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Benoît XVI : La loi de l'incognito
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Le 06 avril 2023 -
E.S.M.
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Il y a Israël, un néant parmi les puissances, qui doit être
le lieu de son apparition dans le monde. Il y a Nazareth, encore un
néant à l'intérieur d'Israël, qui doit être le lieu de sa venue
définitive dans le monde. Il y a ensuite la croix, à laquelle un
homme est suspendu, une existence ratée, et ce doit être le Lieu où
l'on peut littéralement toucher Dieu. Il y a enfin l'Église, produit
équivoque de notre histoire et qui prétend être le lieu permanent de
sa révélation.
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La terre, un néant dans le cosmos-
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Benoît XVI : La loi de l'incognito
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►Le principe « pour »
3) La loi de l'incognito
*
Si le «
pour »
doit être considéré comme le principe décisif de l'existence humaine et si,
rejoignant le principe de l'amour, il constitue avec celui-ci la véritable
manifestation du divin dans le monde, une autre conséquence encore apparaît.
En effet, l'altérité [ndlr : État,
qualité de ce qui est autre, distinct.]
de Dieu, que l'homme peut déjà conjecturer par lui-même, devient alors
altérité totale ; il devient totalement impossible de connaître et de
reconnaître Dieu. Car le caractère mystérieux et caché de Dieu, que l'homme
pouvait prévoir, revêt alors la forme scandaleuse, tangible et visible, d'un
Crucifié. En d'autres termes : Dieu, le premier, l'alpha du monde apparaît
alors comme l'oméga, la dernière lettre de l'alphabet de la création, comme
la moindre des créatures. A ce propos, Luther parle du Dieu caché « sub
contrario », c'est-à-dire dans ce qui paraît être le contraire de Dieu.
Il
souligne ainsi l'originalité de la théologie négative chrétienne, résultant
de la croix, par rapport à la théologie négative de la pensée philosophique.
Déjà la philosophie, la simple réflexion de l'homme sur Dieu, découvre que
Dieu est le Tout-Autre, essentiellement caché et incomparable. « Nos yeux
sont faibles comme les yeux du hibou en face de ce qui est en soi la clarté
suprême » disait Aristote. A partir de la foi en Jésus-Christ, nous
répondrons : de fait, Dieu est le Tout-Autre, l'invisible, l'inconnaissable.
Mais lorsqu'il s'est présenté ainsi tout-autre, invisible quant à sa nature
divine, inconnaissable, ce ne fut pas le genre d'altérité et d'étrangeté que
nous avions attendu et escompté, au point qu'il demeura en fait inconnu.
Mais n'est-ce pas justement là qu'il apparaît alors
réellement comme le
Tout-Autre, qui bouscule nos prévisions d'altérité et se révèle par là
comme
le seul qui soit authentiquement tout autre
?
* Dans ce sens, on peut retrouver continuellement, à travers
toute la Bible, des exemples des deux manières dont Dieu se manifeste dans
le monde. Il se révèle tout d'abord dans la puissance cosmique.
L'immensité,
le logos du monde qui dépasse et en même temps englobe toute pensée humaine,
renvoie à Lui, dont la pensée constitue ce monde
; à Lui devant qui les
nations sont «.comme des gouttes au bord d'un seau », « comme des grains de
poussière dans la balance » (Is 40, 15). L'univers témoigne réellement de son
Créateur. Quelle que soit notre répugnance à l'égard des preuves de
l'existence de Dieu, quelles que soient les objections que la réflexion
philosophique peut à bon droit opposer aux différents arguments, il n'en est
pas moins vrai qu'à travers le monde et sa structure intelligible
transparaît la Pensée primordiale avec sa puissance créatrice.
** Mais ce n'est là qu'une des manières dont Dieu apparaît dans
le monde. L'autre signe qu'il s'est constitué et qui, en le voilant
davantage, révèle avec plus de vérité ce qui fait son être propre,
c'est le
signe de la petitesse, qui du point de vue cosmique et quantitatif est tout
à fait insignifiant, presque un pur néant. Il faudrait ainsi parler de la
série : terre - Israël - Nazareth - Croix - Église, où Dieu semble
disparaître de plus en plus, et où précisément il apparaît de plus en plus
dans son être véritable. Il y a d'abord la
terre, un néant dans le cosmos,
qui doit être le lieu de l'action de Dieu dans le cosmos.
Il y a Israël, un
néant parmi les puissances, qui doit être le lieu de son apparition dans le
monde. Il y a Nazareth, encore un néant à l'intérieur d'Israël,
qui doit
être le lieu de sa venue définitive dans le monde. Il y a ensuite
la croix,
à laquelle un homme est suspendu,
une existence ratée, et ce doit être le
Lieu où l'on peut littéralement toucher Dieu. Il y a enfin
l'Église, produit
équivoque de notre histoire et qui prétend être le lieu permanent de sa
révélation. Nous ne savons que trop aujourd'hui combien la proximité de Dieu
demeure cachée en elle. C'est précisément là où, dans le faste princier de
la Renaissance, l'Église croyait pouvoir se défaire de ce caractère
mystérieux et caché, et être directement « porte du ciel » et « maison de
Dieu », qu'elle est devenue encore une fois et plus qu'auparavant,
l'incognito de Dieu,
dont on avait peine à discerner la présence derrière tout cela.
Ce qui est insignifiant au point de vue cosmique et terrestre
représente ainsi le véritable signe de Dieu, dans lequel se manifeste le
Tout-Autre que, par rapport à nos prévisions, nous sommes toujours encore
incapables de reconnaître. Le néant cosmique, voilà le Tout véritable, car
c'est le « pour
» qui est la réalité divine authentique...
TABLE
DES CHAPITRES :
1)
L'individu et le tout
2)
Le principe « pour »
3)
La loi de l'incognito
4)
La loi de la surabondance
5)
Accomplissement et espérance
6)
Le primat de l'accueil et la positivité chrétienne
7)
Résumé : l'essence du christianisme
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Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -
E.S.M.
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constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 06.04.2023
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