L'enseignement de Benoît XVI au
centre du message pour la Journée de prière pour les prêtres |
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Rome, le 22 avril 2008 -
(E.S.M.) - A l'occasion de la journée Mondiale de prière pour
la sanctification des prêtres, qui aura lieu le 30 mai 2008, nous vous
proposons la lecture du du message du Cardinal Hummes, avec en son
centre, tout l'enseignement du pape Benoît XVI.
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L'enseignement de Benoît XVI au centre du message pour la Journée de prière
pour la sanctification des prêtres
CONGREGATION PRO CLERICIS
SACRE CŒUR DE JESUS
30 MAI2008
JOURNEE MONDIALE DE PRIERE POUR LA SANCTIFICATION DES PRETRES
Chers confrères dans le sacerdoce,
En la Fête du Très Saint Cœur de Jésus, nous fixons les yeux de notre esprit
et de notre cœur, avec un regard d'amour constant, sur le Christ, unique
Sauveur de nos existences et du monde. Rappeler le Christ signifie rappeler
ce Visage que chaque homme, consciemment ou non, cherche comme unique
réponse adaptée à sa soif irrépressible de bonheur.
Ce Visage, nous l'avons rencontré et, en ce jour, en cet instant, Son Amour
a tellement blessé notre cœur, que nous n'avons pu faire autrement que
demander sans cesse de nous trouver en sa Présence. «Au matin, tu écoutes ma
voix; au matin, je me prépare pour toi et je reste en éveil»
(Psaume 5).
La Sainte Liturgie nous conduit à nouveau et encore à contempler le mystère
de l'Incarnation du Verbe, origine et réalité profonde de cette compagnie
qu'est l'Eglise: le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob se révèle en Jésus
Christ. «Sa Gloire, personne n'aurait pu la voir à moins d'être guéri par
l'humilité de sa chair. La poussière t'avait aveuglé, la poussière te
guérit; ton aveuglement était venu de la chair, de la chair est venue ta
guérison» (SAINT AUGUSTIN, Traité sur l'Evangile de Jean, Homélie, 2, 16).
Ce n'est qu'en regardant à nouveau l'humanité parfaite et fascinante de
Jésus Christ, Vivant et agissant en ce moment, qui s'est révélé à nous et
qui à présent se penche encore sur chacun de nous avec cet amour de totale
prédilection qui Lui est propre, qu'il est possible de le laisser illuminer
et combler l'abîme de besoin qu'est notre humanité, certains de l'Espérance
rencontrée, certains de la Miséricorde qui embrasse nos limites, en nous
enseignant à pardonner ce que nous ne parvenions même pas à apercevoir de
nous-mêmes. «L'abîme appelant l'abîme à la voix de tes cataractes»
(Psaume41).
Je voudrais, à l'occasion de la traditionnelle Journée de Prière pour la
Sanctification des Prêtres, qui est célébrée en la Fête du Très Saint Cœur
de Jésus, rappeler la priorité de la prière par rapport à l'action, dans la
mesure où c'est de celle-ci que dépend la profondeur de l'action. De la
relation personnelle de chacun avec le Seigneur Jésus dépend grandement la
mission de l'Eglise. La mission doit donc être nourrie par la prière: « Le
moment est venu de réaffirmer l'importance de la prière face à l'activisme
et au sécularisme dominant » (BENOIT XVI,
Deus Caritas est, n. 37). Ne nous
lassons pas de puiser à sa Miséricorde, de le laisser examiner et guérir les
plaies douloureuses de notre péché pour nous émerveiller face au miracle,
toujours nouveau, de notre humanité rachetée.
Très chers confrères, nous sommes les experts de la Miséricorde de Dieu en
nous et, uniquement ainsi, ses instruments lorsque nous embrassons, de
manière toujours nouvelle, l'humanité blessée. « Le Christ ne nous sauve pas
de notre humanité, mais à travers celle-ci; il ne nous sauve pas du monde,
mais il est venu dans le monde pour que le monde se sauve grâce à Lui
(cf. Jn 3, 17) » (BENOIT XVI,
Message Urbi et Orbi, 25 décembre 2006). Enfin, nous
sommes prêtres pour l'Acte le plus élevé de la Miséricorde de Dieu et, dans
le même temps, de sa prédilection, le Sacrement de l'Ordre.
En deuxième lieu, dans la soif ardente et irrépressible que nous avons de
Lui, la dimension la plus authentique de notre Sacerdoce est la mendicité,
la prière simple et continue, que l'on apprend dans l'oraison silencieuse;
celle-ci a toujours caractérisé la vie des saints et elle doit être demandée
avec insistance. Cette conscience de la relation avec Lui est
quotidiennement soumise à la purification de l'épreuve. Chaque jour, à
nouveau, nous nous apercevons que ce drame ne nous est pas non plus épargné,
nous Ministres qui agissons in Persona Christi Capitis: nous ne pouvons pas
vivre un seul instant en sa présence, sans le doux désir de Le reconnaître,
Le connaître et adhérer encore à Lui. Ne cédons pas à la tentation de
considérer notre être Prêtres comme une charge inévitable et ne pouvant être
déléguée, désormais assumée, que l'on peut «mécaniquement» exercer en
suivant simplement un programme pastoral articulé et cohérent. Le Sacerdoce
est la vocation, la route, la manière à travers laquelle le Christ nous
sauve, avec laquelle il nous a appelés, et nous appelle û présent, à vivre
avec Lui.
L'unique mesure adaptée, face à notre sainte Vocation, est la radicalité. Ce
dévouement total, dans la conscience de notre infidélité, ne peut avoir lieu
que comme une décision renouvelée dans la prière que le Christ réalise
ensuite jour après jour. Le don même du célibat sacerdotal est à accueillir
et à vivre dans cette dimension de radicalité et de pleine configuration au
Christ. Toute autre position, par rapport à la réalité de la relation avec
Lui, risque de devenir idéologique.
Même la quantité de travail, parfois extraordinairement grande, que les
conditions actuelles du ministère nous demandent de soutenir, au lieu de
nous décourager, doit nous pousser à avoir soin, avec encore plus
d'attention, de notre identité sacerdotale, qui a une racine
irréductiblement divine. En ce sens, selon une logique opposée à celle du
monde, ce sont précisément les conditions du ministère qui doivent nous
pousser à «élever le degré» de notre vie spirituelle, en témoignant avec une
plus grande conviction et efficacité de notre appartenance exclusive au
Seigneur.
Nous sommes éduqués au dévouement total par Celui qui nous a aimés le
premier. «Je me fis trouver par celui qui ne me cherchait pas. Je dis: "Me
voici" à celui qui n'invoquait pas mon Nom». Le lieu de la totalité par
excellence est l'Eucharistie, car: «Jésus, dans l'Eucharistie, donne non pas
"quelque chose" mais se donne lui-même; il offre son corps et il verse son
sang. De cette manière, il donne la totalité de son existence, révélant la
source originaire de cet amour» (Sacramentum
Caritatis, n. 7 de Benoît XVI).
Nous sommes fidèles, très chers confrères, à la célébration quotidienne de
la Très Sainte Eucharistie, non seulement pour remplir un engagement
pastoral ou répondre à une exigence de la communauté qui nous est confiée,
mais en raison du besoin personnel absolu que nous en ressentons, comme de
l'air, comme de la lumière pour notre vie, comme l'unique raison appropriée
à une existence accomplie de prêtre.
Le Saint-Père, dans l'Exhortation post-synodale Sacramentum Caritatis, nous
repropose avec force l'affirmation de saint Augustin: «Que personne ne mange
cette chair sans d'abord l'adorer; nous pécherions si nous ne l'adorions
pas» (SAINT AUGUSTIN, Enarrationes in Psalmos, 98, 9). Nous ne pouvons pas
vivre, nous ne pouvons pas regarder la vérité sur nous-mêmes, sans nous
laisser regarder et engendrer par le Christ dans l'Adoration eucharistique
quotidienne, et le «Stabat» de Marie, «Femme eucharistique», sous la Croix
de son Fils, est l'exemple le plus significatif qui nous est donné de la
contemplation et de l'adoration du Sacrifice divin.
De même que la dimension missionnaire est intrinsèque à la nature même de l'Eglise,
notre mission est contenue dans l'identité sacerdotale, c'est pourquoi
l'urgence missionnaire est une question de conscience de nous-mêmes. Notre
identité sacerdotale est édifiée et renouvelée jour après jour dans le
«dialogue» avec notre Seigneur. La relation avec Lui, sans cesse nourrie
dans la prière permanente, a pour conséquence immédiate la nécessité d'y
faire participer ceux qui nous entourent. La sainteté que nous demandons
quotidiennement, en effet, ne peut pas être conçue selon une acception
individualiste stérile et abstraite, mais elle est nécessairement la
sainteté du Christ, qui est contagieuse pour tous: «Le fait d'être en
communion avec Jésus Christ nous implique dans son être "pour tous", il en
fait notre façon d'être» (BENOIT XVI,
Spe Salvi, n. 28).
Cet «être pour tous» du Christ se réalise, pour nous, dans les Tria Munera
dont nous sommes revêtus par la nature même du sacerdoce. Ces derniers, qui
constituent la totalité de notre Ministère, ne sont pas le lieu
d'aliénation, ou pire encore, d'un pur réductionnisme fonctionnaliste de
notre personne, mais l'expression la plus véritable de notre être du Christ;
ils sont le lieu de la relation avec Lui. Le Peuple qui nous est confié afin
que nous l'éduquions, le sanctifions et le gouvernions, n'est pas une
réalité qui nous distrait de «notre vie», mais il est le visage du Christ
que nous contemplons quotidiennement, comme l'époux contemple le visage de
sa bien-aimée, comme le Christ contemple l'Eglise, son Epouse. Le peuple qui
nous est confié est la voie incontournable de notre sainteté, c'est-à-dire
la voie par laquelle le Christ manifeste la gloire du Père à travers nous.
«Si pour la personne qui en scandalise une seule autre et la plus petite il
faut qu'il lui soit suspendue au cou une meule et qu'elle soit précipitée
dans la mer [..„] ceux qui en revanche conduisent à la perdition [...] tout
un peuple comment devront-ils souffrir quel châtiment devront-ils recevoir?»
(SAINT JEAN CHRYSOSTOME, De Sacerdotio VI, 1.498). Face à la conscience
d'une tâche aussi grave et d'une responsabilité si grande pour notre vie et
notre salut, où la fidélité au Christ coïncide avec l'«obéissance» aux
exigences dictées par la rédemption de ces âmes, on ne doit pas laisser le
moindre espace pour douter de la grâce reçue. Nous pouvons seulement
demander de céder le plus possible à Son Amour, afin qu'il agisse à travers
nous, car ou nous laissons le Christ sauver le monde, en agissant en nous ou
bien nous risquons de trahir la nature même de notre vocation. La mesure du
dévouement, chers confrères, est à nouveau et encore la totalité. «Cinq
pains et deux poissons» ce n'est pas beaucoup, oui, mais cela est tout! La
Grâce de Dieu fait de toute notre petitesse, la Communion qui nourrit le
Peuple. A ce «dévouement total», participent de manière particulière les
prêtres âgés ou malades qui, quotidiennement, en exerçant le divin
ministère, en s'unissant à la passion du Christ et en offrant leur existence
presbytérale, pour le vrai bien de l'Eglise et le salut des âmes.
Enfin, le fondement incontournable de toute la vie sacerdotale demeure la
Sainte Mère de Dieu. La relation avec Elle ne peut pas se résoudre en une
pratique de piété et de dévotion mais elle est nourrie par le dévouement
constant, entre les bras de la toujours Vierge, de toute notre vie, de notre
ministère dans sa totalité. La Très Sainte Vierge Marie nous reconduit nous
aussi à nouveau, comme Jean, sous la Croix de Son Fils et notre Seigneur,
pour contempler, avec Elle, l'Amour infini de Dieu: «Elle est descendue
ici-bas, notre Vie, la vraie Vie, elle s'est chargée de notre mort pour la
tuer avec la surabondance de Sa Vie» (SAINT AUGUSTIN, Confessions IV, 12).
Dieu le Père a choisi, comme condition pour notre rédemption, pour
l'accomplissement de notre humanité, pour l'Avènement de l'Incarnation du
Fils, d'attendre le «Fiat» d'une Vierge devant l'annonce de l'ange. Le
Christ a décidé de confier, pour ainsi dire, sa Vie à la liberté pleine
d'amour de la Mère: «En concevant le Christ, en le mettant au monde, en le
nourrissant, en le présentant dans le Temple à son Père, en souffrant avec
son Fils qui mourait sur la croix, elle apporta à l'œuvre du Sauveur une
coopération absolument sans pareille par son obéissance, sa foi, son
espérance, son ardente charité, pour que soit rendue aux âmes la vie
surnaturelle. C'est pourquoi elle est devenue pour nous, dans l'ordre de la
grâce, notre Mère» (Lumen
Gentium, n.61).
Le Pape Saint Pie X affirmait: «Toute vocation sacerdotale vient du cœur de
Dieu, mais elle passe à travers le cœur d'une mère». Cela est vrai par
rapport à l'évidente maternité biologique mais aussi par rapport à
l'«accouchement» de toute fidélité à la Vocation du Christ. Nous ne pouvons
nous passer d'une maternité spirituelle pour notre vie sacerdotale: en nous
en remettant plein de confiance à la prière de toute la Sainte Mère Eglise,
à la maternité du Peuple, dont nous sommes les pasteurs, mais auquel est
confiée également notre garde et notre sainteté; nous demandons ce soutien
fondamental.
Il se fait jour, chers confrères, l'urgence d'«un mouvement de prière qui
place en son centre l'Adoration eucharistique continue sur la durée de
vingt-quatre heures, de manière à ce que de tout angle de la terre, s'élève
toujours à Dieu une prière d'adoration, d'action de grâce, de demande et de
réparation, avec le but principal de susciter un nombre suffisant de saintes
vocations au sacerdoce et, également, d'accompagner spirituellement — au
niveau du Corps mystique —, avec une sorte de maternité spirituelle ce qui
sont déjà appelés au sacerdoce ministériel et sont ontologiquement conformés
à l'unique Souverain et Eternel Prêtre, afin qu'ils Le servent toujours
mieux Lui ainsi que les frères, comme ceux qui , dans le même temps sont
"dans" l'Eglise mais aussi "devant" l'Eglise
(cf. JEAN-PAUL II, Pastores
dabo vobis, n. 16) en représentant le Christ et, le représentant, comme
tête, pasteur et époux de l'Eglise» (Lettre
pour la sanctification du Clergé, 8 décembre 2007).
Ainsi se dessine, en fin de compte, une forme supplémentaire de maternité
spirituelle, qui a toujours accompagné silencieusement, dans l'histoire de
l'Eglise, la famille élue des prêtres: il s'agit de confier concrètement
notre ministère à un visage déterminé, à une âme consacrée, qui soit appelée
par le Christ et, donc, choisisse d'offrir sa propre personne, les
souffrances nécessaires et les difficultés inévitables de la vie, pour
intercéder en faveur de notre existence sacerdotale, en vivant, de cette
manière, en la douce présence du Christ.
Cette maternité, dans laquelle s'incarne le visage amoureux de Marie, doit
être demandée dans la prière, car seul Dieu peut la susciter et la soutenir.
D'admirables exemples en ce sens ne manquent pas; pensons aux larmes
bénéfiques de sainte Monique pour son fils Augustin, pour lequel elle pleure
«plus que ne pleurent les mères pour la mort physique de leurs enfants»
(SAINT AUGUSTIN, Confessions III, 11). Un autre exemple fascinant est celui
d'Eliza Vaughan, qui donna le jour et confia au Seigneur treize enfants; sur
les huit fils, six devinrent prêtres, et sur les cinq filles, quatre
devinrent religieuses. Car il n'est pas possible d'être véritablement
mendiants devant le Christ, merveilleusement caché dans le Mystère
eucharistique, sans savoir concrètement demander l'aide effective et la
prière de ceux qu'il place à nos côtés, et sans craindre de nous en remettre
aux maternités qu'assurément l'Esprit suscite pour nous.
Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, consciente du besoin extrême de prière
pour tous les prêtres surtout pour ceux qui sont tièdes, écrit dans une
lettre adressée à sa sœur Céline: «Vivons pour les âmes, soyons des apôtres,
Sauvons surtout les âmes des prêtres [...]. Prions, souffrons pour eux et,
le dernier jour, Jésus sera reconnaissant» (SAINTE THERESE DE LISIEUX,
Lettre 94).
Confions-nous à l'intercession de la Sainte Vierge Reine des Apôtres, très
douce Mère, tournons avec Elle notre regard vers le Christ, en tendant
continuellement à être totalement, radicalement à Lui; telle est notre
identité!
Nous nous souvenons des paroles du saint Curé d'Ars, Patron des Curés: «Si
j'avais déjà un pied au ciel, et que l'on venait me dire de retourner sur la
terre pour travailler à la conversion des pécheurs, j'y retournerais bien
volontiers. Et s'il était pour cela nécessaire de rester sur la terre
jusqu'à la fin du monde, en me levant toujours à minuit, et que je souffrais
comme je souffre, je consentirais de tout cœur» (FRERE ATHANASE, Procès de
l'Ordinaire, p. 883).
Puisse le Seigneur guider et protéger tous et chacun, en particulier les
malades et les plus souffrants, dans l'offrande constante de notre vie par
amour.
Claudio Card. Hummes Préfet
S.Exc. Mgr Mauro Piacenza Archevêque titulaire de Vittoriana Secrétaire
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Lettre du Cardinal Cláudio Hummes à
l'occasion de la Journée Mondiale de Prière pour la Sanctification des
prêtres (30 mai 2008)
[Anglais,
Espagnol,
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Portugais]
Sources : www.clerus.org
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 21.04.08 -
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