Benoît XVI passe en revue les grands
sujets de 2006 (1) |
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CITE DU VATICAN, le 23 décembre 2006 -
(E.S.M.) - Vendredi la pape a présenté ses voeux aux cardinaux et
aux membres de la Curie Romaine. Ce traditionnel échange a été
l'occasion pour Benoît XVI de tracer un bilan personnel de l'année
écoulée.
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Le pape Benoît XVI adresse
ses voeux à la Curie Romaine
Lors d'un discours brillant, Benoît XVI passe en revue les grands sujets de
2006
Synthèse et texte officiel de la première partie du discours du Saint Père
Pendant la rencontre traditionnelle avec les membres de la Curie Romaine à
l'occasion de la Noël, le Pape Benoît XVI a passé en revue les grands sujets
et les moments de son Pontificat, depuis ses voyages pastoraux jusqu'à la
défense de la vie et de la famille.
Dans son discours étendu et brillant, prononcé dans la Salle Clémentine, le
Saint Père a souligné que "l'année qui se termine"
reste marquée dans notre mémoire par la profonde
empreinte des horreurs de la guerre qui s'est déroulée près de la
Terre Sainte, ainsi que, en général, du danger
d'un affrontement entre cultures et religions, un danger qui
pèse encore de manière menaçante sur notre période historique. Le problème
des chemins vers la paix est ainsi devenu un défi de première importance
pour tous ceux qui ont le souci de l'homme".
Voyages apostoliques
En rappelant ensuite ses voyages apostoliques, le Souverain Pontife s'est
d'abord référé à sa visite pastorale en Pologne en mai dernier: "c'était un
profond devoir de gratitude pour tout ce que, au cours du quart de siècle de
son service, le bien aimé pape Jean Paul II m'a donné, à moi personnellement mais surtout à l'Eglise et au
monde.
Son don le plus grand pour nous a été sa foi inébranlable et le caractère
radical de son dévouement ". "Il n'a rien conservé, il s'est
laissé consumer jusqu'au bout par la flamme de la foi", a dit le pape
Benoît XVI.
Le Saint Père a ensuite indiqué que " le mariage et la famille ont été les sujets du
voyage à Valence (Espagne) en juillet". En ce sens, il a rappelé les
témoignages qu'il a écoutés de familles qui ont traversé des périodes de
crise, mais qui ont réussi à les dépasser par un grand effort, jusqu'à trouver
à nouveau le bonheur. "Devant ces familles et leurs enfants, devant ces
familles dans lesquelles les générations se serrent la main et où l'avenir
est présent, le problème de l'Europe, qui en apparence ne désire plus avoir
d'enfants, est entré profondément en mon âme".
"Pourquoi les choses sont-elles ainsi ?", s'est demandé le Saint Père Benoît
XVI. "Les
réponses sont sûrement très complexes. Avant de chercher ces réponses notre
devoir est d'adresser un remerciement aux nombreux époux qui aujourd'hui
aussi, en Europe, disent oui à l'enfant et acceptent les difficultés que
cela comporte". A ce problème s'ajoute le calcul difficile : de quelles
normes sommes-nous débiteurs à l’égard de l’enfant pour qu'il suive le juste
chemin et comment devons-nous, en faisant cela, respecter
sa liberté ? Le problème est devenu particulièrement difficile également
parce que nous ne sommes plus sûrs des normes à transmettre ; parce que nous
ne savons plus quel est le juste usage de la liberté, quelle est la juste
façon de vivre, ce qui constitue moralement un devoir et ce qui est en
revanche inadmissible."
Benoît XVI a ensuite souligné que "l'homme d'aujourd’hui est incertain à
propos de l'avenir" et ceci uni " à la volonté de posséder toute la vie pour
soi est peut-être la raison la plus profonde pour laquelle le risque
d'avoir des enfants apparaît à de nombreuses personnes comme un risque qui
n'est pratiquement plus envisageable" ; et le pape a signalé que "si nous n'apprenons pas les fondements de
la vie, si nous ne découvrons pas de manière nouvelle la certitude de la foi,
nous aurons également toujours plus de mal à confier aux autres le don de la vie
et la tâche d'un futur inconnu".
D'autre part, a ajouté le Pape, "le problème des décisions
définitives est, enfin, lié à cela : l'homme peut-il se lier pour toujours ?
Peut-il dire un oui pour toute la vie ? Oui, il le peut. Il a été créé pour
cela. C'est précisément ainsi que se réalise la liberté de l'homme et ainsi
que se crée aussi le domaine sacré du mariage qui s'élargit en devenant une
famille et qui construit l'avenir."
Le pape dresse un bilan de l’année 2006
Discours que le pape a prononcé en présence des cardinaux et des membres de
la Famille pontificale et de la Curie romaine qu’il a reçus dans la salle
Clémentine du Palais apostolique pour leur présenter ses vœux de Noël.
1ère partie
Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers frères et sœurs!
C'est avec une grande joie que je vous rencontre aujourd'hui et que
j'adresse à chacun de vous mon salut cordial. Je vous remercie de votre
présence à ce rendez-vous traditionnel, qui a lieu à l'approche du Saint
Noël. Je remercie en particulier le cardinal Angelo Sodano des paroles avec
lesquelles il s'est fait l'interprète des sentiments de toutes les personnes
présentes, en s'inspirant du thème central de l'Encyclique Deus caritas est.
En cette circonstance significative, je désire lui renouveler l'expression
de ma gratitude pour le service que, pendant tant d'années, il a rendu au
pape et au Saint-Siège, en particulier en qualité de secrétaire d'Etat, et
je demande au Seigneur de le récompenser pour le bien qu'il a accompli avec
sa sagesse et son zèle pour la mission de l'Eglise. Dans le même temps, je
suis heureux de renouveler mes vœux particuliers au cardinal Tarcisio
Bertone pour la nouvelle tâche que je lui ai confiée. J’étends volontiers
ces sentiments à ceux qui, au cours de cette année, sont entrés au service
de la Curie romaine ou du Gouvernorat, alors que nous rappelons avec
affection et gratitude ceux que le Seigneur a rappelé à lui de cette vie.
L'année qui touche à son terme – comme vous l’avez dit, Eminence –
reste marquée dans notre mémoire par la profonde
empreinte des horreurs de la guerre qui s'est déroulée près de la
Terre Sainte, ainsi que, en général, du danger
d'un affrontement entre cultures et religions — un danger qui
pèse encore de manière menaçante sur notre période historique. Le problème
des chemins vers la paix est ainsi devenu un défi de première importance
pour tous ceux qui ont le souci de l'homme. Cela vaut en particulier pour
l'Eglise dont les débuts ont été accompagnés par une promesse signifiant à
la fois une responsabilité et un devoir : « Gloire
à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix aux hommes objets de sa
complaisance » (Lc 2, 14).
Ce salut de l'ange aux pasteurs au cours de la nuit de la naissance de Jésus
à Bethléem révèle un lien indissoluble entre la relation des hommes avec
Dieu et leur relation réciproque. On ne peut
trouver la paix sur la terre sans la réconciliation avec Dieu, sans
l'harmonie entre le ciel et la terre. Cette corrélation entre le
thème de « Dieu » et le thème de la « paix » a été l'aspect déterminant des
quatre voyages apostoliques de cette année: c'est à ces derniers que je
voudrais revenir en mémoire maintenant. Il y a tout d'abord eu la
visite pastorale en Pologne, le pays
natal de notre bien-aimé pape Jean-Paul II. Le voyage dans sa patrie a
représenté pour moi un profond devoir de gratitude pour tout ce que, au
cours du quart de siècle de son service, il m'a donné, à moi personnellement
mais surtout à l'Eglise et au monde. Son don le plus grand pour nous tous a
été sa foi inébranlable et le caractère radical de son dévouement. « Totus
tuus » était sa devise : dans celle-ci se reflétait tout son être. Oui, il
s'est donné sans réserve à Dieu, au Christ, à la Mère du Christ, à l'Eglise
: au service du Rédempteur et à la rédemption de l'homme. Il n’a rien
conservé, il s'est laissé consumer jusqu'au bout par la flamme de la foi. Il
nous a ainsi montré comment, en tant qu'hommes de notre temps, on peut
croire en Dieu, dans le Dieu vivant qui s'est fait proche de nous dans le
Christ. Il nous a montré qu'un dévouement définitif et radical de toute sa
vie est possible et que, précisément lorsqu’on se donne, la vie devient
grande, vaste et féconde. En Pologne, partout où je me suis rendu, j'ai
trouvé la joie de la foi. « La joie de Yahvé est votre forteresse » — on a
pu faire dans ce pays l'expérience, comme une réalité, de cette parole que,
face à la misère du nouveau début, le scribe Esdras adresse au peuple
d'Israël à peine revenu de l'exil (Ne 8, 10). J’ai été profondément frappé
par la grande cordialité avec laquelle j'ai été partout accueilli. Les gens
ont vu en moi le Successeur de Pierre à qui est confié le ministère pastoral
de toute l'Eglise. Ils voyaient celui à qui, malgré toute la faiblesse
humaine, s'adresse, aujourd'hui comme alors, la parole du Seigneur
ressuscité : « Pais mes brebis » (cf. Jn 21, 15-19) ; ils voyaient le
Successeur de celui à qui Jésus dit, aux environs de Césarée : « Tu est
Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise » (Mt 16, 18). Pierre, en
soi, n'était pas un roc, mais un homme faible et inconstant. C'est pourtant
précisément de lui que le Seigneur voulut faire la pierre et démontrer que,
à travers un homme faible, Il soutient lui-même solidement son Eglise et la
conserve dans l'unité. Ainsi, la visite en Pologne a
été pour moi, au sens le plus profond, une fête de la catholicité. Le
Christ est notre paix qui réunit ceux qui sont séparés : au-delà de toutes
les différences des époques historiques et des cultures, Il est la
réconciliation. A travers le ministère pétrinien, nous faisons l'expérience
de cette force unifiante de la foi qui, à partir des nombreux peuples édifie
toujours à nouveau l'unique peuple de Dieu. C'est avec joie que nous avons
réellement fait l'expérience que, provenant de nombreux peuples, nous
formons l'unique peuple de Dieu, sa sainte Eglise. C'est pourquoi le
ministère pétrinien peut être le signe visible qui garantit cette unité et
qui forme une unité concrète. Je voudrais remercier encore une fois de
manière explicite et de tout cœur l'Eglise qui est en Pologne de cette
expérience touchante de la catholicité.
La visite à Auschwitz-Birkenau, sur le lieu de la barbarie la plus cruelle —
de la tentative d'effacer le peuple d'Israël, de rendre ainsi vaine
l'élection faite par Dieu, de bannir Dieu lui-même de l'histoire, ne pouvait
pas manquer dans mes déplacements en Pologne. Ce fut pour moi un motif de
grand réconfort de voir à ce moment-là un arc-en-ciel apparaître dans le
ciel, alors que devant l'horreur de ce lieu, dans l'attitude de Job,
j'invoquais Dieu, ébranlé par la frayeur de son absence apparente et, dans
le même temps, soutenu par la certitude que, malgré son silence, il ne cesse
d'être et de demeurer avec nous. L'arc-en-ciel a été comme une réponse :
oui, je suis là, et les paroles de la promesse, de l'Alliance, que j'ai
prononcées après le déluge, sont valables aujourd'hui également
(cf. Gn 9, 12-17).
Le voyage en Espagne — à Valence — s'est entièrement déroulé à
l'enseigne du thème du mariage et de la famille. Il a été beau d'écouter,
devant l'assemblée de personnes de tous les continents, le témoignage
d'époux qui — bénis par de nombreux enfants — se sont présentés devant nous
et ont parlé de leurs chemins respectifs dans le sacrement du mariage et au
sein de leurs familles nombreuses. Ils n'ont pas caché le fait d'avoir
également vécu des jours difficiles, d'avoir dû traverser des périodes de
crise. Mais c'est précisément dans la difficulté de devoir se supporter
réciproquement jour après jour, précisément en s'acceptant toujours à
nouveau dans le creuset des difficultés quotidiennes, en vivant et en
souffrant jusqu'au bout le oui initial — justement sur ce chemin où l'on «
se perd soi-même » de manière évangélique, qu'ils avaient mûri, qu'ils
s'étaient eux-mêmes trouvés et qu'ils étaient devenus heureux. Le oui qu'ils
s'étaient donnés réciproquement, dans la patience du chemin et dans la force
du sacrement avec lequel le Christ les avait liés ensemble, était devenu un
grand oui face à eux-mêmes, aux enfants, au Dieu Créateur et au Rédempteur
Jésus Christ. Ainsi, du témoignage de ces familles, nous arrivait une vague
de joie, non pas une allégresse superficielle et pauvre qui se dissipe
rapidement, mais une joie mûrie également dans la souffrance, une joie qui
va au plus profond et qui rachète vraiment l'homme. Devant ces familles et
leurs enfants, devant ces familles dans lesquelles les générations se
serrent la main et où l'avenir est présent, le problème de l'Europe, qui en
apparence ne désire plus avoir d'enfants, est entré profondément en mon âme.
Pour un étranger, cette Europe semble lasse, elle semble même vouloir
prendre congé de l'histoire. Pourquoi les choses sont-elles ainsi ? Telle
est la grande question. Les réponses sont sûrement très complexes. Avant de
chercher ces réponses notre devoir est d'adresser un remerciement aux
nombreux époux qui aujourd'hui aussi, en Europe, disent oui à l'enfant et
acceptent les difficultés que cela comporte : les problèmes sociaux et
financiers, ainsi que les préoccupations et les fatigues jour après jour ;
le dévouement nécessaire pour ouvrir aux enfants le chemin vers l'avenir. En
mentionnant ces difficultés, apparaissent peut-être également de manière
claire les raisons pour lesquelles le risque d'avoir des enfants apparaît
trop grand pour un grand nombre de personnes. L'enfant a besoin d'une
attention pleine d’amour. Cela signifie : nous devons lui donner un peu de
notre temps, du temps de notre vie. Mais cette « matière première »
essentielle de la vie — le temps — semble précisément manquer toujours
davantage. Le temps que nous avons à disposition suffit à peine pour notre
propre vie ; comment pourrions-nous le céder, le donner à quelqu'un d'autre
? Avoir du temps et donner du temps — cela représente pour nous une manière
très concrète d’apprendre à se donner soi-même, à se perdre pour se trouver.
A ce problème s'ajoute le calcul difficile : de quelles normes sommes-nous
débiteurs à l’égard de l’enfant pour qu'il suive le juste chemin et, en
faisant cela, comment devons-nous, en faisant cela, respecter sa liberté ?
Le problème est devenu particulièrement difficile également parce que nous
ne sommes plus sûrs des normes à transmettre ; parce que nous ne savons plus
quel est le juste usage de la liberté, quelle est la juste façon de vivre,
ce qui constitue moralement un devoir et ce qui est en revanche
inadmissible. L'esprit moderne a perdu l'orientation, et ce manque
d'orientation nous empêche d'être pour les autres des indicateurs du juste
chemin. La problématique va même encore plus loin. L'homme d'aujourd’hui est
incertain à propos de l'avenir. Est-il admissible d'envoyer quelqu'un dans
cet avenir incertain ? En définitive, est-ce une bonne chose d'être un homme
? Cette profonde insécurité sur l'homme lui-même — à côté de la volonté de
posséder toute la vie pour soi — est peut être la raison la plus profonde
pour laquelle le risque d'avoir un enfant apparaît à de nombreuses personnes
comme un risque qui n'est pratiquement plus envisageable. De fait, nous ne
pouvons transmettre la vie de manière responsable que si nous sommes en
mesure de transmettre quelque chose de plus que la simple vie biologique,
c'est-à-dire un sens qui tienne également dans les crises de l'histoire à
venir et une certitude dans l'espérance qui soit plus forte que les nuages
qui assombrissent l'avenir. Si nous ne réapprenons
pas les fondements de la vie — si nous ne découvrons pas de manière nouvelle
la certitude de la foi – nous aurons également toujours plus de
mal à confier aux autres le don de la vie et la tâche d'un avenir inconnu.
Le problème des décisions définitives est, enfin, lié à cela : l'homme
peut-il se lier pour toujours ? Peut-il dire un oui pour toute la vie ? Oui,
il le peut. Il a été créé pour cela. C'est précisément ainsi que se réalise
la liberté de l'homme et ainsi que se crée aussi le domaine sacré du mariage
qui s'élargit en devenant une famille et qui construit l'avenir.
Fin de la première partie
Texte officiel 2ème partie►
Benoît XVI
Texte officiel 3ème partie►
Benoît XVI
Sources:
© Copyright du texte original en italien :
Libreria Editrice Vaticana
(ZF06122205)
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un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 23.12.2006 - BENOÎT XVI |