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19 Avril 2005
 

Le Royaume de Dieu, c'est le Christ total, l'Église

 

Le 23 novembre 2008 - (E.S.M.) - Construire le Royaume, conférence du Père Marie-Eugène de l'Enfant-Jésus o.c.d. Le pape Benoît XVI a aujourd'hui commenté l'évangile de ce dimanche, Solennité du Christ Roi de l'Univers et a rappelé que le royaume de Dieu n'est pas une question d'honneurs et d'apparences, mais, comme l'écrit Saint Paul, il est « justice, paix et joie dans l'Esprit Saint ».

Le Royaume, c'est la vie du Christ en nous - Pour agrandir l'image Cliquer

Le Royaume de Dieu, c'est le Christ total, l'Église

CONSTRUIRE LE ROYAUME

Le 23 novembre 2008 -  Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - Construire le Royaume, conférence du Père Marie-Eugène de l'Enfant-Jésus o.c.d. Le pape Benoît XVI a aujourd'hui commenté l'évangile de ce dimanche, Solennité du Christ Roi de l'Univers et a rappelé que le royaume de Dieu n'est pas une question d'honneurs et d'apparences, mais, comme l'écrit Saint Paul, il est « justice, paix et joie dans l'Esprit Saint ». Angélus de Benoit XVI

L'action de l'Esprit Saint en notre temps

L'Esprit Saint qui vit dans l'Église ne manifeste jamais mieux sa présence et sa puissance que sous la pression de forces adverses, qui semblent devoir l'anéantir ou le chasser. A saint Paul qui se plaignait du soufflet de Satan, le Seigneur répondait : " Ma grâce te suffit, car ma puissance se déploie dans la faiblesse "
(2 Co 12, 9). Éclairé par cette parole et par son expérience, le grand Apôtre constatait en effet : " Oui, je me complais dans mes faiblesses, dans les outrages, les détresses, les persécutions, les angoisses endurées pour le Christ ; car lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort " (Ibid., v. 10).

Il suffit de parcourir l'histoire de l'Église, spécialement l'histoire des persécutions des premiers siècles ou encore l'histoire religieuse des XVIè et XVIIè siècles, pour constater l'application de cette loi de l'action de l'Esprit Saint dans l'Église.

Il est certainement trop tôt pour porter un jugement définitif sur notre époque. Nous saisissons surtout, en notre temps, ce que nous vivons douloureusement : les tristesses d'une déchristianisation des masses qui semble progressive, les luttes ardentes dans lesquelles nous sommes engagés. (...) Encouragé par ses succès, celui-ci arme de sa mystique destructrice de toute civilisation chrétienne, les centaines de millions d'hommes qu'il tient déjà sous son étreinte. Mais la peur provoquée par cette menace, la psychose qu'elle pourrait engendrer, ne doivent pas nous aveugler et nous empêcher de découvrir et d'apprécier à sa juste valeur l'action de l'Esprit Saint en notre temps, les besoins d'absolu, les désirs de vie spirituelle profonde et d'apostolat qu'il crée et entretient dans les âmes.

Les Instituts nouveaux qu'il fait surgir dans l'Église voient arriver à eux de nombreuses recrues, parce que ces instituts leur offrent le moyen de courir la sublime aventure d'une vie complètement et uniquement consacrée au service de Dieu et du prochain. C'est un printemps que le souffle vivant de l'Esprit Saint fait lever actuellement sur l'Église. Ce souffle vivifiant, fait monter la sève et pousser de nouvelles tiges, il gonfle les bourgeons prometteurs et les fait éclater ; mais il peut aussi provoquer la mort et le scandale. Du Christ Jésus, qu'il portait dans ses bras au jour de sa présentation au Temple, le vieillard Siméon annonçait qu'il serait la lumière des nations et la gloire de son peuple, mais aussi qu'il amènerait la chute, à la fois, et le relèvement d'un grand nombre
(Cf. Lc 2, 34).

Il en est des dons de Dieu les plus élevés comme des dons naturels. Ils nous sont donnés pour notre salut et, mal utilisés, ils peuvent devenir cause de notre perte. Il serait douloureux et délicat d'insister et de faire des applications ; cependant, nous devons reconnaître et nous avons le devoir de dire que des générosités sincères, qui paraissaient soulevées par le souffle de l'Esprit qui passe sur l'Église de notre temps, se sont égarées. Nous leur gardons notre affection et notre prière, mais nous devons éviter leurs erreurs et leurs chutes.

Il appartient à la hiérarchie de nous guider en ces voies difficiles et parfois périlleuses de l'utilisation du souffle de l'Esprit Saint, c'est-à-dire de la détermination de la pensée et de la volonté de Dieu sur notre temps, sur chacun de nous. Le Souverain Pontife le fait par ses encycliques lumineuses qui traitent de tous les problèmes qui nous préoccupent. Les évêques nous dispensent les directives pratiques d'action apostolique. Le premier devoir du chrétien est de se soumettre à cet enseignement de l'Église et d'obéir aux directives qui lui sont données.

Ce devoir de soumission, primordial, ne nous dispense pas de l'étude destinée à éclairer les directives de l'Église, en même temps qu'à explorer la pensée de Dieu exprimée dans la Sainte Écriture et dans la tradition chrétienne, spécialement dans la tradition apostolique. L'Esprit Saint qui vit dans l'Église se trouve en chacune de ses parties, donc en chacune de nos âmes. Nous pouvons compter sur son assistance pour ce travail de recherche et d'étude, fait dans le respect de l'autorité qu'il a établie et dans la soumission à l'autorité qu'il a donnée à l'Église.

En cette conférence, nous ne nous proposons pas autre chose que d'éclairer le problème de l'apostolat qui est un des plus délicats de notre temps, en cet esprit et dans une parfaite soumission à l'Église. Nous n'entendons pas polémiquer sur la valeur des méthodes, ni traiter le problème dans toute son ampleur, mais simplement rappeler quelques vérités fondamentales qui nous paraissent l'éclairer et sont parfois oubliées.

I. LE BUT DE L'APOSTOLAT

On raconte que le Maréchal Foch, devant un problème militaire à résoudre, se posait à lui-même et à son état-major cette question : " De quoi s'agit-il ? " En d'autres termes, quelle est la situation et quel est le but que vous vous proposez ? Question banale en apparence, mais si on la néglige, on risque de tout brouiller.

Posons-nous donc cette question à propos de l'apostolat : de quoi s'agit-il ? Précisons la question en disant : quel est le but de l'apostolat ? Dans quelles conditions générales et pratiques doit-il se faire ? C'est le problème que nous aborderons aujourd'hui. Dans notre deuxième conférence, nous verrons en quoi consiste l'apostolat, sa définition ; dans les suivantes, nous étudierons les moyens propres d'apostolat. Tout cela, à la lumière de l'Évangile, de l'enseignement et de l'exemple des Apôtres.

Jésus est venu instaurer le Royaume

Quel est le but de l'apostolat ? L'apostolat doit continuer dans l'Église le travail, l'œuvre du Christ Jésus et des Apôtres. Qu'a fait le Christ ? Le Christ est venu ici-bas pour instaurer le Royaume de Dieu.

Le but de l'apostolat, c'est donc l'instauration du Royaume de Dieu. Un regard sur l'Évangile suffit pour nous en convaincre jusqu'à l'évidence. Saint Jean-Baptiste est envoyé pour préparer la prédication du Christ et il le fait en annonçant que le Royaume de Dieu est proche
(Cf. Mt 3, 2) ; il invite à préparer ce Royaume de Dieu par la pénitence et les bonnes œuvres, car on ne peut y entrer que par ces moyens.

La plus grande partie de la prédication de Jésus se déroulera sur ce thème : le Royaume de Dieu. Jésus en indiquera les lois, les exigences, spécialement dans les paraboles. Il n'y a de doute pour personne, Jésus est venu instaurer le Royaume de Dieu. Les Apôtres attendent d'en être les premiers ministres
(Cf. en particulier Mt 20, 23 s) et seront en compétition jusqu'au dernier moment de la vie terrestre du Christ pour savoir qui le sera, parmi ceux que Dieu a choisis comme apôtres (Cf. Lc 22, 24).

Devant la puissance de Rome qui a établi sa domination en Judée, devant Ponce Pilate, Jésus se proclame Roi
(Cf. Jn 18, 37), et c'est le motif de sa condamnation. Sur sa croix, on mettra : " Jésus Nazarenus Rex Judaeorum ", " Jésus de Nazareth Roi des Juifs " (Jn 19, 19)

Le Royaume, c'est la vie du Christ en nous

Poursuivons notre enquête, en nous demandant : Qu'est-ce que ce Royaume de Dieu qu'est venu instaurer le Christ ?

Retenons d'abord la déclaration de Jésus devant Pilate, à savoir que son Royaume n'est pas de ce monde. Après avoir affirmé qu'il est Roi, Jésus ajoute : " Si mon Royaume était de ce monde mes gardes auraient combattu pour que je ne sois pas livré aux Juifs, mais mon Royaume n'est pas d'ici "
(Jn 18, 36). Voilà une déclaration très nette qui devrait suffire pour nous empêcher de songer à une domination terrestre du Christ ou du Sacré-Cœur sur le monde entier.

Les Apôtres qui cultivèrent jusqu'à la fin ce mythe du royaume terrestre, espérant devenir les grands ministres ou intendants de cette puissance universelle du Christ, ne reçurent pas de réponse à la dernière question qu'ils adressèrent à Jésus quelques instants avant son Ascension
(Cf. Ac 1, 6). Et cependant, l'archange Gabriel avait bien annoncé à la Vierge Marie que le Fils qui naîtrait d'elle s'assiérait sur le trône de David son père, et que son règne n'aurait pas de fin (Cf. Lc 1, 32-33).

Pour expliquer cette apparente contradiction entre le langage de la promesse et sa réalisation, il suffit de nous rappeler que le langage humain n'est pas adapté aux choses surnaturelles. L'Esprit Saint et la théologie ne peuvent décrire les réalités surnaturelles et spirituelles qu'en usant de symboles ou d'analogies. Ne faisons-nous pas ainsi nous-mêmes lorsque nous voulons expliquer à des enfants, ou même à un auditoire, des choses qu'il ignore ou qu'il n'a jamais vues et que nous ne pouvons pas lui montrer ? Nous prenons des exemples, des symboles, des idées connues et nous nous efforçons à l'aide du connu de décrire la réalité à expliquer.

" Le Royaume de Dieu, est semblable à la semence " dira Jésus
(Mt 13, 31), sans vouloir établir cependant une ressemblance parfaite entre le Royaume de Dieu et la semence. L'analogie entre les deux termes ne porte que sur un caractère bien spécifié de l'un et de l'autre, caractère que la parabole doit mettre en relief. Nous dirons de même que le Royaume de Dieu que Jésus est venu instaurer n'est pas un royaume comme ceux que nous connaissons, bien qu'il soit véritablement un royaume.

Qu'est-il donc ? Demandons-le à l'apôtre saint Paul, le grand théologien du Christ, l'Apôtre qui se proclame lui-même le héraut du grand mystère caché aux siècles passés, et qu'il doit manifester et réaliser
(Cf. Ep 3, 1-12). Ce mystère du Royaume de Dieu n'est livré aux autres qu'en paraboles ; lui doit nous en donner l'intelligence qu'il a reçue lui-même. Et l'Apôtre nous dévoile ainsi que Dieu qui a tout créé par son Verbe a décrété, après la chute de l'homme au Paradis terrestre, de tout restaurer par son Verbe incarné, le Christ Jésus (Cf. en particulier Ep 1, 3-10).

II a décrété de " faire habiter en lui toute la Plénitude et par lui de réconcilier tous les êtres, aussi bien sur la terre que dans les cieux en faisant la paix par le sang de sa Croix "
(Col 1, 19-20). Dieu a institué le Verbe incarné, Jésus, au sommet de tout, dit l'Apôtre, " Tête de l'Église, celle-ci étant son corps, la plénitude de Celui qui est rempli, tout en tout " (Ep 1, 22-23). En ces quelques mots, obscurs à cause de leur plénitude, saint Paul nous expose tout le plan des mystères de l'Incarnation, de la Rédemption et de l'Église.

Le Verbe s'incarne et c'est le Christ Jésus. Il vient nous sauver, nous racheter, et il le fait par le sacrifice du Calvaire. Ce sang qu'il répand, c'est le sang de la nouvelle Alliance de Dieu avec les hommes. Ce sang nous est purification et vie. Le Christ Jésus comme Verbe nous donne sa lumière, comme Sauveur il nous purifie, comme Verbe incarné il nous donne sa vie et sa grâce.

Nous recevons cette vie et cette grâce spécialement par les sacrements, plus spécialement encore par le principal d'entre eux, la sainte Communion. Cette vie du Christ descend dans nos âmes, elle nous est donnée au baptême, elle se développe progressivement ; parce qu'elle est charité, elle nous unit au Christ, nous identifie à lui, et établit entre lui et nous des liens très étroits. A tout instant, le Christ répand sa vie dans nos âmes, il nous unit tellement à lui que nous constituons avec lui une réalité nouvelle, qui est le Corps mystique, le Christ total, l'Église.

Le Christ qui nous unit à lui, dont nous sommes la plénitude, le prolongement, règne sur nos âmes parce que nous sommes unis à lui. Il est vraiment notre Roi : nous sommes sous sa puissance, sous son action, nous devenons ses sujets, nous devenons " lui ". Il est notre Roi, notre Maître, notre " tout ", pour employer le langage expressif de l'apôtre saint Paul
(Cf. Ep 1, 23 ; Col 2, 10 ; 3, 11).

Le Royaume de Dieu, c'est le Christ total, l'Église. Ce Royaume est donc surtout spirituel puisqu'il est constitué par le Christ et par la vie de la grâce qu'il répand dans nos âmes. Il est spirituel parce que l'Esprit Saint en est l'animateur, il en est l'âme.

Sa croissance se fait dans les conditions concrètes de l'existence

Mais ce Corps mystique du Christ, pour s'adapter parfaitement à la condition des hommes que nous sommes, pour remplir sa mission auprès de nous et dans le monde, est constitué aussi extérieurement en société visible parfaitement organisée, qui a tous les pouvoirs d'une société parfaite. Cette société visible qu'est l'Église, en raison de sa mission qui est de conduire les âmes à leur fin dernière, de les ramener à Dieu, de les conduire au Christ et de les maintenir dans l'union au Christ, a une action à exercer dans le monde. Elle a des droits dont elle peut se prévaloir par rapport aux autres sociétés constituées, en raison de son universalité et de l'excellence de la mission qui lui appartient. Le Royaume de Dieu, c'est donc le Corps mystique du Christ, société visible.

Ce Corps mystique du Christ est toujours en construction, il s'édifie sans cesse et il s'édifiera jusqu'à la fin des temps, tant que durera l'humanité, puisqu'il est fait pour elle et qu'il doit conduire les hommes au Christ et au salut par lui. L'apostolat, commencé par les Apôtres, doit se continuer jusqu'à la fin des temps. Cet apostolat a pour but de travailler à l'édification du Corps mystique du Christ jusqu'à la fin des temps et, comme le dit l'apôtre saint Paul, jusqu'à ce qu'il arrive à sa taille d'homme parfait, cette taille que Dieu a voulue pour lui de toute éternité
(Cf. Ep 4, 13). Voilà précisé en quelques mots ce qu'est le Royaume de Dieu.

II. — LES CONDITIONS DU COMBAT SPIRITUEL

Ce Royaume de Dieu se développe en certaines conditions. Une des plus importantes, annoncée par Jésus, est que ce Royaume de Dieu sera gêné en son expansion, en son édification, en sa construction, par l'ennemi, celui qui sème l'ivraie, après que le semeur a semé le bon grain et tandis que les gens dorment
(Cf. Mt 13, 24-30). Il sera gêné par une puissance du mal, par Satan qui a, lui aussi, son royaume. Du royaume de Satan, nous devons dire ce que nous avons dit tout à l'heure du Royaume du Christ, à savoir que ce mot de royaume ne doit pas être employé dans un sens strict ; il indique simplement l'exercice d'une certaine puissance.

Une puissance redoutable

Qu'est ce royaume de Satan ? Nous connaissons par l'Évangile l'existence du démon. On feint parfois actuellement de ne pas croire au démon ; en d'autres circonstances, on le voit partout. Qu'est-ce que le démon ? Un ange déchu qui est devenu une puissance du mal. Ange déchu, il reste un esprit et garde par conséquent la puissance d'un esprit, exerçant une certaine domination sur la matière et doué aussi d'une intelligence pénétrante ; esprit capable également d'acquérir une certaine expérience, une certaine science expérimentale.

Par conséquent la puissance du démon est redoutable, d'autant que les démons sont nombreux. Il y a entre eux une certaine alliance réalisée dans l'opposition à l'édification du Corps mystique du Christ. Dieu a voulu et veut que le démon lui-même exerce sa puissance, son opposition.

Rappelons-nous, dans l'Évangile, la parabole de l'ivraie et du bon grain. Le bon grain a été jeté par le semeur, voici que l'ennemi vient pendant la nuit jeter l'ivraie. Lorsque l'un et l'autre ont poussé, les serviteurs vont trouver le maître, lui font remarquer que l'ivraie est semée dans son champ et lui proposent de l'arracher. Le maître s'y refuse : il faut que l'ivraie et le bon grain poussent ensemble, que le bon grain, le froment, pousse dans la contradiction. Au moment de la moisson, les serviteurs recevront l'ordre de faire la séparation de l'ivraie et du bon grain ; en attendant, ils doivent pousser ensemble. Tel est l'enseignement de Jésus. Ne demandons donc pas à Dieu d'anéantir le démon, il a son rôle providentiel.

Saint Jean de la Croix va même plus loin. Commentant le livre de Job, il nous dit que Dieu donne au démon certaines connaissances, certains moyens pour tenter les justes. Saint Jean de la Croix précise par exemple que, lorsqu'une âme reçoit des faveurs surnaturelles, Dieu les fait connaître au démon afin qu'il puisse les imiter, les contrefaire
(Nuit obscure, II, 23, p. 658).. Voilà des indications précises et précieuses. Le démon a un rôle providentiel.

Le combat de Jésus

Pour connaître cette opposition du démon, son action dans le monde et dans l'Église afin d'empêcher le développement du Corps mystique du Christ, ne cherchons pas des histoires merveilleuses ou extraordinaires. Prenons simplement l'Évangile : nous y trouvons une description de cette action du démon.

Que voyons-nous dans la vie de Notre Seigneur ? Tant que Jésus est à Nazareth, le démon n'apparaît pas. Est-il là ? Oui, probablement. Sait-il que Jésus est Fils de Dieu ? Les Pères et les docteurs de l'Église ont discuté de cela, c'est une question incertaine.
 
Mais voici que Jésus quitte Nazareth et s'en va au désert pour se préparer à sa vie publique dans la prière et le jeûne. Il y est poussé par l'Esprit, nous dira l'Évangile
(Cf. Lc 4, 1). Que trouve-t-il au désert ? Au désert, il y a Dieu : on va au désert pour le trouver, mais le démon y habite aussi. Le démon tourne autour de Jésus et se demande quel est ce personnage qui a quitté Nazareth, sa famille et qui dans cette solitude jeûne pendant quarante jours, et se plonge dans des oraisons profondes. Le démon reçoit alors la puissance de le tenter.

Cette tentation nous est décrite en détail dans l'Évangile, certainement pour notre instruction. Dans la tentation que nous décrivent les évangélistes, spécialement saint Matthieu
(Cf. Mt 4, 1-11), nous voyons une progression qui nous découvre par conséquent l'habileté du démon.

Il se trouve devant Jésus, un personnage merveilleux, extraordinaire, dont il soupçonne la puissance mais peut-être ne sait-il pas encore qui il est. En effet, il commence par le tenter sur le plan sensible. Voici quarante jours que Jésus n'a pas mangé, et il lui propose : " Si tu es le Fils de Dieu, dis que ces pierres deviennent des pains " ; tentation à la fois de gourmandise et d'orgueil.

Il est repoussé par Jésus : " Jésus répondit : 'Il est écrit : L'homme ne vit pas seulement de pain mais encore de toute chose qui sort de la bouche de Dieu'. Alors le diable le mena dans la Ville sainte, le plaça dans l'angle du Temple et lui dit : 'Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas, car il est écrit : Il donnera des ordres aux anges à ton sujet et ils te porteront dans leurs mains de peur que tu ne heurtes du pied quelque pierre' ".

Voilà une tentation beaucoup plus subtile : le démon semble avoir la certitude qu'il a affaire au Fils de Dieu tout-puissant, et il va essayer de mettre en jeu sa toute-puissance. Il lui demande donc de se jeter en bas : Si tu es le Fils de Dieu, tu peux compter sur l'aide des anges. Jésus repousse la tentation : " Jésus lui dit : 'II est écrit : Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu' ". Voilà une révélation qui est faite au démon, il sait qu'il a affaire au Messie.

Et dès lors, sachant cela, " le diable le mena sur une montagne très élevée et, lui découvrant tous les royaumes du monde avec leur magnificence, il lui dit : 'Tout cela, je te le donnerai si tu tombes à mes pieds pour m'adorer' ". Le démon connaît la Sainte Écriture, il sait qu'au Messie est promise la domination universelle. Il se propose, par conséquent, de s'allier à Jésus pour lui donner cette domination extérieure sur le monde entier. L'Évangile nous dit que Jésus repousse cette troisième tentation : " Alors Jésus lui dit : 'Arrière Satan, car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu ne serviras que lui' ". Voilà donc la lutte engagée avec Jésus.

Jésus commence alors sa prédication, et le démon se retire. Que va-t-il faire ? Oh ! il sera auprès de Jésus et en effet, spécialement dans ses prédications en Galilée, nous verrons les démons autour de lui. Jésus chasse les démons des corps, il les chasse des âmes ; les démons proclament qu'il est le Fils de Dieu et lui les fait taire.

Il semble que Jésus ait vaincu définitivement le démon, il n'en est rien. Jésus nous dira lui-même dans l'Évangile
(Cf. Mt 12, 43-45) que lorsque le démon est vaincu, il s'en va dans le désert, dans les lieux arides, et y cherche d'autres démons pour continuer le combat. Voici donc dévoilée la tactique du démon : il va chercher d'autres démons, peut-être supérieurs, et engage le combat d'une autre façon.

Comment va-t-il engager le combat ? Il sait très bien qu'il ne peut rien contre le Christ lui-même. Mais tandis que Jésus continue sa prédication, en Galilée ou à Jérusalem, et fait des miracles, le démon, lui, mène son jeu dans l'ombre. C'est un meneur de jeu très habile, qui peut agir sur la matière sensible, sur l'homme en tant qu'il a un corps. C'est un psychologue très pénétrant, qui connaît admirablement nos tendances, nos désirs, nos faiblesses, nos énergies et qui sait en user remarquablement. Tandis que Jésus fait sa prédication, le démon travaille sur les diverses sectes, les Pharisiens, les Sadducéens, ainsi que sur toutes les diverses puissances.

Il a aussi une habileté extraordinaire pour agir sur les foules, il en connaît admirablement la psychologie. Et tandis que Jésus donne son message, voici que cette action se développe et nous le sentons très bien spécialement dans l'évangile de saint Jean. L'opposition croît dans l'ombre : hésitations, discussions, voici déjà des partis qui se forment ; le démon agit jusque sur le Collège apostolique et il y trouvera un traître. Judas, pour livrer le Maître
(Cf. Jn 6, 70 et 13, 2).

Au bout de trois ans, alors que Jésus a rempli sa mission, qu'il a étalé, pour ainsi dire, et développé son message, qu'il a proclamé et prouvé qu'il est le Fils de Dieu par ses miracles

et par ses œuvres, le démon de son côté, a fait son œuvre dans l'ombre. " C'est l'heure de la puissance des ténèbres " dit Jésus
(Lc 22, 53). Il semble que Jésus devrait triompher, et il triomphe en effet le jour des Rameaux à Jérusalem ; et cependant l'heure de la puissance des ténèbres a sonné. A Gethsémani, le démon va jusqu'à s'attaquer à l'humanité du Christ. Il y a là certainement une action personnelle de cette puissance des ténèbres sur l'humanité du Christ.

La scène de Gethsémani est un mystère que nous n'arriverons jamais à pénétrer ; il y a tellement de contrastes humains et psychologiques, de contrastes spirituels, que nous ne pouvons que la regarder de loin, en adorant le Christ dans son abaissement et en même temps dans la puissance de sa victoire. Il y a donc là une force qui s'exerce sur le Christ et cette force, cette pression du démon sur l'humanité du Christ, fait jaillir la sueur de sang de Gethsémani
(Cf. Lc 22, 44).

Et ce n'est pour ainsi dire que le commencement du drame. Car le Vendredi Saint, le lendemain, montrera extérieurement comment le démon a réussi à conquérir la foule et le Conseil des Anciens, scribes et Pharisiens, qui vont se liguer pour demander la mort du Christ. Nous en savons le résultat : c'est le Calvaire où vraiment la puissance du démon triomphe.

En diverses circonstances, Jésus avait proclamé le démon le " prince de ce monde "
(Cf. en particulier Jn 12, 31 ; 14, 30), il avait annoncé aussi sa défaite. Voici que le démon triomphe sur le Calvaire, son action a tout détruit : les Apôtres ont fui. Judas a trahi et il n'est personne, pas une voix qui se soit élevée pour le Christ. Il semble que son œuvre soit tout à fait détruite.

L'Église dans les pas de Jésus

Dans ce Calvaire et dans la vie du Christ, nous est dévoilée déjà l'action du démon dans l'Église. Tout à l'heure, en parlant du Royaume de Dieu, nous disions que l'Église est le Corps mystique du Christ ; c'est le Christ total, le Christ lui-même, le prolongement du Christ dans le temps, le Christ qui s'accroît sans cesse jusqu'à la fin des temps. Cet accroissement, ce développement, cette édification du Christ se fera suivant les mêmes lois que la vie du Christ ici-bas. Les circonstances extérieures peuvent changer, les lois seront les mêmes. La vie du Christ se développera de la même façon, dans la même contradiction. Et c'est ce que je voudrais justement souligner en cet entretien.

Je voudrais d'abord noter cette vérité fondamentale, à savoir que l'Église est le Christ total qui se développe sans cesse et souligner aussi cette action intelligente, constante, du démon à travers les temps contre l'Église. On feint de ne pas croire au démon, ou on le recherche dans quelques manifestations extraordinaires. Elles peuvent exister, il en est à toute époque, mais l'action du démon ne se traduit pas surtout dans tel ou tel cas de possession que nous pouvons voir ici ou là. C'est une action intelligente, qui s'exerce sur les âmes et sur les foules.
 
Cette action remarquablement intelligente, utilise toutes les énergies, toutes les forces de la nature, toutes les inventions ; elle s'exerce sur le plan psychologique, psychique, et aussi sur l'intelligence. Cette action du démon fait de lui, maintenant comme au temps du Christ, le prince de ce monde. Il n'a pas moins de haine contre l'Église, prolongement du Christ, Christ total, qu'il n'en avait contre le Christ.

Quelles sont les phases de cette lutte ? Cette lutte qui se poursuit et se poursuivra jusqu'à la fin des temps, voit le développement du Christ. Le Christ triomphe car il se développe. Chaque jour, la vie du Christ coule par les sacrements, par la communion ; elle coule dans les entretiens intimes des âmes avec le Christ. Chaque jour, l'Église est nourrie du Christ.

L'Esprit Saint vit dans l'Église et fait son œuvre ; lui qui en est l'édificateur, il la développe et par conséquent cette Église croît sans cesse. Elle triomphe en croissant ainsi tous les jours ; et par la mort, les âmes sont placées dans l'Église triomphante où elles ne craignent plus aucune attaque.

Mais ici-bas, l'Esprit Saint continue son œuvre, cette Église se déploie et, en même temps, il y a cette puissance de Satan qui s'exerce, puissance intelligente qui essaie d'empêcher, de gêner l'expansion, l'édification du Christ. Le démon est le prince de ce monde ; comme au temps du Christ, il obtient des victoires, victoires apparentes qui sont des victoires réelles. A mesure que nous avançons vers la fin des temps, de même que le Christ se développe et devient plus puissant, plus grand en son Église, ainsi le démon lui aussi acquiert une expérience, et par conséquent développe et fourbit ses armes, des armes de plus en plus dangereuses contre l'Église de Dieu ; et il obtient des victoires, des victoires apparentes.

Voilà la vérité. Ce monde est du démon, c'est là, en ce monde, qu'il réalise ses victoires apparentes. Pouvons-nous penser qu'un jour viendra où le Christ triomphera ici-bas et le démon ne remportera plus de victoires ? C'est un mystère, mais cependant nous pouvons l'éclairer par l'Évangile.

Que lisons-nous dans l'Évangile ? Voici ce que dit Jésus lui-même : " Mais le Fils de l'homme, quand il reviendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? "
(Lc 18, 8). Il dit encore, dans saint Matthieu : " Par suite de l'iniquité croissante, l'amour se refroidira dans le grand nombre, mais celui qui aura tenu bon jusqu'au bout, celui-là sera sauvé " (Mt 24, 12-13). Et nous parlant de la fin des temps, Jésus lui-même nous dit : " Ces temps seront abrégés à cause des élus " (Mt 24, 22).

Et si nous regardons la vie du Christ et cherchons par analogie la vie de l'Église, que sera sa fin ? Il me paraît que cette fin pourrait bien être un Calvaire. Pourquoi rêver de triomphe puisque le Christ n'a pas eu d'autre triomphe que celui de la Croix ? Le prolongement du Christ, le Christ en sa fin, pourra être et, me semble-t-il, sera comme le Christ en sa vie terrestre ici-bas. Telle est la vérité évangélique.

Cette vérité qui nous est exposée, qui n'est pas nettement révélée en termes précis comme je l'énonce, mais que nous pouvons cependant déduire de ce qui nous est dit, nous devons la regarder en face. Pourquoi nous leurrer toujours de triomphes terrestres ? Pourquoi nous encourager toujours en disant : demain sera mieux, demain nous triompherons ? Nous faisons comme les Apôtres, nous cultivons un mythe. " Mais si on ne dit pas cela, nous perdrons tout courage... " Je ne vois pas que, pour donner du courage, il faille dire des mensonges et des contre-vérités.

Il suffit de regarder la vérité en face et elle est assez belle. Le Christ se développe, chaque jour il triomphe, mais il triomphe dans la souffrance, dans la douleur, il triomphe dans le sang et dans la défaite.

Le salut en espérance : le triomphe du Christ

Son grand triomphe, quel sera-t-il ? Écoutons encore Jésus, ne suivons pas notre imagination et ne cédons pas à ce désir de toujours triompher et dominer. Humilié devant le prince des prêtres, devant ces hommes qui ne veulent pas le reconnaître alors que leur mission était justement de préparer la venue du Christ et de le reconnaître, il dit : " Vous verrez un jour ce Fils de l'homme venir sur les nuées des cieux pour juger les vivants et les morts "
(Cf. Mt 26, 64).

Voilà le triomphe auquel nous pouvons et nous devons penser. Je sais bien que parfois on nous dira : Ah oui, vous êtes des gens qui ne pensez qu'à l'au-delà ! Eh bien oui, si c'est la vérité, pensons à cela. Nous pouvons penser au triomphe de chaque jour de l'Église, mais pensons à ce grand triomphe.

L'Église des premiers siècles, les premiers chrétiens pensaient à la Parousie, à ce triomphe final ; ils y pensaient tellement qu'il croyaient que le Christ reviendrait prochainement. Et l'Apôtre les entretenait dans cette espérance
(Cf. en particulier 1 Th 4, 16 s). Nous-mêmes, regardons cette fin, regardons ce salut en espérance. Regardons notre propre salut ; nous n'avons pas à attendre le jugement dernier pour triompher nous-mêmes. Nous triomphons au jour de notre mort lorsque nous entrons dans la vie du Christ, dans la vie de Dieu, dans la vision face à face.

Mais le triomphe de l'Église, ce sera ce jour-là. Le jugement dernier ne sera pas, comme on le représente trop souvent malheureusement, à mon avis, comme une reddition de comptes, un examen d'un inspecteur quelconque qui viendra voir toutes nos petites affaires et les étalera devant tout le monde, n'est-ce pas ? Non, le jugement dernier, c'est le triomphe du Christ qui descend dans toute sa gloire et qui environne et pénètre de sa gloire tous ceux qui ont cru en lui. Telle est la vérité à laquelle nous devons penser...

Le triomphe d'aujourd'hui : la vie du Christ en moi

Ces perspectives, peut-être un peu douloureuses, de la défaite apparente de l'Église de tous les jours, de la puissance du démon, pourraient nous attrister. Ne nous laissons pas prendre par cette tristesse. Le triomphe est déjà réalisé en nous si nous sommes chrétiens, si nous avons la vie de la grâce. Le chrétien qui vit de la vie de la grâce, qui en a pris conscience, qui l'entretient et la développe par le " commerce "
 [" Commerce " signifie ici " oraison " selon la définition de S. Thérèse d'Avila : " L'oraison est un commerce d'amitié où l'on s'entretient souvent seul à seul avec Dieu dont on se sait aimé " (Vie, ch. 8, p. 82)] avec Dieu et par la communion, triomphe sans cesse car la vie de Dieu est en lui.

Les chrétiens de Chine, ceux de Shanghai comprennent bien cela. Je recevais ces jours-ci des lettres de Shanghai, de carmélites
(Cf. à ce propos les passages des lettres publiées dans Père d'une multitude, Sarment-Fayard, 1988, p. 158 et p. 160). qui ont été oppressées ; ce qui jaillissait de leur âme, c'était la reconnaissance d'avoir été unies à la souffrance du Christ, à cette défaite apparente du Christ, dans ces villes sous l'oppression communiste. Ces carmélites m'écrivaient : " Nous avons laissé là-bas nos sœurs indigènes ". Mais la seule tristesse qu'elles avaient dans l'âme, était simplement celle-ci : " Comment pourrons-nous passer vingt ans, trente ans, sans communion ?... Mais enfin, puisque Dieu le veut, nous tiendrons ".

Ces âmes, sous l'oppression, ont senti ce triomphe intérieur et la certitude de la présence de l'Esprit Saint dans leurs âmes, de la vie du Christ. Et cette vie qui se répand sans cesse sur les âmes les aidera à tenir, sous l'étreinte, non pas seulement sous la menace mais sous les tourments psychologiques et physiques qui leur seront imposés.

Essayons nous-mêmes, sinon d'arriver à ces hauteurs, du moins de prendre conscience de cette vie de Dieu en nous, de la développer et de chercher, en cela, une certitude et des assurances. Que nous puissions ainsi aller toujours de l'avant malgré les tentations du démon, malgré les pressions extérieures, pour faire triompher cette vie de Dieu en nous, pour travailler le mieux possible à l'édification du Corps mystique du Christ.
 

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Sources : Bibliothèque -  (E.S.M.)
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Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M. sur Google actualité)  23.11.2008 - T/Spiritualité

 

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