Qui avait intérêt à salir la
réputation du Pape Benoît XVI ? |
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Le 29 janvier 2009 -
(E.S.M.)
- Lettre ouverte de Mgr Hippolyte Simon, vice-président de la Conférence
des évêques de France : Le déchaînement médiatique contre le Pape Benoît
XVI, qui aurait réintégré quatre évêques intégristes, dont un
négationniste avéré, ne relève pas de la critique, mais de la calomnie
et de la désinformation.
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Mgr
Hippolyte Simon, vice-président de la Conférence des évêques de France -
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Qui avait intérêt à salir la réputation du Pape Benoît XVI ?
Lettre ouverte de Mgr Hippolyte Simon,
vice-président de la Conférence des évêques de France
Le 29 janvier 2009 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
-
Je ne sais pas si je suis en colère ou si je suis malheureux : la vérité
tient sans doute des deux. Mais trop, c’est trop, alors je dis : ça
suffit ! Le déchaînement médiatique contre le Pape Benoît XVI, qui
aurait réintégré quatre évêques intégristes, dont un négationniste
avéré, ne relève pas de la critique, mais de la calomnie et de la
désinformation. Car, quoi que l’on pense des décisions du Pape, il faut
dire, répéter et souligner que ces quatre évêques
n’ont pas été réintégrés (1). Et donc, Mgr Williamson,
dont les propos tenus à la télévision suédoise sont effectivement
intolérables, n’est toujours pas revenu au sein de l’Église catholique
et il ne relève toujours pas de l’autorité du Pape. Les informations qui
parlent de réintégration reposent sur une
confusion grave entre levée des excommunications et
réintégration à part entière.
J’accorde volontiers mon indulgence à tous les journalistes et à tous
les commentateurs qui ont pu confondre, de bonne foi, la levée de
l’excommunication et la réintégration pure et simple. Les catégories
utilisées par l’Église peuvent prêter à équivoque pour le grand public.
Mais la vérité oblige à dire que, selon le Droit de l’Église, ce n’est
pas du tout la même chose. Si on confond les plans on devient victime de
simplifications qui ne profitent qu’à ceux qui veulent faire de la
provocation. Et on se fait complice, involontairement, de ces derniers.
De façon habituelle, le grand public est en droit d’exiger d’un
journaliste sportif qu’il sache distinguer, par exemple, entre un corner
et un essai. Pourquoi l’Église n’aurait-elle pas le droit d’avoir aussi
son vocabulaire « technique » et pourquoi devrait-on tolérer des
approximations aussi graves simplement sous prétexte qu’il s’agit de
religion ?
Reprenons donc exactement ce qui s’est passé. Suite à l’élection du Pape
Benoît XVI, en Avril 2005, les évêques de la Fraternité Saint-Pie-X,
fondée il y a plus de trente ans par Mgr Lefebvre, ont demandé à
reprendre le dialogue avec Rome, mais ils avaient mis deux préalables:
premièrement, la libéralisation du Missel de 1962, ce qui a été fait par
le motu proprio
Summorum Pontificum, en juillet 2007 et,
deuxièmement, la levée des excommunications.
Que signifie la levée des excommunications ? Pour prendre une
comparaison familière, je dirai ceci : quand Mgr Lefebvre est sorti,
c’est-à-dire quand il a désobéi en ordonnant quatre évêques malgré
l’avis formel du Pape, c’est comme s’il y avait eu, automatiquement, une
barrière qui était tombée et un feu qui s’était mis au rouge pour dire
qu’il était sorti. Cela voulait dire que si, un jour, il voulait
rentrer, il faudrait qu’il fasse d’abord amende honorable. Mgr Lefebvre
est mort. Paix à son âme ! Aujourd’hui, ses successeurs, vingt ans
après, disent au Pape : « Nous sommes prêts à reprendre le dialogue,
mais il faut un geste symbolique de votre part. Levez la barrière et
mettez le feu au clignotant orange ! » Le Pape, pour mettre toutes
les chances du côté du dialogue, a donc levé la barrière et a mis le feu
au clignotant orange. Reste à savoir maintenant si ceux qui demandent à
rentrer vont le faire. Est-ce qu’ils vont rentrer tous ? Quand ? Dans
quelles conditions ? On ne sait pas. Comme le dit le cardinal Giovanni
Battista Re
(préfet de la Congrégation des évêques),
dans son décret officiel : « il s’agit de stabiliser les conditions
du dialogue ». Peut-être que le Pape, dans un délai que nous ne
connaissons pas, leur donnera un statut canonique. Mais pour l’instant,
ce n’est pas fait. Le préalable au dialogue est levé, mais le dialogue
n’a pas encore commencé. Nous ne pouvons donc pas juger les résultats du
dialogue avant qu’il n’ait eu lieu.
Là-dessus, la veille du jour où devait être publié le décret du Cardinal
RE, voici qu’une télévision suédoise publie ou republie les propos
clairement négationnistes de l’un des quatre évêques concernés, Mgr
Williamson. Le Pape, quand il a donné son feu vert à la signature du
décret par le Cardinal pouvait-il connaître les discours de Mgr
Williamson ? Très honnêtement, je crois pouvoir dire que non. Et c’est
en un sens plutôt rassurant : c’est le signe que le Vatican n’a vraiment
pas les moyens de faire surveiller tous les évêques et toutes les
chaînes de télévision du monde ! C’est donc ici qu’il ne faut pas se
tromper d’interprétation : que signifie cette coïncidence entre la
signature d’un décret, prévue pour le 21 Janvier, et donc connue de Mgr
Williamson, et la diffusion des propos télévisés du même personnage ?
Que chacun se demande : à qui profite le crime ? A qui profite le
scandale provoqué par des propos d’une telle obscénité ? La réponse me
semble limpide : à celui ou à ceux qui voulaient torpiller le processus
inauguré par la signature du décret ! Or, pour peu que l’on suive un peu
ces questions et les différentes interventions de Mgr Williamson depuis
quelques années, il est clair que lui ne veut à aucun prix de la
réconciliation avec Rome ! Cet évêque, dont je répète, qu’il n’a encore
aujourd’hui aucun lien de subordination canonique vis-à-vis de Rome, a
tout simplement utilisé la méthode des terroristes : il fait exploser
une bombe (intellectuelle) en espérant que tout le processus de
réconciliation va dérailler. Il fait comme tous les ultras de tous les
temps : il préfère laisser un champ de ruines plutôt que de se
réconcilier avec ceux qu’il considère comme des ennemis.
Alors je le dis avec tristesse à tous ceux qui ont relayé, - avec
gourmandise ou avec douleur-, l’amalgame entre Benoît XVI et Mgr
Williamson : vous avez fait le jeu, inconsciemment, d’un provocateur
cynique ! Et, en prime, si j’ose dire, vous lui avez offert un second
objectif qui ne pouvait que le ravir : salir de la pire des manières la
réputation du Pape. Un pape dont il se méfie plus que de tout autre, car
il voit bien que ce Pape ruine absolument tout l’argumentaire échafaudé
jadis par Mgr Lefebvre. Je ne peux pas développer ici ce point. Je ne
fais que renvoyer à un article que j’avais publié dans les colonnes du
journal Le Monde, l’an dernier, au moment de la publication du Motu
Proprio : « Quand je lis, un peu partout, que le Pape accorde tout aux
intégristes et qu’il n’exige rien en contrepartie, je ne suis pas
d’accord : il leur accorde tout sur la forme
des rites, mais il ruine totalement
leur argumentaire sur le fond. Tout l’argumentaire de Mgr
Lefebvre reposait sur une prétendue différence substantielle entre le
rite dit de Saint Pie V et le rite dit de Paul VI. Or, réaffirme Benoît
XVI, il n’y a pas de sens à parler de deux rites. On pouvait, à la
rigueur, légitimer une résistance au Concile si l’on pensait, en
conscience, qu’il existait une différence substantielle entre deux
rites. Peut-on légitimer cette résistance, et a fortiori un schisme, à
partir d’une différence de formes ? » (2)
Pour un fondamentaliste, et qui plus est, pour un négationniste forcené
comme Mgr Williamson, Benoît XVI est infiniment plus redoutable que tous
ceux qui font l’apologie de la « rupture » introduite par le Concile
Vatican II. Car s’il y a rupture, alors il est conforté dans son
opposition à la « nouveauté ». Mais celui qui démontre paisiblement que
le Missel de Paul VI, la liberté religieuse et l’œcuménisme font partie
intégrante de l’authentique Tradition Catholique, celui-là lui enlève
toute justification.
J’ai bien conscience qu’il faudrait développer mon argumentation. Que
chacun veuille bien me pardonner de renvoyer aux sites internet où tout
ceci est visible. Mais je souhaite surtout que chacun veuille bien se
méfier des provocations trop bien montées. Quant à ceux qui s’obstinent
à répéter que Joseph Ratzinger a servi dans les Jeunesses hitlériennes,
qu’ils veuillent bien relire le témoignage qu’il a donné à Caen, le 6
Juin 2004, pour le soixantième anniversaire du Débarquement en
Normandie, et qu’ils se demandent ensuite ce qu’ils auraient fait à sa
place. ..Quand on hurle un peu trop fort avec les loups d’aujourd’hui,
on ne fait pas bien la preuve que l’on eût été capable de se démarquer
des loups de l’époque…
Reste un point qui est second mais cependant très grave : il faudra tout
de même s’interroger sur la communication des instances romaines
lorsqu’il s’agit de sujets aussi sensibles. Après la polémique de
Ratisbonne (qui mériterait elle aussi d’être démontée attentivement..),
j’espère – mais je me réserve d’en parler plutôt en interne - que les
responsables de la Curie vont procéder à un sérieux débriefing sur les
ratés de leur communication. Pour le dire d’un mot, voici comment j’ai
vécu les choses : Mercredi 21 janvier, les milieux intégristes italiens,
qui croyaient triompher, « organisent une fuite » dans « Il Giornale
». Aussitôt le tam-tam médiatique, se met en route. Mais nous,
membres des conférences épiscopales, nous ne savons absolument rien ! Et
pendant trois jours les nouvelles – erronées, qui parlent à longueur de
journée de réintégration – prolifèrent dans tous les sens comme un feu
de brousse. Tout y passe. Arrive alors la « bombe » de Mgr Williamson…
Et c’est seulement samedi matin, - trois jours trop tard ! -, que nous
recevons le communiqué officiel du Cardinal RE. Comment voulez-vous que
nous puissions remettre le débat sur des bases correctes ? Le Cardinal
Ricard s’y est employé, de très bonne façon, mais le feu était parti, et
plus personne ne pouvait alors entendre une parole raisonnable.
Maintenant que la poussière commence à retomber, essayons de reprendre
calmement nos esprits. Comme disait ma Grand-mère : d’un mal Dieu peut
faire sortir du bien. Le mal c’est que le Pape Benoît XVI a une nouvelle
fois été traîné dans la boue par une majorité de grands médias, excepté,
Dieu Merci, La Croix et quelques autres. Beaucoup de catholiques, et
beaucoup de gens de bonne volonté, sont dans l’incompréhension et la
souffrance. Mais le bien, c’est que les masques sont tombés ! Si le
dialogue continue malgré tout avec les évêques de la Fraternité Saint
Pie X, - sous réserve, bien sûr, qu’ils passent la barrière maintenant
levée- , le discernement pourra se faire, car tout le monde sait un peu
mieux ce qu’ils pensent les uns et les autres.
Pour conclure, j’ai envie de m’adresser aux fidèles catholiques qui
peuvent, non sans raison, avoir le sentiment d’être un peu trahis, pour
ne pas dire méprisés, en cette affaire : méditez la parabole du Fils
prodigue, et prolongez-la. Si le Fils aîné, qui avait d’abord refusé
d’entrer dans la fête, dit qu’il veut rentrer, allez-vous le refuser ???
Ayez suffisamment confiance en vous-mêmes et en l’Esprit qui conduit
l’Église, et qui a aussi guidé le Concile de Vatican II, pour penser que
la seule présence de ce fils aîné ne suffira pas à étouffer la fête.
Donnez à ce dernier venu un peu de temps pour s’habituer à la lumière de
l’Assemblée où vous vous tenez…
+ Hippolyte Simon,
Archevêque de Clermont.
Vice-président de la Conférence des évêques de France
(1) Il suffit de lire le communiqué
officiel du Cardinal Ricard, Archevêque de Bordeaux , qui suit ces
questions pour notre Conférence : « La levée de l’excommunication n’est
pas une fin mais le début d’un processus de dialogue. Elle ne règle pas
deux questions fondamentales : la structure juridique de la Fraternité
Saint Pie X dans l’Église et un accord sur les questions dogmatiques et
ecclésiologiques. Mais elle ouvre un chemin à parcourir ensemble. Ce
chemin sera sans doute long. Il demandera meilleure connaissance
mutuelle et estime. » Cf. Site Internet du diocèse de Clermont.
(2) Pourquoi j’obéis au Pape, Le Monde, 13 Juillet 2007.
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Sources : A paraître sur la Croix
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(E.S.M.)
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