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Benoît XVI : La prière sacerdotale de Jésus
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Le 24 janvier 2023 -
(E.S.M.)
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Dans l'Évangile de Jean, après le lavement des
pieds suivent les discours d'adieu de Jésus (ch. 14-16). À la fin, au
chapitre 17, ils s'épanouissent en une grande prière pour laquelle le
théologien luthérien David Chytraeus (1530-1600) a forgé le terme de «
prière sacerdotale ».
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Yom Kippour (jour du pardon) est le jour le plus saint et le plus
solennel du calendrier juif.
Benoît La prière sacerdotale de Jésus
Chapitre 4
Dans l'Évangile de Jean, après le lavement des
pieds suivent les discours d'adieu de Jésus (ch. 14-16). À la fin, au
chapitre 17, ils s'épanouissent en une grande prière pour laquelle le
théologien luthérien David Chytraeus (1530-1600) a forgé le terme de «
prière sacerdotale ». Au temps des Pères de l'Église, ce fut surtout Cyrille
d'Alexandrie (†444) qui souligna le caractère sacerdotal de cette prière.
André Feuillet, dans sa monographie sur Jean 17, cite un texte de
Rupert de Deutz († 1129/1130), dans lequel le caractère essentiel de la
prière est résumé de façon très belle: « Haecpontifex summuspropitiator
ipse et propitia-torium, sacerdos et sacrificium, pro nobis oravit —
Ainsi a prié pour nous le Grand Prêtre, qui était lui-même propitiatoire et
offrande d'expiation, prêtre et sacrifice » (Joan., in: PL
169, coll. 764B; cf. Feuillet, p. 35).
1. La fête juive des Expiations comme arrière-plan biblique de la Prière
sacerdotale
J'ai trouvé la clé de compréhension de ce grand texte dans le livre
déjà mentionné de Feuillet. Il montre que cette prière n'est compréhensible
que sur l'arrière-fond de la liturgie de la fête juive des Expiations (Yom
Kippour). Le rituel de la fête avec son riche contenu théologique est
réalisé dans la prière de Jésus - « réalisé » au sens littéral : le rite est
traduit dans la réalité qu'il signifie. Ce qui y était représenté en actes
rituels a lieu maintenant de façon réelle et de manière définitive.
Pour comprendre cela, nous devons tout d'abord regarder le
rituel de la fête des Expiations décrit dans le Lévitique aux
chapitres 16 et 23, 26-32. En ce jour-là, le grand prêtre, par les
sacrifices respectifs (deux boucs pour un sacrifice expiatoire, un bélier
pour un holocauste, un jeune taureau, cf. Lv 16,5s.), doit accomplir
l'expiation d'abord pour lui-même, ensuite pour « sa maison », c'est-à-dire
pour la classe sacerdotale d'Israël en général, et enfin pour la communauté
d'Israël tout entière (cf. 16,17). « II fera ainsi le rite d'expiation sur
le sanctuaire pour les impuretés des Israélites, pour leurs transgressions
et pour tous leurs péchés. Ainsi procédera-t-il pour la Tente du Rendez-vous
qui demeure avec eux au milieu de leurs impuretés » (Lv 16,16).
À l'occasion de ces rites, pour l'unique fois dans l'année,
le grand prêtre prononce devant Dieu le saint Nom, normalement indicible,
que Dieu avait révélé auprès du buisson ardent — ce nom par lequel il
s'était, pour ainsi dire, rendu touchable par Israël. Le but du grand jour
de l'Expiation est donc de redonner à Israël, après les transgressions d'une
année, sa qualité de « peuple saint », de le ramener à nouveau à sa
destination : être le peuple de Dieu au milieu du monde (cf. Feuillet, p. 56
et 78). En ce sens, il s'agit de l'objectif le plus profond de la création
dans son ensemble : donner naissance à un espace de réponse à l'amour de
Dieu, à sa sainte volonté.
Selon la théologie rabbinique, en effet, l'idée d'alliance,
l'idée de créer un peuple saint comme « interlocuteur » de Dieu et en union
avec lui précède l'idée de la création du monde, et en est même la raison
profonde. Le cosmos est créé non pour que s'y multiplient les astres et tant
d'autres choses, mais pour que s'y trouve un espace pour l'« alliance »,
pour le « oui » de l'amour entre Dieu et l'homme qui lui répond. La fête des
Expiations rétablit chaque fois cette harmonie, ce sens du monde, troublée à
maintes reprises par le péché, et pour cette raison elle constitue le sommet
de l'année liturgique.
La structure du rite décrit en Lévitique 16 est
précisément reprise dans la prière de Jésus: de même que le Grand Prêtre
accomplit l'expiation pour lui-même, pour la classe sacerdotale et pour
toute la communauté d'Israël, ainsi Jésus prie pour lui-même, pour les
Apôtres et enfin pour tous ceux qui, à cause de leur parole, croiraient en
lui par la suite - pour l'Église de tous les temps (cf. Jn 17,20). Il
se sanctifie « lui-même » et procure la sainteté aux siens. Nous devrons
encore réfléchir sur le fait qu'en cela - malgré la démarcation à l'égard du
« monde » (cf. 17,9) - il s'agit en fin de compte du salut de tous, de la «
vie du monde » dans sa totalité (cf. 6,51). La prière de Jésus le montre
comme le Grand Prêtre du grand jour de l'Expiation. Sa Croix et son
élévation constituent le jour de l'Expiation du monde, dans lequel
l'histoire du monde tout entière, en dépit de toute la faute humaine et de
toutes ses destructions, trouve son sens, est introduite dans son véritable
« pourquoi » et « où ».
Ainsi la théologie de Jean 17 correspond parfaitement
à ce que la Lettre aux Hébreux développe en détail. L'interprétation
du culte vétérotestamentaire dans la perspective de Jésus Christ, qui y est
présentée, est aussi l'âme de la prière de Jean 17. Mais la théologie
de saint Paul s'oriente elle aussi vers ce point central qui, dans la
Deuxième lettre aux Corinthiens, résonne en une imploration dramatique:
« Nous vous en supplions au nom du Christ: laissez-vous réconcilier avec
Dieu ! » (5,20).
N'est-il pas vrai que le fait d'être des hommes non
réconciliés avec Dieu, avec le Dieu silencieux, mystérieux, apparemment
absent et pourtant omniprésent, constitue le problème essentiel de toute
l'histoire du monde ?
La Prière sacerdotale de Jésus est la mise en acte du jour de
l'Expiation, elle est pour ainsi dire la fête toujours accessible de la
réconciliation de Dieu avec les hommes. Ici s'impose la question de la
relation entre la Prière sacerdotale de Jésus et l'Eucharistie. Il existe
des tentatives d'interpréter cette prière comme une espèce de « prière
eucharistique », de la présenter, pour ainsi dire, comme la version
johannique de l'institution du Sacrement. Ces tentatives ne sont pas
défendables. Mais il existe une relation plus profonde.
Dans l'échange de Jésus avec son Père, le rituel du jour de
l'Expiation est transformé en prière: ici est rendu tangible le
renouvellement du culte auquel visaient la purification du Temple et les
paroles prononcées par Jésus pour expliquer cet événement. Les sacrifices
d'animaux sont dépassés. Prend leur place ce que les Pères grecs appelaient
la thysia logikè, le sacrifice comme parole, et que Paul qualifie de manière
semblable comme la logikè latrei, le culte modelé sur la parole,
correspondant à la raison (cf. Rm 12,1).
Certes, cette « parole », qui prend la place des sacrifices,
n'est pas simplement parole. Elle est d'abord non seulement un parler
humain, mais elle est parole de celui qui est « la Parole » et qui entraîne
donc toutes les paroles humaines dans le dialogue intérieur de Dieu, dans sa
raison et dans son amour. Mais encore, sous un autre aspect, elle est plus
que parole, parce que cette Parole éternelle a dit : « Tu n'as voulu ni
sacrifice ni oblation; mais tu m'as façonné un corps » (He 10,5; cf.
PS 40,7). La Parole est chair; bien plus : elle est un corps donné, elle est
un sang versé.
Avec l'institution de l'Eucharistie, Jésus transforme son
être tué en « parole », dans la radicalité de son amour qui se donne jusqu'à
la mort. Ainsi devient-il lui-même « Temple ». Parce que la Prière
sacerdotale est une forme de réalisation du don de Jésus lui-même, elle
constitue le nouveau culte et elle est reliée de l'intérieur à l'Eucharistie
: quand nous traiterons de l'institution de ce Sacrement, nous devrons
revenir sur tout cela.
Avant de porter notre attention sur chaque thème de la Prière
sacerdotale, il faut toutefois mentionner encore une autre référence à
l'Ancien Testament, également mise en lumière par André Feuillet. Celui-ci
relève que l'approfondissement spirituel et le renouveau de l'idée du
sacerdoce, rencontrés en Jean 17, ont déjà été anticipés dans les
Chants d'Isaïe sur le Serviteur de Dieu, spécialement en Isaïe 53. Le
Serviteur de Dieu, qui charge sur ses épaules l'iniquité de tous (53,6), qui
s'offre lui-même en expiation (53,10), qui porte le péché des multitudes
(53,12), manifeste en tout cela le ministère du Grand Prêtre ; il accomplit
de l'intérieur la figure du sacerdoce. Il est en même temps prêtre et
victime et, de cette façon, il réalise la réconciliation. Ainsi les Chants
du Serviteur de Dieu reprennent tout le processus d'approfondissement de
l'idée du sacerdoce et du culte, comme cela avait déjà été fait dans la
tradition prophétique, spécialement chez Ézéchiel.
Même si en Jean 17 il ne se trouve aucune référence
directe aux Chants du Serviteur de Dieu, la vision d'Isaïe 53 est,
toutefois, fondamentale pour la nouvelle conception du sacerdoce et du culte
qui apparaît dans tout l'Évangile de Jean et, de façon particulière,
dans la Prière sacerdotale. Nous avons déjà rencontré ce lien de manière
visible dans le chapitre sur le lavement des pieds; il est également
clairement perceptible dans le discours sur le Bon Pasteur, où par cinq fois
Jésus dit de ce Pasteur qu'il offre sa vie pour ses brebis (cf. Jn
10,11.15.17.18s.), reprenant ainsi de façon évidente Isaïe 53.
À travers la nouveauté de la figure de Jésus Christ - visible
dans la rupture extérieure avec le Temple et avec ses sacrifices -, l'unité
profonde avec l'histoire du salut de l'Ancienne Alliance est toutefois
conservée. Si nous pensons à la figure de Moïse qui, intercédant pour le
salut d'Israël, offre sa vie à Dieu, cette unité, dont la démonstration
constitue un but essentiel de l'Évangile de Jean, est évidente une
fois encore.
Cette page correspond au 1 du chapitre 4 du livre du saint Père Benoit XVI
Le TOME II
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Benoît XVI
Extrait de l’audience générale donnée par le pape
Benoit XVI le 25 janvier 2012
Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 24.01.2023
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