Benoît XVI : Une anthologie de la
symphonie "du nouveau monde" |
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Rome, le 22 juillet 2008 -
(E.S.M.)
- Du voyage de Benoît XVI en Australie pour la
Journée Mondiale de la Jeunesse, les médias du monde entier ont retenu
l’arrivée du pape par la mer en baie de Sydney, les danses des aborigènes,
les tableaux vivants du Chemin de Croix, les myriades de bougies des jeunes
pendant la veillée, la condamnation pleine d’émotion des abus sexuels commis
par des prêtres et la rencontre avec quatre de leurs victimes.
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Le pape
Benoît XVI - Pour
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Benoît XVI : Une anthologie de la symphonie "du nouveau monde"
Aux Journées Mondiales de la Jeunesse à Sydney, Joseph Ratzinger prêche une
"nouvelle ère" de l’Esprit qui changerait la face de la terre. Il y a trois
ans, en Allemagne, c'est une "révolution" qu'il avait proposée aux jeunes.
L’espérance historique du pape théologien
par Sandro Magister
Du voyage de Benoît XVI en Australie pour la Journée Mondiale de la
Jeunesse, les médias du monde entier ont retenu l’arrivée du pape par la mer
en baie de Sydney, les danses des aborigènes, les tableaux vivants du Chemin
de Croix, les myriades de bougies des jeunes pendant la veillée, la
condamnation pleine d’émotion des abus sexuels commis par des prêtres et la
rencontre avec quatre de leurs victimes.
Sur cette page, en revanche, on trouvera une anthologie des passages
marquants des discours prononcés par Benoît XVI au cours de son voyage.
Inévitablement, cette sélection laisse de côté d’autres passages non moins
importants des discours et homélies du pape. Par exemple, il faudrait relire
intégralement la
catéchèse
sur l’Esprit Saint que le pape a prononcée devant
les jeunes lors de la veillée nocturne du samedi 19 juillet: on comprendrait
pourquoi “L’Osservatore Romano“ l’a présentée comme “l’un des plus beaux
textes du pontificat“.
Quoi qu’il en soit, on retrouve dans cette anthologie une caractéristique de
Benoît XVI : c’est un pape théologien. Comme saint Augustin – qu’il a
beaucoup cité pendant son voyage en Australie – Benoît XVI veut prêcher à
tous, y compris aux plus humbles et aux plus simples, les merveilles de
Dieu. Sans les simplifier ni les édulcorer, mais en les présentant dans
toute leur essentialité, aussi complexe soit-elle, et dans leurs retombées
historiques.
De par leur contenu et leur style, les extraits reproduits ci-dessous sont
ceux que l’on peut le plus sûrement attribuer à Joseph Ratzinger, à son
esprit et à sa plume, plutôt qu’aux services du Vatican chargés de préparer
les discours du pape et d’y joindre des compléments.
►
Voyage apostolique à Sydney 12-21 juillet 2008
Voici donc notre anthologie:
1. Lorsque Dieu est éclipsé, le sein maternel devient lui aussi un lieu de
violence indicible
Extrait du
Discours
d’arrivée, Sydney, Môle de Barangaroo, jeudi 17 juillet
2008
Chers amis, [...] d’en haut, la vue de notre planète fut quelque chose de
vraiment magnifique. Le miroitement de la Méditerranée, la magnificence du
désert nord africain, la forêt luxuriante de l’Asie, l’immensité de l’Océan
Pacifique, l’horizon sur la ligne duquel le soleil se lève et se couche, la
splendeur majestueuse de la beauté naturelle de l’Australie, dont j’ai pu
jouir au cours de ces derniers jours ; tout cela suscite un profond
sentiment de crainte révérencielle. C’est comme si nous capturions de
rapides images sur l’histoire de la création racontée dans la Genèse : la
lumière et les ténèbres, le soleil et la lune, les eaux, la terre et les
créatures vivantes. Tout cela est « bon » aux yeux de Dieu
(cf. Gn 1, 1-2,
4). Plongés dans une telle beauté, comment ne pas faire écho aux paroles du
Psalmiste quand il loue le Créateur : « Qu’il est grand ton nom par toute la
terre » (Ps 8, 2) ?
Mais il y a bien plus encore [...]: des hommes et des femmes créés rien que
moins à l’image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26). Au cœur de la
merveille de la création, nous nous trouvons, vous et moi, la famille
humaine « couronnée de gloire et d’honneur » (cf. Ps 8, 6). Quelle merveille
! Avec le psalmiste, nous murmurons : « Qu’est-ce que l’homme pour que tu
penses à lui ? » (cf. Ps 8, 5). Introduits dans le silence, pleins de
reconnaissance et par la puissance de la sainteté, nous réfléchissons.
Que découvrons-nous ? [...] Que non seulement le milieu naturel, mais aussi
le milieu social – l’habitat que nous nous créons nous-mêmes – a ses
cicatricesi, [...] comme un poison qui menace de corroder ce qui est bon, de
remanier ce que nous sommes et de nous détourner du but pour lequel nous
avons été créés. [...] Il y a aussi quelque chose de sinistre qui découle du
fait que la liberté et la tolérance sont très souvent séparées de la vérité.
Cela est alimenté par l’idée, largement diffusée aujourd’hui, qu’aucune
vérité absolue ne peut guider nos vies. Le relativisme, en donnant une
valeur quasi indistincte à toute chose, a rendu l’« expérience » plus
importante que tout. En réalité, les expériences, sans tenir compte de ce
qui est bon et vrai, peuvent conduire non pas à une liberté authentique,
mais au contraire, à une confusion morale ou intellectuelle, à un
affaiblissement des principes, à la perte de la propre estime, et même au
désespoir.
Chers amis, la vie n’est pas réglée par le hasard, elle n’est pas
accidentelle. Votre existence personnelle a été voulue par Dieu, bénie par
Lui et il lui a été donné un but (cf. Gn 1, 28) ! La vie n’est pas une
simple succession de faits et d’expériences, même si de tels événements
peuvent être utiles. Elle est une recherche de ce qui est vrai, bien et
beau. C’est précisément en vue de tels objectifs que nous accomplissons nos
choix, que nous exerçons notre liberté et en cela, c’est-à-dire en ce qui
est vrai, bien et beau, nous trouvons le bonheur et la joie. Ne vous laissez
pas tromper par ceux qui voient en vous de simples consommateurs sur un
marché offrants de multiples possibilités, où le choix en lui-même devient
le bien, la nouveauté se fait passer pour beauté, l’expérience subjective
remplace la vérité.
Le Christ offre davantage ! Bien plus, il offre tout ! Seulement Lui, qui
est la Vérité, peut être le chemin et donc aussi la Vie. Ainsi, le « chemin
», que les Apôtres portèrent jusqu’aux extrêmes limites de la terre, est la
vie en Christ. C’est la vie de l’Église. Et l’entrée dans cette vie, dans la
vie chrétienne, se fait par le Baptême. [...]
Beaucoup prétendent aujourd’hui que Dieu doit être laissé de côté et que la
religion et la foi, acceptables sur le plan individuel, doivent être, ou
exclues de la vie publique, ou utilisées uniquement pour poursuivre des
objectifs pragmatiques limités. Cette vision sécularisée tente d’expliquer
la vie humaine et de modeler la société en se référant peu ou sans se
référer du tout au Créateur. Il est présenté comme une force neutre,
impartiale et respectueuse de chacun. En réalité, comme toute idéologie, le
sécularisme impose une vision globale. Si la présence de Dieu est
insignifiante dans la vie publique, alors la société pourra être modelée
d’après une image dépourvue de Dieu. Mais quand Dieu est éclipsé, notre
capacité de reconnaître l’ordre naturel, le but et le « bien » commence à
s’évanouir. [...]
Et que dire de notre milieu social ? [...] Savons-nous reconnaître que la
dignité innée de tout individu s’appuie sur son identité la plus profonde,
étant image du Créateur, et que, par conséquent, les droits humains sont
universels et se basent sur la loi naturelle, et qu’ils ne dépendent ni des
négociations ni de la condescendance, et bien moins encore des compromis ?
C’est ainsi que nous sommes amenés à réfléchir sur la place qu’occupent dans
nos sociétés les indigents, les personnes âgées, les immigrés, les
sans-voix. Comment se fait-il que la violence domestique tourmenter tant de
mères et d’enfants ? Comment se fait-il que l’espace humain, le plus beau et
le plus sacré qu’est le sein maternel, soit devenu un lieu de violence
indicible ?
Chers amis, la création de Dieu est unique et elle est bonne. Les
préoccupations au sujet de la non-violence, du développement durable, de la
justice et de la paix, de la protection de notre environnement sont d’une
importance vitale pour l’humanité. Tout cela, cependant, ne peut être
compris sans une profonde réflexion sur la dignité innée de toute vie
humaine, de la conception jusqu’à la mort naturelle, dignité qui est
conférée par Dieu lui-même et qui est, par conséquent, inviolable.
2. Le “point critique“ qu’a atteint le mouvement œcuménique
Extrait du
Discours aux représentants des autres confessions chrétiennes,
Sydney, Crypte de la Saint Mary's Cathedral, vendredi 18 juillet 2008
Chers amis dans le Christ, je pense que vous serez d’accord pour constater
que le mouvement œcuménique est parvenu à un point critique. Pour
progresser, nous devons sans cesse demander à Dieu de renouveler nos esprits
par la grâce de l’Esprit Saint (cf. Rm 12, 2), qui nous parle à travers les
Écritures et nous conduit à la vérité tout entière (cf. 2 P 1, 20-21 ; Jn
16, 13). Nous devons nous garder de la tentation de considérer la doctrine
comme une cause de division et, par conséquent, comme un empêchement à ce
qui semble être la tâche immédiate la plus urgente pour améliorer le monde
dans lequel nous vivons. En réalité, l’histoire de l’Église démontre que la
"praxis" non seulement est inséparable de la "didaché", ou enseignement,
mais qu’elle en découle au contraire.
3. Jésus seul est l’Alpha et l’Oméga
Extrait du
Discours aux représentants des autres religions, Sydney, Salle
capitulaire de la Saint Mary’s Cathedral, vendredi 18 juillet 2008
Chers amis, [...] l’Église aborde le dialogue avec les autres religions
convaincue que la véritable source de la liberté se trouve en la personne de
Jésus de Nazareth. Les chrétiens croient que c’est Lui qui nous révèle
pleinement les potentialités humaines en ce qui concerne la vertu et le
bien, et que c’est Lui qui nous libère du péché et des ténèbres.
L’universalité de l’expérience humaine, qui dépasse toutes les frontières
géographiques et toutes les limites culturelles, permet aux disciples des
religions de s’engager dans le dialogue afin d’affronter le mystère des
joies et des souffrances de la vie. À cet égard, l’Église cherche ardemment
toutes les occasions pour se mettre à l’écoute des expériences spirituelles
des autres religions. Nous pourrions affirmer que toutes les religions
cherchent à pénétrer le sens profond de l’existence humaine en le ramenant à
une origine ou principe extérieur à elle. Les religions offrent une
tentative de compréhension du cosmos comme provenant de cette origine ou
principe et y retournant. Les chrétiens croient que Dieu a révélé cette
origine et principe en Jésus, que la Bible définit comme l’« Alfa et Omega »
(cf. Ap 1, 8 ; 22, 1).
4. Soyez des "signes de contradiction" dans le monde
Extrait de l’Homélie prononcée au cours de la messe avec les évêques, les
prêtres, les séminaristes et les novices, Sydney, Saint Mary's Cathedral,
samedi 19 juillet 2008
Chers frères et sœurs, [...] dans la liturgie de ce jour, l’Église nous
rappelle que, comme cet autel, nous avons nous aussi été consacrés, mis « à
part » pour le service de Dieu et la construction de son règne. Trop
souvent, cependant, nous nous retrouvons immergés dans un monde qui voudrait
mettre Dieu « de côté ». Au nom de la liberté et de l’autonomie humaine, le
nom de Dieu est mis sous silence, la religion est réduite à une dévotion
personnelle et la foi est écartée de la place publique. Parfois, une
mentalité de ce genre, totalement opposée à l’essence de l’Évangile, peut
même en venir à obscurcir notre compréhension de l’Église et de sa mission.
Nous aussi, nous pouvons être tentés de réduire la vie de foi à une simple
question de sentiment, affaiblissant ainsi sa capacité d’inspirer une vision
cohérente du monde et du dialogue rigoureux avec les nombreuses autres
visions qui concourent pour gagner à elles les esprits et les cœurs de nos
contemporains. [...]
Je désire ici [...] évoquer la honte que nous avons tous éprouvée à la suite
des abus sexuels commis sur des mineurs par quelques prêtres et religieux de
ce pays. Je suis vraiment profondément désolé pour la douleur et la
souffrance que les victimes ont supportées et je les assure qu’en tant que
Pasteur je partage leur souffrance. Ces méfaits qui constituent une trahison
grave de la confiance doivent être condamnés sans équivoque. Ils ont causé
de grandes souffrances et ont porté porter préjudice au témoignage de
l’Église. Je demande à chacun de vous de soutenir et d’assister vos Évêques
et de collaborer avec eux pour combattre ce mal. Les victimes doivent
recevoir compassion et soin et les responsables de ces maux doivent
comparaître devant la justice. [...]
Je désire m’adresser maintenant aux séminaristes et aux jeunes religieux qui
sont parmi nous pour leur manifester mon affection et mes encouragements.
[...] Faites de la célébration quotidienne de l’Eucharistie le centre de
votre vie. À chaque messe, quand le Corps et le Sang du Seigneur sont élevés
au terme de la prière eucharistique, élevez votre cœur et votre vie dans le
Christ, avec Lui et par Lui, dans l’unité de l’Esprit Saint, comme un
sacrifice agréable à Dieu notre Père.
Ainsi, chers jeunes, séminaristes et religieux, deviendrez-vous vous-mêmes
des autels vivants, sur lesquels le sacrifice d’amour du Christ sera rendu
présent comme un modèle et une source de nourriture spirituelle pour tous
ceux que vous rencontrerez. En répondant à l’appel du Seigneur à le suivre
dans la chasteté, la pauvreté et l’obéissance, vous avez entrepris, en tant
que disciples, une démarche radicale qui fera de vous des « signes de
contradiction » (cf. Lc 2, 34) pour beaucoup de vos contemporains. Modelez
quotidiennement votre vie sur la libre offrande pleine d’amour du Seigneur,
en obéissance à la volonté du Père. De cette façon, vous découvrirez la
liberté et la joie qui peuvent attirer les autres à cet Amour qui est
au-dessus de tout autre amour comme sa source et son accomplissement ultime.
N’oubliez jamais que la chasteté pour le Royaume signifie embrasser une vie
entièrement dédiée à aimer. Aimer vous rend capables de vous consacrer sans
réserve au service de Dieu pour être pleinement présents à vos frères et à
vos sœurs, spécialement à ceux qui sont dans le besoin.
5. L’Esprit Saint, l’"Oublié" de la Sainte Trinité
Extrait du
discours aux jeunes lors de la veillée nocturne, Sydney,
Hippodrome de Randwick, samedi 19 juillet 2008
Très chers jeunes, [...] l’unité et la réconciliation ne peuvent être
atteintes par nos seuls efforts. Dieu nous a fait l’un pour l’autre
(cf. Gn
2, 24) et nous ne pouvons trouver qu’en Dieu et que dans l’Église l’unité
que nous cherchons. Cependant, face aux imperfections et aux désillusions
aussi bien individuelles qu’institutionnelles, nous sommes parfois tentés de
construire une communauté « parfaite ». Ce n’est pas là une tentation
nouvelle. L’histoire de l’Église contient de multiples exemples de
tentatives pour contourner et dépasser les faiblesses et les échecs humains
pour créer une unité parfaite, une utopie spirituelle.
De telles tentatives pour bâtir l’unité, en fait, la minent ! Séparer
l’Esprit Saint du Christ présent dans la structure institutionnelle de
l’Église compromettrait l’unité de la communauté chrétienne, qui est
précisément un don de l’Esprit ! Cela trahirait la nature de l’Église en
tant que Temple vivant de l’Esprit Saint (cf. 1 Co 3, 16).
C’est l’Esprit, en fait, qui guide l’Église sur le chemin de la pleine
vérité et en assure l’unité dans la communion et le service
(cf. Lumen
Gentium, 4).
Malheureusement, la tentation d’« aller de l’avant tout seul » persiste.
Certains parlent de leur communauté locale comme d’une réalité séparée de la
soi-disant Église institutionnelle, décrivant la première comme souple et
ouverte à l’Esprit, et la seconde comme rigide et privée de l’Esprit. [...]
Il y a des moments dans lesquels nous pouvons être tentés de rechercher la
félicité loin de Dieu. Jésus lui-même demande aux Douze : « Voulez-vous
partir, vous aussi ? » (Jn 6, 67). Un tel éloignement offre peut-être
l’illusion de la liberté. Mais où nous conduit-il ? Vers qui pouvons-nous
aller ? Dans nos cœurs, nous savons, en fait, que seul le Seigneur a « les
paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 67-69). S’éloigner de lui n’est qu’une
tentative inutile de nous fuir nous-mêmes (cf. Saint Augustin, Les
Confessions VIII, 7). Dieu est avec nous dans la réalité de la vie et non
dans notre imaginaire ! Affronter la réalité, et non la fuir, c’est ce que
nous voulons ! Pour cela, l’Esprit Saint avec délicatesse, mais aussi avec
fermeté, nous attire vers ce qui est réel, vers ce qui est durable, vers ce
qui est vrai. C’est l’Esprit qui nous ramène à la communion avec la Sainte
Trinité.
L’Esprit Saint a été, de quelque manière, l’oublié de la Sainte Trinité. Une
claire compréhension de sa Personne semble presque hors de notre portée. Et
cependant quand j’étais encore un petit garçon, mes parents, comme les
vôtres, m’ont enseigné le signe de la Croix. J’ai ainsi très tôt compris
qu’il y a un Dieu en trois Personnes et que la Trinité est au centre de la
foi et de la vie chrétienne. Quand j’ai cru au point d’avoir une certaine
compréhension de Dieu le Père et de Dieu le Fils – leurs noms parlaient déjà
d’eux-mêmes –, ma compréhension de la troisième Personne de la Trinité
restait faible. C’est pourquoi, comme jeune prêtre chargé d’enseigner la
théologie, j’ai décidé d’étudier les grands témoins de l’Esprit dans
l’histoire de l’Église. C’est en parcourant cet itinéraire que je me suis
retrouvé à lire, entre autres, le grand saint Augustin.
Sa compréhension de l’Esprit Saint se développa de manière graduelle ; elle
fut un combat. Jeune, il avait embrassé le Manichéisme – l’une de ses
tentatives, dont j’ai parlé il y a un instant, de créer une utopie
spirituelle en séparant les réalités de l’esprit des réalités de la chair.
En conséquence, au début, il était méfiant à l’égard de l’enseignement
chrétien sur l’incarnation de Dieu. Et cependant, son expérience de l’amour
de Dieu présent dans l’Église le conduisit à en rechercher la source dans la
vie du Dieu Un et Trine. Ceci le porta à avoir trois intuitions
particulières sur l’Esprit Saint comme lien d’unité au sein de la Sainte
Trinité : unité comme communion, unité comme amour durable, unité comme don,
donné et reçu. Ces trois intuitions ne sont pas seulement théoriques. Elles
aident à expliquer comme l’Esprit agit. Dans un monde où aussi bien les
individus que les communautés souffrent souvent de l’absence d’unité et de
cohésion, de telles intuitions nous aident à demeurer en syntonie avec
l’Esprit et à étendre et à clarifier la nature de notre témoignage. [...]
Ce qui constitue notre foi ce n’est pas en premier lieu ce que nous faisons,
mais ce que nous recevons. En effet, il se peut que des personnes
généreuses, qui ne sont pas chrétiennes, fassent beaucoup plus que nous.
Amis, acceptez-vous d’être introduits dans la vie trinitaire de Dieu ?
Acceptez-vous d’être introduits dans sa communion d’amour ?
Les dons de l’Esprit qui agissent en nous, orientent et déterminent notre
témoignage. Orientés, de par leur nature, à l’unité, les dons de l’Esprit
nous lient encore plus étroitement à l’ensemble du Corps du Christ
(cf.
Lumen
Gentium, 4), en nous rendant davantage capables d’édifier l’Église,
pour servir ainsi le monde (cf. Ep 4, 13). Ils
nous appellent à participer activement et joyeusement à la vie de l’Église
[...]. Oui, l’Église doit grandir dans l’unité, elle doit s’affermir dans la
sainteté, se rajeunir et se renouveler constamment (cf.
Lumen
Gentium, 4). Mais suivant quels
critères ? Ceux de l’Esprit Saint ! Adressez-vous à lui, chers jeunes, et
vous découvrirez la signification véritable du renouvellement.
6. Une “nouvelle ère“ qui renouvellerait le monde et l’Eglise
Extrait de l’Homélie prononcée au cours de la messe avec les jeunes, Sydney,
hippodrome de Randwick, dimanche 20 juillet 2008
Chers amis, [...] « Vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit qui
viendra sur vous » (Ac 1, 8). Ces paroles du Seigneur ressuscité ont une
signification particulière pour les jeunes qui seront confirmés, marqués par
le don de l’Esprit Saint, au cours de cette Messe. Mais ces paroles sont
aussi adressées à chacun d’entre nous, à tous ceux qui ont reçu de l’Esprit
le don de la réconciliation et de la vie nouvelle au Baptême, qui l’ont
accueilli dans leurs cœurs comme leur soutien et leur guide à la
Confirmation et qui, chaque jour, grandissent dans ses dons de grâce par la
Sainte Eucharistie. En effet, à chaque Messe, l’Esprit Saint, invoqué par la
prière solennelle de l’Église, descend de nouveau non seulement pour
transformer nos offrandes, le pain et le vin, dans le Corps et le Sang du
Seigneur, mais aussi pour transformer nos vies, pour faire de nous, par sa
puissance, « un seul corps et un seul esprit dans le Christ ».
Mais quel est donc ce « pouvoir » de l’Esprit Saint ? C’est le pouvoir de la
vie Dieu ! C’est le pouvoir de l’Esprit lui-même qui se répandit sur les
eaux à l’aube de la création et qui, dans la plénitude des temps, releva
Jésus de la mort. C’est le pouvoir qui nous conduit nous et le monde vers
l’avènement du Royaume de Dieu. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, Jésus annonce
qu’une nouvelle ère a commencé, dans laquelle l’Esprit Saint sera répandu
sur l’humanité entière (cf. Lc 4, 21). Jésus lui-même, conçu de l’Esprit
Saint et né de la Vierge Marie, est venu parmi nous pour nous donner cet
Esprit. Comme source de notre vie nouvelle dans le Christ, l’Esprit Saint
est aussi, d’une manière très réelle, l’âme de l’Église, l’amour qui nous
lie au Seigneur et entre nous et la lumière qui ouvre nos yeux pour voir les
merveilles de la grâce de Dieu autour de nous. [...]
Cette force, la grâce le l’Esprit, n’est pas quelque chose que nous pouvons
mériter ou acquérir, mais nous pouvons seulement la recevoir comme un don.
L’amour de Dieu peut répandre sa puissance uniquement quand nous lui
permettons de nous transformer intérieurement. Nous devons lui permettre de
traverser dans la dure carapace de notre indifférence, de notre lassitude
spirituelle, de notre conformisme aveugle à l’esprit de notre temps. Alors
seulement nous pouvons lui permettre d’enflammer notre imagination et de
façonner nos désirs les plus profonds. Voilà pourquoi la prière est si
importante : la prière quotidienne, la prière personnelle, dans le silence
de notre cœur et devant le Saint Sacrement ainsi que la prière liturgique en
Église. Elle est réceptivité pure de la grâce de Dieu, amour en acte,
communion avec l’Esprit qui demeure en nous et nous conduit, à travers
Jésus, dans l’Église, à notre Père céleste. Par la puissance de son Esprit,
Jésus est toujours présent en nous, attendant tranquillement que nous nous
mettions en silence à côté de Lui pour écouter sa voix, demeurer dans son
amour et recevoir la « force qui vient d’en-haut », force qui nous rend
capables d’être sel et lumière pour notre monde. [...]
La puissance de l’Esprit Saint ne nous éclaire ni ne nous console seulement.
Elle nous oriente aussi vers l’avenir, vers l’avènement du Royaume de Dieu.
Quelle magnifique vision d’une humanité rachetée et renouvelée
entrevoyons-nous dans la nouvelle ère promise par l’Évangile d’aujourd’hui !
Saint Luc nous dit que Jésus Christ est la réalisation de toutes les
promesses de Dieu, le Messie qui possède en plénitude l’Esprit Saint pour le
communiquer à l’humanité tout entière. L’effusion de l’Esprit du Christ sur
l’humanité est un gage d’espérance et de libération vis-à-vis de tout ce qui
nous appauvrit. Elle redonne la vue à l’aveugle, elle libère les opprimés,
et crée l’unité dans et à travers la diversité (cf. Lc 4, 18-19 ; Is 61,
1-2). Cette force peut créer un monde nouveau : elle peut « renouveler la
face de la terre » (cf. Ps 104, 30) !
Fortifiée par l’Esprit et s’inspirant d’une riche vision de foi, une
nouvelle génération de chrétiens est appelée à contribuer à l’édification
d’un monde où la vie est accueillie, respectée et aimée, non rejetée ou
ressentie comme une menace et par conséquent détruite. Une nouvelle ère où
l’amour n’est pas avide et égoïste, mais pur, fidèle et sincèrement libre,
ouvert aux autres, respectueux de leur dignité, cherchant leur bien et
rayonnant la joie et la beauté. Une nouvelle ère où l’espérance nous libère
de la superficialité, de l’apathie et de l’égoïsme qui mortifient nos âmes
et enveniment les relations humaines. Chers jeunes amis, le Seigneur vous
demande d’être des prophètes de cette nouvelle ère, des messagers de son
amour, capables d’attirer les personnes au Père et de bâtir un avenir plein
d’espérance pour toute l’humanité.
Le monde a besoin de ce renouvellement ! Dans nombre de nos sociétés, à côté
de la prospérité matérielle, le désert spirituel s’étend : un vide
intérieur, une crainte indéfinissable, un sentiment caché de désespoir.
Combien de nos contemporains se sont creusés des citernes fissurées et vides
(cf. Jr 2, 13) en cherchant désespérément le sens, la signification ultime
que seul l’amour peut donner ? C’est là le don immense et libérateur que
l’Évangile apporte : il nous révèle notre dignité d’hommes et de femmes
créés à l’image et à la ressemblance de Dieu. Il nous révèle la sublime
vocation de l’humanité qui est de trouver sa propre plénitude dans l’amour.
Il renferme la vérité sur l’homme, la vérité sur la vie.
L’Église a aussi besoin de ce renouvellement ! Elle a besoin de votre foi,
de votre idéalisme et de votre générosité, afin d’être toujours jeune dans
l’Esprit (cf.
Lumen
Gentium, 4). Dans la deuxième Lecture d’aujourd’hui,
l’Apôtre Paul nous rappelle que chaque chrétien a reçu un don qui doit être
utilisé pour l’édification du Corps du Christ.
7. Ce “oui“ qui change l’histoire
Extrait de l’Angélus qui a suivi la messe avec les jeunes, Sydney,
Hippodrome de Randwick, dimanche 20 juillet 2008
Chers jeunes, [...] dans l’Ancien Testament, Dieu s’était révélé de façon
partielle et de manière graduelle, comme nous le faisons tous dans nos
relations personnelles. Il fallait un certain temps au peuple élu pour
approfondir sa relation avec Dieu. L’Alliance avec Israël a été comme un
temps de séduction, de longues fiançailles. Le moment définitif arriva donc,
le moment du mariage, la réalisation de la nouvelle et éternelle alliance. À
ce moment-là, devant le Seigneur, Marie représente toute l’humanité. Dans le
message de l’ange, c’était Dieu qui faisait une proposition de mariage avec
l’humanité. Et, en notre nom, Marie dit son « oui ».
Dans les fables, les récits s’achèvent ainsi : et tous « vécurent alors
heureux et contents ». Dans la vie réelle, ce n’est pas aussi facile. Marie
dut faire face à de nombreuses difficultés pour affronter les conséquences
de ce « oui » dit au Seigneur. Syméon prophétisa qu’une épée lui
transpercerait le cœur. Lorsque Jésus eut douze ans, elle connut les pires
cauchemars que tout parent éprouve quand, pendant trois jours, elle dut
affronter la disparition de son Fils. Et après l’activité publique de Jésus,
elle souffrit l’agonie, étant présente à sa crucifixion et à sa mort. Dans
ses différentes épreuves, elle resta toujours fidèle à sa promesse, soutenue
par l’Esprit de force. Et elle en fut récompensée par la gloire.
Chers jeunes, nous aussi nous devons rester fidèles au « oui » par lequel
nous avons accueilli l’offre d’amitié que le Seigneur nous a faite. Nous
savons qu’Il ne nous abandonnera jamais. Nous avons qu’Il nous soutiendra
toujours par les dons de l’Esprit. Marie a accueilli la « proposition » du
Seigneur en notre nom. [...] Marie nous inspire, elle est notre modèle. Elle
intercède pour nous auprès de son Fils et, avec son amour maternel, elle
nous protège des dangers.
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Sources : La chiesa.it
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 22.07.2008 -
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