La contribution de l’Église
Catholique dans la question interreligieuse |
|
Cité du Vatican, le 06 août 2008 -
(E.S.M.) -
La question interreligieuse est sans aucun doute une des questions
capitales des sociétés contemporaines. Les frontières traditionnelles
qui délimitaient les espaces entre lesquels se sont développées les
différentes cultures ne sont plus les mêmes. C’est d’abord dans les
faits que les hommes de cultures, de traditions et des religions
différentes, doivent cohabiter.
|
Jean-Paul II à Jérusalem -
Pour
agrandir l'image ►
Cliquer
La contribution de l’Église Catholique dans la "question interreligieuse"
Introduction
La question interreligieuse est sans aucun doute une
des questions capitales des sociétés contemporaines. Les frontières
traditionnelles qui délimitaient les espaces entre lesquels se sont
développées les différentes cultures ne sont plus les mêmes. C’est d’abord
dans les faits que les hommes de cultures, de traditions et des religions
différentes, doivent cohabiter. C’est un phénomène qui se développe toujours
plus, que ce soit pour la recherche de conditions de vie plus convenables,
ou que ce soit pour l’échange d’informations que les peuples recherchent
pour leur développement.
Dans un scénario de ce genre, en évolution continue, s’ouvrent des questions
économiques, sociales, politiques, mais surtout, des questions religieuses
d’un intérêt particulier. Pour ces dernières, une mentalité est très en
vogue actuellement, selon laquelle la dimension religieuse doit être
reléguée dans le domaine privé sans avoir aucune incidence avec la dimension
publique. En effet, parler de questions religieuses veut dire se référer
surtout à la manière avec laquelle l’homme établit un rapport avec une
Entité supérieure pour en faire descendre, en conséquence, une manière
particulière de faire face à la réalité ; comment concevoir sa propre vie,
le rapport avec les autres, le respect du monde créé, l’utilisation des
ressources de la nature, le travail, etc. Dans cette perspective, toute
tentative de réduire l’expérience religieuse au seul aspect de la piété
privée, qui est pourtant fondamentale, risque ainsi de ne pas tenir compte
du donné structurel qui caractérise l’être humain.
Celui qui voudrait neutraliser l’aspect social de la religion, finirait un
jour ou l’autre par en empêcher son aspect privé, en se substituant de fait
à la divinité : les exemples terribles ne manquent pas, qui nous viennent du
passé. En effet, depuis toujours, les différentes cultures, à partir des
cultures primitives, ont considéré la religiosité naturelle de l’homme comme
le moyen pour marquer des moments de la vie profane : il suffit de
considérer que les rites d’initiation de nombreuses cultures antiques
deviennent un véritable et propre viatique pour entrer à plein titre à faire
partie de la société ; ou encore les différents rites d’expiation qui
impliquaient aussi bien l’autorité sacrée que profane. Toutefois, c’est
surtout dans la culture occidentale que s’est vérifiée une fracture entre
ces deux milieux, atteignant son sommet dans l’illuminisme, phénomène
précurseur de la révolution française. Dans la revendication légitime de la
valeur de la raison, à partir des grands progrès de la science et de la
technique, l’homme a prétendu éliminer Dieu, en restant l’unique et dernier
tribunal de lui-même. Dans le monde, soi-disant développé, le discours
religieux en général et le discours interreligieux en particulier, est vicié
en grande partie par cette perspective.
Toutefois, l’Église Catholique, avec le sain réalisme qui a marqué son
chemin tout au long de son histoire, ne s’est pas soustraite face à ce
problème qui vient de cet état de choses. Ainsi, dans la tentative pour
donner des éléments pour des synthèses nouvelles qui aident le dialogue et
la cohabitation pacifique entre les hommes, croyants ou non-croyants,
chrétiens ou non-chrétiens : l’Église est en première ligne dans la
promotion de la confrontation. Bien plus, si l’on parle encore de dialogue,
de confrontation, de collaboration entre les hommes des différentes
religions, on le doit exclusivement à l’initiative de l’Église Catholique.
Des exemples en sont plusieurs Documents conciliaires :
Nostra
Aetate,
Gaudium et
Spes,
Dignitatis Humanae ; mais aussi toute une série de
rencontre des derniers Pontifes Romains avec les responsables de plusieurs
des plus grandes religions non-chrétiennes.
Cependant, l’effort déployé par l’Église dans le domaine du dialogue, a fait
naître, notamment dans les quarante dernières années, toute une série
d’équivoques au sein du Peuple de Dieu, sur l’opportunité d’évangéliser,
comme si l’on était entré dans une ère dans laquelle le mandat du Christ
d’aller et de baptiser les Nations au nom de la très Sainte Trinité, n’était
plus valable, voire même dangereux dans le mesure où il nuirait à la
cohabitation pacifique entre des fidèles appartenant à des religions
différentes. L’antinomie apparente entre identité et dialogue a vu
l’aiguille de la balance pencher de ce côté. Certaines organisations, malgré
l’œuvre méritoire d’aide aux plus nécessiteux, et dans la tentative de
médiation dans des situations de conflits en différentes parties du monde,
ont fait naître de nombreuses équivoques concernant le caractère spécifique
de la foi chrétienne par rapport aux autres religions.
La promotion de certaines initiatives, malgré les aspects positifs liés à
leur image, ont fait naître beaucoup trop souvent une sorte de confusion
entre les différentes religions. L’agencement de ces événements a créé une
équivoque étrange au sein du Peuple de Dieu, et pas seulement. Chez
plusieurs intellectuels catholiques, et chez bon nombre d’hommes d’Église,
s’est insinué peu à peu le doute à propos du caractère exclusif du salut
apporté par Jésus-Christ. Le passage de cette présentation erronée à la
considération que ceux qui s’acharnaient encore à déclarer que l’annonce du
salut et la conversion était dépassée, a été bref. Au fond, si un des
Dicastères clefs de l’Église Catholique, comme la Congrégation pour la
Doctrine de la Foi, a dû préciser la caractère unique de la médiation
salvifique de Jésus-Christ, par un acte solennel, comme la publication de «
Dominus Jesus », cela veut dire qu’il y avait une raison et qu’il était
nécessaire de faite la clarté à ce sujet ; et de même, plus récemment, ce
même Dicastère a publié une notre doctrinale sur plusieurs aspects de
l’évangélisation. (Ibidem,
Note Doctrinale sur "quelques aspects de l'Evangélisation",
Roma, 2007)
Il faut donc à présent se demander : si la confrontation et le dialogue
réalisés sous la forme que nous connaissons n’a pas porté de fruits, quelle
est l’alternative ? Un durcissement sur ses propres positions qui aurait
comme conséquence le conflit ? Des identités différentes destinées à ne se
rencontrer sur aucun point ? Essayons de donner une réponse à ces questions,
avec ce qu’a déclaré le Pape Jean Paul II lors de l’Angélus au cours duquel
il a présenté la Déclaration citée ci-dessus : « Notre Confession, du Christ
comme Fils Unique, par lequel nous voyons nous-mêmes le visage du Père
(cf.
Jean 14, 8), n’est pas une arrogance qui méprise les autres religions, mais
une reconnaissance joyeuse parce que le Christ s’est montré à nous sans
aucun mérite de notre part ».
La voie indiquée par une telle affirmation nous place dans la perspective
juste : la foi chrétienne est un don gratuit et immérité que nous ne pouvons
pas ne pas communiquer sans manquer à ce devoir grave de celui qui sait
qu’il a dans les mains quelque chose de précieux qu’il ne peut garder
seulement pour lui.
Les religions: une seule question de nombreuses
réponses
Au Concile Vatican II
Jean XXIII, dans la Bulle de convocation du Concile Vatican II, « Humanae
Salutis », constatait avec peine qu’était en cours la crise d’un monde «
qui se glorifie de ses conquêtes dans le domaine technique et
scientifique, mais apporte aussi les conséquences d’un ordre temporel, que
certains ont voulu réorganiser, en faisant abstraction de Dieu. C’est
pourquoi la société moderne se distingue par un grand progrès matériel,
auquel ne correspond pas une avancée égale dans le domaine moral », et par
le « fait, qui est tout à fait nouveau et déconcertant : l’existence d’un
athéisme militant agissant au plan mondial » (Giovanni
XXIII, Constitutio Apostolica Humanae Salutis).
Dans le discours d’ouverture du Concile le Pontife rappelait ceci : « Le
grand problème, qui se pose à la face du monde, est toujours le même : être
pour Dieu ou contre Dieu. Il est facile de s’apercevoir de cette réalité, si
l’on considère avec attention le monde actuel, occupé par la politique et
par les controverses d’ordre économique, au point de ne plus trouver le
temps de s’occuper des sollicitations d’ordre spirituel »
(Giovanni XXIII discorso di apertura del concilio l’11.10.1962).
Lors de la reprise du Concile, le Pape Paul VI partait de la même
préoccupation que son Prédécesseur. Il considérait qu’il fallait réveiller
chez les hommes le sens religieux et le culte envers Dieu, et il invitait
les chrétiens à mettre en valeur tout ce qu’il y avait de bon et de vrai
dans les différentes religions. Il invitait en outre les hommes à être
responsables et débiteurs envers l’humanité tout entière, dans la conscience
exprimée dans «
Pacem en
terris » que « le monde est encore bien loin de
la vérité, de la justice, de la liberté et de l’amour, et donc de la paix
» (Paolo VI, discorso di apertura del 4° periodo del
Concilio).
Il ressort de tout ce qui été affirmé ici-même, que l’Église s’occupe de
l’homme, de son destin. Chacune de ses déclarations a pour but le salut
intégral de la personne et de la société. Elle trouve le centre du problème
de l’homme dans ces questions justes, qui représentent son visage le plus
authentique.
La Constitution Pastorale sur « l’Église dans le Monde Contemporain », «
Gaudium et
Spes », déclare : « Néanmoins le nombre croît de ceux qui, face à
l’évolution présente du monde, se posent les questions les plus
fondamentales ou les perçoivent avec une acuité nouvelle. Qu’est-ce que
l’homme ? Que signifient la souffrance, le mal, la mort, qui subsistent
malgré tous les progrès ? » (Gaudium et Spes 10)
Dans l’histoire de l’humanité, on trouve la présence constante de ces
questions qui représentent le visage le plus profond de l’homme, son sens
religieux, auquel s’oppose, comme c’est l’habitude, l’exception d’un ordre
temporel qui veut nier l’existence de Dieu. Ou bien, tout en ne voulant pas
nier explicitement son existence, l’homme veut parfois s’arroger le droit
indiscutable de juger son œuvre en se mettant de fait à sa place. « Tandis
que certains athées nient Dieu expressément, d'autres pensent que l'homme ne
peut absolument rien affirmer de Lui… Beaucoup, outrepassant indûment les
limites des sciences positives, ou bien prétendent que la seule raison
scientifique explique tout, ou bien, à l'inverse, ne reconnaissent comme
définitive absolument aucune vérité » (Ibidem, 19).
Mais la forme la plus fréquente la plus insidieuse d’athéisme est celle qui,
tout en ne niant pas l’existence, enlève à Dieu la possibilité d’agir et
d’intervenir dans l’histoire. La gravité de cette conception consiste dans
le fait qu’elle se change souvent en idolâtrie, parce que, par sa nature,
elle ne peut se passer d’une dévotion envers un Absolu.
Repartir de la dignité de l’homme
L’Église, toutefois, est consciente que la solution des problèmes ne
consiste pas dans leur escamotage, mais en les affrontant en prenant en eux
la charge provocatrice qu’ils portent. La Constitution «
Gaudium et
Spes » déclare en effet : « Elle (note : l’Église »)
affirme en outre que, sous tous les changements, bien des choses demeurent
qui ont leur fondement ultime dans le Christ, le même hier, aujourd'hui et à
jamais (7). C'est pourquoi, sous la lumière du Christ, Image du Dieu
invisible, Premier-né de toute créature (8), le Concile se propose de
s'adresser à tous, pour éclairer le mystère de l'homme et pour aider le
genre humain à découvrir la solution des problèmes majeurs de notre temps »
(Ibidem n. 10).
La place pour une pleine coopération entre les peuples et les cultures, et
les religions, est donc ample, parce que les problèmes à résoudre sont
nombreux. La méthode indiquée par le Concile est celle de développer en
plein les énergies que les croyants et les non-croyants peuvent offrir pour
rendre la vie de l’homme moins difficile : « Croyants et incroyants sont
généralement d'accord sur ce point: tout sur terre doit être ordonné à
l'homme comme à son centre et à son sommet (Ibidem n° 12).
Toutefois, « Gaudium et Spes » ne cache pas que cette affirmation
peut être source d’ambiguïté. Sans préciser de quel homme il s’agit, il est
difficile de ne pas tomber dans le piège de l’idéologie qui, en dernière
analyse, établit quel type d’homme est plus fonctionnel pour son projet. «
Gaudium et Spes » précise qu’il s’agit de l’homme qui est « unité
d’âme et de corps », qui synthétise en lui « un résumé de l'univers des
choses qui trouvent ainsi, en lui, leur sommet, et peuvent librement louer
leur Créateur … C'est donc la dignité même de l'homme qui exige de lui qu'il
glorifie Dieu » . (Ibidem n° 14)
Au centre du discours sur les religions, il est
indispensable que l’on place l’aspect constitutif de la personne, dont la
caractéristique fondamentale est la raison. Une raison ouverte, c’est-à-dire
capable de comprendre que tout ce qui nous entoure ne peut être le fruit de
notre créativité, et qu’au contraire, elle est le reflet d’un Être Créateur
qui, façonne et renouvelle. Éliminer ou marginaliser la dimension
transcendante de l’être humain veut dire réduire de fait l’homme à un
mécanisme anonyme de la nature.
La liberté religieuse
Aider un climat culturel qui souligne l’importance de la dimension
spirituelle de l’homme, veut dire poser les prémisses pour un dialogue
authentique entre les fidèles de religions différentes.
La liberté religieuse est reliée sans aucun doute à cet aspect. N’importe
quelle communauté religieuse qui ne veut pas, ou qui n’est pas en mesure de
se confronter avec ce droit premier de l’homme, est destinée, un jour ou
l’autre, à disparaître avec le temps. D’autre part, ce qu’on appelle le «
principe de Gamaliel » (Ac 5,34 – 39) appliqué
par le Sanhédrin juif à l’égard de l’Église des premières décennies, malgré
ses deux mille ans d’âge, conserve inaltérée toute son actualité.
Le principe de la liberté religieuse, en plus de servir de banc d’essai pour
porter un jugement sur une expérience de foi, sert aussi à vérifier la
capacité du système juridique d’un État : plus un État est disposé à prendre
en considération, comme étant nécessaire, l’expérience religieuse de son
peuple, et plus il est capable de régler de manière adéquate les différentes
communautés présentes sur son territoire, et d’aider à sa libre expression.
La liberté religieuse est, selon la Déclaration Conciliaire «
Dignitatis Humanae », directement fondée sur la dignité de la personne
humaine, et doit donc être reconnue par tout système juridique qui doit,
entre autres choses, veiller à ce qu’il n’y ait pas d’obstacles ou de
coercitions, parce que « chacun a le devoir, et par conséquent le droit,
de chercher la vérité en matière religieuse afin de se former prudemment, un
jugement de conscience droit et vrai, en employant les moyens appropriés
» (Dignitatis humanae 3). Chacun de nous en
effet est inséré dans un contexte communautaire. D’ailleurs, la nature même
des choses nous révèle cette dynamique : nous naissons dans une communauté,
nous passons une bonne partie de notre vie avec d’autres personnes .
L’expérience religieuse ne se soustrait pas non plus à cette dynamique,
poursuit « Dignitatis Humanae » car elle « requiert elle-même
qu'il exprime extérieurement ces actes internes de religion, qu'en matière
religieuse il ait des échanges avec d'autres, qu'il professe sa religion
sous une forme communautaire ».
La déclaration Conciliaire poursuit en ces termes : « Aux groupes
religieux appartient, de même, le droit de ne pas être empêchés d'enseigner
et de manifester leur foi publiquement, de vive voix et par écrit… dès lors,
donc, que les justes exigences de l'ordre public ne sont pas violées »
(Ibidem, n° 4).
La méthode utilisée dans une expérience religieuse pour l’annonce, indique
son authenticité : ouvrir le monde de Dieu à l’homme,
et amener l’homme à Dieu ; respectueuse de la liberté dans la proposition et
dans l’adhésion. Le Concile Vatican II, insiste sur ce point : «
Que la réponse de foi donnée par l'homme à Dieu doit être volontaire; en
conséquence, personne ne doit être contraint à embrasser la foi malgré soi
» (Ibidem n°10).
Le Christ Jésus lui-même, tout en soulignant la
gravité de la question d’être pour ou contre Lui, a exercé sa Mission en
annonçant et en proposant, la voie du salut sans exercer aucune coercition.
La Déclaration conciliaire, sans passer sous silence plusieurs
responsabilités de certains des fils de l’Église, qui, au cours de
l’histoire, n’ont plus cru à l’authenticité du mandat du Maître, déclare
toutefois : « Cette doctrine, reçue du Christ et des Apôtres, elle l'a,
au cours des temps, gardée et transmise. Bien qu'il y ait eu parfois dans la
vie du Peuple de Dieu, cheminant à travers les vicissitudes de l'histoire
humaine, des manières d'agir moins conformes, voire même contraires, à
l'esprit évangélique, l'Église a, cependant, toujours enseigné que personne
ne peut être amené par contrainte à la foi » (Ibidem
n° 12).
La Déclaration « Dignitatis Humanae » reconnaît dans la Liberté
Religieuse la clef de lecture pour affronter la question du développement
d’une civilisation. Loin d’être simplement un étendard
à brandir pour augmenter son hégémonie, l’Église, en rappelant ce principe,
revendique la liberté pour tous, même pour les plus petites minorités.
Une société, une Nation, un État, seront respectueux des diversités et des
minorités, dans la mesure où ils accorderont la considération qui lui est
due à ce droit de base. Ce n’est pas par hasard que les régimes
totalitaires, du passé comme ceux qui sont toujours en vigueur, pour
soutenir l’enracinement de leur propre idéologie, tentent d’étouffer
l’exigence religieuse en en empêchant la profession publique
L’interdépendance entre les peuples
Un autre Document Conciliaire intéressant pour saisir la méthode qu’adopte
l’Église à l’égard des religions non-chrétiennes, est la Déclaration sur «
les Relations de l’Église avec les religions non-chrétiennes », «
Nostra
Aetate ».
Il révèle le visage d’une Église attentive au
mouvement actuel d’unification et d’interdépendance du genre humain ; ce
document, tout comme aussi d’autres Documents Conciliaires, se présente
comme prophétique, par le fait qu’il est aujourd’hui largement répandu.
Le caractère prophétique de “Nostra Aetate”, doit être recherché à
n’en point douter, dans son insistance à souligner les deux aspirations
fondamentales de l’homme de chaque époque : chercher Dieu pour entrer en
relation avec Lui ; trouver une réponse aux questions fondamentales de la
vie. Quel serait, au fond, le but d’une religion si ce n’est de répondre aux
questions les plus profondes que l’homme se pose ?. En effet, le Document
déclare : « Les hommes attendent des diverses religions la réponse aux
énigmes cachées de la condition humaine, qui, hier comme aujourd'hui,
troublent profondément le coeur humain: Qu'est-ce que l'homme ? Quel est le
sens et le but de la vie ? Qu'est-ce que le bien et qu'est-ce que le péché ?
Quels sont l'origine et le but de la souffrance ? Quelle est la voie pour
parvenir au vrai bonheur ? Qu'est-ce que la mort, le jugement et la
rétribution après la mort ? Qu'est-ce enfin que le mystère dernier et
ineffable qui entoure notre existence, d'où nous tirons notre origine et
vers lequel nous tendons ? » (Nostra Aetate).
Ces points qui viennent d’être cités, pourraient devenir les critères pour
tenter de faire une comparaison entre les religions. On pourrait «
interroger » les religions sur chacun de ces points, afin de juger, pour
chacun d’eux, le caractère raisonnable des réponses qu’elles offrent. Cette
comparaison ne peut pas ne pas tenir compte du contexte historique,
géographique et culturelle dans lequel elles sont nées et se sont
développées. Parce que, s’il est vrai que chaque expérience religieuse peut
être exportée en n’importe quel lieu et se soumettre ainsi à la
confrontation avec des cultures différentes de leur culture d’origine, il
reste toutefois indiscutable que le fait que certains aspects d’une religion
ou d’une philosophie de vie, sont applicables exclusivement dans le contexte
culturel où ils sont nés.
A ce sujet, nous ne pouvons oublier tout ce que la religion chrétienne
elle-même, en particulier au début de son histoire, a eu à faire avec ce
type de problème, en rapport surtout avec le judaïsme et avec ses rites.
Selon la Déclaration Conciliaire, le sens religieux est le facteur commun à
tous les hommes, et il a besoin nécessairement, comme tous les aspects de la
vie de l’homme, d’être éduqué, soutenu, développé et élargi toujours plus.
C’est une attitude qui pousse l’Église à une ouverture vis-à-vis de tout ce
qu’il y a de vrai chez l’autre.
« Nostra
Aetate » consacre deux paragraphes aux grandes religions monothéistes :
le Judaïsme, et l’Islam
a) Avec les Juifs
Au paragraphe 4°, se détache l’insistance à souligner le lien particulier
qui existe entre les chrétiens et les juifs, unis par une longue tradition
spirituelle commune : « L'Église du Christ, en effet, reconnaît que les
prémices de sa foi et de son élection se trouvent, selon le mystère divin du
salut, dans les patriarches, Moïse et les prophètes. Elle confesse que tous
les fidèles du Christ, fils d'Abraham selon la foi, sont inclus dans la
vocation de ce patriarche » (Ibidem n° 4).
Jésus, sa Mère, les Apôtres, nombre des premiers disciples qui ont annoncé
l’Évangile étaient juifs
« Néanmoins, selon l'Apôtre, les Juifs restent encore, à cause de leurs
pères, très chers à Dieu, dont les dons et l'appel sont sans repentance.
Avec les prophètes et le même Apôtre, l'Église attend le jour, connu de Dieu
seul, où tous les peuples invoqueront le Seigneur d'une seule voix et "le
serviront sous un même joug" »
Le Concile, à partir du « grand patrimoine
spirituel commun », invite les chrétiens et les juifs à développer leur
connaissance réciproque par les études bibliques et théologiques, sans
oublier les oppositions qui, dès la naissance du christianisme, se sont
manifestées entre les juifs et les disciples du Nazaréen.
b) Avec les musulmans
Le paragraphe consacré aux musulmans commence par une attestation d’estime à
l’égard des disciples de Mahomet, « qui adorent le Dieu Un, vivant et
subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de ta terre
». Comme le déclare le Coran « le Dieu Un, vivant et subsistant,
miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de ta terre qui a parlé
aux hommes… possède les clefs du mystère que lui seul connaît parfaitement
».
Ce sont là des aspects qui, malgré leur conception différente, trouvent des
points de départ pour une confrontation. La Déclaration ne manque pas de
souligner la grande considération que les musulmans ont de Jésus ; mais le
Coran, pour souligner la transcendance absolue de Dieu fait dire à Jésus : «
Tu connais ce qui est en moi, alors que moi je ne connais pas ce qui est en
toi. Tu connais parfaitement les secrets invisibles » ; le Coran et l’islam
attribuent à Jésus une place exceptionnelle dans la liste des prophètes : il
est un serviteur exemplaire qui refuse pour sa part tout ce que les
chrétiens lui attribuent : il n’est ni Dieu, ni Seigneur, ni Fils de Dieu,
ni le troisième d’une Triade, et les juifs ne l’ont pas tué et crucifié.
Pour ce qui concerne Marie en revanche, elle est considérée comme une femme
bénie de manière particulière, vierge par excellence, très croyante et très
pieuse ; elle reçoit l’annonce d’un enfant qui naît d’elle, effectivement
sans le concours humain ; à tout cela s’ajoute la foi dans le Patriarche
Abraham, commun aux trois grandes religions. Le musulman croit en outre aux
envoyés de Dieu, œuvre de sa miséricorde envers les êtres humains dans une
histoire qui se répète de cycle en cycle ; il distingue entre les grands
prophètes et ceux qu’il considère comme des prophètes mineurs, parmi
lesquels il place Abraham « l’ami de Dieu, fondateur de la religion en
esprit et en vérité ; Moïse « l’interlocuteur de Dieu », législateur pour
les enfants d’Israël.
Le Concile, toutefois, ne cache pas les dissensions et les inimitiés qui se
sont manifestées tout au long des siècles entre chrétiens et musulmans, et
déclare : « Si, au cours des siècles, de nombreuses
dissensions et inimitiés se sont manifestées entre les chrétiens et les
musulmans, le Concile les exhorte tous à oublier le passé et à s'efforcer
sincèrement à la compréhension mutuelle, ainsi qu'à protéger et à promouvoir
ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la
paix et la liberté » (Ibidem n° 3)”
.
Il est évident aux yeux de tous combien ces dernières affirmations sont
prophétiques. Un domaine de collaboration entre les hommes de foi chrétienne
et de foi islamique, peut être à n’en point douter, celui de la promotion de
l’homme, d’aplanir les injustices sociales qui caractérisent non seulement
les pays à majorité islamique, mais chaque partie du monde. C’est la raison
pour laquelle si, d’un côté, il existe des aspects qui diffèrent entre
chrétiens et musulmans, dans la manière de concevoir Dieu, il est néanmoins
vrai que toute action qui protège la dignité de l’homme et de la femme est
valable : sur ce point également, les différences, même grandes, ne manquent
pas, mais c’est l’unique solution adéquate pour affronter des problèmes de
notre époque face auxquels se trouve aujourd’hui l’humanité
Dossier réalisé di N.L. - Agence Fides 6/8/2008; Directeur Luca de Mata
Lire la suite :
1)
Introduction
2)
La question interreligieuse dans le Magistère de Jean Paul II
3)
Le tournant de Ratisbonne
4)
Conclusion
Sources : www.vatican.va
-
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 06.08.2008 -
T/Oecuménisme |