements itinérants des apôtres et des prophètes, n’est que l’ombre portée de l’événement fondateur : la mort et la résurrection de Jésus.

Pour les jeunes Églises chrétiennes, la question de la sélection des témoignages les plus fiables sur Jésus émerge seulement au courant du IIe siècle, quand l’éclatement doctrinal se profile. La montée en puissance du christianisme sur le pourtour méditerranéen s’accompagne en effet d’une floraison de doctrines entachées par des philosophies ésotériques venues de Grèce, d’Iran ou d’Égypte, comme la gnose - un mot grec signifiant « connaissance ».

En quelques décennies, les courants gnostiques déferlent sur le christianisme oriental. Ils se caractérisent par une opposition entre le monde matériel, voué à la perdition, et le monde spirituel, objet d’une connaissance supérieure et réservé à une petite élite. Pour les désavouer, Irénée de Lyon recourt, à la fin du IIe siècle, à la notion de « tradition » : est considéré comme vrai ce qui a été reçu directement des apôtres et conservé intact dans les Églises fondées par les apôtres, en particulier celle de Rome.
(Lire la très belle catéchèse du pape Benoît XVI sur saint Irénée de Lyon : La tradition Apostolique est publique, unique)

Irénée de Lyon fait ainsi remonter les quatre Évangile à des apôtres directs
(Matthieu et Jean) ou à leurs compagnons (Marc et Luc) et montre que les quatre textes proclament différemment la même chose. Le quatuor sonne juste, sans dissonance. Pourquoi quatre ? Parce qu’il y a quatre points cardinaux, répond, imperturbable, Irénée. La réponse ne convainc visiblement pas des chrétiens qui manipulent, à cette époque, près d’une quinzaine d’Évangile. Citons le célèbre Évangile de Thomas, déterré en Égypte en 1945 et titré « Paroles cachées de Jésus écrites par Thomas ».

C’est dans ce contexte polémique que s’impose la nécessité d’opérer un tri et de déterminer une règle qui définit les textes lui appartenant de droit. Ainsi naît l’idée d’un canon des Écritures. Loin des bibliothèques gnostiques, les écrits chrétiens sont d’abord des paroles proclamées, à des fins d’enseignement ou de célébration.

Les siècles suivants vont alors faire apparaître un nouveau personnage, banal pour nous modernes, mais révolutionnaire pour l’Antiquité tardive : le lecteur privé des Écritures.

Origène, à Césarée maritime, établit la première école biblique. Après avoir résout les problèmes de critique textuelle, il écrit ses commentaires allégoriques dont certains se rapprochent du midrash juif. A Bethlehem Jérôme traduit la Bible en latin, la Vulgate, et revient au texte hébreu, alors qu’Augustin d’Hippone préférait la traduction grecque des Septante.
(Benoît XVI nous a invités à accueillir l'enseignement de ce grand maître de la foi : le pape donne une "leçon magistrale" sur l'exégèse.)

Augustin qui vit à Milan est en recherche de la vérité. Déçu de tout, lassé des philosophes et de leurs contradictions, il se rend à l’église pour entendre les sermons de l’évêque Ambroise. Fasciné par cet homme pieux, Augustin se glisse ensuite dans son bureau, dont la porte est toujours ouverte. Et là, Ambroise, qui ne pensait pas être vu, lit un livre à voix basse. Pourquoi cette scène bouleverse-t-elle à ce point Augustin ? Simplement parce qu’elle le fait basculer dans un monde neuf, qui est encore aujourd’hui le nôtre : celui du livre comme compagnon intime, miroir de l’âme et ami de la solitude. La Bible chrétienne, dont les contours commencent alors à se dessiner, est le premier livre à jouer ce rôle en Occident. Le monde gréco-romain était un monde d’orateurs, formé à l’art de la rhétorique ; le monde chrétien va devenir un monde de lecteurs. Le livre devient le lieu même où se joue la vie spirituelle.

C’est du côté des premiers moines, au Ve siècle, que la pratique de la lectio divina, ou « lecture des textes divins », va se répandre, au point de devenir l’un des piliers de la vie monastique, avec le travail manuel et la prière du choeur. D’abord liturgique et public, le rapport au livre devient personnel. Il s’agit de lire la Bible comme une parole qui m’est adressée, à moi et à nul autre, à l’instant même où je la lis. Devenu un manuscrit copié à la plume d’oie dans le silence du scriptorium, le livre n’est plus une simple suite de propositions dédiées à l’enseignement, mais le lieu même où la vie spirituelle se joue. Dans les ermitages de Cappadoce les moines apprennent par cœur les Psaumes et les Évangile pour les ruminer jour et nuit. Dans le désert de Juda Cariton, Sabbas et Eythyme fondent des laures où les moines travaillent et méditent les Écritures durant la semaine et se retrouvent pour la liturgie dominicale.

A la fin du XIIe siècle, le prieur de la grande Chartreuse, Guigues II
(théologien du XIIème siècle) fait de la lecture silencieuse le « premier barreau de l’échelle qui monte au ciel ». Il rédige en 1150 L’Échelle du moine, où il distingue quatre étapes dans la vie du moine : lecture, méditation, prière et contemplation. La lecture signifie cependant la recherche du sens littéral du texte.

Plus tard, François d’Assise veut que l’Évangile vécu au quotidien soit l’unique règle des Frères Mineurs, ce qui exige une méditation constante des saintes Écritures. L’Institution du tiers ordre pour les laïcs met à la disposition du peuple chrétien les Évangiles. Mais les livres sont chers. Jusqu’à la Renaissance, la Bible existe principalement pour les clercs des monastères et des universités. Pour le peuple, elle se transmet par la liturgie qui la met en scène, la prédication qui l’explique et l’art qui la représente. Ainsi, les cathédrales avec leurs sculptures colorées, sont une Bible de pierre.

La lecture monastique commence cependant à ébranler la pierre des cathédrales. Peu à peu, la relation personnelle au livre saint remet en question les intermédiaires institutionnels. Une brèche apparaît, dans laquelle entreront au XVIe siècle les mouvements de réforme de l’Église.

Le premier livre à sortir des presses de Gutenberg à Strasbourg en 1455 est la Bible. Gutenberg préfère imprimer sur papier plutôt que sur parchemin, ce qui lui permet d’abaisser considérablement le poids du livre. La technique devient ainsi l’alliée des humanistes et des réformés, pareillement soucieux de démocratiser l’accès à la Bible, en l’arrachant à la prédiction et à la liturgie. Malgré tout la Bible reste coûteuse et volumineuse. Cependant, la révolution est en marche. Elle fera du livre saint un objet malléable, offert à toutes les lectures et à toutes les interprétations.

« Sola fides » s’écrie alors Luther, court-circuitant la hiérarchie ecclésiale et son clergé. Pour le moine allemand la foi à l’intérieur du coeur ne doit avoir pour seul répondant, à l’extérieur, que le livre saint, lisible par tous.

Joignant le geste à la parole, l’initiateur de la Réforme traduit la Bible latine dans une langue allemande encore en formation, mais qu’il veut la plus proche possible de celle qui est utilisée par le peuple. Il poursuit ainsi un mouvement inauguré aux XIIe et XIIIe siècles, avec les premières traductions de la Bible en français. A l’époque, leur diffusion n’avait pas dépassé le cercle des familles royales. Cette fois, par l’imprimerie, le mouvement s’accélère et le public s’élargit.

Mais cette Bible des humanistes et des réformés n’est sans doute qu’un rêve : celui d’un accès simple et direct à une Parole divine qui illuminerait le lecteur aussitôt qu’il la découvrirait. Éloignée d’une lecture spirituelle qui dissimulait ses aspérités, la Bible apparaît à l’époque moderne comme un texte embarrassant : les contradictions historiques sautent aux yeux des fins lettrés que sont Baruch Spinoza
(1632-1677) et surtout Richard Simon (1638-1712), auteur du grand ouvrage Histoire critique du Vieux Testament (1678). Simon, prêtre catholique, compare les différentes versions disponibles, révise les traductions et discute l’attribution des premiers textes de la Bible à Moïse. Il entend cependant laisser l’Écriture à sa dimension divine, limitant l’objet et la portée de sa critique savante.

Les mutations que le rapport au livre saint a connues au cours des siècles ne sont donc pas pour autant des fractures. Avec Internet commence une nouvelle mutation : la Bible est maintenant à la disposition de tous les navigateurs en toutes les langues du monde et avec des centaines de commentaires. C’est maintenant la lecture personnelle qui renvoie à une lecture plus communautaire. La dialectique poursuit son chemin : dans un premier temps de la lecture collective à la lecture personnelle, puis de la lecture personnelle à la lecture communautaire. Pour le chrétien de 2009, il s’agit plutôt d’intégrer sans les opposer ces trois usages du livre qui en ont bouleversé la réception : la lecture collective, la lecture personnelle et la lecture critique. Le recours à la lectio divina prôné par le synode devrait permettre de réaliser ce défi. Vatican II a rappelé que la hiérarchie institutionnelle est soumise à la parole de Dieu qui la jugera.

L’Orient a soif aujourd’hui de la parole de Dieu. La Bible qui est une vraie nourriture sera capable d’apaiser la faim des populations chinoises et asiatiques grâce à la générosité de la communauté de Taizé. L’Esprit qui parle au cœur des lecteurs leur permettra de saisir la richesse de la parole de Dieu. Les communautés chrétiennes auront pour tâche d’expliquer le texte millénaire qui est parole de Dieu pour aujourd’hui.

Frédéric Manns, ofm
 

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Sources : Custodia Terre Sainte-  (E.S.M.)
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M. sur Google actualité)  10.01.2009 - T/Synode

 

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