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Un Afghanistan en Méditerranée

 

Rome, le 24 février 2011  - (E.S.M.) - Deux scénarios de la révolte dans les pays arabes. Celui de l'Égypte, avec une alliance inédite entre les chrétiens et les musulmans. Et celui de la Libye, où l'effondrement de l'état ouvre la voie à l'islamisme radical. L'analyse de Khaled Fouad Allam.

Un Afghanistan en Méditerranée

par Sandro Magister

Le 24 février 2011 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - Les  trois photos ont été prises au Caire sur la place Tahrir, la place de la Libération. Elles ont été publiées et commentées sur le site web de l’agence de presse "Asia News" de l’Institut Pontifical des Missions Étrangères par le jésuite égyptien Samir Khalil Samir, islamologue très estimé par le pape Joseph Ratzinger.

Sur la place Tahrir, lorsqu’avait lieu la prière coranique, les chrétiens coptes formaient la haie pour assurer la protection des musulmans prosternés. On a également vu au Caire des affiches portant la croix et le Coran l’une à côté de l’autre, ainsi que l’inscription : "Égyptiens, une seule main". L’opinion du père Samir est que l'unité entre musulmans et chrétiens que l’on a pu voir à l’œuvre pendant les journées de la rébellion est le signe que ce n’est pas l'islamisme fondamentaliste qui dirige le virage en cours, ni en Égypte ni dans les autres pays d’Afrique du Nord et du Golfe.

La révolution qui bouleverse actuellement les pays arabes n’est certainement pas partie des mosquées. La plus célèbre et la plus influente des mosquées sunnites, la mosquée Al-Azhar du Caire, est tout de suite apparue hors jeu. Ses dirigeants, qui ont tous été nommés par le président Moubarak, paient eux aussi le prix de la chute de celui-ci.

En Égypte, l'unique chance sérieuse qu’aient les islamistes de conquérir le pouvoir est liée au sort des Frères Musulmans. Ceux-ci ont une capacité notable d’organisation. Ils contrôlent les principaux ordres professionnels : ingénieurs, médecins, dentistes, pharmaciens, commerçants, avocats. Ils ont pénétré dans les campagnes. L’un de leurs leaders, Sobhi Saleh, est membre du comité qui a été constitué par les militaires pour la réforme de la constitution égyptienne. Et le président de ce même comité, Tariq Al-Bishri, fils d’un grand imam d’Al-Azhar, est leur allié.

Mais plus qu’un effet de leur force, cette cooptation des Frères Musulmans au sein du comité pour la nouvelle constitution apparaît comme un geste calculé de la part des militaires qui sont au pouvoir, afin de les contrôler.

Même l'exploit du cheikh Youssef Al-Qaradawi, ce leader charismatique des Frères Musulmans du monde entier qui est rentré au Caire après plusieurs décennies d’exil afin de diriger la prière du vendredi 18 février sur la place Tahrir et de haranguer la foule, ne semble pas avoir orienté la révolte dans la direction de l'extrémisme religieux.

Al-Qaradawi s’est grandement réjoui de la chute du "Pharaon", mais ce ne sont certainement pas les Frères Musulmans qui ont renversé Moubarak.

Il a raconté son rêve de Jérusalem libéré des infidèles, mais il n’y a eu de drapeaux israéliens brûlés ni avant ni après son sermon.

Les églises chrétiennes sont elles aussi restées intactes pendant les journées de la révolte, alors qu’elles avaient fait l’objet, il y a seulement quelques semaines, de cruelles agressions à un moment où le régime de Moubarak contrôlait encore totalement le pays. Le patriarche des coptes, Chenouda III, a parié jusqu’au dernier moment sur le maintien de Moubarak au pouvoir, qui lui paraissait plus rassurant qu’un changement de régime. Mais les coptes sont descendus dans la rue dès les premiers jours, pour réclamer davantage de liberté.

Le père Samir dit que le soulèvement actuel lui rappelle la révolution égyptienne de 1919 contre la Grande-Bretagne qui occupait alors l'Égypte et le Soudan : une révolution qui n’avait pas un caractère religieux mais qui avait pour objectif l'indépendance.

Mais la révolte qui enflamme aujourd’hui les pays arabes, de l'Égypte au Yémen, ne se dresse pas contre des puissances étrangères : Israël, les États-Unis, l'Occident. Et encore moins contre les chrétiens. Ses ennemis sont des ennemis intérieurs, ce sont les régimes tyranniques. Les demandes sont élémentaires. La première révolte, celle de Tunisie, a pour origine le renchérissement du prix du pain.

Khaled Fouad Allam, Algérien de nationalité italienne, professeur de sociologie du monde musulman aux universités de Trieste et d’Urbino, a expliqué au quotidien de la conférence des évêques d’Italie "Avvenire" que les protagonistes de la révolte actuelle sont les jeunes générations :

"Les jeunes gens de 18 à 30 ans ont une pratique religieuse de type piétiste. L’islam n’est plus perçu comme la solution, ce qui aurait probablement été le cas il y a dix ou quinze ans. Les jeunes ne croient plus que le Coran leur donnera du travail, comme leurs pères pouvaient le penser. Ils sont croyants et pratiquants mais ils n’ont pas une charge idéologique. Du Yémen à l’Algérie, on n’entend pas de slogans religieux".

Et d’ajouter :

"Il y a également l’aspect de la globalisation : une conscience mondiale de la démocratie est en train de se développer. Un jeune d’Alger qui correspond par internet avec un de ses amis vivant à Rome se demande comment il est possible qu’il y ait la liberté sur l’autre rive de la Méditerranée mais pas dans son pays. Cela crée un sentiment très fort. La technologie informatique ne compte pas en elle-même, mais par son effet, c’est-à-dire une accélération de la maturation de la prise de conscience".

La révolte ne paraît pas avoir de direction précise. Elle n’a pas de leader. Elle n’a pas de grandes organisations. "Elle va durer longtemps", prévient Allam. Sans que l’on puisse en prévoir les résultats.

Le portrait qui s’en dégage est celui d’un monde musulman beaucoup plus fragile et beaucoup plus désordonné que ce que l’on imagine habituellement. Beaucoup plus bigarré. Beaucoup plus exposé à la sécularisation et aux langages de la communication globale, qui sont universels mais également de signification incertaine.

C’est un portrait qui correspond de manière impressionnante à celui qui est brossé de manière très vivante dans un livre autobiographique de l'Italo-marocaine Anna Mahjar-Barducci, dont un chapitre a été reproduit dans cet article de www.chiesa Anna et ses frères. Les mille visages du véritable islam

*

Ce qui vient d’être expliqué jusqu’à maintenant s’applique à la quasi-totalité des pays arabes qui sont actuellement en état de révolte. Mais il y a une exception.

Cette exception, c’est la Libye.

C’est encore le professeur Khaled Fouad Allam qui l’explique, dans un commentaire qui a été publié le 23 février par "Il Sole 24 Ore", le quotidien financier le plus diffusé en Italie et en Europe.

La Libye n’a jamais été une nation homogène. C’est un enchevêtrement de tribus arabes, berbères et africaines et dans chacune d’elles l’esprit de corps compte plus que tout. Lorsque la révolte a éclaté, des villes et des régions entières se sont rapidement rendues autonomes.

En Libye il n’existe pas de véritables institutions d’état, il n’y a pas un parlement, il n’y a pas une armée qui soit en mesure de prendre le pouvoir, comme cela a été le cas en Égypte, et d’assurer une transition contrôlée.

Pour Kadhafi la "révolution", c’était l’état et l’état, c’était lui. Il prônait un "maoïsme musulman" épuré par la tradition prophétique, la Sunna. De ce fait il était perçu comme étranger et mal vu par l’ensemble du monde musulman sunnite lui-même.

Paradoxalement, la tyrannie de Kadhafi assurait à l’Église catholique des niveaux de liberté supérieurs à ce qui pouvait exister dans n’importe quel autre pays musulman de la région.

La chute de Kadhafi pourrait donc coïncider avec l’effondrement total de la Libye. Celle-ci pourrait devenir – prévient Allam – "un Afghanistan en Méditerranée".

Parce que, dans le chaos et le vide de l’état, ce sont précisément les courants musulmans les plus radicaux, en provenance d'Afrique et d’autres pays arabes, qui trouveraient un espace de présence et d’action. Cela en dépit de la demande "laïque" de liberté qui a été formulée par les jeunes qui, en Libye aussi, ont envahi les places, au prix de leur vie dans de nombreux cas.

Un nouvel Afghanistan, avec un islamisme incendiaire, très riche en pétrole et en gaz, tout proche de l'Italie et de l'Europe.

*

Les autres photos de la place Tahrir, au Caire, commentées par le père Samir Khalil Samir sur le site "Asia News" Rivoluzione egiziana- Cristiani e Musulmani uniti


POST SCRIPTUM – Cet article était en ligne depuis peu de temps lorsque l'on a appris l'assassinat d'un prêtre copte à Assiout, en Haute Egypte. Des milliers de chrétiens sont descendus dans la rue pour protester et ont eu des affrontements avec des musulmans. Assiout est la ville d'Egypte qui compte le plus grand nombre de coptes et c'est aussi la ville natale de l'actuel patriarche des coptes, Chenouda III. On trouve, aux environs, d'importants monastères et un sanctuaire consacré à Marie, très fréquenté par les chrétiens comme par les musulmans.

 Traduction française par Charles de Pechpeyrou, Paris, France.


 

Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 24.02.2011 - T/International

 

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