Benoît XVI: le monde a
besoin d'un témoignage commun |
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ROME, le 27 janvier 2007 -
(E.S.M.) - Dans son homélie, le pape Benoît XVI qui présidait les
vêpres en clôture de la Semaine de prière pour l'unité a encouragé les
fidèles à s’interroger sur le fait que "nous, chrétiens, soyons devenus
peut-être trop muets ?", se demandant si "le courage de parler et de
témoigner comme l’ont fait ceux qui étaient témoins de la guérison du
sourd-muet, ne nous manquait pas aujourd’hui.
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Le pape Benoît XVI
Benoît XVI: le monde a besoin d'un témoignage commun
Texte intégral de l'homélie de Benoît XVI
Dans son homélie, le pape Benoît XVI qui présidait les vêpres en clôture de la
Semaine de prière pour l'unité, a encouragé les fidèles à s’interroger sur le
fait que "nous, chrétiens, soyons devenus peut-être trop muets ?", se
demandant si "le courage de parler et de témoigner comme l’ont fait ceux qui
étaient témoins de la guérison du sourd-muet, ne nous manquait pas
aujourd’hui. " Le Saint Père a rappelé que le monde a besoin d'un témoignage
commun.
Voici le texte intégral de l'homélie que le pape Benoît XVI a prononcée au
cours de la célébration.
Chers frères et sœurs !
Au cours de la « Semaine de prière » qui se conclut ce soir, s'est
intensifiée dans les diverses Eglises et Communautés ecclésiales du monde
entier, l'invocation commune au Seigneur pour l'unité des chrétiens. Nous
avons médité ensemble sur les paroles de l'évangile de Marc qui viennent
d'être proclamées : « Il fait entendre les sourds et parler les muets »
(Mc
7, 37), thème biblique proposé par les communautés chrétiennes d'Afrique du
Sud. Les situations de racisme, de pauvreté, de conflit, d'exploitation, de
maladie, de souffrance, dans lesquelles elles se trouvent, en raison de
l'impossibilité même de faire comprendre leurs besoins, suscitent en elles
une exigence profonde d'écouter la parole de Dieu et de parler avec courage. Etre sourd-muet, c'est-à-dire ne pouvoir ni entendre ni parler, ne peut-il
pas en effet être un signe de manque de communion et un symptôme de division
? La division et l'incommunicabilité, conséquence du péché, sont contraires
au dessein de Dieu. L'Afrique nous a offert cette année un thème de
réflexion de grande importance religieuse et politique, car « parler » et «
écouter » sont des conditions essentielles pour édifier la civilisation de
l'amour.
Les paroles « Il fait entendre les sourds et parler les muets » constituent
une bonne nouvelle, qui annonce la venue du Royaume de Dieu et la guérison
de l'incommunicabilité et de la division. Ce message se retrouve dans toute
la prédication et l’oeuvre de Jésus, qui traversait les villages, les villes
et les campagnes, et, partout où il allait, « on mettait les malades sur les
places et on le priait de les laisser toucher ne fût-ce que la frange de son
manteau, et tous ceux qui le touchaient étaient sauvés »
(Mc 6, 56). La
guérison du sourd-muet, sur laquelle nous avons médité ces derniers jours, a
lieu alors que Jésus, ayant quitté la région de Tyr, se dirige vers le lac
de Galilée, traversant ce qu'on appelle la « Décapole », territoire
multiethnique et multireligieux (cf. Mc 7, 31). Une situation emblématique
également pour notre époque. Comme ailleurs, dans la Décapole également, on
présente à Jésus un malade, un homme sourd et ayant des difficultés à parler
(moghìlalon) et on le prie de lui imposer les mains, car on le considère
comme un homme de Dieu. Jésus conduit le sourd-muet loin de la foule et
accomplit des gestes qui signifient un contact salvifique - il met ses
doigts dans ses oreilles, touche avec sa salive la langue du malade - puis,
tournant le regard vers le ciel, commande : « Ouvre-toi ! ». Il prononce ce
commandement en araméen (« Ephphata ») vraisemblablement la langue des
personnes présentes et du sourd-muet lui-même, une expression que
l'évangéliste traduit en grec (dianoìchthti). Les oreilles du sourd
s'ouvrirent, le lien de sa langue se dénoua : « et il parlait correctement »
(orthos). Jésus recommande que l'on ne dise rien du miracle. Mais, plus il
le recommandait, « de plus belle ils le proclamaient ». Et le commentaire
émerveillé de ceux qui y avaient assisté reprend la prédication d’Isaïe pour
l’avènement du Messie : « Il fait entendre les sourds et parler les muets »
(Mc 7, 37).
Le premier enseignement que nous tirons de cet épisode biblique, rappelé
également lors du rite du baptême, est que, dans la perspective chrétienne,
l'écoute est prioritaire. A cet égard, Jésus affirme de façon explicite : «
Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et l'observent ! »
(Lc
11, 28). Plus encore, à Marthe, préoccupée par tant de choses, Il dit qu'«
il en faut peu, une seule même » (Lc 10, 42). Et du contexte, il apparaît
que cette seule chose est l'écoute obéissante de la Parole. C'est pourquoi
l'écoute de la parole de Dieu est prioritaire pour notre engagement
œcuménique. En effet, ce n'est pas nous qui faisons ou organisons l'unité de
l'Eglise. L'Eglise ne se fait pas elle-même et ne vit pas d'elle-même, mais
de la parole créatrice qui vient de la bouche de Dieu. Ecouter ensemble la
parole de Dieu ; pratiquer la lectio divina de la Bible, c'est-à-dire
la lecture liée à la prière ; se laisser surprendre par la nouveauté, qui ne
vieillit jamais et qui ne finit jamais, de la parole de Dieu ; surmonter
notre surdité face aux paroles qui ne s'accordent pas avec nos préjugés et
nos opinions ; écouter et étudier, dans la communion des croyants de tous
les temps : tout cela constitue un chemin à parcourir pour atteindre l'unité
dans la foi, comme réponse à l'écoute de la Parole.
Celui qui se met à l'écoute de la parole de Dieu peut et doit ensuite parler
et la transmettre aux autres, à ceux qui ne l'ont jamais écoutée, ou à ceux
qui l'ont oubliée et enterrée sous les épines des soucis et des séductions
du monde (cf. Mt 13, 22). Nous devons nous demander : nous, chrétiens, ne
sommes-nous pas devenus trop muets ? Ne nous manque-t-il pas le courage de
parler et de témoigner comme l'ont fait ceux qui étaient les témoins de la
guérison du sourd-muet dans la Décapole ? Notre monde a besoin de ce
témoignage ; il attend surtout le témoignage commun des chrétiens. C'est
pourquoi l'écoute du Dieu qui parle implique également l'écoute réciproque,
le dialogue entre les Eglises et les Communautés ecclésiales. Le dialogue
honnête et loyal constitue l'instrument irremplaçable de la recherche de
l'unité. Le Décret sur l'œcuménisme du Concile Vatican II a souligné que si
les chrétiens ne se connaissent pas réciproquement, aucun progrès sur la
voie de la communion n'est envisageable. En effet, dans le dialogue, on
s'écoute et l'on communique ; on se confronte, et, avec la grâce de Dieu, on
peut converger sur sa parole en accueillant ses exigences, qui sont valables
pour tous.
Dans l'écoute et dans le dialogue, les Pères conciliaires n’ont pas entrevu
une utilité orientée exclusivement vers le progrès œcuménique, mais ils ont
ajouté une perspective se référant à l'Eglise catholique elle-même : « De ce
genre de dialogue - affirme le texte du Concile - ressort plus clairement
aussi la vraie position de l'Eglise catholique » (Unitatis
Redintegratio,
n. 9). Il est bien sûr indispensable d'« exposer clairement la doctrine
intégrale » pour un dialogue en mesure d'affronter, de discuter et de
surmonter les divergences existant entre les chrétiens, mais dans le même
temps « la méthode et la manière d'exprimer la foi catholique ne doivent
nullement faire obstacle au dialogue avec les frères »
(ibid., n.
11). Il faut parler correctement (orthos) et de manière compréhensible. Le
dialogue œcuménique comporte la correction fraternelle évangélique et
conduit à un enrichissement spirituel réciproque dans le partage des
expériences de foi et de vie chrétienne authentiques. Pour que cela ait
lieu, il faut implorer sans se lasser l'assistance de la grâce de Dieu et
l'illumination de l'Esprit Saint. C'est ce que les chrétiens du monde entier
ont fait au cours de cette « Semaine » particulière, ou qu'ils feront au
cours de la Neuvaine qui précède la Pentecôte, ainsi qu'en chaque
circonstance opportune, en élevant leur prière confiante afin que tous les
disciples du Christ soient un, et afin que, dans l'écoute de la Parole, ils
puissent donner un témoignage unanime aux hommes et aux femmes de notre
temps.
Dans cette atmosphère d'intense communion, je désire adresser mon salut
cordial à toutes les personnes présentes : au cardinal archiprêtre de cette
Basilique, au cardinal président du Conseil pontifical pour la Promotion de
l'Unité des Chrétiens et aux autres cardinaux, aux vénérés frères dans
l'épiscopat et dans le sacerdoce, aux moines bénédictins, aux religieux et
aux religieuses, aux laïcs qui représentent la communauté diocésaine de Rome
tout entière. Je voudrais saluer de manière particulière les frères des
autres Eglises et Communautés ecclésiales qui prennent part à la
célébration, en renouvelant la tradition significative de conclure ensemble
la « Semaine de prière », le jour où nous commémorons la conversion
foudroyante de saint Paul sur le chemin de Damas. Je suis heureux de
souligner que le sépulcre de l'Apôtre des nations, auprès duquel nous nous
trouvons, a récemment été l'objet de recherches et d'études, à la suite
desquelles on a voulu le rendre visible aux pèlerins, grâce à une
intervention adaptée sous l'autel majeur. Je présente mes félicitations pour
cette importante initiative. Je confie à l'intercession de saint Paul,
inlassable constructeur de l'unité de l'Eglise, les fruits de l'écoute et du
témoignage communs dont nous avons pu faire l'expérience lors des nombreuses
rencontres fraternelles et des dialogues qui ont eu lieu au cours de l'année
2006, aussi bien avec les Eglises d'Orient qu'avec les Eglises et les
Communautés ecclésiales en Occident. A travers ces événements, il a été
possible de percevoir la joie de la fraternité, tout comme la tristesse pour
les tensions qui demeurent, en conservant toujours l'espérance que le
Seigneur nous communique. Nous remercions ceux qui ont contribué à
intensifier le dialogue œcuménique par la prière, par l'offrande de leur
souffrance et par leur action inlassable. C'est surtout à notre Seigneur
Jésus Christ que nous rendons grâce avec ferveur pour tout. Que la Vierge
Marie fasse en sorte que l'on puisse au plus tôt réaliser l'ardente
aspiration à l'unité de son divin Fils : « Que tous soient un... afin que le
monde croie » (Jn 17, 21).
Synthèse de
l'homélie:
Benoît XVI clôture la semaine de prière pour l'unité des chrétiens
Benoît XVI, recueilli devant le tombeau de Saint Paul:
Benoît XVI
Sources: -
www.vatican.va
-
E.S.M.
© Copyright du texte original en italien : Libreria Editrice Vaticana
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 27.01.2007 - BENOÎT XVI |