Benoît XVI: "le monde a un besoin
urgent du dialogue entre foi et raison" |
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CITE DU VATICAN, le 26 décembre 2006 -
(E.S.M.) - Après avoir déjà présenté le texte officiel de la 1ère et
2è partie, voici le dernier volet du discours que le pape Benoît XVI a
adressé aux cardinaux, dialogue entre foi et raison, son voyage en
Turquie et un appel à la paix.
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Le pape Benoît XVI
Le pape
Benoît XVI: "le monde a un besoin urgent du dialogue entre foi et raison"
Synthèse et texte officiel
de la troisième partie du discours du Saint Père
Benoît XVI (1ère partie ►
Benoît XVI - 2ème partie►
Benoît XVI )
Dialogue entre foi et raison
Benoît XVI a ensuite abordé la question du dialogue rappelant ses entretiens
avec le philosophe Jürgen Habermas, qui avait dit que "nous aurions besoin
de penseurs capables de traduire les convictions codées de la foi chrétienne
dans le langage du monde sécularisé pour les rendre ainsi à nouveau
efficaces".
"En effet, - a observé Benoît XVI - il devient toujours plus évident
que le monde a un besoin urgent du dialogue entre foi et raison. ",
c'est surtout plus évident quand "la
capacité cognitive de l'homme, sa domination sur la matière à travers la
force de la pensée, a accompli entre-temps des progrès alors inimaginables" et "le
pouvoir de l'homme, qui s'est accru entre ses mains grâce à la science,
devient toujours plus un danger qui menace l'homme lui-même et le monde".
"La foi dans ce Dieu qui est la Raison créatrice de l'univers en
personne, doit être accueillie par la science de façon nouvelle comme un
défi et une chances. Et cette foi doit reconnaître à nouveau son ampleur
intrinsèque et son bien-fondé. La raison a besoin du Logos qui est à
l'origine de tout et qui est notre lumière; la foi, pour sa part, a besoin
du dialogue avec la raison moderne, pour se rendre compte de sa grandeur et
être à la hauteur de ses responsabilités".
En abordant la question du dialogue entre les religions, le Pape a dit
ensuite que "la raison sécularisée n'est pas en mesure d'entrer dans un
véritable dialogue avec les religions", et a signalé que "si elle
demeure fermée face à la question sur Dieu, cela finira par conduire à
l’affrontement entre les cultures".
À ce sujet, Benoît XVI a réaffirmé que " les religions doivent se
rencontrer dans le cadre de leur devoir commun de se placer au service de la
vérité et donc de l'homme".
Voyage en Turquie
Un autre important sujet du discours à la Curie a été le voyage apostolique
en Turquie, qui "m'a offert l'occasion de manifester aussi publiquement
mon respect de la religion musulmane". Le Pape a observé que dans le
dialogue avec l'Islam il est nécessaire de tenir compte que "le monde
musulman se trouve aujourd'hui avec une grande urgence face à une tâche très
semblable à celle qui fut imposée aux chrétiens à partir du siècle des
Lumières et à laquelle le Concile Vatican II a apporté des solutions
concrètes pour l’Eglise catholique au terme d’une longue et difficile
recherche".
"D'une part, nous devons nous opposer à la dictature de la raison
positiviste, qui exclut Dieu de la vie de la communauté et de l'organisation
publique" ; mais il a signalé que d'autre part, "il est nécessaire
d'accueillir les véritables conquêtes de la philosophie des Lumières, les
droits de l'homme et en particulier la liberté de la foi et de son exercice".
"Le monde islamique - a ajouté Benoît XVI -, avec sa tradition propre,
se trouve face à la grande tâche de trouver les solutions adaptées à cet
égard. Le contenu du dialogue entre chrétiens et musulmans consistera en ce
moment en particulier à se rencontrer dans cet engagement en vue de trouver
les solutions appropriées."
Ensuite, le Saint Père a parlé de sa rencontre avec le Patriarche oecuménique
Bartolomé I à Istanbul. "Nous avons fait l'expérience d'une unité
profonde dans la foi et nous prierons le Seigneur avec encore plus
d'insistance afin qu'il nous donne bientôt la pleine unité dans le partage
commun du Pain", et
a ajouté : "Espérons et prions pour que la liberté religieuse, qui
correspond à la nature profonde de la foi et est reconnue dans les principes
de la Constitution turque, trouve dans des formes juridiques adéquates comme
dans la vie quotidienne du Patriarcat et des autres communautés chrétiennes
une réalisation concrète toujours croissante".
Appel à la paix
Benoît XVI a consacré les derniers paragraphes de son discours étendu au
thème de la paix. "Nous devons apprendre que la paix ne peut être
atteinte uniquement de l'extérieur à travers des structures et que la
tentative de l'établir par la violence ne conduit qu'à une violence
supplémentaire" ; a dit le Souverain Pontife.
"Nous devons apprendre que la paix ne peut exister que si la haine et
l'égoïsme sont surmontés de l'intérieur. L'homme doit être renouvelé de
l'intérieur, il doit devenir un homme nouveau, différent. Ainsi, la paix
dans ce monde demeure toujours faible et fragile. Nous en souffrons. ".
"Aide-nous afin que la raison de la paix l'emporte sur la folie de la
violence!", il a
conclu.
Texte officiel 3ème partie
Troisième et dernière partie du discours que le pape Benoît XVI a prononcé
en présence des cardinaux et des membres de la Famille pontificale et de la
Curie romaine qu’il a reçus dans la salle Clémentine du Palais apostolique
pour leur présenter ses vœux de Noël, vendredi 22 décembre.
L'autre grand thème lié à celui de Dieu est le thème du dialogue. Le cercle
intérieur du dialogue complexe qui est aujourd'hui nécessaire, l'engagement
de tous les chrétiens pour l'unité, est apparu de façon évidente au cours
des
Vêpres oecuméniques dans la Cathédrale de Ratisbonne, où, outre les
frères et sœurs de l'Eglise catholique, j'ai pu rencontrer de nombreux amis
orthodoxes, et chrétiens évangéliques. Dans la récitation des Psaumes et
dans l'écoute de la Parole de Dieu, nous étions tous réunis, et il est
significatif que cette unité nous ait été donnée. La rencontre avec
l'Université était consacrée - comme il se doit - au dialogue entre foi et
raison. A l'occasion de ma rencontre avec le philosophe Jürgen Habermas, il
y a quelques années, à Munich, ce dernier avait dit que nous aurions besoin
de penseurs capables de traduire les convictions codées de la foi chrétienne
dans le langage du monde sécularisé pour les rendre ainsi à nouveau
efficaces. En effet, il devient toujours plus évident que le monde a un
besoin urgent du dialogue entre foi et raison. Emmanuel Kant, en son temps,
avait vu exprimée l'essence de la philosophie des Lumières dans le dicton «sapere
aude» : dans le courage de la pensée qui ne laisse aucun préjugé la mettre
dans l’embarras. Eh bien, la capacité cognitive de l'homme, sa domination
sur la matière à travers la force de la pensée, a accompli entre-temps des
progrès alors inimaginables. Mais le pouvoir de l'homme, qui s'est accru
entre ses mains grâce à la science, devient toujours plus un danger qui
menace l'homme lui-même et le monde; La raison visant entièrement à
s'emparer du monde n'accepte plus de limites. Elle est sur le point de
traiter désormais l'homme lui-même comme le simple sujet de sa production et
de son pouvoir. Notre connaissance s'accroît, mais dans le même temps, on
assiste à un aveuglement progressif de la raison en ce qui concerne ses
propres fondements; en ce qui concerne les critères qui lui confèrent son
orientation et son sens. La foi dans ce Dieu qui est la Raison créatrice de
l'univers en personne, doit être accueillie par la science de façon nouvelle
comme un défi et une chance. Réciproquement, cette foi doit reconnaître à
nouveau son ampleur intrinsèque et son bien-fondé. La raison a besoin du
Logos qui est à l'origine de tout et qui est notre lumière; la foi, pour sa
part, a besoin du dialogue avec la raison moderne, pour se rendre compte de
sa grandeur et être à la hauteur de ses responsabilités. C'est ce que j'ai
tenté de souligner dans mon discours à Ratisbonne Il s'agit d'une question
qui n'est absolument pas de nature uniquement académique ; notre avenir à
tous est contenu dans cette question.
A Ratisbonne, le dialogue entre les religions ne fut évoqué que de façon
marginale et sous un double point de vue. La raison sécularisée n'est pas en
mesure d'entrer dans un véritable dialogue avec les religions. Si elle
demeure fermée face à la question sur Dieu, cela finira par conduire à
l’affrontement entre les cultures. L'autre point de vue concernait
l'affirmation selon laquelle les religions doivent se rencontrer dans le
cadre de leur devoir commun de se placer au service de la vérité et donc de
l'homme.
La visite en Turquie m'a offert l'occasion d'exprimer également publiquement
mon respect pour la religion musulmane, un respect, d'ailleurs, que le
Concile Vatican II (cf. Déclaration
Nostra Aetate, n.
3), nous a indiqué comme un devoir. Je voudrais à présent exprimer une fois
de plus ma gratitude envers les Autorités de la Turquie et envers le peuple
turc, qui m'a accueilli avec une si grande hospitalité et qui m'a offert des
journées de rencontre inoubliables. Dans un dialogue à intensifier avec
l'Islam, nous devrons garder à l'esprit le fait que le monde musulman se
trouve aujourd'hui avec une grande urgence face à une tâche très semblable à
celle qui fut imposée aux chrétiens à partir du siècle des Lumières et à
laquelle le Concile Vatican II a apporté des solutions concrètes pour l’Eglise
catholique au terme d’une longue et difficile recherche. Il s'agit de
l'attitude que la communauté des fidèles doit adopter face aux convictions
et aux exigences qui s'affirment dans la Philosophie des Lumières. D'une
part, nous devons nous opposer à la dictature de la raison positiviste, qui
exclut Dieu de la vie de la communauté et de l'organisation publique,
privant ainsi l'homme de ses critères spécifiques de mesure. D'autre part,
il est nécessaire d'accueillir les véritables conquêtes de la philosophie
des Lumières, les droits de l'homme et en particulier la liberté de la foi
et de son exercice, en y reconnaissant les éléments essentiels également
pour l'authenticité de la religion. De même que dans la communauté
chrétienne, il y a eu une longue recherche sur la juste place de la foi face
à ces convictions — une recherche qui ne sera certainement jamais conclue de
façon définitive — ainsi, le monde musulman également, avec sa tradition
propre, se trouve face à la grande tâche de trouver les solutions adaptées à
cet égard. Le contenu du dialogue entre chrétiens et musulmans consistera en
ce moment en particulier à se rencontrer dans cet engagement en vue de
trouver les solutions appropriées. Nous chrétiens, nous sentons solidaires
de tous ceux qui, précisément sur la base de leur conviction religieuse de
musulmans, s'engagent contre la violence et pour l'harmonie entre foi et
religion, entre religion et liberté. En ce sens, les deux dialogues dont
j'ai parlé s’interpénètrent.
Enfin, à
Istanbul, j'ai pu vivre une fois de plus des heures heureuses de
proximité œcuménique lors de la rencontre avec le Patriarche œcuménique
Bartholomaios Ier. Il y a quelques jours, il m'a écrit une lettre dont les
paroles de gratitude provenant du plus profond du cœur m'ont fait revivre
l'expérience de communion de ces journées. Nous avons fait l'expérience
d'être frères non seulement sur la base de paroles et d'événements
historiques, mais du plus profond de l'âme; d'être unis par la foi commune
des Apôtres jusque dans notre pensée et nos sentiments personnels. Nous
avons fait l'expérience d'une unité profonde dans la foi et nous prierons le
Seigneur avec encore plus d'insistance afin qu'il nous donne bientôt la
pleine unité dans le partage commun du Pain. Ma gratitude profonde et ma
prière fraternelle vont en cette heure au Patriarche Bartholomaios et à ses
fidèles, ainsi qu'aux diverses communautés chrétiennes que j'ai pu
rencontrer à Istanbul. Espérons et prions pour que la liberté religieuse,
qui correspond à la nature profonde de la foi et est reconnue dans les
principes de la Constitution turque, trouve dans des formes juridiques
adéquates comme dans la vie quotidienne du Patriarcat et des autres
communautés chrétiennes une réalisation concrète toujours croissante.
«Et erit iste pax» — telle sera la paix, dit le prophète Michée (5, 4) en ce
qui concerne le futur dominateur d'Israël, dont il annonce la naissance à
Bethléem. Aux pasteurs qui gardaient leurs brebis dans les champs autour de
Bethléem, les anges dirent: celui que l’on attendait est arrivé. «Sur la
terre paix aux hommes» (Lc 2, 14). Lui-même a dit à ses disciples: «Je vous
laisse la paix; c'est ma paix que je vous donne» (Jn 14, 27). C'est de ces
paroles que s'est développé le salut liturgique: «La paix soit avec vous».
Cette paix qui est communiquée dans la liturgie est le Christ lui-même. Il
se donne à nous comme la paix, comme la réconciliation au-delà de toute
frontière. Là où Il est écouté se multiplient les îlots de paix. Nous,
hommes, aurions voulu que le Christ bannisse une fois pour toutes les
guerres, qu'il détruise les armes et établisse la paix universelle. Mais
nous devons apprendre que la paix ne peut être atteinte uniquement de
l'extérieur à travers des structures et que la tentative de l'établir par la
violence ne conduit qu'à une violence supplémentaire. Nous devons apprendre
que la paix - comme le disait l'ange de Bethléem - est liée à l'eudokia, à
l'ouverture de nos cœurs à Dieu. Nous devons apprendre que la paix ne peut
exister que si la haine et l'égoïsme sont surmontés de l'intérieur. L'homme
doit être renouvelé de l'intérieur, il doit devenir un homme nouveau,
différent. Ainsi, la paix dans ce monde demeure toujours faible et fragile.
Nous en souffrons. C'est précisément pour cela que nous sommes d'autant plus
appelés à nous laisser pénétrer intérieurement par la paix de Dieu, et à
apporter sa force dans le monde. Dans notre vie doit se réaliser ce qui a eu
lieu en nous dans le Baptême de façon sacramentelle: la mort de l'homme
ancien et ainsi la renaissance de l'homme nouveau. Et nous prierons toujours
à nouveau le Seigneur avec insistance: Secoue nos cœurs! Fais de nous des
hommes nouveaux! Aide-nous afin que la raison de la paix l'emporte sur la
folie de la violence! Fais de nous les messagers de ta paix!
Que la Vierge Marie, à laquelle je vous confie, ainsi que votre travail,
nous obtienne cette grâce. A chacun de vous ici présent et aux personnes qui
vous sont chères, je renouvelle mes vœux les plus fervents, tandis que je
vous donne avec affection ma Bénédiction apostolique, en l'étendant aux
collaborateurs des divers dicastères et Bureaux de la Curie Romaine et du
Governorat de l'Etat de la Cité du Vatican. Bon Noël et tous mes vœux
également pour la Nouvelle Année.
Fin du discours du pape Benoît XVI
Sources: © Copyright du texte
original en italien : Libreria Editrice Vaticana - ZF06122508
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 26.12.2006 - BENOÎT XVI |