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Lecture: Ps 130, 1-3
1. Nous n'avons écouté que quelques paroles, une trentaine, de l'original
en hébreu du Psaume 130. Et pourtant, il s'agit de paroles intenses qui
développent un thème cher à toute la littérature religieuse: l'enfance
spirituelle. L’on pense immédiatement et spontanément à sainte Thérèse de
Lisieux, à sa « petite voie », à son désir de « demeurer petite » pour « être
entre les bras de Jésus » (cf. Manuscrit «C», 2r°-3v°: Œuvres complètes, Cité du
Vatican 1997, pp. 235-236).
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Au centre du Psaume, en effet, se découpe l'image d'une mère
avec son enfant, signe de l'amour tendre et maternel de Dieu, comme l'avait déjà
exprimé le prophète Osée: « Quand Israël était jeune, je l'aimai [...] Je les
menais avec des attaches humaines, avec des liens d'amour; j'étais pour eux
comme ceux qui soulèvent un nourrisson tout contre leur joue; je m'inclinais
vers lui et le faisais manger » (Os 11, 1.4).
2. Le Psaume s'ouvre par la description d'un comportement contraire à celui
de l'enfance. Celle-ci est consciente de sa fragilité, mais confiante dans
l'aide d'autrui. Le Psaume met en revanche en scène le cœur fier, le regard
hautain, la « grandeur et les prodiges » (cf. Ps 130, 1). C'est la
représentation de la personne fière, qui est décrite à travers des termes
hébreux qui indiquent l'« arrogance » et l'« exaltation », l'attitude arrogante
de celui qui regarde les autres avec un sentiment de supériorité, les
considérant inférieurs à lui.
La grande tentation de l'orgueilleux, qui veut être comme Dieu, arbitre du
bien et du mal (cf. Gn 3, 5), est fortement repoussée par l'orant, qui opte pour
la confiance humble et spontanée dans l'unique Seigneur.
3. On passe ainsi à l'image inoubliable de l'enfant et de la mère. Le texte
original hébreu ne parle pas d'un nouveau-né, mais d'un « petit enfant » (Ps
130, 2). Or, on sait que dans l'antiquité, au Proche-Orient, le sevrage se
situait officiellement aux alentours des trois ans, et était célébré par une
fête (cf. Gn 21, 8; 1 S 1, 20-23; 2 M 7, 27).
L'enfant, auquel le psalmiste fait référence, est lié à la mère par un
rapport désormais plus personnel et intime et non pas par le simple contact
physique et la nécessité de se nourrir. Il s'agit d'un lien plus conscient, même
s'il est toujours immédiat et spontané. Telle est la parabole idéale de la
véritable « enfance » de l'esprit, qui s'abandonne à Dieu non pas de façon
aveugle et automatique, mais sereine et responsable.
4. La profession de foi de l'orant s'étend alors à toute la communauté; «
Mets ton espoir, Israël, en Yahvé, dès maintenant et à jamais! »(Ps 130, 3).
L'espérance naît à présent dans tout le peuple, qui reçoit de Dieu sécurité, vie
et paix, et se prolonge du présent vers l'avenir, « dès maintenant et à jamais!
».
Il est facile de continuer la prière en reprenant d'autres voix présentes
dans le Psautier, inspirées par la même confiance en Dieu: « Sur toi je fus jeté
au sortir des entrailles dès le ventre de ma mère, mon Dieu c'est toi » (Ps 21,
11). « Si mon père et ma mère m'abandonnent, Yahvé m'accueillera » (Ps 26, 10).
« Car c'est toi mon espoir, Seigneur, Yahvé, ma foi dès ma jeunesse. Sur toi
j'ai mon appui dès le sein, toi ma part dès les entrailles de ma mère » (Ps 70,
5-6).
5. A l'humble confiance s'oppose, comme nous l’avons vu, l'orgueil. Un
écrivain chrétien du IVe-Ve siècle, Giovanni Cassiano, met en garde les fidèles
contre la gravité de ce péché, qui « détruit toutes les vertus et ne menace pas
seulement les médiocres et les faibles, mais surtout ceux qui sont arrivés au
sommet en utilisant leurs forces ». Il poursuit: «Voilà la raison pour laquelle
le bienheureux David préserve avec tant de circonspection son cœur jusqu'à oser
proclamer devant Celui auquel n'échappait certainement pas les secrets de sa
conscience: Seigneur, que mon cœur ne s'enorgueillisse pas et que mon regard ne
s'élève pas avec supériorité; je ne recherche pas de grandes choses, au-delà de
mes forces ... Toutefois, bien conscient de la difficulté, même pour les hommes
parfaits, de préserver leur cœur, il ne prétend pas s'appuyer sur ses seules
capacités, mais supplie par des prières le Seigneur de l'aider à échapper aux
dards de l'ennemi et à ne pas être blessé: Que le pied des superbes ne
m'atteigne (Ps 35, 12) (Le istituzioni cenobitiche, XII, 6, Abbaye de Praglia,
Bresseo di Teolo, Padova 1989, p. 289).
De même, un ancien anonyme des Pères du désert nous a transmis cette
déclaration, qui fait écho au Psaume 130: « Je n'ai jamais dépassé mon rang pour
marcher plus haut, et je ne me suis jamais troublé lorsque j'ai été humilié, car
ma pensée tout entière était occupée par cela: prier le Seigneur de me dévêtir
de l'homme ancien » (I Padri del deserto. Detti, Roma 1980, p. 287)
.
(
ZENIT.org
)
La souffrance a toujours un sens aux yeux de Dieu, déclare Benoît XVI
Le pape médite le psaume 125 au cours de sa catéchèse du mercredi 17 août
2005
Lecture: Ps 125, 1-5
1. En écoutant les paroles du psaume 125, on a l'impression de voir défiler
devant les yeux l'événement chanté dans la seconde partie du Livre d'Isaïe: le «
nouvel exode ». C'est le retour d'Israël de l'exil de Babylone à la terre des
pères à la suite de l'édit du roi de Perse Cyrus en 538 avant J.-C. Alors se
répéta l'expérience joyeuse du premier exode, lorsque le peuple juif fut libéré
de l'esclavage d'Egypte.
Ce psaume revêtait une signification particulière lorsqu'il était chanté
les jours où Israël se sentait menacé et avait peur, car il était de nouveau
soumis à l'épreuve. Le psaume comprend effectivement une prière pour le retour
des prisonniers du moment (cf. v. 4). Il devenait ainsi une prière du peuple de
Dieu sur son itinéraire historique, pavé de dangers et d'épreuves, mais toujours
ouvert à la confiance en Dieu Sauveur et Libérateur, soutien des faibles et des
opprimés.
2. Le psaume introduit une atmosphère de joie: on sourit, on se réjouit de
la liberté obtenue, des lèvres s'élèvent des chants de joie (cf. vv. 1-2).
La réaction face à la liberté redonnée est double. D'un côté, les nations
païennes reconnaissent la grandeur du Dieu d'Israël: « Merveilles que fit pour
eux le Seigneur » (v. 2). Le salut du peuple élu devient une preuve limpide de
l'existence efficace et puissante de Dieu présent et actif dans l'histoire. De
l'autre côté, c'est le peuple de Dieu qui professe sa foi dans le Seigneur qui
sauve: « Merveilles que fit pour nous le Seigneur » (v. 3).
3. La pensée se tourne ensuite vers le passé, revécu avec un frisson de
peur et d'amertume. Nous aimerions fixer notre attention sur l'image liée à
l'agriculture utilisée par le psalmiste: « Ceux qui sèment dans les larmes
moissonnent en chantant » (v. 5). Sous le poids du travail, le visage est
parfois sillonné de larmes: on accomplit une semence difficile, parfois vouée à
l'inutilité et à l'échec. Mais lorsqu'arrive la moisson abondante et joyeuse, on
découvre que cette douleur a été féconde.
Dans ce verset du psaume est résumée la grande leçon sur le mystère de
fécondité et de vie que peut contenir la souffrance. Précisément comme l'avait
dit Jésus au seuil de sa passion et de sa mort: « Si le grain de blé tombé en
terre ne meurt pas, il demeure seul; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit
» (Jn 12, 24).
4. L'horizon du psaume s'ouvre ainsi à une moisson de fête, symbole de la
joie engendrée par la liberté, la paix et la prospérité, qui sont le fruit de la
bénédiction divine. Cette prière devient alors un chant d'espérance, auquel on
peut recourir lorsqu'on est plongé dans le temps de l'épreuve, de la peur, de la
menace extérieure et de l'oppression intérieure.
Mais il peut également devenir un appel plus général à vivre ses jours et à
accomplir ses choix dans un climat de fidélité. La persévérance dans le bien,
même si elle est incomprise et contrariée, débouche toujours à la fin sur un
phare de lumière, de fécondité, de paix.
C'est ce que saint Paul rappelait aux Galates: « Qui sème dans l'esprit,
récoltera de l'Esprit la vie éternelle. Ne nous lassons pas de faire le bien; en
son temps viendra la récolte, si nous ne nous relâchons pas » (Ga 6, 8-9).
5. Nous concluons par une réflexion de saint Bède le Vénérable (672/3-735)
sur le psaume 125 commentant les paroles par lesquelles Jésus annonçait à ses
disciples la tristesse qui les attendait et la joie qui devait jaillir de leur
affliction (cf. Jn 16, 20).
Bède rappelle que « pleuraient et se lamentaient ceux qui aimaient le
Christ lorsqu'ils le virent capturé par les ennemis, ligoté, porté en jugement,
condamné, fouetté, ridiculisé, et enfin crucifié, frappé par la lance et
enseveli. Au contraire, ceux qui aimaient le monde se réjouissaient...
lorsqu'ils condamnèrent à une mort terrible celui dont la seule vue leur était
insupportable. Les disciples furent attristés par la mort du Seigneur, mais,
ayant appris sa résurrection, leur tristesse se transforma en joie; ayant vu
ensuite le prodige de l'ascension, avec une joie encore plus grande, ils
louèrent et bénirent le Seigneur, comme en témoigne l'évangéliste Luc (cf. Lc
24, 53). Mais ces paroles du Seigneur s'adaptent à tous les fidèles qui, à
travers les larmes et les douleurs du monde, s'efforcent de parvenir aux joies
éternelles, et qui, à juste titre, pleurent à présent et sont tristes, parce
qu'ils ne peuvent plus voir celui qu'ils aiment et parce que, jusqu'à ce qu'ils
demeurent dans leur corps, ils savent qu'ils sont loin de leur patrie et de leur
royaume, même s'ils sont certains de parvenir, à travers leurs difficultés et
leurs luttes, à la récompense. Leur tristesse se transformera en joie lorsque,
une fois terminée la lutte de cette vie, ils recevront la récompense de la vie
éternelle, selon ce que dit le Psaume: Celui qui sème dans les larmes, récoltera
dans la joie » (Homélies sur l'Evangile, 2, 13: Collection de Textes
patristiques, XC, Roma 1990, pp. 379-380).
(
ZENIT.org
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