Le Christ, approfondit Benoît XVI, n'a pas mis
Dieu à l'épreuve |
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Le 23 octobre 2007 -
(E.S.M.) - L'interprétation de
la Bible peut devenir un instrument de l'Antéchrist. Ce n'est pas
seulement Soloviev qui le dit, c'est ce qu'affirme implicitement le
récit même des tentations. Les pires livres, signale Bennoît XVI, qui
détruisent la figure de Jésus, qui démolissent la foi, ont été écrits
avec de prétendus résultats de l'exégèse.
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L'Antéchrist
Le Christ, approfondit Benoît XVI, n'a pas mis Dieu à l'épreuve
Deuxième chapitre - Les tentations de Jésus
(p. 45 à 65) 1) l'Esprit
conduit Jésus au désert :
Benoît XVI 2) La première tentation
:
Benoît XVI
3) La deuxième tentation
: Le Christ n'a pas mis Dieu à l'épreuve
Dans la page
précédente, Benoît XVI a présenté la première tentation de Jésus, celle
du pain.
Venons-en maintenant à la deuxième tentation de Jésus, dont la signification
exemplaire est à beaucoup d'égards la plus difficile à comprendre. La
tentation est à comprendre comme une sorte de vision, dans laquelle est
résumée une réalité, une menace particulière pour l'homme et pour la mission
de Jésus. D'emblée, mentionne Benoît XVI, un point nous intrigue. Pour attirer Jésus dans son
piège, le diable cite l'Écriture Sainte : le Psaume 91
[90]; qui évoque la
protection que Dieu accorde à l'homme fidèle : « II donne mission à ses
anges de te garder sur tous tes chemins. Ils te porteront sur leurs mains
pour que ton pied ne heurte les pierres
» (v. 11-12). Ces paroles prennent
une importance plus grande du fait qu'elles ont été prononcées dans la Ville
sainte, dans le lieu saint. En effet, le psaume cité est lié au Temple ;
celui qui
le récite attend une protection dans le Temple, car la maison de Dieu doit
être un lieu particulier de protection divine. En quel autre lieu l'homme
qui croit en Dieu devrait-il se savoir plus à l'abri que dans l'enceinte
sacrée (Voir à ce sujet plus en détail J. Gnilka, Das Matthâusevangelium, op. cit.,
p. 88) ? Le diable se révèle un connaisseur de l'Écriture, il est capable
de citer le psaume avec précision. Tout le dialogue de la deuxième tentation
se présente comme un débat entre deux experts en Écriture Sainte : le diable
y fait figure de théologien, ainsi que nous le fait remarquer Joachim Gnilka.
Vladimir
Soloviev a repris ce thème dans son Court récit sur l'Antéchrist :
l'Antéchrist est fait docteur honoris causa en théologie de l'université de Tiibingen ; c'est un grand expert de la Bible. Ainsi, Soloviev a voulu
exprimer, de façon radicale, son scepticisme envers un certain type
d'exégèse érudite de son temps. Il ne s'agit pas d'un refus de
l'interprétation scientifique de la Bible en tant que telle, formule
Benoît XVI, mais d'un
avertissement particulièrement nécessaire et salutaire face à ses errances
possibles. L'interprétation de la Bible peut effectivement devenir un
instrument de l'Antéchrist. Ce n'est pas seulement Soloviev qui le dit,
c'est ce qu'affirme implicitement le récit même des tentations.
Les pires
livres qui détruisent la figure de Jésus, qui démolissent la foi, ont été
écrits avec de prétendus résultats de l'exégèse.
De nos jours, la Bible est assujettie chez beaucoup au critère de la
prétendue vision moderne du monde, dont le dogme fondamental est que
Dieu ne
peut nullement agir dans l'histoire, et que, par conséquent, tout ce qui le
concerne est à reléguer dans la sphère du subjectif. Alors la Bible ne parle
plus de Dieu, du Dieu vivant, mais c'est nous-mêmes seulement qui parlons et
qui déterminons ce que Dieu peut faire et ce que nous voulons ou devons
faire. Et l'Antéchrist nous dit alors, se présentant comme un
grand érudit, qu'une exégèse qui lit la Bible dans la perspective de la foi
au Dieu vivant, lui prêtant attention, relève d'une attitude fondamentaliste
; seule son exégèse, l'exégèse considérée comme authentiquement
scientifique, dans laquelle Dieu lui-même ne dit rien et n'a rien à dire,
serait à la pointe du progrès.
La dispute théologique entre Jésus et le diable est une dispute qui concerne
chaque époque et qui a comme objet l'interprétation correcte de la Bible,
dont la question herméneutique fondamentale est la question de l'image de
Dieu. La dispute sur l'interprétation est en fin de compte une discussion
qui porte sur qui est Dieu. Cette discussion autour de l'image de Dieu, dont
il s'agit dans la dispute sur l'interprétation correcte de l'Écriture,
trouve son expression concrète dans l'image du Christ : celui qui est resté
sans pouvoir terrestre est-il réellement le Fils du Dieu vivant ?
Ainsi, la question concernant la structure de l'étrange dialogue sur
l'Écriture entre Jésus et le Tentateur conduit directement au cœur de la
question du contenu. De quoi est-il question ? On a associé cette tentation
au thème du panem et circemes : après le pain, doit être offert quelque
chose de sensationnel. Comme il ne suffit manifestement pas à l'homme d'être
physiquement rassasié, celui qui ne veut pas laisser entrer Dieu dans le
monde et dans les hommes doit offrir la stimulation d'expériences
excitantes, dont le frémissement remplace et refoule l'émotion religieuse.
Mais ce ne peut pas être le sens de ce passage, car, à ce qu'il semble, il
n'y a pas de spectateurs.
L'enjeu , explique Benoît XVI, apparaît dans la réponse de Jésus empruntée encore au Deutéronome
(6, 16) : «
Vous ne mettrez pas à l'épreuve le Seigneur votre Dieu. » Dans
le Deutéronome, c'est une allusion à l'histoire d'Israël qui risquait de
mourir
de soif dans le désert. S'ensuit une rébellion contre Moïse qui devient une
rébellion contre Dieu. Dieu doit montrer qu'il est Dieu. Dans la Bible,
cette rébellion contre Dieu est décrite ainsi : « Ils avaient mis le
Seigneur au défi en disant : "Le Seigneur est-il vraiment au milieu de nous,
ou bien n'y est-il pas ?" » (Ex 17, 7). Il s'agit donc de ce que nous avons
déjà mentionné précédemment : Dieu doit se prêter à l'expérimentation. Il
est « mis à l'épreuve », comme on teste les marchandises. Il doit se
soumettre aux conditions que nous considérons comme nécessaires à notre
certitude. S'il n'accorde pas maintenant la protection promise par le Psaume
91 [90], alors il n'est pas Dieu. Alors il a falsifié sa parole, et de ce
fait il s'est falsifié lui-même.
Nous avons ici devant nous dans sa totalité la grande question de savoir
comment on peut connaître Dieu et comment on peut ne pas le connaître,
comment l'homme peut être en relation avec lui et comment il peut le perdre.
La présomption qui veut transformer Dieu en objet et lui imposer nos
conditions expérimentales de laboratoire ne saura trouver Dieu. Car il
présuppose déjà que nous nions Dieu en tant que Dieu, parce que nous nous
mettons au-dessus de lui, parce que nous mettons de côté toute la dimension
de l'amour, de l'écoute intérieure, et que nous ne reconnaissons comme réel
que ce dont on peut faire l'expérience, que ce qui a été mis entre nos
mains. Celui qui pense ainsi se fait lui-même Dieu et rabaisse ainsi non
seulement Dieu mais aussi le monde et lui-même.
À partir de cette scène sur le pinacle du Temple, le regard s'ouvre
également sur la croix. Le Christ, affirme
Benoît XVI, ne s'est pas jeté du pinacle du Temple. Il
n'a pas sauté dans l'abîme. Il n'a pas mis
Dieu à l'épreuve. Mais il est
descendu dans l'abîme de la mort, dans la nuit de l'abandon ; il s'est
exposé
comme un être sans défense. Il a osé ce saut-là comme acte d'amour de Dieu
pour les hommes. Et donc il savait qu'en sautant, il ne pouvait tomber
finalement qu'entre les mains clémentes du Père. Ainsi apparaît le sens
véritable du Psaume 91 [90],
le droit à la confiance extrême et illimitée,
dont il parle : celui qui fait la volonté de Dieu sait qu'au milieu de
toutes les terreurs qu'il traverse, il ne perdra jamais une ultime
protection. Il sait que le fondement du monde est l'amour et que, par
conséquent, même là où aucun humain ne peut ou ne veut l'aider, il peut
continuer à cheminer dans la confiance en Celui qui l'aime. Cette confiance,
à laquelle l'Écriture nous autorise et à laquelle le Seigneur, le
Ressuscité, nous invite, est quelque chose de tout à fait autre que le défi
aventureux adressé à Dieu, qui voudrait faire de Lui notre serviteur.
à suivre... La prochaine
page sera consacrée à la troisième tentation de Jésus
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"Jésus de Nazareth"
Sources: www.vatican.va
- (E.S.M.)
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Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 23.10.2007 - BENOÎT XVI
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