Jean-Paul II : la signification de
l'absence de la honte à l'origine |
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Le 16 novembre 2008 -
(E.S.M.)
- Qu'est-ce que la honte et comment en expliquer l'absence dans l'état
d'innocence originelle, dans la profondeur même du mystère de la
création de l'homme, homme et femme ?
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La
création d’Adam : le visage d’Adam 1510. Chapelle Sixtine
Jean-Paul II : la signification de
l'absence de la honte à l'origine
SIGNIFICATION DE LA PUDEUR
Pages précédentes :
►
Réflexions sur l'origine de la famille (1)
►
La frontière qui sépare l'innocence primitive de l'homme du péché
originel (2)
►
L'arbre de la connaissance du bien et du mal
(3)
►
Le sens de la solitude de l'homme à l'origine
(4)
►
L'homme prend conscience d'être une personne
(5)
►
Alternative entre la mort et l'immortalité
(6)
►
L'unité originelle de l'homme et de la femme
(7)
►
Par la communion des personnes l'homme devient image de Dieu
(8)
►
La procréation s'enracine dans la création (9)
►
L'homme et la femme font leurs premières découvertes (10)
Le 16 novembre 2008 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
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Les études contemporaines sur la honte — notamment sur la pudeur
sexuelle — mettent en évidence la complexité de l'expérience
fondamentale par laquelle l'homme s'exprime en tant que personne selon
sa structure propre. Dans l'expérience de la pudeur, l'être humain
éprouve la crainte du second je (la femme
devant l'homme par exemple) qui est en
substance crainte de son je à lui. Par la pudeur, l'être humain éprouve
quasi instinctivement le besoin d'affirmer et d'accepter à sa juste
valeur ce je et il l'éprouve aussi bien à l'intérieur de lui-même qu'à
l'extérieur, c'est-à-dire vis-à-vis de l’autre.
On peut donc dire que la pudeur est une expérience complexe parce que
tout en éloignant deux êtres humains l'un de l'autre
(la femme de l'homme), elle tente en même
temps de les rapprocher à un niveau convenable. C'est pour cette même
raison que la pudeur revêt une signification fondamentale quant à la
formation de l’ethos dans la coexistence humaine et notamment dans le
rapport homme-femme. L'analyse de la pudeur,
montre clairement qu'elle exprime les règles essentielles de la
communion des personnes et qu'elle touche de très près la dimension de
la solitude originelle de l'homme.
Mais ce qu'il nous faut savoir maintenant, c'est
la signification de l'absence de la honte à l'origine : Ils
étaient nus et n'avaient pas honte l'un devant l'autre
(Gn 2, 25)
Il faut commencer par préciser qu'il s'agit d'une véritable non-présence
de la honte et non pas d'une carence ou d'un sous-développement Nous ne
pouvons en aucun cas donner à cela une signification primitive. Par
conséquent, le verset 25 du IIe chapitre de la Genèse dit non seulement
qu'il ne faut pas penser à une absence de la honte, donc à un manque de
pudeur, mais il dit aussi qu'il ne faut pas l'expliquer par analogie
avec d'autres expériences humaines positives comme celles de l'enfance
ou de peuples primitifs. De tels rapprochements sont non seulement
insuffisants, mais ils risquent aussi d'être décevants. Les paroles du
verset 25 du IIe chapitre de la Genèse : Ils n'avaient pas honte, ne
veulent pas dire qu'il y a absence de honte ; elles manifestent, au
contraire, une prise de conscience totale, une plénitude d'expérience,
une compréhension parfaite de la signification du corps due au fait
qu'ils étaient nus. C'est ainsi qu'il faut comprendre et interpréter ce
texte ; et la suite du récit yahviste en témoigne lorsqu'il fait le lien
entre l'apparition de la honte et notamment de la pudeur sexuelle et
la perte de la plénitude originelle. Par
conséquent, en considérant l'expérience de la pudeur comme une
expérience liminale, il faut nous demander à quelle plénitude de
conscience, d'expérience et de compréhension de la signification du
corps correspond le sens de la nudité originelle dont parle le verset 25
du IIe chapitre de la Genèse.
La connaissance
Et pour répondre à la question, il ne faut pas perdre de vue l'analyse
effectuée jusqu'ici de l'ensemble du texte yahviste où la solitude
originelle de l'homme apparaît comme une non identification de sa nature
humaine avec le monde des êtres vivants
(animalia) qui l'entourent. A la
suite de la création de l'homme, homme et femme, cette
non-identification fait découvrir à l'homme, grâce à l'existence de
l'autre être humain, sa nature humaine. Ainsi l'homme découvre et
connaît sa nature humaine avec l'aide de la femme
(Gn 2, 25). Cet acte lui permet
de percevoir le monde directement par son corps
(elle est la chair de ma chair).
Il est la source directe et visible de l'expérience de l'unité dans
l'humanité. Il est donc facile de comprendre que la nudité est liée à la
prise de conscience totale de la signification du corps qui vient de la
perception des sens. On peut penser cette plénitude de conscience en
termes de catégories de vérité de l'être ou de la réalité et on peut
dire, qu'à l'origine,
l'homme et la femme appartenaient l'un à l'autre
précisément en vertu de cette vérité : Ils étaient nus. Et
lorsqu'on analyse le sens de la nudité, on ne peut faire abstraction de
cette dimension. La participation à la perception du monde — perception
extérieure — est quelque chose de direct, de spontané, d'antérieur à
toute complication critique de la connaissance et de l'expérience
humaine. On pourrait déjà percevoir par là l’innocence originelle de la
connaissance.
Commune union
Cependant, il est impossible de saisir le sens de la nudité originelle,
en ne considérant que la participation de l'homme à la perception
extérieure du monde ; pour ce faire, il faut aller au plus profond de
l'homme : le verset 25 du IIe chapitre de la Genèse nous y conduit pour
que nous y cherchions l'innocence originelle de la
connaissance. C'est en effet en partant de l’intériorité humaine
qu'il faut expliquer et mesurer cette plénitude particulière de cette
communication interpersonnelle qui fait que : homme et femme, ils
étaient nus et n'avaient pas honte l'un devant l'autre.
Notre langage conventionnel a quelque peu ôté au concept de
communication sa signification originelle profonde. Le terme de
communication est aujourd'hui rattaché aux moyens d'échange, d'entente
et de rapprochement. Or, dans son sens originel, le mot communion
s'appliquait et s'applique à des sujets qui communiquent, précisément en
vertu de la commune union qui existe entre eux ; des sujets qui
communiquent entre eux soit pour atteindre, soit pour exprimer une
réalité qui n'est propre qu'au domaine des personnes. Le corps humain
acquiert ainsi une signification complètement nouvelle qui ne peut être
placée sur le même plan que la perception extérieure du monde. En effet,
il exprime la réalité ontologique et existentielle de la personne, ce
qui est bien plus que l'individu ; il exprime le je humain, personnel,
qui tire de l'intérieur sa perception extérieure.
La plénitude intérieure
Le récit biblique et notamment le texte yahviste, montre que, du fait
qu'il est visible, le corps manifeste l'homme et, en le manifestant, il
fait fonction d'intermédiaire, c'est-à-dire qu'il permet dès l'origine à
l'homme et à la femme de communiquer entre eux, selon cette communion
des personnes voulue par le Créateur précisément pour eux. Seule cette
dimension semble-t-il, nous permet de bien comprendre le sens de la
nudité originelle. Et, à ce propos, tout critère naturaliste est voué à
l'échec, tandis que le critère personnaliste peut beaucoup aider. Le
verset 25 du II° chapitre de la Genèse parle certainement de quelque
chose d'extraordinaire qui sort des limites de la pudeur connue à
travers l'expérience humaine et qui, en même temps décide de la
plénitude de la communication interpersonnelle enracinée au cœur même de
cette communio ainsi révélée et développée. Dans ce contexte, les
paroles : Ils n'avaient pas honte ne peuvent indiquer
(in sensu obligo) que la profondeur
originelle de ce qui est inhérent à la personne, de ce qui est
visiblement féminin et masculin et qui fait l'intimité personnelle de la
communication réciproque dans sa simplicité radicale et sa pureté. A
cette plénitude de perception « extérieure » exprimée par la nudité
physique, correspond la plénitude « intérieure » de la vision l'homme en
Dieu, c'est-à-dire à la mesure, de l'image de Dieu
(cf. Gn 1, 17). Et devant Dieu
l'homme est vraiment nu (ils étaient nus, Gn 2,
25) avant même de s'en apercevoir,
(Cf. Gn 3, 7, 10).
La Genèse
Récits des origines
1)
Premier récit de la création
2)
Deuxième récit de la création
3)
La chute
(Fin de la traduction : la suite de
cette série de réflexions du pape Jean-Paul II :
index_fr.htm,
en italien, lire à partir du 2 janvier et
suivants)
Sources : www.vatican.va
(Archives)
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(E.S.M.)
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
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16.11.2008 -
T/Famille
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