Des personnages de haut rang
prétendent déjà préparer un après-Benoît XVI |
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Le 21 janvier 2009 -
(E.S.M.)
- Peu après l’élection de Benoît XVI, paraissait un
livre-manifeste d’un cardinal anonyme n’ayant pas participé au conclave.
Il est révélateur de l’état d’esprit de l’aile la plus libérale de la
Curie.
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Des personnages de haut
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Des personnages de haut rang
prétendent déjà préparer un après-Benoît XVI
2ème partie :
Un livre-manifeste - Confession d’un cardinal
Le 21 janvier 2009 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
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Peu après l’élection de Benoît XVI, paraissait un livre-manifeste d’un
cardinal anonyme n’ayant pas participé au conclave. Il est révélateur de
l’état d’esprit de l’aile la plus libérale de la Curie.
Lors de la parution, l’an passé, chez Jean-Claude Lattès, du livre d’Olivier
Le Gendre, Confession d’un cardinal , les observateurs avertis ont
compris qu’il s’agissait d’une opération importante, commanditée par des
personnages de haut rang qui prétendent déjà préparer un après-Benoît XVI,
auquel ils voudraient imprimer une direction toute différente de celle de
l’actuel pontificat.
Cet ouvrage très ingénieusement conçu, sous la forme d’entretiens avec un
cardinal anonyme, à Rome et en d’autres lieux, témoigne d’une connaissance
précise des milieux (et même des lieux)
ecclésiastiques romains, et développe des propos savamment mesurés mais
redoutablement libéraux. Tout laisse penser que cette opération a été
imaginée et diligentée par le cardinal Achille Silvestrini, chef de file de
l’aile libérale du collège cardinalice. Il fait en quelque sorte équipe avec
le cardinal Walter Kasper, ancien évêque de Rottenburg-Stuttgart, président
du Conseil pontifical pour la Promotion de l’Unité des chrétiens. Le
cardinal Walter Kasper, théologien libéral de haut renom, s’est opposé au
cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la
foi, sur divers sujets comme l’admission des divorcés remariés à
l’Eucharistie, mais surtout sur des questions ecclésiologiques, telle
l’interprétation de la collégialité. Le cardinal qui se « confesse »
emprunte à Silvestrini un certain nombre de traits particulièrement
reconnaissables : il est comme lui un ancien cardinal de Curie
(Achille Silvestrini, qui a aujourd’hui 85 ans, a été Préfet
de la très importante Congrégation pour les Église orientales).
Malgré la fatigue de l’âge le cardinal anonyme, de même que Silvestrini,
semble n’avoir jamais mieux joui de ses moyens intellectuels. En raison de
cet âge, le cardinal qui se confesse n’a pas participé au dernier conclave
(Achille Silvestrini, qui avait 81 ans lors de
l’ouverture du conclave, n’en a pas passé les portes). En
revanche, Achille Silvestrini n’a jamais été expert conciliaire, comme dit
l’avoir été le cardinal qu’Olivier Le Gendre est censé interroger. Certains
autres détails font penser à un vieux complice de Silvestrini, le
cardinal Laghi (Ndlr: qui vient de décéder), 86 ans, Romagnol comme lui, auquel on a fait une
réputation d’ami de la dictature argentine lorsqu’il était nonce dans ce
pays. Ancien nonce aux États-Unis, lesquels n’ont pas à se féliciter de ses
nominations épiscopales, pas plus que de sa gestion en tant que Préfet de la
Congrégation pour l’Éducation catholique, il s’est naturellement retrouvé
dans les opposants à l’accession au pontificat du cardinal Joseph Ratzinger.
D’autres modèles ont pu aussi inspirer telle ou telle touche
(le cardinal Etchegaray et, bien entendu, pour de nombreuses
analyses théologiques, le cardinal Kasper).
Une réforme à finaliser
La thèse maîtresse du livre, qui résume parfaitement le projet de l’aile
libérale, est la suivante : la sécularisation achève de détruire un modèle
d’Église constantinien et tridentin, que le dernier Concile, malgré ses
bonnes intentions, n’a pas réussi à déraciner véritablement. Si la suite de
Vatican II a été une crise sans précédent, c’est que le Concile n’a pas été
assez conciliaire. Le vrai travail reste à accomplir : il faut aujourd’hui «
inventer » un nouveau modèle d’Église pour les temps nouveaux dans lesquels
nous sommes entrés : « Si le désenchantement du monde est une évolution
naturelle, inévitable et indispensable de l’humanité (…), alors l’Église
doit inventer dans ce monde désenchanté et pour ce monde désenchanté une
nouvelle façon d’être fidèle à son message. » Au vrai, ce modèle «
nouveau » n’est autre qu’un nouvel avatar du vieux libéralisme catholique.
Tous les ingrédients s’y retrouvent : la constatation « réaliste » de la
victoire définitive de la modernité, dont il convient que les catholiques
prennent leur parti ; l’étonnante méconnaissance de la nature radicalement
antichrétienne - et antinaturelle - de cette modernité, spécialement dans sa
version politique, la démocratie libérale ; la mauvaise conscience des
hommes d’Église (la condamnation de la contraception,
comme une nouvelle affaire Galilée). Plus près de nous que celui
des cardinaux Dupanloup, Maret, du père Gratry, le modèle d’Église du
cardinal anonyme est celui de la théologie de la libération d’il y a trente
ans, « libération » du « carcan » disciplinaire et dogmatique. Au détail
près que le marxisme qui fascinait les pères Boff et Sobrino et maints
évêques brésiliens, s’est effondré, et que la fascination des hommes
d’Église libéraux d’aujourd’hui se porte désormais vers une société
postmarxiste, dont ils accompagnent ecclésialement les desseins, comme les
théologiens de la libération accompagnaient ceux des derniers héritiers de
Lénine.
Qui plus est, le « programme » développé par le mystérieux cardinal, malgré
l’intelligence indéniable des propos, montre la corde : l’imagination du
dernier carré des hauts responsables libéraux s’épuise. Les propos d’Achille
Silvestrini aujourd’hui reprennent ceux du cardinal Martini, ancien
archevêque de Milan, lorsqu’il était la tête pensante de cette tendance.
Dans les propos qu’Olivier Le Gendre recueille, on retrouve exactement le
programme que le cardinal Carlo Maria Martini avait dressé, à la fin du
synode des évêques d’Europe, en 1999, en énumérant les « nœuds » que
l’Église aurait à trancher en entrant dans le nouveau millénaire :
- la « carence dramatique de ministres ordonnés » : elle ne pourra être
résolue sans l’ordination d’hommes mariés ;
- la place des femmes dans l’Église : il faudra en venir à l’accession des
femmes au moins, pour commencer, aux paliers du presbytérat ;
- les problèmes afférents à la « sexualité » : on devra faire appel aux
droits de la conscience individuelle pour dépasser l’effet catastrophique
pour l’image de l’Église produit par Humanæ vitæ ;
- la « discipline du mariage » : elle devra être réétudiée pour permettre
l’accès des divorcés « remariés » à l’Eucharistie ; - « l’espérance
œcuménique » à revitaliser. Ce programme d’« ouverture », le cardinal
Martini vient d’ailleurs de le réitérer dans un livre d’entretien avec son
ami le jésuite allemand Georg Sporschill, Jerusalemer Nachtgespräche
(Herder, 2008) - Conversations nocturnes à
Jérusalem -, qui vient d’être publié en Espagne (San
Pablo), en Italie (Mondadori), et le
sera bientôt en France : « On ne peut pas rendre Dieu catholique. Dieu
est au-delà des limites et des définitions que nous établissons. Dans la vie
nous avons besoin d’elles, c’est évident, mais nous ne devons pas les
confondre avec Dieu. »
Humanae Vitae en cause
Martini s’oppose de manière frontale à l’encyclique
Humanae
Vitae (les quarante ans écoulés depuis Humanæ Vitæ
sont comparés par lui aux quarante ans passés par les Hébreux dans le
désert). Mais il prône surtout un catholicisme sinon adogmatique,
du moins dans lequel la prédication du dogme est mise en sourdine : «
Nous devons apprendre à vivre l’immensité de l’être catholique. Et à
connaître les autres. (…) Pour protéger cette immensité, je ne connais rien
de mieux que de continuer sans cesse à lire la Bible. (…) Si nous écoutons
Jésus et si nous regardons les pauvres, les opprimés, les malades, (…) Dieu
nous conduit au-dehors, dans l’immensité. Il nous apprend à penser de
manière ouverte. »
De même, selon le cardinal interrogé par Olivier Le Gendre, la théologie du
célibat sacerdotal est dépassée : « Nous sommes la religion de
l’Incarnation » ; il ne faut donc plus séparer le prêtre de la vie
concrète. Mais avant tout, il estime qu’il faut rompre avec une logique «
défensive » vis-à-vis du monde moderne. Et il s’enflamme : la manière d’être
du gouvernement de l’Église qui doit disparaître à jamais, « c’est de
faire des lois sans arrêt, c’est tenter de contraindre la vie dans le cadre
des textes, c’est centraliser à outrance par crainte des dérives - toujours
cette crainte des dérives qui nous paralyse. C’est se comporter en monarque,
bienveillant dans le meilleur des cas, autoritaire dans le pire. Bref, c’est
être romain avant toute chose et redonner vie dans les temps modernes au
système d’un empire qui, à force de dépendre d’une seule tête, s’est
effondré par sa périphérie. C’est sacraliser à outrance l’autorité, imposer
aux émotions et à leurs expressions le carcan du liturgiquement correct,
brider la spontanéité car elle serait dangereuse. Bref, c ’est vouloir
maîtriser, maîtriser encore, maîtriser toujours, et contrôler en permanence.
»
Abbé Claude BARTHE
Lire la suite prochainement :
(1)
Y a-t-il une opposition romaine au Pape Benoît XVI ?
(2) Des personnages de haut rang prétendent déjà préparer un après-Benoît
XVI
(3)
Le pape Benoît XVI irrite à la Curie
Sources : hommenouveau
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 21.01.2009 -
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