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La petite communauté de Jean Paul II

 

Cité du Vatican, le 25 septembre 2007 - (E.S.M.) - L'amour de sa terre natale est si puissant que Jean-Paul II, en vingt-deux ans de pontificat, y est retourné sept fois. Il y est toujours accueilli avec autant d'enthousiasme. Presque dix ans après la chute du régime, la première chaîne nationale de télévision polonaise comme la radio nationale retransmettent tous les dimanches, à midi, en direct, la bénédiction papale.

Le pape Jean Paul II

La petite communauté de Jean Paul II

II y a cinq ans, l'auteur du livre "Le Pape en privé" se lance un défi : entrer avec un photographe dans les appartements privés du Pape, le rencontrer, l'interroger. Avec patience et obstination, Caroline Pigozzi force la porte de bronze du plus petit État du monde et tisse des liens de confiance, respectueux et joyeux, avec l'homme le plus médiatisé, le plus secret et le plus protégé de la planète.

Comment vivait Jean-Paul II ? À quoi ressemblaient ses journées, qui sont ses visiteurs, ses amis ? Il a transformé la vie quotidienne au Vatican comme il a bouleversé les rapports traditionnels établis par ses prédécesseurs entre lui et les catholiques, lui et les chefs d'État, lui et la télévision. Une fois franchi le barrage que constitue le cercle des Polonais, garde rapprochée du souverain pontife, Caroline Pigozzi a parlé avec ses conseillers, elle est montée dans tous les avions quand le Pape partait conquérir les foules. Elle a rencontré les hommes qui veillent sur sa fragile santé, elle s'est rendue en Pologne voir ses amis du temps du séminaire et dans les chalets de montagne où, l'été, il aime pique-niquer. Rien n'a échappé à l'œil sagace de Caroline Pigozzi. C'est pourquoi le lecteur est de plain-pied là où il n'est jamais allé : dans l'intimité de Jean-Paul II.
Caroline Pigozzi est grand reporter à Paris Match. Elle a obtenu le prix Mumm pour ses reportages sur Karol Wojtyla. (Éditions Nil)

Première partie: Dans l'intimité de Jean-Paul II

IIème partie:
Monseigneur Dziwisz a l'art de n'être jamais envahissant ni devant les caméras ni dans le voisinage du souverain pontife où se bousculent parfois d'importants et obséquieux prélats. Au Vatican, il n'y a qu'une star : le pape. Peu importe à son secrétaire particulier de ne pas être sur le devant de la scène dans la mesure où il contrôle les ressorts de la vie de Jean-Paul II en dehors des structures institutionnelles. Il n'a pas les clés de saint Pierre mais il a tous les passes. Rien n'est possible sans lui. Il lui est facile d'invoquer la fatigue du Saint-Père pour écarter un rendez-vous ou remettre la visite d'une personnalité à une date indéterminée. Il devine, en effet, si elle l'importune ou risque de le lasser.

Autour de monseigneur Dziwisz s'articule l'importante colonie polonaise de la Ville éternelle. Une poignée de proches qui sont à des postes stratégiques : le père Adam Boniecki, ancien directeur de l'édition polonaise de L'Osservatore Romano, l'organe officiel du Vatican (on a fait, après l'élection de Karol Wojtyla, cette édition polonaise qui, contrairement à la version italienne, ne paraît qu'une fois par semaine ; elle est rentable car elle se vend très bien en Pologne) ; l'abbé Mieczyslaw Mokrzycki, secrétaire particulier adjoint du pape ; monseigneur Henryk Nowack, responsable de la section polonaise de la secrétairerie d'État ; monseigneur Pawel Ptasznik, et d'autres compatriotes aux fonctions moins précises mais qui communiquent eux aussi directement avec monseigneur Stanislaw en ignorant les bureaucratiques et très lents canaux officiels.

Ils fonctionnent en circuit fermé, protégés et aidés par leur langue commune. C'est également le cas des cinq religieuses polonaises, recluses dans les appartements privés, que l'on a une petite chance de croiser au détour de l'Annona, le supermarché détaxé du Vatican où le beurre est danois, le fromage polonais, les alcools français, avec un département épicerie fine plus proche de «Monoprix Gourmet» que de Fauchon, où elles font leurs courses pour acheter les produits de base de la maison pontificale. C'est pratiquement la seule occasion pour les sœurs de quitter le troisième étage. Elles se sont exceptionnellement esquivées, une fois, en août 2000 pendant la veillée des J.M.J., pour voir leur « patron » se faire acclamer place Saint-Pierre par des millions de jeunes du monde entier. Elles se font alors furtives pour ne pas se laisser piéger par des photographes. Ni le public ni les journalistes ne connaissent leurs physionomies, l'un des secrets les mieux gardés d'Italie...

Sœur Tobiana, infirmière-médecin, veille sur la santé du Saint-Père, à l'approvisionnement de la pharmacie, et l'accompagne depuis peu dans ses voyages.
Sœur Fernanda, la mère économie, gère le train de maison, fait le ménage et se charge de la bonne marche domestique.
Sœur Germana s'occupe des repas. La cuisine est une pièce très simple, rustique, avec une grande table de bois blanc recouverte d'une toile cirée à fleurs et peu d'appareils modernes style mixeur et machine à café Expresse. Au mur, beige et un peu défraîchi, une photo encadrée du pape marchant dans les jardins du Vatican. La sœur cuisinière porte un tablier, un voile qu'elle serre à la nuque et un petit col, tout cela blanc.
Sœur Eufrosyna, d'origine polonaise, juive convertie comme le cardinal Jean-Marie Lustiger, parle presque autant de langues que le Saint-Père : polonais, anglais, allemand, italien, français, elle suit donc sa correspondance privée et, avec une désuète machine à écrire et un petit ordinateur portable, répond au courrier et prépare des lettres sur un épais papier vélin frappé du timbre apostolique et des armoiries de Jean-Paul II Lequel, ensuite, de son fin stylo à encre bleu marine, corrige, paraphe ou appose directement sa signature en latin : « Joannes Paulus II ».

À sœur Matylda revient la responsabilité du vestiaire. Cela peut prêter à sourire, mais il ne s'agit pas d'une charge de tout repos. Jean-Paul II a une vingtaine de soutanes de chez Annibale Gammarelli, le couturier des papes, des cardinaux et des évêques, dont le magasin est sis via Santa Chiara, près du Panthéon. De père en fils, depuis 1798, les Gammarelli habillent les papes sur mesure, dans des tissus plus ou moins riches. Ils ont sur fiche toutes leurs mesures depuis deux siècles (c'est chez eux qu'Edouard Balladur achète ses chaussettes rouges de cardinal en fil d'Écosse). Raffinement : les boutons des soutanes blanches du pape sont brodés de fil blanc formant des croisillons ton sur ton. Ces soutanes ont un liseré blanc sur blanc, presque invisible. Moins longues et moins amples que dans leur version ancienne, elles sont passées au-dessus d'une chemise blanche que ferme un col romain avec des poignets mousquetaires — le pape aime beaucoup les boutons de manchette ; il en reçoit souvent de ses familiers, qui connaissent ce détail. Soutanes et chemises doivent être impeccablement repassées pour tomber bien droit. Les poches du pape sont toujours vides. En effet, il n'emporte avec lui aucun papier d'identité. Il est l'homme le plus connu du monde. Il n'a bien entendu jamais d'argent sur lui. Comme pour la reine d'Angleterre, s'il y a quelque chose à payer, sa suite s'en charge. Le pape ne reçoit aucun salaire, contrairement aux cardinaux qui perçoivent 5 300 000 lires par mois, c'est-à-dire environ 16 000 francs. Mais il est défrayé de tout, tel notre président de la République, Cependant, une fois par an, à l'occasion de la journée d'offrande de la fête de Saint-Paul et Saint-Pierre, le 29 juillet, les fidèles peuvent apporter leurs dons au Saint-Père. Ce compte personnel lui sert à alimenter à sa guise des œuvres charitables. Sœur Matylda doit aussi tenir à disposition du Saint-Père d'innombrables calottes car le vent les projette souvent au loin. Il lui incombe également d'entretenir les épaisses ceintures blanches, les longs manteaux crème et la série d'élégantes capes pourpres à fins liserés de fil rouge et or dont le haut est en forme de pèlerine. Elles sont réservées aux circonstances solennelles.

Selon un rituel du xne siècle, les vêtements blancs que le pape doit porter à l'intérieur symbolisent l'innocence et la charité ; les vêtements rouges qu'il revêt à l'extérieur rappellent le sang des martyrs, l'autorité et la compassion. Et il n'est évidemment pas question que le Saint-Père, malgré ses nombreuses activités de la journée, ait la moindre tache sur ses divers habits blancs. D'ailleurs, confie l'un de ses médecins, « dans les déjeuners de travail il ne mange jamais de salade, de spaghettis ou de tagliatelles afin de ne pas risquer la fatale goutte de vinaigrette ou de sauce sur son camail. En privé, il n'hésite pas à nouer une grande serviette autour de son cou ». Les mocassins bordeaux confectionnés par un bottier de Turin (autrefois taille 43, mais du 44 maintenant, car les pieds du pape sont plus fragiles) doivent évidemment être lustrés à la perfection. Le Saint-Père a aussi un bottier à Cracovie qui lui envoie des chaussures robustes. Enfin, chasubles et étoles brodées de fil d'or font l'objet des soins méticuleux des religieuses, travail difficile car le fil d'or s'oxyde et s'effiloche facilement.

Jean-Paul II porte toujours, à l'annulaire droit, l'anneau pontifical et, fixée à sa soutane, son imposante croix pectorale en or. Il possède plusieurs anneaux pontificaux car ce sont les rares présents vraiment personnels, avec les boutons de manchette et les montres, qu'on puisse lui offrir. Cependant, le pape n'accorde aucune importance à la valeur des cadeaux qu'il reçoit...

Une des sœurs, souvent sœur Matylda, lui fait régulièrement les mains. Chaque mois, Antonio, le coiffeur barbier du Saint-Père, qui a un salon au Borgo Pio, vient lui couper les cheveux.

Le dimanche, la communauté polonaise proche du Saint-Père s'élargit. Plus encore que dans le passé, à quatre-vingts ans, le pape aime s'entourer, le jour du Seigneur, de visages familiers. D'abord le cardinal Andrzej Maria Deskur, soixante-seize ans, son ami intime depuis le séminaire, issu de l'aristocratie polonaise nantie et élevé par des nurses anglaises et françaises dans le château de famille, près de Kielce, un moment confisqué par les communistes. Il a deux frères en Pologne. L'un d'eux élève des petits chevaux de race. Il parle sans accent aussi bien le français que l'anglais. Théologien de haut niveau, d'une grande aisance mondaine, très bon joueur de bridge, l'esprit vif, il fut longtemps président du Conseil pontifical pour les communications sociales. Aujourd'hui, il en est resté le président honoraire. Il est l'un des membres les mieux informés de la curie romaine. Seule disgrâce, Deskur, plus proche du pape que tout autre dignitaire de l'Église, est resté, à cinquante ans, paralysé à la suite d'une attaque pendant le conclave de 1978. S'il est dans une petite chaise, sa tête fonctionne très bien ! Cet intellectuel influent à l'humour corrosif fit ardemment campagne pour l'élection de Jean-Paul II, lequel, avant d'occuper le siège de saint Pierre, habitait presque toujours chez lui lorsqu'il s'arrêtait à Rome. Quelques heures après son élection triomphale, c'est à Deskur qu'il consacra sa première sortie pour lui rendre visite à l'hôpital Gemelli. Chaque dimanche sans exception, le cardinal Deskur vient vers 13 heures retrouver le pape pour déjeuner. Ils fêtent toujours ensemble leurs anniversaires respectifs et, le 4 novembre, la Saint-Charles, fête du souverain pontife.

« Je me creuse la tête toute la semaine pour trouver de nouvelles blagues à lui raconter », me confie-t-il.

— Mais sur quoi, Éminence ?
— Sur saint Pierre. Sur le cardinal Martini. Sur le cardinal Ratzinger. Et sur les Italiens de la curie romaine. Les sujets ne manquent pas !
— Vous voulez insinuer que les Italiens l'agacent ?
— Non, ce n'est pas exactement cela. Il ne comprend pas toujours ce qu'ils tentent de lui expliquer. Il les trouve un peu alambiqués et confus ; comme il n'est guère enclin à la polémique, il a souvent tendance à trancher les discussions avec eux d'un argument bref et bien ciblé. »

Le cardinal Deskur a, avec le pape, une liberté de ton qui stupéfie toujours les autres invités.

Ces chaleureux repas (qui commencent toujours par le bénédicité) où l'on sert des plats polonais : soupe à l'orge légèrement acidulée, tripes à la Wadowice, c'est-à-dire au basilic et aux oignons sauvages, côtelette de porc chasseur aux choux, tarte aux épinards, fromages forts, sont souvent l'occasion de réunir, hors de tout protocole, le dimanche, des personnalités polonaises du Saint-Siège, la « curie parallèle », dont certains sont logés dans les palazzi du Vatican, et aussi des intellectuels polonais — dont son ami de jeunesse et écrivain le père Mieczyslaw Malinski —, des évêques de passage, des amis du collège polonais de l'Aventin et naturellement, quand il se trouve à Rome, Jerzy Kluger, le plus vieil ami de Karol Wojtyla depuis le collège Marcin-Wadowita. Juif polonais résidant entre Londres et l'Italie, cet ingénieur de formation, devenu un homme d'affaires important, est le seul avec lequel Wojtyla puisse encore évoquer les souvenirs lointains de leur enfance commune à Wadowice, cette petite ville du Sud polonais qui le vit naître le 18 mai 1920. La guerre les sépara, mais Jerzy retrouva en 1978 son brillant camarade de classe devenu pape.

Ainsi se réunissent-ils entre Slaves pour un repas détendu où l'on plaisante beaucoup, et où l'on chante parfois. Contrairement à la légende, le Saint-Père ne boit pas de vodka polonaise, juste son habituel verre de vin blanc des vignes pontificales coupé d'eau. En revanche, ses convives polonais lui font honneur, prétextant que la vodka polonaise est moins nocive que la russe. Jean-Paul II est, avec eux, détendu comme il ne l'est jamais dans ses repas plus officiels, heureux de reconstituer cet univers intime et chaleureux qui lui a tant fait défaut.

C'est sans doute grâce à cette atmosphère familiale et soutenu par sa foi immense que Jean-Paul II réussit à préserver son équilibre et à traverser les épreuves.

Un dimanche, alors qu'il recevait, dans l'une des grandes salles solennelles d'audience, des pèlerins polonais qui se précipitaient passionnément pour le toucher, il leur dit en riant, avec cette familiarité dont il fait toujours preuve avec ses compatriotes et qui agace tellement le personnel italien du Vatican : « Nous sommes tous cousins. Vous n'avez qu'à dire que vous avez un parent à Rome, cela vous facilitera l'obtention d'un visa. » Une simple boutade, mais qui illustre parfaitement l'attachement viscéral qu'il a pour son peuple ! Parmi ses visiteurs polonais, le Saint-Père reçoit avec une attention particulière les religieux qui ont été séminaristes à Cracovie quand il y était archevêque. Il avait coutume de voir ces jeunes gens individuellement et d'être à l'écoute de leurs problèmes. Il en a vu passer un bon millier. « Cela, explique le père Pawel Sukiennik, qui était l'un d'eux, a créé entre nous et Karol Wojtyla des liens profonds qui subsistent trente ans après. » Le père Sukiennik est aujourd'hui curé de la paroisse de Niegowic dont Jean-Paul II fut le vicaire entre 1948 et 1949.

Enfin, le successeur du prince des Apôtres, qui, depuis les débuts de son pontificat, est partagé entre son engagement pastoral, son mysticisme et son penchant pour la théologie, a placé son existence à Rome sous la protection de la Vierge polonaise de Czestochowa. En tant que Polonais, il la vénère avant toute autre représentation de Marie. Il a accroché une reproduction de l'icône dans la chapelle de ses appartements privés. La Vierge noire de Czestochowa portant l'Enfant Jésus, surnommée ainsi à cause de son visage sombre, est la sainte patronne de la Pologne. Ses fidèles lui attribuent des dons miraculeux. Ils sont convaincus qu'aux heures les plus dures de leur histoire elle a ranimé la foi du pays et l'a sauvé de la menace russe. Ainsi Wojtyla lui a-t-il confié sa vie et son ministère dès son ordination sacerdotale en 1946. Geste qu'il a renouvelé en 1999 à genoux, au pied du sanctuaire de Czestochowa, sur la colline de Jasna Gora, en Pologne. Et il a envoyé à ce sanctuaire la large ceinture blanche tachée de sang qu'il portait à la taille le jour de son attentat du 13 mai 1981. Car, comme il l'avait déclaré quelques semaines plus tard aux fidèles venus place Saint-Pierre : « La Vierge a détourné de sa propre main les balles meurtrières. » Quand il se rend en Pologne, le Saint-Père y rencontre son ancien condisciple de séminaire, le cardinal Franciszek Macharski, archevêque de Cracovie, qui fait lui aussi partie du cercle de ses très proches et qui le loge toujours à l'évêché (qui fut sa « maison » de 1964 à 1978). Quand le cardinal vient à Rome, il prend au moins un repas avec Jean-Paul II.

Le cardinal Macharski m'a reçue à l'archevêché de Cracovie, un lieu très italien par sa décoration et son atmosphère. Au sol, d'élégants pavés de marbre noirs et blancs. Des appartements majestueux aux couleurs florentines et partout des tableaux religieux anciens, dont une galerie des papes depuis la Renaissance. Le cardinal m'a confié : « Dès sa jeunesse, Jean-Paul II a su quel serait l'essentiel dans sa vie. Certes, il ne pensait pas devenir pape. Mais déjà il était celui qui a dit, le jour de son élection place Saint-Pierre : "N'ayez pas peur. " Déjà très mystique, il priait énormément. Il se dominait beaucoup et n'aimait pas trancher. Il voulait que les gens soient responsables d'eux-mêmes. Ce qui est frappant, c'est qu'il écoute toujours, aujourd'hui comme hier, ses interlocuteurs jusqu'au bout. Malgré sa piété profonde, c'était aussi un homme d'action; comme prêtre, comme évêque, comme cardinal, il savait mobiliser les fidèles et surtout les jeunes. La Pologne est toujours présente dans sa prière. »

II est donc incontestable qu'au plus profond de lui-même l'amour de son pays tient une place essentielle dans le cœur du Saint-Père. Deskur dit qu'il serait capable de quitter le Vatican en une heure pour aller porter secours aux Polonais, qui le lui rendent bien. Partout où il pose les pieds sur sa terre natale, ils lui érigent une statue, toujours en bronze. Détail : sur ces statues, la soutane du Saint-Père est toujours volontairement emportée sur la droite comme par un vent qui se lève de l'ouest vers l'est !

Autre trait de caractère typiquement polonais de Jean-Paul II, comme l'explique le cardinal Poupard : un goût inné du secret. Victime des régimes totalitaires de l'Est et donc méfiant, le pape pratique la prudence depuis toujours. « Je ne l'ai jamais vu prendre aucune note, dit le cardinal, alors qu'il m'a toujours interrogé sur des sujets variés avec une grande précision. Il n'écrit rien et se fie uniquement à sa mémoire exceptionnelle. Habitué à cerner les problèmes, il ne se laisse pas détourner de ce qu'il veut connaître. Tout au plus demande-t-il à la personne qu'il reçoit de lui remettre une fiche technique où la signature n'apparaît jamais. » Réflexe évident de circonspection d'un Polonais de l'Église du silence, cette Église qui, pendant toutes les années de régime totalitaire, a été le seul lieu d'expression de la liberté polonaise. Les églises étaient les seuls endroits où la police politique n'entrait pas.

C'est en secret que Karol Wojtyla, après l'invasion nazie et le séminaire clandestin (parce que dans un pays communiste), fut ordonné prêtre le 1er novembre 1946 à Cracovie, dans la chapelle privée du cardinal prince Adam Stefan Sapieha. Cinquante-quatre ans plus tard, on n'échappe pas à son passé. La prudence du Saint-Père est amplement justifiée car, en cette fin de règne, où courent tant de rumeurs, des oreilles malveillantes pourraient être à l'écoute dans les immenses palais pontificaux, et les spécialistes électroniciens du Vatican sont sans cesse à la recherche de micros cachés. Ils en ont déjà trouvé. Cette forme d'espionnage serait redoutable au cours d'un futur conclave (sans parler des portables). La Constitution apostolique, au sujet de la vacance du siège pontifical, prévoit que pendant le conclave « deux techniciens de confiance » s'assureront qu'aucun moyen d'enregistrement ou de transmission ne pénétrera dans la chapelle Sixtine où s'assembleront les cardinaux, ni dans les locaux de Domus Santae Marthae dans l'enceinte même du Vatican et tenu par les sœurs de la Charité, où ils seront logés.

L'amour de sa terre natale est si puissant que Jean-Paul II, en vingt-deux ans de pontificat, y est retourné sept fois. Il y est toujours accueilli avec autant d'enthousiasme. Aujourd'hui encore, presque dix ans après la chute du régime communiste, la première chaîne nationale de télévision polonaise comme la radio nationale retransmettent tous les dimanches, à midi, en direct, la bénédiction papale de la fenêtre des appartements du Vatican. Et l'aéroport de Cracovie a été baptisé l'année dernière « aéroport Jean-Paul II». De Gaulle et Kennedy n'ont eu un tel honneur qu'après leur mort !

En 1982, Jean-Paul II, qui était allé en Toscane, à Livourne, visiter une usine Solvay — société qui l'employa comme casseur de pierres pendant la guerre, dans ses carrières de soude à Cracovie —, avait fourni dans son allocution l'une des explications de cet attachement. « La Pologne, avait-il dit, est ma patrie, bien que, depuis que je suis devenu pape, ma patrie soit aussi le monde. En tout cas je dois à la Pologne ceci : c'est un pays qui a beaucoup souffert et qui m'a préparé à comprendre tous ceux qui souffrent aussi bien par manque de biens que par manque de liberté. Ma solidarité avec tous les peuples qui souffrent m'est donc naturelle. »
 

Sources: www.vatican.va - E.S.M.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 25.09.2007 - BENOÎT XVI

 

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