Sainte Faustine - Héléna Kolwaska
Le Petit Journal
édition numérique par Anne Speeckaert et www.JesusMarie.com
Petit Journal de Sœur Faustine
853. 29. XI.1936. Aujourd’hui, après la Sainte Communion, j’entendis dans
mon âme une voix : « Ma fille, veille, car Je viendrai sans qu’on Me
remarque. » Jésus, vous ne voulez pas me dire l’heure que j’attends avec
tant de langueur ? – « Ma fille tu l’apprendras pour ton bien, mais pas
maintenant. Veille ! » Ô Jésus, faites de moi ce qu’il Vous plaira ! Je sais
que Vous êtes le Sauveur miséricordieux et je sais que Vous ne changerai pas
pour moi l’heure de ma mort. Si dès maintenant, Vous me témoignez un amour
si particulier et Vous daignez si gracieusement et confidentiellement Vous
unir à moi, je m’attends à beaucoup plus à l’heure de ma mort. Vous, le
Seigneur, mon Dieu, Vous ne pouvez changer ! Vous êtes toujours le même. Les
cieux peuvent changer, ainsi que tout ce qui a été créé, mais Vous,
Seigneur, Vous êtes toujours le Même. Vous êtes dans les siècles. Donc
venez, comme Vous voulez et quand Vous voulez ! Père infiniment
miséricordieux, moi, Votre enfant, j’attends avec nostalgie Votre venue.
Ô Jésus, Vous avez dit dans le Saint Evangile: Vous serez jugés sur vos
paroles. Jésus, je parle toujours de Votre indicible miséricorde, donc j’ai
confiance que Vous allez me juger selon Votre insondable miséricorde.
854. 30.XII. 1936. l’année finit. Je prends la journée d’aujourd’hui pour ma
retraite mensuelle. Mon esprit a approfondi les bienfaits que Vous avez
répandus sur moi durant toute l’année. Mon âme a tremblé à la vue de
l’immensité des grâces du Seigneur. De mon âme a jailli vers Dieu un hymne
d’action de grâces. Toute une heure durant je me suis plongée dans
l’adoration et dans l’action de grâces, méditant un à un, les bienfaits de
Dieu et aussi mes petits manquements. Tout ce que cette année renfermait
s’est engouffré dans l’éternité. Rien ne se perd. Je me réjouis que rien ne
se perde.
855. 30. XII. 1936. Retraite d’un jour.
Pendant la méditation du matin, j’ai ressenti une aversion et une répugnance
pour tout ce qui est créé. Tout me paraît si pâle, mon esprit est détaché de
tout. Je ne désire que Dieu seul, et cependant je dois vivre. C’est un
martyre que je ne peux décrire. Dieu se donne à l’âme avec amour et
l’entraîne dans les inconcevables profondeurs de la Divinité. Mais en même
temps Il la laisse sur cette terre dans le seul but de souffrir et
d’agoniser en languissant après Lui. Et ce puissant amour est si pur que
Dieu, Lui-même y trouve Son délice. L’amour-propre n’a pas de part à ses
actions, car ici tout est parsemé d’amertume, donc tout est très pur. La vie
est une perpétuelle mort, douloureuse et terrible. Mais en même temps elle
est la base de la vraie vie, du bonheur inconcevable, de la force de l’âme.
Et par là même, l’âme est capable de grandes actions pour Dieu.
856. Le soir, j’ai prié pendant quelques heures, d’abord pour mes parents et
ma famille, pour la Mère Générale et toute la Congrégation, pour nos élèves,
pour trois prêtres à qui je dois beaucoup. J’ai parcouru le monde entier en
long et en large et j’ai rendu grâce à l’insondable miséricorde de Dieu pour
toutes les grâces données aux hommes. Et je Lui ai demandé pardon pour tout
ce qui L’a offensé.
857. Pendant les vêpres, j’ai aperçu Jésus qui a regardé doucement et
profondément mon âme. « Prends patience, ma fille, ce ne sera plus long. »
Ce regard profond et ces paroles, ont donné à mon âme force, puissance et
courage, ainsi qu’une étrange confiance que j’accomplirai tout ce qu’Il
exige de moi, malgré tant d’énormes difficultés. Elles introduisirent aussi
dans mon âme l’étrange conviction que le Seigneur est avec moi et qu’avec
Lui je peux tout. Toutes les puissances du monde et de l’enfer entier ne me
sont rien, tout doit s’écrouler de par la puissance de Son Nom. Je remets
tout entre Vos mains, ô mon Seigneur et mon Dieu. Unique Chef de mon âme,
dirigez-moi d’après Vos désirs éternels !
858. Cracovie, Pradnik I. I. 1937 Jésus, j’ai confiance en Vous !
Aujourd’hui, j’ai dit adieu à l’année 1936 et j’ai salué l’année 1937. C’est
avec tremblement et appréhension qu’en cette première heure de l’année j’ai
regardé bien en face ce laps de temps. Jésus miséricordieux, j’irai
courageusement et bravement dans le combat et les batailles. En Votre Nom,
j’accomplirai tout et je vaincrai tout. Mon Dieu, bonté infinie, je Vous en
prie que Votre infinie miséricorde m’accompagne toujours et partout !
En entrant dans cette nouvelle année, la peur me prend face à la vie. Mais
Jésus éloigne de moi cette peur en me faisant connaître quelle grande gloire
Lui procurera cette œuvre de la miséricorde.
859. Il y a des moments dans la vie où l’âme ne trouve d’apaisement que dans
une profonde prière. Que les âmes sachent persévérer dans l’oraison ! En de
tels moments, c’est une chose bien importante.
860. J. M. J. Jésus, j’ai confiance en Vous !
Résolutions pour l’année 1937, 1er jour du 1er mois.
Résolutions détaillées, toujours les mêmes :
- m’unir au Christ miséricordieux.
- comment aurait fait le Christ dans telle ou telle occasion ?
- embrasser par l’esprit le monde entier, surtout la Russie et l’Espagne.
Résolutions générales.
I. Stricte observance du silence. Calme intérieur.
II. Voir en chaque Sœur l’image de Dieu, de ce motif doit dériver tout
l’amour du prochain.
III. A chaque moment de la vie, accomplir fidèlement la volonté de Dieu et
en vivre.
IV. Rendre fidèlement compte de tout à mon directeur de conscience et ne
rien entreprendre d’important sans m’être entendue avec lui. Je vais tâcher
de lui dévoiler clairement les plus secrètes profondeurs de mon âme en me
souvenant que c’est à Dieu seul que j’ai affaire, et que ce n’est qu’un
homme qui Le remplace. Prier Dieu chaque jour qu’Il lui donne la lumière
nécessaire.
V. A l’examen du soir, me poser cette question : « S’Il m’appelait
aujourd’hui ? »
VI. Ne pas chercher Dieu au loin, mais demeurer avec Lui en tête-à-tête dans
mon cœur.
VII. Dans les épreuves et les contrariétés, recourir au tabernacle et me
taire.
VIII. Unir toutes mes souffrances, prières, travaux et mortifications aux
mérites de Jésus dans le but d’obtenir miséricorde pour le monde.
IX. Profiter des moments libres, mêmes les plus petits pour prier à
l’intention des agonisants.
X. Qu’il n’y ait pas un jour dans ma vie où je ne sollicite Votre grâce pour
les œuvres de notre congrégation.
XI. N’avoir jamais aucun égard pour l’opinion humaine. N’être sur pied de
familiarité avec personne. Envers nos élèves : avoir une douce fermeté, une
patience sans bornes. Les punir sévèrement, mais avec des punitions de ce
genre : prière et sacrifice de soi-même. La force contenue dans
l’anéantissement de soi est pour elles un constant remords de conscience et
cela fléchit leur cœur rebelle.
XII. La présence de Dieu est le fondement de toutes mes actions, mes paroles
et mes pensées.
XIII. Profiter de chaque aide spirituelle. Remettre toujours l’amour-propre
à sa place, c’est-à-dire la dernière. Faire mes exercices spirituels comme
si je les faisais pour la dernière fois de ma vie, et accomplir tous mes
devoirs de même.
861. 2. I. 1937. Ô Jésus, qu’il est grand Votre Nom Seigneur ! Il est la
puissance de mon âme ! Lorsque les forces m’abandonnent et que les ténèbres
envahissent mon âme, Votre Nom devient alors comme un soleil dont les rayons
éclairent et réchauffent l’âme. Et sous leur ardeur l’âme embellit et
rayonne de l’éclat de Votre Nom. Au doux Nom de Jésus mon coeur bat plus
fort. Il y a des moments où en entendant le Nom de Jésus je tombe en
défaillance. Mon esprit s’élance vers Vous.
862. Ce jour est pour moi tout particulièrement un grand jour. Ce jour-là,
je suis allée pour la première fois m’occuper de la peinture de cette image.
Ce jour-là, la Miséricorde divine a été pour la première fois
particulièrement honorée au dehors, bien qu’elle soit connue depuis
longtemps, mais cette fois-ci sous la forme que le Seigneur souhaitait. Ce
jour de Fête du doux Nom de Jésus me rappelle bien des grâces particulières.
863. Aujourd’hui la Mère Supérieure de la Congrégation, qui assure le
service de l’hôpital, est venue me voir avec une de ses Sœurs. Nous avons
longuement parlé de choses spirituelles. J’ai reconnu en elle une grande
ascète. C’est pour cela que notre conversation a été agréable à Dieu.
Aujourd’hui une jeune fille est venue chez moi. J’ai reconnu qu’elle était
souffrante, pas tant de corps que d’âme. Je la consolais autant que je
pouvais, mais mes paroles de consolation ne suffisaient pas. C’était une
pauvre orpheline, son âme était plongée dans l’amertume de la douleur. Elle
me dévoila son âme et elle me raconta tout. J’ai compris que de simples mots
de consolation ne suffiraient pas ici. J’ai imploré le Seigneur pour cette
âme et j’ai offert à Dieu ma joie pour la lui donner à elle, et qu’il m’ôte
tout sentiment de joie. Le Seigneur a exaucé ma prière. Pour moi resta la
consolation qu’elle avait été consolée.
864. Adoration. Le premier dimanche du mois, pendant l’adoration, je me suis
sentie si pressée d’agir que je me suis mise à pleurer. Et j’ai dit au
Seigneur : « Jésus, ne me pressez pas, mais donnez l’inspiration à ceux qui,
Vous le savez, retardent cette œuvre. » Et j’ai entendu ces mots : « Ma
fille sois tranquille, ce ne sera plus long ! »
865. Pendant les vêpres, j’ai entendu ces paroles : « Ma fille, Je désire Me
reposer en ton cœur, car beaucoup d’âmes M’ont aujourd’hui rejeté de leur
cœur. » J’en ai éprouvé une tristesse mortelle. J’ai taché de consoler le
Seigneur, en Lui faisant mille fois l’offrande de mon amour. J’ai ressenti
en mon âme une grande aversion pour le péché.
866. Mon cœur est constamment abreuvé d’amertume, car je désire aller chez
Vous, Seigneur, dans la plénitude de la vie. Ô Jésus, comme cette vie me
semble un terrible désert. Il n’y a de nourriture ni pour mon cœur, ni pour
mon âme sur cette terre. Je souffre et me languis de Vous, Seigneur. Vous
m’avez laissé, ô Seigneur, la Sainte Eucharistie. Mais elle attise davantage
encore la nostalgie de mon âme envers Vous, Dieu éternel, mon Créateur.
Jésus, je désire m’unir à Vous, daignez entendre les soupirs de Votre
bien-aimée. Oh ! Comme je souffre de ne pouvoir encore m’unir à Vous ! Mais
qu’il en soit selon Vos désirs !
867. 5. I. 1937. Ce soir, j’ai vu un prêtre qui avait besoin de prières,
pour une certaine affaire. J’ai prié ardemment, car cette affaire me tient
aussi à cœur. Merci, Jésus pour cette bonté.
868. Ô Jésus miséricordieux, enveloppez le monde entier, et pressez-moi
contre Votre Cœur !…. Permettez, Seigneur que mon âme repose dans l’océan de
Votre insondable miséricorde !
869. 6. I. 1937. Aujourd’hui, pendant la Sainte Messe, je me suis
inconsciemment plongée dans l’infinie Majesté de Dieu. Toute l’immensité de
l’amour divin, inondait mon âme, en ce moment précis. J’ai compris combien
Dieu s’est abaissé pour moi – ce Seigneur au-dessus de tous les Seigneurs –
et que suis-je moi, misérable pour que Vous ayez de telles relations avec
moi ? La stupéfaction qui m’a saisie après cette grâce particulière se
prolongea avec vivacité pendant toute la journée. Profitant de l’intimité à
laquelle le Seigneur m’admet, je L’ai supplié pour le monde entier. Dans de
tels moments, il me semble que le monde entier dépend de moi.
870. Mon Maître, disposez ainsi mon cœur : que je n’attende l’aide de
personne, mais qu’au contraire je tâche toujours d’aider les autres, de les
consoler et de les soulager en tout. J’ai le cœur toujours ouvert aux
souffrances d’autrui. Je ne le ferme pas aux souffrances des autres. C’est
pour cela que l’on m’appelle, avec une allusion malicieuse, la pelle à
poussière. C'est-à-dire, que chacun jette sa douleur dans mon cœur. J’ai
répondu, que chacun a sa place en mon cœur. Et moi, en compensation, j’ai ma
place dans le Cœur de Jésus. Ces allusions au droit d’amour ne rétrécissent
pas mon cœur. Mon âme est toujours sensible sur ce point, et Jésus seul est
le mobile de mon amour du prochain.
871. 7. I. 1937. Pendant l’Heure Sainte, le Seigneur me permit de goûter Sa
Passion. J’ai partagé l’amertume dont était remplie Son âme durant la
Passion. Jésus m’a fait comprendre combien l’âme doit être fidèle à
l’oraison malgré les tourments, la sécheresse et les tentations. Car, pour
la plupart, c’est d’une telle oraison que dépend la réalisation des desseins
de Dieu qui sont parfois bien grands. Si nous ne persévérons pas dans cette
oraison, nous déjouons que Dieu voulait accomplir par nous, ou en nous. Que
chacun se rappelle ces paroles : « En proie à la détresse, Il priait de
façon plus instante. » Je prolonge toujours semblable oraison autant qu’il
est en mon pouvoir et en accord avec mes devoirs.
872. 8. 1. 1937. Vendredi matin, lorsque j’allais à la chapelle pour la
Sainte Messe, soudain j’ai aperçu sur le trottoir un grand buisson de
genévrier dans lequel se trouvait un terrible chat qui me barrait le passage
vers la chapelle, me regardant méchamment. Un soupir au Nom de Jésus
dispersa tout. J’ai offert toute cette journée pour les pécheurs agonisants.
Pendant la Sainte Messe j’ai ressenti d’une manière particulière la
proximité du Seigneur. Après la Sainte Communion j’ai regardé le Seigneur
avec confiance et je Lui dis : « Jésus, je désire tant Vous dire quelque
chose. » Et le Seigneur me regarda avec amour et me dit : « Que désires-tu
Me dire ? »- « Jésus, je Vous supplie par l’inconcevable puissance de Votre
miséricorde, que toutes les âmes, qui agoniseront aujourd’hui échappent au
feu de l’enfer, seraient-ce les âmes des plus grands pécheurs ? C’est
aujourd’hui vendredi, commémoration de votre amère agonie sur la Croix et
parce que Votre miséricorde est inconcevable, les Anges ne s’en étonneront
pas. » Jésus me serra contre Son Cœur et dit : « Ma fille bien-aimée, tu as
bien reconnu l’immensité de Ma miséricorde. Je ferai comme tu m’en as prié.
Mais unis-toi constamment à Mon Cœur agonisant et donne satisfaction à Ma
justice ! Sache que tu M’as priée pour une grande chose. Je vois que cela
t’a été dicté par le pur amour que tu as pour Moi. C’est pourquoi Je vais
satisfaire tes exigences. »
873. Marie, Vierge Immaculée, prenez-moi sous Votre protection particulière
! Gardez la pureté de mon âme, de mon cœur et de mon corps ! Vous êtes le
modèle et l’étoile de ma vie.
874. J’ai éprouvé aujourd’hui une grande souffrance au moment de la visite
de nos Sœurs. J’ai appris une chose, qui a profondément blessé mon cœur,
cependant je me suis maîtrisée de telle façon que les Sœurs n’ont rien
remarqué. Pendant un long moment la douleur déchira mon cœur. Mais tout cela
c’est pour les pauvres pécheurs… Ô Jésus pour les pauvres pécheurs… Jésus,
ma force, soyez près de moi, secourez-moi !…
875. 10. I. 1937. J’ai prié aujourd’hui le Seigneur de m’accorder des forces
pour que je puisse aller communier. « Mon Maître, je Vous prie de tout mon
cœur languissant de me donner, si cela est conforme à Votre Sainte Volonté,
toutes les souffrances et les faiblesses qu’Il Vous plaît. Je désire
souffrir durant la journée et la nuit entière. Mais je Vous en supplie,
fortifiez-moi au moment où je dois communier. Vous voyez bien, Jésus, qu’on
n’apporte pas la Sainte Communion aux malades. Alors si Vous ne me fortifiez
pas pour ce moment-là afin que je puisse descendre à la chapelle, comment
puis-je Vous recevoir dans le mystère de l’Amour ? Et Vous savez combien mon
cœur languit de Vous. Ô mon doux époux, à quoi bon tant de plaintes ? Vous
savez que je vous désire ardemment. Si Vous le voulez, Vous pouvez faire
cela pour moi. » Le lendemain matin je me suis sentie tout à fait bien
portante : défaillances et faiblesses avaient disparues. Cependant quand je
suis revenue de la chapelle, toutes ces souffrances et ces faiblesses me
sont immédiatement revenues comme si elles m’attendaient. Mais je n’avais
plus du tout peur d’elles, car je m’étais nourrie du Pain des Forts. Je
regarde tout bravement droit dans les yeux, même la mort.
876. Ô Jésus caché dans l’hostie, mon doux Maître et fidèle Ami, mon âme est
heureuse d’avoir un tel ami, qui me tient toujours compagnie ! Je ne me sens
pas seule, bien que je sois dans l’isolement. Jésus Eucharistie, nous nous
connaissons, cela me suffit.
877, 12. I. 1937. Aujourd’hui, lorsque le médecin est venu pour visiter les
malades, je ne lui ai guère plu. J’étais naturellement plus souffrante et ma
température était sensiblement plus élevée. Il va sans dire qu’il a décidé
que je ne devais plus descendre pour la Sainte Communion jusqu’à ce que la
température ait complètement baissé. J’ai répondu : « Bien, » quoique la
douleur ait serré mon cœur. Mais j’ai dit que, si je n’avais pas de fièvre
je descendrai. Il consent à cela.
Quand le médecin fut sorti, j’ai dit au Seigneur : « Jésus, maintenant cela
dépend de Vous que j’y aille ou non. » Et je n’y ai plus pensé quoique à
chaque instant l’idée me venait : « Je ne vais pas pouvoir recevoir Jésus –
non, c’est impossible – et non seulement une fois, mais plusieurs fois,
jusqu’à ce que la température baisse. » Mais le soir j’ai dit au Seigneur :
« Jésus, si mes Saintes Communions Vous sont agréables, je Vous prie
humblement de n’avoir pas un seul degré de température demain matin. » Le
matin je prends ma température et pense en moi-même : Si j’ai, ne serais-ce
qu’un seul degré, alors je ne me lèverai pas, car ce serait contraire à
l’obéissance. » Cependant je retire le thermomètre et il n’y avait pas un
seul degré de température. J’ai sauté tout de suite au bas de mon lit et je
suis allée communier.
Lorsque le médecin est venu et que je lui ai dit que, n’ayant pas un seul
degré de température, j’étais allée communier, il en fut étonné. Je l’ai
prié de ne pas me faire de difficultés pour aller communier, car cela ne
peut avoir une influence défavorable sur ma cure. Il a répondu : « Afin
d’avoir la conscience tranquille, et en même temps afin de ne pas vous
déranger, ma Sœur, arrangeons-nous de telle sorte qu s’il fait beau temps,
s’il ne pleut pas, et que vous vous sentiez bien, alors vous pouvez aller
communier. Mais en conscience soyez prudente ! Je me suis réjouie que le
médecin ait tant d’égards pour moi. Voyez-Vous, Jésus, ce que je devais
faire, je l’ai déjà fait. Maintenant je compte sur Vous et je suis toute à
fait tranquille.
878. J’ai vu aujourd’hui le Père Andrasz célébrer la Sainte Messe. Avant
l’Elévation, j’ai aperçu le Petit Jésus qui, les petites mains tendues,
était très joyeux. Puis, un moment après je ne vis plus rien. J’étais dans
ma chambre séparée, continuant à faire mon action de grâces.. Cependant plus
tard, j’ai pensé en moi-même : pourquoi l’Enfant Jésus était-Il si gai ? Car
Il n’est pas toujours aussi gai, à ce que je vois. Soudain, j’entendis ces
mots en mon âme : « Car Je me sens bien dans son cœur. » Et cela ne m’a pas
du tout étonnée, car je sais que le Père aime beaucoup Jésus.
879. Mon union avec les agonisants continue d’être très étroite. Oh ! Que la
miséricorde divine est inconcevable ! Dieu me permet par mon indigne prière,
de venir en aide aux agonisants ! J’essaye, autant qu’il m’est possible, de
me trouver auprès de chaque agonisant. Ayez confiance en Dieu car Il est bon
et inconcevable. Sa miséricorde dépasse notre compréhension.
880. 14. I. 1937. Aujourd’hui Jésus est entré dans ma chambre particulière.
Vêtu d’une robe claire, ceint d’une ceinture d’or, une grande majesté
rayonnait de Sa personne et Il a dit : « Ma fille, pourquoi t’abandonnes-tu
à des pensées alarmantes ? » J’ai répondu : « Ô Seigneur, Vous savez
pourquoi. » Et Il m’a dit : « Pourquoi ? »- « Cette œuvre m’alarme. Vous
savez que je suis incapable de l’accomplir. » Et Il a dit : Pourquoi ? » - «
Vous voyez bien que je ne suis pas en bonne santé, que je n’ai pas
d’instruction, que je n’ai pas d’argent, que je suis un abîme de misère et
que les relations avec les gens me font peur. Jésus, je ne désire que Vous.
Vous pouvez, Vous, me dispenser de cela. » Et le Seigneur m’a dit : « Ma
fille, ce que tu as dit est vrai. Tu es très misérable. Mais il M’a plu de
réaliser l’œuvre de la miséricorde, justement par toi, qui est la misère
même. N’aie pas peur. Je ne te laisserai pas seule. Fait ce que tu peux dans
cette affaire, Moi J’accomplirai tout ce dont tu es incapable. Tu sais ce
qui est en ton pouvoir de faire, alors fais-le ! » Le Seigneur a jeté un
regard plein de bienveillance au fond de mon être. J’ai cru que j’allais en
mourir de joie. Le Seigneur disparut. En mon âme demeurèrent joie, puissance
et force d’agir. Mais je suis étonnée de ce que le Seigneur ne veuille pas
me dispenser et qu’Il ne change rien à ce qu’il a une fois décidé. Et malgré
toutes ces joies, il y a toujours une ombre de douleur. Je vois que l’amour
et la douleur vont de pair.
881. J’ai rarement de semblables visions, mai le plus souvent, mon commerce
avec le Seigneur s’opère de manière très profonde. Les sens restent assoupis
quoique ce soit imperceptible. Et tout ce qui touche à l’être divin, aux
vérités révélées, ainsi qu’à la connaissance de ma propre misère, devient
pour moi plus réel et plus clair que si je le voyais de mes yeux. En un
instant l’esprit discerne plus que durant de longues années de réflexions
approfondies et de méditations.
882. Rien ne me dérange dans cette union avec le Seigneur, ni la
conversation avec le prochain, ni aucune tâche, quand bien même il s’agirait
d’affaires très importantes, cela ne me dérange aucunement. Mon esprit est
avec Dieu. Mon cœur est plein de Dieu, je ne le cherche donc pas en dehors
de moi-même.
Lui, le Seigneur transperce mon âme, comme le rayon de soleil transperce le
verre. Lorsque j’étais enfermée dans le sein de ma mère, je ne lui étais pas
aussi unie que je le suis à mon Dieu. Là, c’était l’inconscience. Ici c’est
la réalité en plein, ainsi que la conscience de l’union. Mes visions sont
purement intérieures. Mais mieux je les comprends, moins je puis les
exprimer en paroles.
883. Oh ! Comme le monde spirituel est beau ! Et il est si réel qu’en
comparaison, la vie extérieure n’est que vain leurre, impuissance.
884. Jésus, donnez-moi force et sagesse pour que je puisse venir à bout de
ce terrible désert, pour que mon cœur sache supporter patiemment la
nostalgie de Vous, ô mon Seigneur ! Je demeure toujours dans un saint
étonnement, quand je vois que Vous Vous approchez de moi, Vous, le Seigneur
possesseur d’un terrible trône, que Vous descendez dans ce misérable exil et
venez chez une pauvre mendiante qui n’a rien hors la misère. Je ne sais Vous
régaler, mon Prince royal, mais Vous savez que je vous aime de chaque
tressaillement de mon cœur. Je vois que Vous Vous abaissez, mais cependant
Votre Majesté ne diminue pas à mes yeux. Je sais que Vous m’aimez d’un amour
d’Epoux et cela me suffit, bien qu’un grand abîme nous sépare, car Vous êtes
le Créateur et moi Votre créature. Pourtant, l’amour seul explique notre
union, hors de lui tout est incompréhensible. Seul l’amour explique cette
inconcevable intimité avec laquelle Vous me fréquentez. Ô Jésus, Votre
grandeur m’effraie et je serais dans un étonnement constant et une peur
continuelle, si Vous ne m’apaisiez pas Vous-même. Vous me rendez capable
d’avoir commerce avec Vous.
885. 15. I. 1937. La tristesse ne s’installe pas dans un cœur qui aime la
volonté divine. Mon cœur languissant après Dieu ressent toute la misère de
l’exil. J’avance courageusement, quoique mes pieds se blessent, vers ma
patrie. Et en route, je me nourris de la volonté divine. Elle m’est
nourriture. Secourez-moi, vous, les heureux habitants de la patrie céleste
afin que votre sœur ne faiblisse pas en route. Le désert est terrible,
pourtant je marche le front levé et de mes yeux je fixe le soleil,
c’est-à-dire Votre Cœur miséricordieux.
886. 19. I. 1937. Ma vie s’écoule maintenant dans une calme conscience de
Dieu. Mon âme silencieuse vit de Lui et cette vie consciente de Dieu dans
mon âme m’est source de bonheur et de force. Je ne cherche pas de bonheur en
dehors de la profondeur de mon âme dans laquelle demeure Dieu. Je suis
consciente de cela. Je sens comme un besoin de me communiquer aux autres. Je
découvre en mon âme la source du bonheur, c’est Dieu. Ô mon Dieu, je vois
que tout ce qui m’entoure est comblé de Dieu. Et c’est mon âme qui est la
plus comblée, elle qui est ornée de la grâce de Dieu. Je commence maintenant
ce dont je vivrai dans l’éternité.
887. Le silence est un langage si puissant, qu’il atteint le trône du Dieu
vivant. Le silence est Sa parole qui, bien que mystérieuse, est puissante et
vivante.
888. Jésus, vous me faites voir et comprendre en quoi consiste la grandeur
de l’âme : ce n’est pas dans de grandes actions, mais dans un grand amour.
L’amour a de la valeur, et c’est lui qui donne de la valeur à nos actions.
Et, bien que nos actes soient petits et ordinaires en eux-mêmes, à cause de
l’amour, ils deviennent grands et puissants devant Dieu.
889. L’amour est un mystère qui transfigure tout ce qu’il touche en des
choses belles et agréables à Dieu. L’amour de Dieu rend l’âme libre. Elle
est comme une reine, qui ne connaît pas la contrainte de l’esclavage. Elle
entreprend tout avec grande aisance, car l’amour qui l’habite lui donne
l’impulsion pour agir. Tout ce qui l’entoure lui fait comprendre que Dieu
seul est digne de son amour. L’âme amoureuse de Dieu est plongée en Lui.
Elle va à son devoir dans les mêmes dispositions qu’à la Sainte communion.
Et elle accomplit la plus simple action avec un grand soin sous le regard
amoureux de Dieu. Elle ne se trouble pas lorsque, après un certain temps,
quelque chose se révèle peu réussi. Elle reste calme, car au moment d’agir
elle a fait ce qui était en son pouvoir. Lorsqu’il arrive que la présence
vivante de Dieu la quitte, cette présence dont elle jouit presque sans
cesse, elle tâche alors de vivre de foi pure. Cette âme comprend qu’il y a
des moments de repos et des moments de lutte. Par la volonté elle est
toujours avec Dieu. Cette âme est exercée au combat comme un chevalier, elle
voit de loin où l’ennemi se cache et elle est prête à la lutte. Elle sait
qu’elle n’est pas seule, Dieu est sa force.
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