Carême en vue... Souviens-toi que tu
es poussière ! |
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Le 30 janvier 2008 -
(E.S.M.)
- Le carême, on le
sait, est une préparation à la sainte fête de Pâques, par la pénitence
et la prière. Dans le Message qu’il a adressé à l’occasion de
l’ouverture prochaine du carême, le 6 février, le pape Benoît XVI a
rappelé ceci : « C'est l'amour et non la richesse matérielle qui dicte
les lois de l'existence ». Ce message ne s’adresse pas seulement aux
fidèles ; il vaut pour tout homme et toute femme.
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Carême en vue... Souviens-toi que tu es poussière !
Le carême, on le sait, est une préparation à la sainte fête de Pâques, par
la pénitence et la prière. Il marque de façon plus particulière le “combat”,
selon le terme utilisé par les Ecritures, la tradition spirituelle et la
liturgie, que les fidèles – mais aussi tous les hommes – doivent mener sur
eux-mêmes, contre le péché, pour se tourner vers Dieu pour recevoir sa
miséricorde : « Seigneur, Tu aimes tout ce qui existe, et Tu n´as de
répulsion pour aucune de tes œuvres ; Tu fermes les yeux sur les péchés des
hommes: Tu les invites à la pénitence, et Tu leur pardonnes, car Tu es le
Seigneur notre Dieu » (Sag. 11, 24-25.27).
Cette pénitence est ouverte et symbolisée par le rituel des cendres, par
lequel le prêtre, marquant sur le front des fidèles le signe de la croix
rédemptrice avec des cendres, leur rappelle qu’ils sont poussière et
retourneront à la poussière.
Ce rappel a, de tous temps, été très cruel à l’orgueil humain et à ses
songes. Il l’est plus encore dans une société tournée sur l’avoir, la
possession, la richesse, la consommation, la poursuite forcenée de l’intérêt
personnel, vivant dans l’illusion d’un monde sans fin et d’une éternité
matérielle. Il s’agit pourtant d’un rappel salutaire. L’Eglise ne le fait
pas pour jouer les rabat-joie. Elle exerce sa pédagogie réaliste. Non, tout
cela, qu'on le veuille ou non, ne durera pas : vous amassez, vous
thésaurisez, vous construisez d’invraisemblables bulles financières, vous
calculez sans fin vos bénéfices, vos profits, vos avoirs, vos carrières et
vos retraites, et tout cela fort souvent aux dépens d’autrui, mais au bout
du compte, vous partirez sans rien, comme vous êtes venus. Viendra pour vous
ce qu’il advient pour chacun : l’accident, ou la maladie, plus ou moins
dégradante, la terrible solitude des derniers jours, et la mort, et la
poussière.
Est-ce cruel de le dire ? En un sens oui, pour ceux et celles qui déploient
tant d’efforts et d’argent pour essayer de paraître éternellement jeunes, ou
qui se distraient perpétuellement de la considération de la fin à laquelle
ils s’acheminent pourtant, comme s’ils marchaient à l’envers sur un tapis
roulant. La douche est très froide. Mais il est mille fois, cent mille fois
plus cruel de le taire. Quel est le père, ou la mère, qui serait assez
insensé pour ne pas essayer de mettre en garde ses enfants contre une
situation dont ils savent qu’elle constitue pour eux une menace certaine ?
Cela fait des siècles et des siècles qu’il y a des gens pour ricaner de ce
genre de discours, on le sait bien. Mais cela fait des siècles et des
siècles aussi que ces ricanements, inexorablement, s'éteignent dans des
tombes froides. Des siècles aussi où grâce à Dieu, d’autres, mieux
inspirés, prenant au sérieux cette histoire nécessaire, y trouvent une porte
vers la vie.
Dans le Message qu’il a adressé à l’occasion de l’ouverture prochaine du
carême, le 6 février, le pape Benoît XVI a rappelé ceci : « C'est l'amour et
non la richesse matérielle qui dicte les lois de l'existence ». Ce message
ne s’adresse pas seulement aux fidèles ; il vaut pour tout homme et toute
femme, pour toute existence humaine, puisqu'il fait appel à des « lois » qui
sont spécifiques à la nature humaine, qui est celle d'êtres capables de
connaissance et d'amour.
En disant cela, le pape exprime que les hommes doivent réapprendre à
orienter leurs vies, leurs professions, leurs organisations sociales, leurs
projets personnels, politiques, économiques ou écologiques, selon le critère
de l’amour des autres et non pas selon celui exclusif de l'enrichissement,
quitte à y sacrifier quelque chose ou à se limer quelque peu les dents.
Mais il indique aussi qu'intrinsèquement la loi de l’existence, c’est
l’amour. Autrement dit, une existence humaine ne "fonctionne" comme telle
que si elle est menée dans une logique de l'amour, du don, du pardon, du
partage. Si ce n'est pas le cas, elle est autre chose qu'une existence
humaine ; au mieux, elle n'en est qu'une atrophie, un nanisme moral. La
sociologie le confirme d'ailleurs, qui manifeste que l'économisme ambiant
conduit souvent les hommes à une multiplication de clones, chosifiés dans
leurs emplois, massifiés dans leurs pensées réduites, leur façon de
s'habiller, de se divertir, de s'abrutir.
La richesse matérielle conduit à la richesse matérielle, comme un pas
conduit à un autre, selon sa logique matérielle propre, mais elle n’assure
elle-même rien d’humain. Elle ne détermine rien qui soit proprement humain.
Elle peut même engendrer l’inhumain, et c’est d’ailleurs ce dont elle est
ordinairement le plus capable. C’est pourquoi l’Evangile avertit qu’il est
plus facile à un chameau de passer par le chas d’une aiguille qu’à un riche
d’entrer dans le Royaume des cieux. Cela paraît énorme comme affirmation,
mais c’est tout de même le Christ qui le dit, et il connaît bien le seuil de
ce Royaume, lui qui est voie, vérité et vie.
Qu'on observe bien l'image qu'il donne : il s'agit de faire passer quelque
chose dans quelque chose, ce qui réclame mouvement, et surtout tension et
attention [tous ceux qui ont dû faire passer un fil dans une aiguille savent
de quoi je parle !]. En réalité, ce n'est pas la taille du paisible camélidé
qui est directement en cause ici, c'est "l'intension" et la préoccupation du
riche : elles sont telles, par rapport aux vraies fins de l'homme, figurées
par le chas de l'aiguille, qu'elles rendent le passage rigoureusement
impossible. Là où es ton trésor, est-il dit ailleurs, là est ton cœur. Si
notre cœur n'est pas en Dieu, Dieu ne sera jamais notre trésor.
Seul donc l’amour peut faire la différence, en ce monde, pour modifier des
rapports humains qui peuvent devenir invivables, et qui le sont souvent déjà
d'ailleurs à bien des égards, et seul il le fait aussi pour l’autre : « Au
dernier jour, disait saint Jean de la Croix – Docteur en la matière – nous
serons jugés sur l’amour ».
« Souviens-toi que tu es poussière, et que tu retourneras en poussière ». A
l’entrée de l’Enfer de Dante, le visiteur est averti qu’il doit laisser là
toute espérance. A l’entrée en carême, le fidèle est averti qu’au soir de sa
vie il ne sera revêtu que de mort ou d’amour. Il ne restera rien d’autre que
poussière. Mort éternelle ou amour éternel. On entre donc en carême en
prenant de l’espérance, si on l’a jusque-là laissé tomber, pour regarder à
l’inéluctable. Non pas comme à un mur où toute existence est appelée à se
fracasser, mais comme à une rencontre à laquelle se préparer, et qui est
éclairée de toutes les fulgurantes promesses de la Résurrection. L’étreinte
à venir demande des mains, elle demande des bras, elle demande un cœur
aimant. C’est ici, c’est maintenant qu’ils se forgent. C’est à cela que le
carême nous invite à penser et à travailler pour opérer, par la prière et la
pénitence, une réorientation de notre vie où l’amour de Dieu et des autres
puisse être, avec sa grâce miséricordieuse, le premier et le dernier de nos
mots.
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Message de Benoît XVI pour le Carême 2008
Sources:
HERMAS
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 30.01.2008 - BENOÎT XVI |