Benoît XVI : la succession
apostolique et le Verbe |
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Le 18 Juin 2008 -
(E.S.M.) - Peut-on considérer la succession
et la Parole comme antinomiques ? Oui, indubitablement, affirme Benoît XVI, mais uniquement si
l'on entend exclusivement par « Parole » la Parole écrite, le Livre.
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Sacre de saint
Germain -
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Benoît XVI : la succession apostolique et le Verbe
LA PAROLE DE DIEU
Rubrique : Théologie
Primauté, épiscopat et succession apostolique
1ère partie ►
Le papisme
2ème partie ►
"Tradition" et "succession", furent
originellement très proches
(suite)
II s'avère ainsique la « tradition apostolique » et la «succession
apostolique» se définissent mutuellement. La succession est la forme que
prend la tradition, tandis que la tradition est l'élément constitutif de la
succession. Cette relation recèle dans le même temps la justification des
deux principes, qui n'en sont qu'un - le principe décisif, par lequel le
christianisme catholique (grec ou romain) s'élève au-dessus de cet
entendement chrétien de soi qui renonce à l'attribut « catholicus » et ne
daigne accepter comme seul qualificatif que l'Évangile (Ce ne serait donc ici pas le lieu le moins approprié pour décider si ou
dans quelle mesure une Église (par exemple l'anglicane) est à rapprocher de
l'expression catholique de la foi chrétienne). Car la
subordination de la seule Écriture à la Parole vivante de la proclamation
[évangélique]
est néotestamentaire par excellence, et les théologiens chrétiens qui, dans
leur confrontation à la gnose, ont fait l'exégèse de la conscience de soi de
leur Église dans le sens décrit, ont ainsi jeté les bases d'une communauté
qui, dans ce noyau essentiel de sa conscience d'elle-même, coïncidait encore
entièrement avec cette conscience que reflètent les écrits du Nouveau
Testament. La signification de ce que nous avons dit jusque-là devient
évidente si nous la mettons en relation avec les propos suivants d'Oskar
Cullmann, que l'on peut considérer comme une formulation classique de la
pensée réformatrice. En ce qui concerne le concept de succession : « Dans le
seul
texte néotestamentaire qui mentionne explicitement la relation des apôtres à
l'Église qui leur a succédé, le passage déjà mentionné de la prière du
grand-prêtre, Jn 17, 20, la perpétuation des actes apostoliques n'est
justement pas liée au principe de succession, mais à la
Parole des apôtres
"ceux qui croient grâce à leur parole" »
(Saint Pierre. Disciple-apôtre-martyr, Zurich, 1952, p. 248-249. À
rapprocher des opinions de Karl Barth sur le problème de la succession, dans
Kirchliche Dogmatik I, 1, Zurich, 1947, p. 97-101. Sur le point de vue de
l'Église évangélique luthérienne unifiée d'Allemagne, cf. sa « Déclaration
au sujet de la succession apostolique » dans le bulletin d'information de la
EELUA [VELDK] 1958, p. 4-13; instructif également P. Brunner, De la fonction
de l'évêque, Berlin, 1955; du même auteur, art. « Évêque IV » dans LThK II_
505-506)
Peut-on considérer la succession
et la Parole comme antinomiques ? Oui, indubitablement, mais uniquement si
l'on entend exclusivement par « Parole » la Parole écrite, le Livre. Mais
peut-on vraiment accepter que le Nouveau Testament aurait, là où il parle du
Verbe, de la Parole, voulu entendre un livre ? De fait, les générations
suivantes viennent à la foi par le Verbe -, cependant, du point de vue de la
Bible, non pas comme lecteurs, mais comme
auditeurs de celui-ci. Comment ne
pas se rappeler dans ce contexte ces magnifiques versets de saint Paul ? «
Mais comment l'invoquer sans d'abord croire en lui ? Et comment croire sans
d'abord l'entendre ? Et comment entendre sans prédicateur ? Et comment prêcher
sans être d'abord envoyé ? selon le mot de l'Écriture: "qu'ils sont beaux les
pieds des messagers de bonnes
nouvelles" » (Rm 10, 14-15). (ndlr
: Ces paroles ont été admirablement développées dans un discours que le pape
Benoît XVI a prononcés à
l'Université catholique d'Amérique à Washington)
Du point de vue du Nouveau Testament, le Verbe
est donc une parole entendue, donc une Parole proclamée et non une Parole
lue. Cela signifie que si la véritable successio apostolica est liée à la
Parole, elle ne peut donc pas être liée à un livre; elle doit plutôt, en
tant que successio verbi, être une
successio praedicantium, qui à son tour
ne peut exister sans « envoi en mission », autrement dit, souligne Benoît
XVI, sans une continuité
personnelle remontant aux apôtres. C'est justement au nom du Verbe - qui,
dans la Nouvelle Alliance, ne doit pas être lettre morte mais une
viva vox -
qu'une viva successio est requise. Dans cette mesure, la théologie
néotestamentaire du Verbe et de l'Écriture livre finalement une confirmation
encore plus profonde du concept de succession formulé par la première
théologie antignostique, à savoir la prise de conscience de plus en plus
répandue que le rite, reçu du judaïsme, de l'accomplissement de l'office par
l'imposition des mains doit remonter aux débuts juifs de la chrétienté
(Cf. E. LOHSE, L'Ordination dans le judaïsme tardif et dans le Nouveau
Testament, Gôttingen, 1951 ; O. LINTON, « Église et office dans le Nouveau
Testament », dans Ein Buch von der Kirche, Aulen, Fridrichsen et alii,
Gôttingen, 1951, p. 110-144; A. VOLKMANN, « Réflexions évangé-liques
catholiques à propos de la successio apostolica », dans Una Sancta 10 (1955)
42-54 ;W. RICHTER, « La Succession apostolique et l'Église évangélique
luthérienne unifiée d'Allemagne, ibid. 14 (1959) 48-54. Ces deux derniers
théologiens évangéliques proposent - en tout cas dans la lignée de Lohse -
des visions fortement catholicisantes de la successio apostolica. Pour
l'objection à Cullmann, voir O. KARRER, Pour l'unité des chrétiens,
Francfort, 1953, p. 166 et suiv).
Ce
n'est en effet et précisément qu'à travers une telle conception du
don du Verbe fait à l'Église que l'homme peut, de façon répétée et le plus
sérieusement possible, se retrouver en situation d'être « auditeur de la
Parole », un auditeur qui lui-même n'a pas de pouvoir sur la Parole, mais
qui se tient dans cette position de réception pure que l'on appelle « foi
» (Cf. R. Guardini, « Le Christianisme évangélique du point de vue
catholique actuel », dans Una Sancta 13 (1958) 225-233). Et une telle « foi » est arrachée à tout rétrécissement individualiste,
car l'« audition » la tourne sans cesse vers le Tu, cette vaste communauté
des croyants appelés à devenir « un seul » dans le Christ (Ga 3, 28).
En résumé, conclut Benoît XVI, nous pouvons dire que dans un premier temps, l'Église n'oppose
pas à l'idée gnostique de l'existence de traditions occultes et non écrites
l'Écriture, mais le principe de succession. La « succession apostolique »
est, dans sa nature même, la présence vivante du Verbe sous la forme
personnelle du témoin. La continuité ininterrompue des témoins résulte de la
nature du Verbe en tant que auctoritas et viva vox.
à suivre :
Relation et différence entre
successio papalis et successio episcopalis
Source :
La Parole de Dieu, cardinal
Ratzinger/Benoît XVI -
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 18.06.08 -
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