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Celui qui prie est poussé à l'isolement
confiait Benoît XVI
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Le 13 janvier 2023 -
(E.S.M.)
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Voici un texte faisant partie de ce chapitre que Benoit XVI a du
souvent méditer :
À
cause de sa vie conforme à la parole de Dieu, celui qui prie est
poussé à l'isolement ; la parole devient pour lui une source de
souffrance qui lui est causée par ceux qui l'entourent et le
haïssent. « Sauve-moi, ô Dieu, car les eaux me sont entrées jusqu'à
l'âme... c'est pour toi que je souffre l'insulte... le zèle de ta
maison me dévore... » (Ps
69,2.8.10).
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Benoît XVI au
mur des lamentations -
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Celui qui
prie est poussé à l'isolement confiait Benoît XV
Tome II
Avant-propos - Tome II
►
Benoît XVI
Premier chapitre - Entrée à Jérusalem et
purification du Temple (p. 15 à 36)
1. L'entrée à Jérusalem
►
Benoît XVI
2. Purification du Temple
►Benoît XVI
- Incessamment la suite des liens -
Le 13 janvier 2023 - E.
S. M. - La purification du
Temple
Marc nous raconte qu'après cet accueil, Jésus alla
dans le Temple, il regarda autour de lui et, comme il était déjà tard, il se
rendit à Béthanie, où il logeait durant cette semaine-là. Le jour suivant,
il entra de nouveau dans le Temple et il commença à chasser les vendeurs et
les acheteurs: « II culbuta les tables des changeurs et les sièges des
marchands de colombes » (Mc 11,15
Jésus justifie son action par une parole du prophète Isaïe qu'il complète
par une parole de Jérémie : « Ma maison sera
appelée une maison de prière pour toutes les nations.
Vous, vous en avez fait un repaire de brigands »
(Mc 11,17 ; cf. Is 56,7; Jr 7,11).
Qu'a fait là Jésus? Qu'est-ce qu'il voulait dire ?
Dans la littérature exégétique, sont repérables trois grandes lignes
d'interprétation, que nous devons brièvement considérer.
Il y a d'abord la thèse selon laquelle la purification du Temple ne
signifiait pas une attaque contre le Temple comme tel, mais touchait
seulement les abus. Certes, les commerçants étaient autorisés par l'autorité
juive qui en tirait un grand profit. En ce sens, l'activité des changeurs et
des commerçants en bétail était légitime selon les normes en vigueur; il
était aussi compréhensible que pour les monnaies romaines en usage,
lesquelles en raison de l'image de l'empereur devaient être considérées
idolâtriques, on pourvoie à leur échange en monnaie du Temple, justement
dans le vaste Parvis des Gentils et que là, on vende aussi les animaux à
sacrifier. Mais selon la disposition architecturale du Temple, cette
confusionentre Temple et
affaires ne correspondait pas à la destination du Parvis des Gentils.
Par son action Jésus attaquait l'ordre en vigueur établi par l'aristocratie
du Temple, mais il ne violait pas la Loi et les Prophètes - au contraire :
contre une pratique profondément
corrompue,
devenue « droit », il revendiquait le droit essentiel et vrai,
le droit divin d'Israël.
C'est seulement ainsi que s'explique pourquoi ni la police du Temple, ni la
cohorte romaine présente dans la forteresse Antonia ne sont intervenues. Les
autorités du Temple se limitèrent seulement à poser à Jésus la question
concernant son autorisation pour une telle action.
En ce sens est juste la thèse, motivée minutieusement surtout par Vittorio
Messori, selon laquelle dans la purification du Temple, Jésus agissait en
harmonie avec la Loi, empêchant un abus à l'égard du Temple. Si donc de cela
on voulait tirer la conclusion que Jésus « apparaît comme un simple
réformateur qui défend les préceptes juifs de sainteté »
(ainsi Eduard Schweizer, cité en Pesch, Markusevangelium II, p. 200),
on n'évaluerait pas bien le vrai sens de l'événement. Les paroles de Jésus
montrent que sa revendication allait plus loin, justement aussi parce que,
par son action, il entendait accomplir la Loi et les Prophètes.
Nous arrivons ainsi à une seconde explication, en opposition à la première -
l'interprétation politico-révolutionnaire de l'événement. Déjà au siècle des
Lumières, il y avait eu des tentatives de faire de Jésus un révolutionnaire
politique. Mais seule l'œuvre de Robert Eisler, lesous basileus ou
baslileusas, publiée en deux volumes
(Heidelberg, 1929/1930),
a cherché à démontrer de façon cohérente selon l'ensemble des données
néotestamentaires que « Jésus aurait été un révolutionnaire politique
d'empreinte apocalyptique : ayant suscité une insurrection à Jérusalem, il
aurait été arrêté et exécuté par les Romains » (ainsi Hengel, War Jésus Revolutionar ?, p. 7).
Le livre fit grande sensation, mais dans la situation particulière des
années trente, il n'exerça pas un effet durable.
C'est seulement dans les années soixante que se forma le climat spirituel et
politique dans lequel une telle vision pouvait développer une force
explosive. Ce fut le cas avec Samuel George Frederik Brandon qui, dans son
œuvre Jésus and the Zealots (New
York, 1967), donna à l'interprétation
de Jésus comme révolutionnaire politique une apparente légitimation
scientifique. Jésus était rangé, par conséquence, dans la ligne du mouvement
zélote, qui voyait son fondement biblique dans le prêtre Pinhas, un neveu
d'Aaron : Pinhas avait transpercé avec sa lance un Israélite qui s'était
engagé avec une femme idolâtre. Maintenant il était vu comme modèle des «
zélés » pour la Loi, pour le culte rendu uniquement à Dieu
(cf. Nb 25).
Le mouvement zélote reconnaît son origine concrète dans l'initiative du père
des frères Maccabées, Mattathias, lequel, face à la tentative de conformer
totalement Israël au modèle de la culture hellénistique, le privant aussi de
son identité religieuse, avait affirmé : « Nous n'écouterons pas les ordres
du roi. Nous ne dévierons pas de notre religion ni à droite ni à gauche »
(1 M 2,22).
Ces paroles enclenchèrent l'insurrection contre la dictature hellénistique.
Mattathias mit sa parole à exécution: il tua l'homme qui, suivant les
décrets des autorités hellénistiques, voulait publiquement sacrifier aux
idoles. « À cette vue, le zèle de Mattathias s'enflamma... il courut et
l'égorgea sur l'autel... il agissait par zèle pour la Loi »
(1 M 2,24s.).
Depuis lors, le mot « zèle » (en grec : zèlos) fut le mot qui servit à
exprimer la volonté de s'engager par la force en faveur de la foi d'Israël,
à défendre le droit et la liberté d'Israël au moyen de la violence.
Selon la thèse de Eisler et de Brandon, Jésus serait à placer dans cette
ligne du « zèlos » des zélotes - une thèse qui dans les années
soixante a suscité une vague de théologies de la révolution et de théologies
politiques. Comme preuve centrale de cette théorie, on allègue maintenant la
purification du Temple, qui aurait été évidemment un acte de violence, car
sans violence il n'aurait pas pu avoir lieu, même si les évangélistes
avaient cherché à le cacher. De même, le salut adressé à Jésus comme fils de
David et instaurateur du royaume davidique aurait été un acte politique et
la crucifixion de Jésus par les Romains sous l'accusation de « roi des juifs
» démontrerait pleinement qu'il était un révolutionnaire - un zélote - et
qu'il aurait été exécuté comme tel.
Depuis, la vague des théologies de la révolution qui, selon un Jésus
interprété comme zélote, avaient cherché à légitimer la violence comme moyen
pour instaurer un monde meilleur - le Royaume - s'est calmée. Les
conséquences terribles d'une violence motivée religieusement sont de façon
radicale devant nos yeux à tous. La violence
n'instaure pas le royaume de Dieu, le royaume de l'humanité.
C'est, au contraire, l'instrument préféré de
l'Antéchrist - même avec une motivation religieuse idéaliste. Elle ne sert
pas à l'humanité, mais à l'inhumanité.
Mais qu'en est-il de Jésus ? Était-il un zélote ? La purification du Temple
était-elle le commencement d'une révolution politique ? Toute l'activité et
le message de Jésus - à partir des tentations au désert, de son baptême au
Jourdain, du discours sur la montagne jusqu'à la parabole du Jugement
dernier (cf. Mt 25)
et à sa réponse à la
confession de Pierre - s'y opposent absolument, comme nous l'avons vu dans
la première partie de cette œuvre.
Non, la subversion violente, le meurtre des autres au nom de Dieu ne
correspondaient pas à sa façon d'être. Son « zèle » pour le royaume de Dieu
était tout à fait différent. Nous ne savons pas précisément ce
qu'imaginaient les pèlerins quand, à l'« intronisation » de Jésus, ils
parlaient du « Règne qui vient, de notre père David ». Mais ce que Jésus
lui-même pensait et entendait, il l'a rendu de manière très évidente par ses
gestes et par les paroles prophétiques, dans le contexte desquels il se
plaçait lui-même.
Certes, au temps de David, l'âne avait été l'expression de sa royauté et,
dans la suite de cette tradition, Zacharie présente le nouveau roi de la
paix qui monte un âne quand il entre dans la Ville sainte. Mais au temps de
Zacharie déjà, et encore plus au temps de Jésus, le cheval était devenu
l'expression du pouvoir et des puissants, alors que l'âne était l'animal des
pauvres et donc l'image d'une royauté bien différente.
Il est vrai que Zacharie annonce un royaume «
d'une mer à l'autre ». Mais justement,
il abandonne de la sorte le cadre national et indique
une universalité nouvelle, dans laquelle le monde trouve la paix de Dieu et,
dans l'adoration du Dieu unique, est uni au-delà de toutes les frontières.
Dans ce royaume dont parle le prophète, les arcs de la guerre sont brisés.
Ce qui chez lui est encore une vision mystérieuse, dont la configuration
concrète - en regardant de loin ce qui allait venir et qui ne pouvait pas
être perçu distinctement - s'éclaircit lentement dans l'action de Jésus;
toutefois, c'est seulement après la Résurrection, et dans l'avancée de
l'Évangile vers les païens, qu'elle peut prendre peu à peu sa propre forme.
Mais aussi au moment de l'entrée de Jésus à Jérusalem, le lien avec la
prophétie tardive, dans laquelle Jésus insérait son agir, donnait à son
geste une orientation qui s'opposait radicalement à l'interprétation zélote.
En Zacharie, Jésus n'avait pas trouvé seulement l'image du roi de la paix
qui arrive sur l'âne, mais aussi la vision du pasteur tué qui, par sa mort,
apporte le salut, et encore l'image du transpercé vers lequel tous auraient
dirigé leur regard. L'autre grand cadre de référence, dans lequel il voyait
son action, était la vision du serviteur de Dieu souffrant qui, en servant,
offre sa vie pour la multitude et ainsi, apporte le salut
(cf. Is 52,13-53,12).
Cette prophétie tardive est la clé d'interprétation avec laquelle Jésus
ouvre l'Ancien Testament ; à partir d'elle, lui-même devient, après Pâques,
la clé pour lire de façon nouvelle la Loi et les Prophètes.
Venons-en maintenant aux paroles interprétatives par lesquelles Jésus
lui-même explique le geste de la purification du Temple. Tenons-nous-en
surtout à Marc avec lequel Matthieu et Luc, abstraction faite de petites
variantes, coïncident. Après l'acte de la purification, Jésus, nous rapporte
Marc, « enseignait ». L'essentiel de cet « enseignement », l'évangéliste le
voit résumé dans la parole de Jésus: « N'est-il pas écrit: Ma maison sera
appelée une maison de prière pour toutes les nations ? Mais vous, vous en
avez fait un repaire de brigands! » (11,17).
Dans cette synthèse de la « doctrine » de Jésus sur le Temple - comme on l'a
déjà vu -, deux paroles prophétiques sont fusionnées ensemble.
Il y a avant tout la vision universaliste du prophète Isaïe
(56,7) d'un
avenir où, dans la Maison de Dieu, toutes les
nations adorent le Seigneur comme le Dieu unique.
Dans la structure du Temple, le très grand Parvis des Gentils, où la scène
se déroule, est l'espace ouvert, qui invite tout le monde à prier le Dieu
unique. L'action de Jésus souligne cette ouverture intérieure de l'attente
qui, dans la foi d'Israël, était vivante. Même si Jésus limite consciemment
son œuvre à Israël, il est toutefois toujours mû par la tendance
universaliste d'ouvrir Israël de façon à ce que tous puissent reconnaître
dans le Dieu de ce peuple le Dieu unique commun
à tout le monde. À la question de savoir ce que
Jésus a vraiment apporté aux hommes, dans la première partie, nous avons
répondu qu'il a apporté Dieu aux hommes
(cf. p. 63-64
Benoît XVI).
Selon ce qu'il dit, lors de la purification du Temple, il s'agit justement
de cette intention fondamentale: enlever ce qui est opposé à la commune
connaissance et adoration de Dieu - donc ouvrir
l'espace à l'adoration de tous.
Un petit événement rapporté par Jean à propos du « dimanche des Rameaux »
oriente dans la même direction. Toutefois, nous devons ici nous rappeler
que, selon Jean, la purification du Temple se déroula durant la
première Pâque de Jésus, au commencement de
son activité publique. Par contre, les Synoptiques - comme nous l'avons déjà
vu — parlent seulement d'une unique Pâque de Jésus et ainsi, la purification
du Temple tombe nécessairement au cours des derniers jours de toute son
activité. Alors que récemment encore, l'exégèse partait généralement de la
thèse selon laquelle la datation de saint Jean était « théologique » et non
exacte dans le sens biographique et chronologique, apparaissent aujourd'hui
toujours plus clairement les raisons en faveur d'une datation exacte aussi
du point de vue chronologique du quatrième évangéliste qui, malgré toute la
profondeur théologique du texte, se révèle, ici comme ailleurs, très
précisément informé sur les temps, les lieux et les déroulements. Mais nous
ne devons pas entrer ici dans cette discussion, en définitive secondaire.
Arrêtons-nous simplement à l'examen de ce petit événement qui, chez Jean,
n'est pas lié à la purification du Temple, mais éclaire par la suite sa
signification intrinsèque.
L'évangéliste rapporte que, parmi les pèlerins, il y avait aussi quelques
Grecs « qui montaient pour adorer pendant la fête »
(Jn 12,20).
Ces Grecs s'avancent vers « Philippe, qui était de Bethsaïde en Galilée » et
lui demandent: « Seigneur, nous voulons voir Jésus »
(12,21). Dans cet homme au nom grec
provenant de la Galilée à moitié païenne, ils voient évidemment un médiateur
qui peut leur ouvrir l'accès à Jésus. Cette parole des Grecs : « Seigneur,
nous voulons voir Jésus », nous rappelle d'une certaine façon la vision que
saint Paul eut du Macédonien, qui lui dit : « Passe en Macédoine, viens à
notre secours ! » (Ac 16,9).
L'Évangile continue en racontant que Philippe en parle à André et tous les
deux exposent la demande à Jésus. Comme il arrive souvent dans l'Évangile de
Jean, Jésus répond de façon mystérieuse et énigmatique sur le moment : «
Voici venue l'heure où doit être glorifié le Fils de l'homme. En vérité, en
vérité, je vous le dis, si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il
demeure seul; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit »
(12,23-24). À la
demande d'une rencontre de la part d'un groupe de pèlerins grecs, Jésus
répond par une prophétie de la Passion, où il interprète sa mort imminente
comme « glorification » - une glorification qui se révèle d'une grande
fécondité. Qu'est-ce que cela signifie ?
Ce qui compte, ce n'est pas une rencontre immédiate et extérieure entre
Jésus et les Grecs. Il y aura une autre rencontre qui sera plus riche et
plus profonde. Oui, les Grecs le « verront »: il ira vers eux par la Croix.
Il ira comme le grain de blé mort et il portera du fruit chez eux. Ils
verront sa « gloire » : en Jésus crucifié, ils trouveront le vrai Dieu,
qu'ils recherchaient dans leurs mythes et dans leur philosophie.
L'universalité, dont parle la prophétie d'Isaïe
(cf. 56,7),
est mise dans la lumière de la Croix : à partir de la Croix, le Dieu unique
se rend reconnaissable par les nations ; dans le Fils, elles connaîtront le
Père et, de cette façon, le Dieu unique qui s'est révélé dans le buisson
ardent.
Revenons à la purification du Temple. Là, la promesse universaliste d'Isaïe
est reliée à cette parole de Jérémie: Vous avez fait de ma maison un repaire
de brigands (cf. 7,11).
Nous reviendrons encore brièvement à la bataille du prophète Jérémie au
sujet et en faveur du Temple dans le contexte de l'explication du discours
eschatologique de Jésus. Anticipons ici l'essentiel: Jérémie s'engage
passionnément pour l'unité entre le culte et la vie dans la justice devant
Dieu ; il lutte contre une politisation de la foi, selon laquelle Dieu
devrait en toute occasion défendre son Temple pour que le culte perdure.
Cependant, un Temple qui est devenu un «
repaire de brigands » n'a pas la protection de Dieu.
Dans le lien entre culte et affaires, qu'il combat, Jésus voit évidemment
réalisée de nouveau la situation du temps de Jérémie. En ce sens, sa parole
comme son geste sont un avertissement où, d'après Jérémie, on pouvait aussi
percevoir une allusion à la destruction de ce Temple. Mais tout comme
Jérémie, Jésus lui non plus n'est pas le destructeur du Temple : tous deux
indiquent par leur passion qui et quoi détruira réellement le Temple.
Cette explication de la purification du Temple devient encore plus claire à
la lumière d'une parole de Jésus, qui dans ce contexte est transmise
seulement par Jean, mais qui, de façon déformée, se trouve aussi sur les
lèvres de faux témoins durant le procès de Jésus, selon la relation de
Matthieu et de Marc. Il ne fait pas de doute qu'une telle parole remonte à
Jésus lui-même et c'est d'autant plus évident qu'elle est placée dans le
contexte de la purification du Temple.
En Marc, le faux témoin dit de Jésus qu'il aurait déclaré : « Je détruirai
ce Sanctuaire fait de main d'homme et, en trois jours, j'en rebâtirai un
autre qui ne sera pas fait de main d'homme »
(14,58).
Le « témoin », par conséquent, est peut-être très proche de la parole de
Jésus, cependant il se trompe sur un point décisif: ce n'est pas Jésus le
destructeur du Temple ; ce sont ceux qui en font un repaire de brigands qui
l'abandonnent à la destruction, comme c'était arrivé au temps de Jérémie.
En Jean, la vraie parole de Jésus est celle-ci : « Détruisez ce Sanctuaire
et en trois jours je le relèverai »
(2,19). Par ces
mots Jésus répondait à une demande de l'autorité juive d'un signe par lequel
il donnerait une preuve pour légitimer un acte tel que la purification du
Temple. Son « signe », c'est la Croix et la
Résurrection. La Croix et la Résurrection le
légitiment comme celui qui instaure le culte juste. Jésus se justifie par sa
Passion - le signe de Jonas, qu'il donne à Israël et au monde.
Mais la parole va encore plus loin. Avec raison, Jean dit que les disciples
comprirent la parole dans toute sa profondeur seulement en en faisant
mémoire après la Résurrection - en en faisant mémoire à la lumière de
l'Esprit Saint comme communauté des disciples, comme Église.
Le rejet de Jésus, sa crucifixion, signifie en même temps la fin de ce
Temple. L'époque du Temple est passée. Un nouveau culte arrive, dans un
Temple non construit par des hommes. Ce Temple c'est son Corps - le
Ressuscité qui rassemble les peuples et les unit dans le sacrement de son
Corps et de son Sang. Lui-même est le nouveau Temple de l'humanité. La
crucifixion de Jésus est en même temps la destruction de l'ancien Temple.
Avec sa Résurrection commence une nouvelle façon de vénérer Dieu, non plus
sur telle ou telle montagne, mais « en esprit
et en vérité » (Jn 4,23).
Alors, qu'est-ce, au juste, que le « zèlos » de Jésus? Par rapport à
cette demande, Jean -justement dans le contexte de la purification du Temple
- nous a donné une parole précieuse qui constitue une réponse précise et
approfondie à la question elle-même. Il nous dit que, à l'occasion de la
purification du Temple, les disciples se rappelèrent qu'il est écrit: « Le
zèle pour ta maison me dévorera » (2,17).
C'est une parole tirée du grand Psaume
69 concernant la
Passion.
À cause de sa vie conforme à la parole de Dieu, celui qui prie est poussé à
l'isolement ; la parole devient pour lui une source de souffrance qui lui
est causée par ceux qui l'entourent et le haïssent. « Sauve-moi, ô Dieu, car
les eaux me sont entrées jusqu'à l'âme... c'est pour toi que je souffre
l'insulte... le zèle de ta maison me dévore... »
(Ps 69,2.8.10).
Dans le juste souffrant, le souvenir des disciples a reconnu Jésus : le zèle
pour la Maison de Dieu le conduit à la Passion, à la Croix. C'est là le
tournant fondamental que Jésus a fait prendre au thème du zèle. Il a
transformé en zèle de la Croix le « zèle » qui voulait servir Dieu par la
violence. Il a établi ainsi définitivement le critère du vrai zèle - le zèle
de l'amour qui se donne. Le chrétien doit s'orienter selon ce zèle ; en lui
se trouve la réponse authentique à la question concernant le « zélotisme »
de Jésus.
Cette interprétation trouve à nouveau sa confirmation dans les deux petits
épisodes par lesquels Matthieu conclut le récit de la purification du
Temple.
« II y eut aussi des aveugles et des boiteux qui s'approchèrent de lui, et
il les guérit (21,14).
Au commerce d'animaux et aux affaires d'argent, Jésus oppose sa bonté qui
guérit. Elle est la vraie purification du Temple. Jésus ne vient pas comme
destructeur; il ne vient pas avec l'épée du révolutionnaire. Il vient avec
le don de la guérison. Il se consacre à ceux qui, à cause de leurs
infirmités, sont repoussés aux marges de leur propre vie et aux marges de la
société. Il montre Dieu comme celui qui aime, et son pouvoir comme le
pouvoir de l'amour.
Le comportement des enfants qui répètent l'acclamation du Hosanna que les
grands lui refusent, se situe donc en pleine harmonie avec tout cela
(cf. Mt 21,15).
De ces « petits » lui viendra toujours la louange
(cf. PS 8,3) -
de ceux qui sont capables de voir avec un cœur pur et simple et qui sont
ouverts à sa bonté.
Ainsi, le nouveau Temple qu'il est venu construire, est annoncé à l'avance
dans ces deux petits événements.
Le TOME I ►
Benoît XVI
Le TOME II
►
Benoît XVI
Sources : Texte original des écrits du Saint Père
Benoit XVI
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E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) Le
13 janvier 2023
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