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19 Avril 2005
 

Benoît XVI : le saut de la foi dans l'invisible

Le 26 février  2023 - (E.S.M.) - De façon plus ou moins lointaine toute vie est participation à la vie divine, participation au Verbe de Dieu. Non pas seulement « don », mais « participation », ce qui n'est pas seulement davantage, mais d'un autre ordre. Participation, c'est-à-dire que Dieu ne cesse d'être présent aux êtres, de les informer de l'intérieur, d'être leur vie même. Non pas cependant au sens d'une subordination de Dieu à ce qu'il aurait communiqué de lui-même à son œuvre, mais tout à l'opposé, Dieu antérieur à son œuvre, distinct d'elle et s'épanchant librement en elle par une création continue, que rien ne limite ni ne contient. P.P.M.de la C.

Benoît XVI - Pour agrandir l'image ► Cliquer

 

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     5) La foi : « prendre appui » / « comprendre
   
    En opposant les relations « prendre appui/comprendre » et « savoir/faire », je fais allusion à un verset biblique concernant la foi, pratiquement impossible à traduire. Luther a essayé de rendre le jeu de mots profond dans la formule : « Si vous ne croyez pas, vous ne subsisterez pas ». Plus littéralement l'on pourrait traduire : « Si vous ne tenez pas à moi, vous ne tiendrez pas » (Is 7, 9). La racine 'mn (amen) comprend à elle seule plusieurs significations, dont la parenté et les nuances font la subtile richesse de ce verset. Elle peut signifier : vérité, solidité, ferme appui ; ou encore : fidélité, se fier, se confier, prendre appui, avoir foi. Ainsi croire en Dieu, c'est adhérer à Dieu et grâce à cette adhésion, l'homme gagne un appui ferme pour sa vie. Croire, c'est prendre pied, s'appuyer avec confiance sur le fondement de la parole de Dieu. Les Septante (traduction grecque de l'Ancien Testament) ont traduit ce verset, en l'infléchissant dans le sens de la pensée grecque : « si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas. » Selon certains exégètes, nous assisterions ici au processus d'hellénisation, déviation de la pensée biblique originelle. La foi aurait été intellectualisée. Au lieu d'exprimer l'attitude confiante qui s'appuie sur la parole indéfectible de Dieu, la foi est mise en relation avec l'intelligence, avec la raison, et placée sur un plan totalement différent et complètement inadéquat. Il y a sans doute une part de vérité. Mais, à mon sens, on peut dire que par rapport à l'ensemble et dans des catégories différentes, l'essentiel est sauf. Le mot hébreu, qui exprime une prise de position du croyant, n'exclut nullement l'élément intellectuel. Nous reviendrons dans un instant sur ce point. En attendant, nous pouvons reprendre le fil de nos considérations et dire : la foi se situe donc sur un plan totalement différent de celui de « l'opérationnel ». Dans son essence, elle traduit la confiance en une réalité qui n'est pas et ne peut pas être l'œuvre de nous-mêmes, et qui pour cette raison est le fondement de notre activité. On ne saurait jamais la rencontrer ni en aucun cas la trouver sur le plan de « l'opérationnel », sur le plan du verum quia factum seu faciendum. Si l'on essayait de « l'étaler sur la table » et d'en donner une preuve dans le contexte de « l'opérationnel », on ferait fausse route, on irait à l'échec. Une telle réalité échappe à ce genre de science ; celui qui la trouverait sur ce terrain n'en aurait découvert qu'une contrefaçon. Le « peut-être » lancinant, par lequel la foi interpelle l'homme partout et sans relâche n'a pas trait à une incertitude dans le domaine des sciences techniques ; il est la mise en question du caractère absolu de ce domaine ; il est l'indication du caractère relatif de ce domaine, qui ne représente qu'un niveau de l'être humain et de l'être tout court, et qui porte la marque du non-achevé. En d'autres termes, nos réflexions nous ont amenés à constater qu'il y a deux formes fondamentales dans l'attitude humaine en face de la réalité, et qui sont irréductibles l'une à l'autre, car elles ne se situent pas sur le même plan.

    On peut rappeler ici une opposition faite par Martin Heidegger, qui distingue entre la pensée mathématique et la pensée méditative. Les deux sont parfaitement légitimes et même nécessaires, mais pour cette raison même, elles sont irréductibles l'une à l'autre. Les deux formes doivent exister : la pensée mathématique ordonnée à « l'opérationnel » et la pensée spéculative qui réfléchit sur l'être. Le philosophe fribourgeois n'a pas tout à fait tort quand il exprime son appréhension que, dans un temps où la pensée mathématique fête ses triomphes les plus éclatants, l'homme est menacé plus que jamais du manque de réflexion, en évitant de penser. Uniquement préoccupé de « l'opérationnel », il risque d'oublier le retour sur lui-même, de réfléchir sur le sens de son être. Sans doute cette tentation est-elle de tous les temps. Ainsi au XIIIe siècle, le grand théologien franciscain Bonaventure se crut obligé de reprocher à ses collègues de la faculté de philosophie à Paris, d'avoir appris à mesurer le monde mais d'avoir désappris à se mesurer eux-mêmes. Autrement dit, la foi telle que le Credo la conçoit n'est pas une forme inachevée du savoir, une opinion que l'on pourrait ou devrait transposer en termes de savoir opérationnel. Par son essence, elle est plutôt une autre forme d'attitude spirituelle qui se juxtapose, avec son caractère personnel et autonome, au savoir opérationnel, auquel on ne saurait la ramener et dont elle ne dérive en aucun cas. Car la foi n'est pas ordonnée au domaine de la technique et de l'histoire, bien qu'elle ait rapport aux deux. Elle est du ressort des options fondamentales de l'homme, qui demandent inévitablement une réponse. Cette réponse, de par son essence, ne peut revêtir qu'une forme, que nous appelons la foi. Il est indispensable, me semble- t-il, d'en avoir une idée très nette : tout homme doit prendre position, d'une manière ou d'une autre, à l'égard des options fondamentales de l'existence ; il ne peut le faire que sous la forme d'une foi. Il y a un domaine qui n'admet pas d'autre réponse que la foi ; il n'est au pouvoir de personne de l'éviter entièrement. D'une certaine manière, tout homme est obligé d'avoir une foi.

    La tentative la plus convaincante jusqu'à présent, de faire coïncider malgré tout l'attitude de « foi » avec l'attitude du savoir pratique, a été faite par le marxisme. Car ici, le « faciendum », l'avenir que l'homme doit édifier de ses propres forces, représente en même temps le « sens » de l'homme, de sorte que ce sens donné normalement par la foi est donné ici sur le plan de l'opérationnel. De ce fait le marxisme est allé à l'extrême limite de la pensée moderne ; il semble avoir réussi à faire entrer entièrement le sens de l'homme dans « l'opérationnel », au point de les faire coïncider. Mais à y regarder de plus près, on s'aperçoit que lui non plus n'a pas trouvé la solution de la quadrature du cercle. Car il ne saurait démontrer que « l'opérationnel » soit le véritable sens de la vie ; il ne peut que le promettre et en faire un objet de foi. Ce qui paraît rendre aujourd'hui cette foi si attractive et si directement accessible, c'est l'impression d'harmonie avec le savoir opérationnel qu'elle suscite.

    Après cette courte digression, revenons à notre sujet et, pour résumer, posons encore une fois la question : qu'est-ce que la foi ? Nous dirons : elle est la forme, irréductible au savoir et sans commune mesure avec lui, d'une prise de position de l'homme à l'égard de l'ensemble de la réalité; elle est ce qui donne le sens, fournissant une base à la vie humaine, sens préexistant au calcul et à l'action de l'homme, sans lequel, en définitive, il ne saurait ni calculer ni agir, faute de fondement indispensable. En vérité, l'homme ne vit pas seulement du pain de son activité technique. Il est homme ; il vit de ce qui lui est précisément propre : de la parole, de l'amour et du sens. Le sens est le pain qui fait vivre le tréfonds de son être. Sans la parole, sans le sens, sans l'amour, l'homme sombre dans le désespoir, même s'il jouit du confort et de l'abondance. On sait combien la situation du « je n'en peux plus » éclot très souvent au sein même de la richesse matérielle ! Or le sens ne provient pas du savoir. Vouloir le créer de cette façon, c'est-à-dire vouloir le faire dériver du savoir « opérationnel », correspondrait à la tentative absurde de Munchhausen, qui cherchait à se tirer du marais, en se tenant à ses propres cheveux. Cette histoire absurde n'est-elle pas l'image exacte de la situation de l'homme. Personne n'est capable de se tirer soi-même du marais de l'incertitude et du désespoir ; et ce n'est pas par une série de syllogismes, de preuves logiques, par un « cogito ergo sum » comme Descartes pouvait encore le penser, que nous y arriverons. Un sens que l'on se donne à soi-même n'a pas de sens en dernier ressort. Le sens, c'est-à-dire le fondement sur lequel repose toute notre existence, nous ne pouvons le créer nous-mêmes, nous ne pouvons que le recevoir.

    Partis d'une analyse très générale de l'attitude fondamentale de foi, nous voici arrivés directement à la véritable notion de la foi chrétienne. Croire en chrétien veut dire : se confier au sens qui me porte et qui porte aussi le monde ; le regarder comme un roc solide sur lequel je puis m'appuyer sans crainte. Suivant le langage traditionnel, nous pourrions dire : croire en chrétien, c'est faire de son existence une réponse à la parole, au logos, racine et fondement de toutes choses. C'est admettre que le sens qui ne dépend pas de nous et que nous ne pouvons que recevoir, nous est déjà donné, de telle manière qu'il nous suffit de le saisir et de nous y abandonner. En conséquence, la foi chrétienne, c'est reconnaître que le don précède l'action - sans pour autant déprécier l'action ou même la déclarer inutile. C'est parce que nous avons reçu qu'il nous est possible de « faire ». Et puis, comme nous l'avons dit, la foi chrétienne accorde plus de réalité à l'invisible qu'au visible. 

    Elle professe le primat de l'invisible comme étant le vrai réel qui nous porte et qui nous permet ainsi d'affronter avec assurance le monde visible, conscients de notre responsabilité devant l'Invisible, racine de toutes choses. De ce fait, la foi chrétienne - on ne peut le nier - représente un double défi à l'attitude préconisée par la vision du monde moderne. Le positivisme et le phénoménologisme nous incitent à nous limiter au « visible », au « phénomène », dans le sens le plus large du mot, et à étendre cette attitude méthodique, qui a permis tous les succès des sciences de la nature, à tous nos rapports avec la réalité. La technique à son tour nous invite à faire confiance à la « praxis », qui fournira un point d'appui solide. Or, le primat, accordé à l'invisible et à l'accueil d'un don, va dans le sens diamétralement opposé. Voilà pourquoi le saut de la foi dans l'invisible devient si difficile de nos jours. Et cependant, la liberté de créer et de soumettre le visible, grâce à une recherche méthodique, n'est rendue possible en dernière analyse que par le caractère provisoire que la foi confère à cette activité par la domination que nous acquérons ainsi sur elle.

A suivre

  
 

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Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -  E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 26.02.2023

 
 

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