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Benoît XVI : Le Dieu personnel
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Le 22 juin 2023 -
E.S.M.
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Si le logos de tout ce qui existe, si l'Être qui porte
et embrasse tout, est Conscience, Liberté et Amour, alors
logiquement, la réalité suprême dans le monde n'est pas la Nécessité
cosmique, mais la Liberté. Les conséquences sont d'une portée
considérable. La liberté devient en quelque sorte la structure
nécessaire du monde et par suite, le monde ne saurait être conçu que
comme « inconcevable »; il est nécessairement irréductibilité au
concept. Car si la clé de voûte du monde est une liberté qui porte,
veut, connaît et aime le monde entier comme liberté, alors
l'imprévisible, inhérent à la liberté, fait partie essentielle du
monde.
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La Liberté éclairant le monde ! -
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Texte précédent :
Benoît XVI : Le primat du Logos
II. LE DIEU PERSONNEL
Si la foi est d'abord option pour le primat du logos,
si elle est foi en la réalité antécédente du Sens créateur qui porte le
monde, elle est aussi foi au caractère personnel de ce Sens : pour elle, la
Pensée originelle qui a produit le monde, n'est pas
une conscience anonyme neutre, mais Liberté, Amour créateur, Personne.
Elle est donc aussi option pour le primat du particulier sur l'universel. La
réalité suprême n'est pas l'universel, mais le particulier ; ainsi la foi
chrétienne est aussi option pour l'homme, être irréductible ouvert sur
l'infini ; par là elle est enfin option pour le primat de la liberté contre
le primat d'un déterminisme cosmique. De cette façon, la spécificité de la
foi chrétienne est fortement mise en relief, en face de toutes les autres
formes d'option de l'esprit humain. La position prise
par un homme qui accepte le Credo chrétien devient parfaitement claire.
On peut montrer que la première option - primat du logos
sur la simple matière - n'est pas possible sans la deuxième et la troisième
; plus exactement : la première, prise toute seule, resterait un pur
idéalisme ; c'est seulement en y ajoutant les deux autres - primat du
particulier, primat de la liberté - que s'établit la ligne de partage entre
idéalisme et foi chrétienne qui est loin d'être un pur idéalisme.
Il y aurait beaucoup à dire là-dessus. Contentons-nous de
quelques éclaircissements indispensables et demandons-nous d'abord : que
veut-on dire lorsqu'on affirme que le Logos, dont le monde représente
la pensée, est une personne et que, par suite, la foi est une option pour le
primat du particulier sur l'universel ? On peut répondre de manière très
simple : cela signifie, en fin de compte, que cette Pensée créatrice, le
présupposé et le principe de tout être, est une Pensée réellement consciente
d'elle-même, qui non seulement se connaît elle-même mais connaît aussi tout
ce qu'elle pense. Cela veut dire, de plus, que cette Pensée-ne connaît pas
seulement mais qu'elle aime aussi, qu'elle est créatrice parce que Amour ;
et enfin, étant capable non seulement de connaître mais aussi d'aimer, elle
a établi ce qu'elle a pensé, dans la liberté d'un être autonome ; elle l'a
objectivé, pourvu d'un être propre. Le tout revient à dire que cette
Pensée-là connaît, aime et porte avec amour l'objet de sa pensée, devenu
autonome. Nous voilà encore revenus à ce point qui polarise toutes nos
réflexions : ne pas être enfermé par ce qu'il y a de plus grand, se laisser
enfermer par ce qu'il y a de plus petit, voilà qui est divin.
Mais si le logos de tout ce qui existe, si l'Être qui
porte et embrasse tout, est Conscience, Liberté et Amour, alors logiquement,
la réalité suprême dans le monde n'est pas la Nécessité cosmique, mais la
Liberté. Les conséquences sont d'une portée considérable. La liberté devient
en quelque sorte la structure nécessaire du monde et par suite, le monde ne
saurait être conçu que comme « inconcevable »; il est nécessairement
irréductibilité au concept. Car si la clé de voûte du monde est une liberté
qui porte, veut, connaît et aime le monde entier comme liberté, alors
l'imprévisible, inhérent à la liberté, fait partie essentielle du monde.
L'imprévisibilité est une implication de la liberté ; dans ce cas, le monde
ne pourra jamais être entièrement ramené à une logique mathématique. Mais
avec ce côté audacieux et grandiose d'un monde marqué dans sa structure par
la liberté, surgit également le sombre mystère du démoniaque, qui en est la
contrepartie. Un monde qui a été créé et voulu avec le risque de la liberté
et de l'amour, ne saurait être de la pure mathématique. Domaine de l'amour,
il est par le fait même domaine où joue la liberté, où menace le danger du
mal. Mais ce risque du mystère de l'ombre, il le court en vue de la lumière
plus grande que constituent l'amour et la liberté.
Nous voyons à nouveau comment, dans une telle optique, les
catégories de maximum et de minimum, de plus grand et de plus petit se
transforment. Dans un monde qui, en dernière analyse, n'est pas
mathématique, mais amour, le minimum est en fait un maximum ; l'être le plus
petit, capable d'aimer, devient le plus grand ; le particulier est plus que
l'universel, la personne, réalité singulière dans le temps et non
réitérable, est en même temps la réalité définitive et suprême. Dans une
telle vision du monde, la personne n'est pas un simple individu, un
exemplaire polycopié, résultant du morcellement de l'Idée dans la matière,
elle est précisément « personne ». Pour la pensée grecque, les nombreux
êtres particuliers, sans excepter les hommes, ne sont que des individus. Ils
résultent de l'émiettement de l'Idée par la matière. De la sorte, le
multiple est toujours une réalité secondaire; la réalité authentique, ce
serait l'un et l'universel. Le chrétien voit dans l'homme non pas un
individu, mais une personne. Dans ce passage de l'individu à la personne
apparaît, à mon sens, toute l'étendue du chemin qui va de l'antiquité au
christianisme, du platonisme à la foi. Cet être déterminé n'est nullement
quelque chose de secondaire, qui nous laisserait simplement entrevoir de
manière fragmentaire l'universel, seul authentique. En tant que minimum, il
est un maximum ; en tant que réalité singulière dans le temps et non
réitérable, il est réalité suprême et authentique.
Faisons un dernier pas. S'il en est ainsi, si la personne est
plus que l'individu, si le multiple est une réalité authentique et pas
seulement secondaire, s'il y a un primat du particulier sur l'universel,
alors l'unité n'est pas la seule et dernière réalité, alors le multiple a
lui aussi ses droits, propres et définitifs. Cette affirmation qui découle
de l'option chrétienne par une nécessité interne, nous conduit spontanément
à dépasser la conception d'un Dieu qui ne serait qu'unité. La logique
interne de la foi chrétienne en Dieu oblige à dépasser un pur monothéisme et
conduit à la foi au Dieu un et trine, dont nous parlerons
maintenant.
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Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -
E.S.M.
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 22.06.2023
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