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19 Avril 2005
 

Benoît XVI : pour bien célébrer la liturgie, porter sans cesse le regard vers Dieu

 

Le  27 juin 2009  - (E.S.M.) - Une liturgie ne peut être vraiment belle que si elle découle d'une intention pure - idée au demeurant très importante pour Benoît XVI -. Dieu, dans sa magnificence, doit apparaître de façon évidente comme le sujet de l'événement

Le pape Benoît XVI - Pour agrandir l'image Cliquer

Benoît XVI : pour bien célébrer la liturgie, porter sans cesse le regard vers Dieu

Beauté de la liturgie - Beauté de l'âme

Le 27 juin 2009  - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - Dernière partie de la Conférence donnée par Dom Karl Joseph Wallner le 4 mai 2009 au Congrès "Liturgie et vie psychique" qui s'est tenu à l'abbaye cistercienne d'Heiligenkreuz (A) cum permissio
Pour lire les pages précédentes :
Pour Benoît XVI, la liturgie est la clé pour l'avenir de la foi chrétienne - 24.05.09 (1)
Benoît XVI et Urs von Balthasar, une amitié qui n'est pas due au hasard - 26.05.09 (2)
Benoît XVI et la dimension esthétique de la liturgie (3)
L'authentique liturgie sacrée, l'élévation par la célébration (4)

SUITE ET FIN

3. La spiritualisation par l' "ordo".

Le troisième aspect de l'influence que peut avoir la beauté liturgique sur notre âme est sa capacité à "spiritualiser" notre être. La liturgie est par elle-même, par tout ce qu'on peut percevoir d'elle sur le plan visuel et acoustique, spiritualisante.

Il me faut à ce propos revenir encore une fois sur la notion de "leiturgia logike", cette expression mentionnée dans la Lettre aux Romains où S. Paul traite les thèmes du Salut par la conversion, de la justification par la foi, et pose ainsi les fondements de la sotériologie.

Cette expression, "liturgie conforme au logos", n'est en effet pas à comprendre uniquement en opposition aux paroles magiques, aux transes et aux extases irrationnelles qu'on trouve dans les cultes antiques, en particulier dans les cultes à mystère. Elle désigne ce qu'est réellement le culte chrétien au plus profond de lui-même. Elle décrit un mouvement de dépassement des rituels sacrificiels juifs par le culte de la mort et de la résurrection du Christ. Au chapitre 12 de la Lettre aux Romains, verset 1, on lit: "Je vous exhorte donc, frères par la miséricorde de Dieu, à offrir vos personnes en hostie vivante, sainte, agréable à Dieu; c'est là le culte spirituel ("leiturgia logike") que vous avez à rendre". Et plus haut, en Rm 3, 25, cette référence est encore plus claire, lorsque Paul, après la fête de Yom Kippour, désigne le Christ comme "instrument de propitiation": "Dieu l'a exposé comme instrument de propitiation..."

S. Paul connaissait le culte sacrificiel du temple; il connaissait l'abattage quotidien des animaux destinés au sacrifice, le jaillissement du sang des bêtes, le bûcher où ils étaient ensuite entièrement consumés... Et tout cela pour effacer à jamais le péché qu'on pensait présent, par transfert, dans le sang et la chair de l'animal.

Il nous est difficile aujourd'hui d'imaginer ce que fut le judaïsme jusqu'en l'an 70, année au cours de laquelle Jérusalem fut prise par Titus, et où l'extraordinaire Temple d'Hérode fut réduit en cendres. C'était alors une religion très portée sur les manifestations cultuelles, et très en vue dans la société de l'époque. Au centre de tout, était le culte sacrificiel sur la montagne de Sion à Jérusalem, escabeau pour les pieds du Dieu invisible et innommable. Le culte du Temple consistait en une suite ininterrompue de rituels d'offrande. Il faut s'imaginer les parvis du Temple - selon les termes de Joachim Jeremias, exégète protestant - comme un immense abattoir: les animaux étaient conduits à la mort, en lieu et place des pécheurs. La vie conduite à la mort... car ainsi seulement pouvait être vaincue la mort de la relation à Dieu provoquée par la transgression de la loi.

Le Vendredi Saint, l'Eglise chante: "O mors ero mors tua", "O mort, je serai ta mort", et elle met ces mots dans la bouche du Christ. Lorsque l'Eglise primitive reconnut dans la Croix du Christ le signe du Salut, lorsqu'elle désigna le Christ comme instrument de propitiation, et comme Agneau de Dieu qui porte le péché du monde, il devint clair pour elle qu'il n'y aurait plus jamais de sacrifice sanglant. Le christianisme a été une véritable révolution sur le plan cultuel dans l'Antiquité. L'orgie sanglante du Golgotha a rendu obsolète toute autre idée de sacrifice. Ne reste plus à présent que la "leiturgia logike", le culte spirituel, la liturgie selon le logos.

On peut remarquer aussi que c'est précisément la Lettre aux Hébreux qui parle du "sacrifice de louange", et du "fruit des lèvres". C'est ce passage à l'ordre spirituel qui explique - réalité difficilement compréhensible autrement - pourquoi les premiers chrétiens redoutaient tant, à l'époque des persécutions, de devoir exprimer leur loyauté à l'égard de l'Etat par un sacrifice à l'effigie de l'empereur.
Le temps des sacrifices appelant une réponse divine est révolu; ne reste qu'un seul sacrifice, celui du Golgotha; le temps des prêtres, au pluriel, est passé; ne reste qu'un seul Prêtre, Jésus-Christ.

Le Concile de Trente enseigne que la Sainte Messe actualise l'unique Sacrifice du Christ; de même, le prêtre ordonné est vraiment prêtre en ce qu'il participe au sacerdoce du Christ, unique grand prêtre. C'est pourquoi le culte célébré par l'Eglise est toujours un culte spirituel. Sa forme sera toujours au service de son contenu, et jamais l'inverse. Ce qui est perçu par nos sens sera toujours sommé de représenter le contenu spirituel. Cela signifie aussi que la beauté extérieure aura pour mission d'attirer l'attention sur la beauté intérieure. Notre âme sera conduite "per visibilia ad invisibilia", du visible vers l'invisible. Une oraison emploie même pour cela le mot "rapiamur", c'est-à-dire que nous serons ravis, emportés vers la sphère divine.

Cet ordonnancement - du visible à l'invisible - est la véritable raison d'être de l'acte liturgique. On peut parler d'un ordo spiritualisant. Le terme "ordo" prend ainsi toute son importance: cette racine latine se retrouve en effet non seulement dans la désignation du sacrement de l'ordre, mais désigne aussi tout le déroulement liturgique selon les normes de l'Eglise. On parle de l'Ordo Missae (le rite de la messe), de l'Ordo Exequiarum (rite des funérailles), de l'Ordo Baptismi (rite du baptême) etc...

Dans le mot "ordo" se trouve contenu l'élément spiritualisant de la liturgie, référence qui a malheureusement été perdue dans la traduction allemande. En allemand en effet, le mot "Ordnung", directement issu de "ordo", aurait pu servir à désigner tous ces rites. Le synode de Würzbourg (1971-1975) lui a pourtant préféré le mot "Feier", c'est-à-dire "fête, célébration". L' "Ordo Missae" est ainsi devenu "la célébration de la messe"; et cela se retrouve partout: célébration du baptême, célébration de l'ordination, jusqu'un peu paradoxalement à la célébration des funérailles. Cela avait un côté réjouissant, car dans les années 70 personne n'attendait de la part d'un synode autant d'humeur festive... Mais il ne s'agissait pas de cela. Le synode avait plutôt voulu insister sur le fait que tout acte liturgique est un acte communautaire, et que la notion de communauté avait plus d'affinité avec celle de fête qu'avec celle de normes à suivre.

Personnellement je préfère la sobriété toute romaine du mot "ordo", parce qu'il renvoie davantage au contexte spirituel. (Note du traducteur: en français aussi le terme "célébration" a été largement utilisé, mais parallèlement aussi celui de "rite", qui bien que n'ayant pas la même racine qu' "ordo" me semble une traduction en phase avec les réflexions de Dom Wallner).

Notre liturgie vit en effet toujours de ce que Dieu a donné par avance. Sa forme prédéfinie existe avant tout contenu subjectif. S. Paul, au moment de rapporter l'institution de l'Eucharistie (1Cor 11) nous prévient humblement: il ne fait que transmettre "ce qu'il a lui-même reçu". Puis il transcrit un texte, canon primitif de la messe, qui correspond presque mot à mot à ce qu'on lit dans l'Evangile de S. Luc au moment de la dernière Cène. C'est cette force spirituelle et spiritualisante contenue dans des paroles préexistantes, préformulées, qu'il nous est donné d'expérimenter ici durant les offices monastiques. Nous ne prions pas sur de petits textes inventés par nos soins, mais sur les Psaumes inspirés par l'Esprit Saint qui nous relient à tous les priants des trois derniers millénaires, avec leurs émotions et leurs pensées. S. Benoît n'a pas voulu que nous fabriquions des prières, mais que nous nous laissions saisir par ce qui existe déjà: "ut mens nostra concordet voci nostrae". Ce sont les textes qui doivent former notre âme et pas l'inverse.

Pour atteindre la beauté spirituelle au cours de la liturgie il convient ainsi de respecter l'ordonnancement liturgique. Plus que jamais, le monde a besoin aujourd'hui d'une liturgie ayant la force de résister au culte de l'ego, à l'idolâtrie du "je - moi - mon", au terrorisme du subjectivisme. La nécessité du respect des normes liturgiques n'est pas un rabat-joie: elle nous apporte plutôt une grande liberté nous permettant d'accéder à la joie véritable. C'est ce que disait Romano Guardini: "Présenter à Dieu un jeu, une œuvre d'art - non pas s'affairer, mais être - c'est cela l'essence véritable de la liturgie" (R. Guardini, De l'Esprit de la Liturgie, 1921).

En tant que formateur auprès de jeunes prêtres, j'ai pu constater que le fait d'apprendre à respecter l'ordonnancement liturgique a un effet très positif sur la formation du caractère du célébrant: cet effort le protège en effet contre toute crispation subjective et contre tout relâchement piétiste. Cette aptitude à se glisser dans un ordo engendre pour le célébrant une sorte de soulagement. Il est important pour les jeunes candidats au sacerdoce de bien apprendre les ordo de la messe et des divers sacrements. Plus et mieux le futur prêtre se sera familiarisé avec ces attitudes, ces déroulements, ces gestes et ces formulations, moins il se rendra ensuite esclave de son propre ego. Le célébrant n'aura plus alors à se poser la question de savoir comment il est perçu par les gens, mais il pourra advenir cette chose toute surnaturelle qu'est la venue miséricordieuse du Christ dans le cœur du prêtre.

J'ai vécu cela moi-même lorsque j'étais cérémoniaire: c'est en entrant dans la forme liturgique, en mourant ainsi à soi-même, que l'on devient libre en vue de l'essentiel; le formalisme assumé libère l'âme en la menant au substantiel. La nature en vient à héberger le surnaturel. L'action banale se dépasse elle-même et conduit à l'action sacrée; les attitudes et la musique se font art. Et je citerai ici à nouveau Guardini: "La liturgie est la vie devenue art".

L'ordonnancement de la liturgie est un élément constitutif de cette beauté qu'expérimente l'âme. L'ordo permet en effet de relier horizontalement celui qui célèbre avec l'Eglise de son temps. Et l'Eglise n'est-elle pas la plus ancienne entreprise mondialiste, elle qui embrasse toutes les cultures, toutes les races, tous les pays, tous les continents, elle qui est universelle, kata holon?

Mais le respect des normes liturgiques approuvées par l'Eglise nous place aussi verticalement sous l'autorité de Dieu, concrétisée et actualisée par l'autorité apostolique de Pierre et des autres Successeurs des Apôtres. Sans cesse les documents post-conciliaires nous le rappellent: ne faisons pas de la liturgie un champ d'expérimentation pour nos théologies ou nos pédagogies personnelles. Le slogan: "Quot sacerdotes, tot liturgiae", - il y a autant de liturgies différentes que de prêtres - traduit une pensée déviante due à l'air du temps, et certainement pas une inspiration de l'Esprit Saint. Joseph Ratzinger dit que la mission du prêtre est de démontrer à la communauté qu'il existe quelque chose dont on ne peut pas simplement disposer, quelque chose qu'on ne peut pas manipuler, quelque chose à quoi lui-même se soumet. Qu'il n'est pas un régisseur, mais un acteur qui se met à la disposition du Régisseur divin, tel un instrument.

Joseph Ratzinger dénonce aussi un néo-cléricalisme qui voudrait que le prêtre soit un artiste qui par son propre jeu aurait à distraire son public. Mais de telles liturgies ne seraient pas à même d'ouvrir cette fenêtre spirituelle qui permettrait à notre âme de jeter un regard vers le lieu de la Beauté divine. Au contraire, un tel activisme repousserait notre âme dans la cave sans ouverture d'un univers simplement humain. Et cela ne peut mériter le qualificatif de "beau", tout au plus celui de "divertissant".

III. Conclusion.

Je résume: sur la base dogmatique de la plénitude divine, nous pouvons poser que là où l'on met en oeuvre tout ce qui est humainement possible pour atteindre la beauté liturgique, là advient un apaisement de l'âme, une élévation de l'âme, et une certaine spiritualisation de l'âme. Et cette influence est réciproque car, de la même façon que la beauté de la liturgie agit sur l'âme, ainsi une liturgie ne peut être vraiment belle que si elle découle d'une intention pure - idée au demeurant très importante pour Benoît XVI -. Dieu, dans sa magnificence, doit apparaître de façon évidente comme le sujet de l'événement: c'est la condition sine qua non pour qu'une liturgie soit belle. Alors seulement elle pourra déployer toute sa force thérapeutique. Cela suppose de la part du célébrant, aussi bien une intention droite et pure, qu'un empressement à vouloir célébrer dignement le rite.

Je veux laisser le dernier mot au Pape Benoît XVI. Il dit en effet: "Parmi tous les efforts nécessaires pour bien célébrer la liturgie, le plus important est de porter sans cesse le regard vers Dieu. Nous sommes là, devant Dieu, Il nous parle et nous lui parlons. Chaque fois que dans nos réflexions sur la liturgie nous ne cherchons qu'à la rendre attractive, intéressante, jolie, il n'est déjà plus question de liturgie. Ou bien elle est opus Dei, avec Dieu comme véritable objet, ou bien elle n'est pas. Je vous en supplie donc ici: que l'essentiel de votre liturgie soit votre regard tourné vers Dieu dans la communauté des Saints et avec l'Eglise vivante de tous les lieux et de tous les temps; ainsi elle deviendra l'expression de la beauté et de la grandeur de Dieu, ami des hommes."

Trad. MH/APL
 

Sources : Pro Liturgia
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 27.06.09 - T/Liturgie

 

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