Discours de Benoît XVI lors de la
célébration des Vêpres |
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Cité du Vatican, le 17 avril 2008 -
(E.S.M.)
- Le pape Benoît XVI s'est adressé hier aux évêques américains
dans la basilique du Sanctuaire National de l’Immaculée Conception au
cours de la célébration des Vêpres.
Mieux vaut lire directement le Saint-Père Benoît XVI que ce que les
commentateurs en disent, car sa pensée est si fluide, exprimée en termes
si simples, qu'il n'est pas nécessaire d'en rajouter.
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Le pape
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Discours de Benoît XVI lors de la célébration des Vêpres
Basilique de l'Immaculée Conception, Washington, 16 avril
Mieux vaut lire directement le Saint-Père Benoît XVI que ce que les
commentateurs en disent, car sa pensée est si fluide, exprimée en termes si
simples, qu'il n'est pas nécessaire d'en rajouter.
Il n'est pas question, loin de là, que des prêtres pédophiles, mais ce qu'il
dit aux évêques est très clair: "Témoignez par votre vie". Chacun de
nous, d'ailleurs, est concerné, et pas seulement les évêques.
Disons que c'est un texte à portée morale, plus encore que religieuse. Mais
c'est la dimension religieuse qui donne la conclusion.
Texte intégral des paroles du Saint-Père aux
évêques
Vénérés frères dans l'épiscopat,
Ma joie est grande en vous saluant aujourd'hui, au début de ma visite dans
ce pays, et je remercie le cardinal George des aimables paroles qu'il m'a
adressées en votre nom. Je désire remercier chacun de vous, en particulier
les membres de la Conférence épiscopale, pour le travail important qu'a
supposé la préparation de ce voyage. Mon appréciation reconnaissante va, en
outre, à l'équipe et aux volontaires du sanctuaire national, qui nous ont
accueillis ici ce soir. Les catholiques d'Amérique sont connus pour leur
réelle dévotion à l'égard du Siège de Pierre. Ma visite pastorale ici est
une occasion pour renforcer davantage les liens de communion qui nous
unissent. Nous avons commencé par la célébration de la prière du soir dans
cette basilique consacrée à l'Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge
Marie, sanctuaire possédant une signification spéciale pour les catholiques
américains, précisément au cœur de votre capitale. Unis en prière avec
Marie, Mère de Jésus, nous confions avec amour à notre Père céleste le
Peuple de Dieu dans chaque partie des Etats-Unis.
Pour les communautés catholiques de Boston, New York, Philadelphie et
Louisville, il s'agit d'une année de célébrations particulières, étant donné
qu'elle marque le bicentenaire de l'érection de ces Eglises locales au rang
de diocèses. Je m'unis à vous pour rendre grâce pour les nombreux dons
célestes accordés à l'Eglise dans ces lieux au cours des deux derniers
siècles. Etant donné que l'année en cours marque également le bicentenaire
de l'érection du siège fondateur, Baltimore, au rang d'archidiocèse, cela
m'offre l'opportunité de rappeler avec admiration et gratitude la vie et le
ministère de John Carroll, premier évêque de Baltimore et digne pasteur de
la communauté catholique dans votre nation qui était devenue depuis peu
indépendante. Ses efforts inlassables pour diffuser l'Evangile dans le vaste
territoire confié à ses soins jetèrent les bases de la vie ecclésiale dans
votre pays et permirent à l'Eglise en Amérique de grandir vers la maturité.
Aujourd'hui, la communauté catholique que vous servez est l'une des plus
vastes du monde et l'une des plus influentes. Il est donc très important de
faire en sorte que votre lumière brille devant vos concitoyens et devant le
monde, "afin qu'ils voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui
est dans les cieux" (Mt 5, 16).
Un grand nombre des personnes auprès desquelles John Carroll et ses
confrères évêques exercèrent leur ministère il y a deux siècles venaient de
terres lointaines. La diversité de leur provenance se reflète dans la riche
variété de la vie ecclésiale de l'Amérique d'aujourd'hui. Chers frères
évêques, je désire vous encourager, ainsi que vos communautés, à continuer à
accueillir les immigrants qui s'unissent à vous aujourd'hui, à partager
leurs joies et leurs espérances, à les soutenir dans leurs souffrances et
leurs épreuves, et à les aider à prospérer dans leur nouvelle maison. C'est
d'autre part ce que firent vos concitoyens pendant des générations. Dès les
débuts, ils ont ouvert leurs portes à ceux qui étaient las, aux pauvres, aux
"masses qui se pressaient à la recherche d'un souffle dans la liberté"
(cf. Sonnet gravé sur la statue de la liberté).
Telles étaient les personnes que l'Amérique a faites siennes.
Parmi ceux qui vinrent ici pour se construire une nouvelle vie, beaucoup
furent capables de faire bon usage des ressources et des opportunités qu'ils
y trouvèrent, et d'atteindre un haut niveau de prospérité. En vérité, les
citoyens de ce pays sont connus pour leur grande vitalité et créativité. Ils
sont également connus pour leur générosité. Après l'attaque des tours
jumelles, en septembre 2001, et également après l'ouragan Katrina en 2005,
les Américains ont montré leur rapidité à venir en aide à leurs frères et
sœurs qui étaient dans le besoin. Au niveau international, la contribution
offerte par le peuple d'Amérique aux opérations de secours et de sauvetage
après le tsunami de décembre 2004 est une démonstration supplémentaire de
cette compassion. Permettez-moi d'exprimer mon appréciation particulière
pour les innombrables formes d'assistance humanitaire offertes par les
catholiques américains à travers les Caritas catholiques et les autres
agences. Leur générosité a porté des fruits dans l'attention aux pauvres et
aux indigents, ainsi que dans l'énergie manifestée dans la construction du
réseau national de paroisses catholiques, d'hôpitaux, d'écoles et
d'universités. Tout cela offre de solides raisons pour rendre grâce.
L'Amérique est également une terre de grande foi. Votre peuple est bien
connu pour sa ferveur religieuse et il est fier d'appartenir à une
communauté de prière. Il a confiance en Dieu et il n'hésite pas à introduire
dans les discours publics des raisons morales enracinées dans la foi
biblique. Le respect pour la liberté de religion est profondément enraciné
dans la conscience américaine; c'est un fait qui a contribué à ce que ce
pays attire des générations d'immigrants à la recherche d'une maison où
pouvoir librement rendre leur culte à Dieu selon leurs propres convictions
religieuses.
Dans ce contexte, je prends volontiers acte de la présence parmi vous
d'évêques de toutes les vénérables Eglises orientales en communion avec le
Successeur de Pierre: je les salue avec une joie particulière. Chers frères,
je vous demande d'assurer vos communautés de ma profonde affection et de ma
prière incessante, pour elles comme pour les nombreux frères et sœurs restés
dans leur terre d'origine. Votre présence dans ce pays rappelle le courageux
témoignage en faveur du Christ de tant de membres de vos communautés,
souvent en affrontant de grandes souffrances, dans leurs patries
respectives. Cela constitue également un grand enrichissement pour la vie
ecclésiale en Amérique, car une expression vivante de la catholicité de
l'Eglise et de la variété de ses traditions liturgiques et spirituelles est
ainsi offerte.
C'est sur ce sol fertile, nourri par tant de sources différentes, que vous,
vénérés frères dans l'épiscopat, êtes appelés aujourd'hui à répandre la
semence de l'Evangile. Cela m'amène à me demander comment, au XXI siècle, un
évêque peut répondre au mieux à l'appel à "faire chaque chose nouvelle en
Jésus Christ, notre espérance"? Comment peut-il conduire son peuple "à la
rencontre avec le Dieu vivant?", source de cette espérance qui transforme la
vie dont parle l'Evangile? (cf.
Spe
Salvi - Benoît XVI, 4). Peut-être
a-t-il tout d'abord besoin d'abattre certaines barrières qui empêchent cette
rencontre. Même s'il est vrai que ce pays est marqué par un authentique
esprit religieux, l'influence subtile du sécularisme peut toutefois marquer
la façon dont les personnes permettent que la foi influence leurs propres
comportements. Est-il cohérent de professer notre foi à l'église le dimanche
et ensuite, au cours de la semaine, de promouvoir des affaires ou des
procédures médicales contraires à cette foi? Est-il cohérent pour les
catholiques pratiquants d'ignorer ou d'exploiter les pauvres et les exclus;
de promouvoir des comportements sexuels contraires à l'enseignement moral
catholique, ou d'adopter des positions qui contredisent le droit à la vie de
chaque être humain de sa conception jusqu'à sa mort naturelle? Il faut
résister à toute tendance à considérer la religion comme un fait privé. Ce
n'est que lorsque la foi imprègne chaque aspect de leur vie que les
chrétiens deviennent vraiment ouverts à la puissance transformatrice de
l'Evangile.
Dans une société riche, un obstacle supplémentaire à une rencontre avec le
Dieu vivant se trouve dans l'influence subtile du matérialisme, qui peut
malheureusement très facilement concentrer l'attention sur le "centuple"
promis par Dieu en cette vie, au détriment de la vie éternelle qu'il promet
pour le temps à venir (Mc 10, 30). Il est
aujourd'hui nécessaire de rappeler aux personnes le but ultime de
l'existence. Elles ont besoin de reconnaître qu'elles ont en elles une
profonde soif de Dieu. Elles ont besoin d'avoir l'opportunité de puiser à la
source de son amour infini. Il est facile d'être subjugués par les
possibilités presque illimitées que la science et la technique nous offrent;
il est facile de faire l'erreur de penser pouvoir obtenir par nos propres
efforts la satisfaction des besoins les plus profonds. Il s'agit d'une
illusion. Sans Dieu, qui nous donne ce que nous ne pouvons pas atteindre
seuls (cf.
Spe
Salvi, n. 31), nos vies sont en
définitive vides. Les personnes ont sans cesse besoin d'être appelées à
cultiver une relation avec lui, qui est venu afin que nous ayons la vie en
abondance (cf. Jn 10, 10). Le but de chacune de
nos activités pastorales et catéchétiques, l'objet de notre prédication, le
centre même de notre ministère sacramentel doit être celui d'aider les
personnes à établir et à nourrir une telle relation vitale avec "le Christ
Jésus, notre espérance" (1 Tm 1, 1).
Dans une société qui accorde beaucoup de valeur à la liberté personnelle et
à l'autonomie, il est facile de perdre de vue notre dépendance des autres,
ainsi que les responsabilités que nous avons à leur égard. Cette
accentuation de l'individualisme a même influencé l'Eglise
(cf.
Spe
Salvi, nn. 13-15), donnant origine à
une forme de piété qui souligne parfois notre relation privée avec Dieu au
détriment de l'appel à être les membres d'une communauté rachetée. Et
pourtant, dès le début, Dieu vit qu'"il n'est pas bon que l'homme soit seul"
(Gn 2, 18). Nous avons été créés comme des êtres sociaux qui ne
trouvent leur accomplissement que dans l'amour envers Dieu et envers leur
prochain. Si nous voulons vraiment garder le regard fixé sur lui, source de
notre joie, nous devons le faire comme des membres du Peuple de Dieu
(cf.
Spe
Salvi, n. 14). Si cela semblait aller à
l'encontre de la culture actuelle, cela ne serait qu'une preuve
supplémentaire de l'urgente nécessité d'une évangélisation renouvelée de la
culture.
Ici en Amérique, vous avez été bénis par un laïcat catholique d'une
considérable variété culturelle, qui place ses dons multiformes au service
de l'Eglise et de la société en général. Il se tourne vers vous pour
recevoir de l'encouragement, une direction et une orientation. A une époque
saturée d'informations, l'importance d'offrir une solide formation de la foi
ne risque pas d'être sur-évaluée. Les catholiques américains ont accordé par
tradition une grande valeur à l'éducation religieuse, que ce soit dans les
écoles ou dans l'ensemble des programmes de formation pour adultes: il faut
maintenir et développer cela. Les nombreux hommes et femmes qui se
consacrent généreusement aux œuvres caritatives doivent être aidés à
renouveler leur engagement à travers une "formation du cœur": une "rencontre
avec Dieu dans le Christ, qui suscite en eux l'amour et qui ouvre leur
esprit à autrui" (Deus
Caritas est- Benoît XVI, 31). A une époque où les
progrès dans les sciences médicales apportent de nouvelles espérances à de
nombreuses personnes, des défis éthiques auparavant inimaginables peuvent
apparaître. D'où la nécessité, plus importante que jamais, d'assurer une
solide formation dans les enseignements moraux de l'Eglise aux catholiques
qui sont engagés dans le domaine de la santé. Il est nécessaire dans tous
ces domaines d'apostolat, de prendre une direction sage, pour qu'ils
puissent porter des fruits abondants. S'ils veulent vraiment promouvoir le
bien intégral de la personne, ils doivent eux-mêmes être renouvelés dans le
Christ notre espérance.
En tant qu'annonciateurs de l'Evangile et guides de la communauté
catholique, vous êtes également appelés à participer à l'échange d'idées sur
la scène publique, pour aider à façonner des attitudes culturelles adaptées.
Dans un contexte où la liberté de parole est appréciée et un débat
substantiel et honnête est encouragé, votre voix est une voix respectée qui
a beaucoup à offrir au débat sur les questions sociales et morales de
l'actualité. En faisant en sorte que l'Evangile soit entendu de façon
claire, non seulement vous formez les personnes de votre communauté, mais,
dans le cadre du plus vaste auditoire de la communication de masse, vous
aidez à diffuser le message de l'espérance chrétienne dans le monde entier.
L'influence de l'Eglise dans le débat public, cela est clair, se déroule à
de nombreux niveaux très différents. Aux Etats-Unis, comme ailleurs,
existent actuellement beaucoup de lois déjà en vigueur ou en discussion qui
suscitent une préoccupation du point de vue de la moralité et la communauté
catholique, sous votre direction, doit offrir un témoignage clair et unanime
sur ces matières. L'ouverture graduelle des esprits et des cœurs de la
communauté la plus vaste à la vérité morale est toutefois encore plus
importante: c'est un domaine dans lequel il y a encore beaucoup à accomplir.
Dans ce domaine, le rôle des fidèles laïcs est crucial en agissant comme un
"levain" dans la société. Toutefois, on ne doit pas tenir pour acquis que
tous les citoyens catholiques pensent selon l'enseignement de l'Eglise à
propos des questions éthiques fondamentales d'aujourd'hui. Encore une fois,
votre devoir est de faire en sorte que la formation morale offerte à chaque
niveau de la vie ecclésiale reflète l'enseignement authentique de l'Evangile
de la vie.
A ce propos, un thème profondément préoccupant pour nous tous est la
situation de la famille au sein de la société. Il est vrai que le cardinal
George a tout d'abord rappelé que vous avez placé le renforcement du mariage
et de la vie familiale parmi vos priorités pour les prochaines années. Dans
le Message de cette année pour la Journée mondiale de la paix, j'ai parlé de
la contribution essentielle qu'une vie familiale saine offre à la paix dans
et entre les nations. Dans la maison familiale, nous vivons l'expérience "de
certaines composantes fondamentales de la paix: la justice et l'amour entre
frères et sœurs, la fonction d'autorité manifestée par les parents, le
service affectueux envers les membres les plus faibles parce que petits,
malades ou âgés, l'aide mutuelle devant les nécessités de la vie, la
disponibilité à accueillir l'autre et, si nécessaire, à lui pardonner"
(n. 3). La famille est, en outre, le lieu
primordial de l'évangélisation, dans la transmission de la foi, dans l'aide
aux jeunes à apprécier l'importance de la pratique religieuse et de
l'observance du dimanche. Comment ne pas être déconcertés en observant le
rapide déclin de la famille en tant qu'élément fondamental de l'Eglise et de
la société? Le divorce et l'infidélité sont en augmentation, et de nombreux
jeunes hommes et femmes choisissent de retarder le mariage ou même de
l'ignorer complètement. Pour certains jeunes catholiques le lien sacramentel
du mariage apparaît peu différent d'un lien civil, ou bien il est carrément
perçu comme un simple accord pour vivre avec une autre personne de manière
informelle et sans stabilité. En conséquence, on constate une diminution
alarmante des mariages catholiques aux Etats-Unis, ainsi qu'une augmentation
des cohabitations, dans lesquelles le don réciproque des époux à la manière
du Christ, à travers le sceau d'une promesse publique de vivre les exigences
d'un engagement indissoluble pendant toute l'existence, est simplement
absent. Dans ces circonstances, on nie aux enfants le milieu sûr dont ils
ont besoin pour grandir comme des êtres humains, et on nie également à la
société ces piliers stables qui sont nécessaires, si l'on veut conserver la
cohésion et le centre moral de la communauté.
Comme mon prédécesseur, le Pape Jean-Paul II, l'enseignait: "Le premier
responsable de la pastorale familiale dans le diocèse est l'évêque... il
doit lui consacrer intérêt, sollicitude, temps, personnel, ressources: mais
par-dessus tout, il doit apporter un appui personnel aux familles et à tous
ceux qui... l'assistent dans la pastorale de la famille" (Familiaris Consortio, 73).
Votre tâche est de proclamer avec force les arguments de foi et de raison
qui parlent de l'institution du mariage, compris comme engagement pour la
vie entre un homme et une femme, ouvert à la transmission de la vie. Ce
message devrait retentir au milieu des personnes d'aujourd'hui, car il est
essentiellement un "oui" inconditionné et sans réserve à la vie, un "oui" à
l'amour et un "oui" aux aspirations du cœur dans notre humanité commune,
alors que nous nous efforçons de mener à bien notre profond désir d'intimité
avec les autres et avec le Seigneur.
Parmi les signes contraires à l'Evangile de la vie que l'on peut trouver en
Amérique, mais également ailleurs, il y en a un qui cause une profonde
honte: l'abus sexuel des mineurs. Beaucoup d'entre vous m'ont parlé de
l'immense douleur que vos communautés ont ressenti quand des hommes d'Eglise
ont trahi leurs obligations et leurs devoirs sacerdotaux avec un tel
comportement gravement immoral. Alors que vous cherchez à éliminer ce mal
partout où il se trouve, soyez assurés du soutien priant du Peuple de Dieu
dans le monde entier. Vous donnez à juste titre la priorité à la
manifestation de compassion et de soutien aux victimes: c'est une
responsabilité qui vous vient de Dieu, en tant que pasteurs, qui est celle
de panser les blessures causées par chaque violation de la confiance, de
favoriser la guérison, de promouvoir la réconciliation et d'aller à la
rencontre de ceux qui ont été aussi gravement blessés, avec une sollicitude
pleine d'amour.
La réponse à une telle situation n'a pas été facile et, comme l'a indiqué le
président de votre Conférence épiscopale, elle a "parfois été très mal
gérée". Maintenant que la dimension et la gravité du problème sont plus
clairement comprises, vous avez pu adopter des mesures disciplinaires et des
remèdes plus adaptés et promouvoir un milieu sûr qui offre une plus grande
protection aux jeunes. Alors que l'on doit se rappeler que la plus grande
majorité des prêtres et des religieux en Amérique accomplissent un excellent
travail en apportant le message libérateur de l'Evangile aux personnes
confiées à leurs soins pastoraux, il est d'une importance vitale que les
sujets vulnérables soient toujours protégés de ceux qui pourraient les
blesser. A ce propos, vos efforts pour soulager et protéger portent de
nombreux fruits non seulement à l'égard de ceux qui sont directement placés
sous votre attention pastorale, mais également de la société tout entière.
Toutefois, si nous voulons qu'elles atteignent pleinement leur but, il faut
que les mesures et les stratégies que vous avez adoptées soient placées dans
un contexte plus large. Les enfants ont le droit de grandir dans une saine
compréhension de la sexualité et du rôle qui lui est propre dans les
relations humaines. On devrait leur épargner les manifestations dégradantes
et la manipulation vulgaire de la sexualité aujourd'hui si dominante; ils
ont le droit d'être éduqués dans les authentiques valeurs morales enracinées
dans la dignité de la personne humaine. Cela nous ramène à la considération
sur la place centrale de la famille et sur la nécessité de promouvoir
l'Evangile de la vie. Que signifie parler de la protection des enfants
lorsque la pornographie et la violence peuvent être regardées dans de si
nombreuses maisons à travers les mass media largement disponibles
aujourd'hui? Nous devons réaffirmer de toute urgence les valeurs qui
soutiennent la société, de manière à offrir aux jeunes et aux adultes une
solide formation morale. Tous ont un rôle à jouer dans cette tâche, non
seulement les parents, les guides religieux, les enseignants et les
catéchistes, mais également l'information et l'industrie du spectacle. Oui,
chaque membre de la société peut contribuer à ce renouveau moral et en tirer
profit. Prendre vraiment soin des jeunes et de l'avenir de notre
civilisation signifie reconnaître notre responsabilité de promouvoir et de
vivre les valeurs morales authentiques qui sont les seules à rendre la
personne humaine capable de se développer. Votre tâche de pasteurs qui ont
comme modèle le Christ, Bon Pasteur, est de proclamer de manière forte et
claire ce message et donc d'affronter le péché de l'abus dans le contexte
plus vaste des comportements sexuels. En outre, en reconnaissant le problème
et en l'affrontant lorsqu'il a lieu dans un contexte ecclésial, vous pouvez
offrir une orientation aux autres, étant donné que cette plaie ne se trouve
pas seulement au sein de vos diocèses, mais dans tous les secteurs de la
société. Elle exige une réponse déterminée et collective.
Les prêtres ont eux aussi besoin de votre direction et de votre proximité au
cours de cette période difficile. Ils ont vécu l'expérience de la honte à la
suite de ce qui est arrivé et un grand nombre d'entre eux se rendent compte
qu'ils ont perdu une partie de la confiance qu'ils avaient autrefois.
Nombreux sont ceux qui font l'expérience d'une proximité avec le Christ dans
sa Passion, alors qu'ils s'efforcent d'affronter les conséquences de la
crise actuelle. L'évêque, en tant que père, frère et ami de ses prêtres,
peut les aider à tirer du fruit spirituel de cette union avec le Christ, en
les rendant conscients de la présence réconfortante du Seigneur au cœur de
leurs souffrances, et en les encourageant à marcher avec le Seigneur sur le
sentier de l'espérance (cf.
Spe
Salvi, n. 39). Comme l'observait le
Pape Jean-Paul II il y a six ans, "nous devons être confiants dans le fait
que ce moment d'épreuve apportera une purification de toute la communauté
catholique", conduira "à un sacerdoce plus sain, à un épiscopat plus sain et
à une Eglise plus sainte" (Message aux cardinaux des
Etats-Unis, 23 avril 2002, n. 4). De nombreux signes montrent
que, pendant la période successive, cette purification a vraiment eu lieu.
La présence constante du Christ au cœur de nos souffrances transforme
graduellement nos ténèbres en lumière: chaque chose est faite à nouveau
véritablement dans le Christ Jésus, notre espérance.
En ce moment, une partie vitale de votre tâche est de renforcer les
relations avec vos prêtres, en particulier dans les cas où une tension est
née entre prêtres et évêques à la suite de la crise. Il est important que
vous continuiez à démontrer à leur égard votre préoccupation, votre soutien
et votre direction à travers l'exemple. Ainsi, vous les aiderez certainement
à rencontrer le Dieu vivant et vous les orienterez vers cette espérance qui
transforme l'existence dont parle l'Evangile. Si vous vivez vous-mêmes d'une
manière qui se configure étroitement au Christ, le Bon Pasteur, qui donna sa
vie pour ses brebis, vous inspirerez vos frères prêtres à se consacrer à
nouveau au service du troupeau avec la générosité qui caractérisa le Christ.
En vérité, une concentration plus claire sur l'imitation du Christ dans la
sainteté de vie est nécessaire si nous voulons aller de l'avant. Nous devons
redécouvrir la joie de vivre une existence centrée sur le Christ, en
cultivant les vertus et en nous plongeant dans la prière. Lorsque les
fidèles savent que leur pasteur est un homme qui prie et qui consacre sa vie
à leur service, ils répondent avec une chaleur et une affection qui nourrit
et soutient la vie de la communauté tout entière.
Le temps passé à prier n'est jamais perdu, même si les devoirs qui nous
pressent de toutes parts sont importants. L'adoration du Christ notre
Seigneur dans le Très Saint Sacrement prolonge et intensifie cette union
avec lui, qui se constitue à travers la célébration eucharistique (cf.
Sacramentum Caritatis, 66). La contemplation des
mystères du Rosaire libère toute leur force salvifique en nous conformant,
en nous unissant et en nous consacrant à Jésus Christ (cf.
Rosarium Virginis
Mariae, 11, 15). La fidélité à la Liturgie des Heures
garantit que notre journée tout entière soit sanctifiée, en nous rappelant
sans cesse la nécessité de rester concentrés sur l'accomplissement de
l'œuvre de Dieu, malgré toutes les urgences ou les distractions qui peuvent
apparaître face aux obligations à accomplir. De cette manière, la dévotion
nous aide à parler et à agir in persona Christi, à enseigner, à gouverner et
à sanctifier les fidèles au nom de Jésus, en apportant sa réconciliation, sa
guérison et son amour à tous ses frères et sœurs bien-aimés. Cette
configuration radicale au Christ Bon Pasteur est au centre de notre
ministère pastoral et si nous nous ouvrons, à travers la prière, à la
puissance de l'Esprit, Il nous accordera les dons dont nous avons besoin
pour accomplir notre devoir formidable, au point de ne jamais nous soucier
"pour savoir ce que vous direz ni comment vous le direz"
(Mt 10, 19).
En concluant ce discours qui vous est adressé ce soir, je confie de manière
toute particulière l'Eglise qui est dans votre pays à la sollicitude
maternelle et à l'intercession de Marie Immaculée, Patronne des Etats-Unis.
Elle qui a porté dans son sein l'espérance de toutes les nations,
puisse-t-elle intercéder pour le peuple de cette nation, afin que tous
soient renouvelés en Jésus Christ, son Fils. Chers frères évêques, j'assure
chacun de vous ici présents de ma profonde amitié et de ma participation à
vos préoccupations pastorales. A vous tous, au clergé, aux religieux et aux
fidèles laïcs je donne cordialement ma Bénédiction apostolique, gage de joie
et de paix dans le Christ Ressuscité.
[Anglais,
Espagnol,
Italien]
Réponses du
Saint-Père aux questions des évêques américains ►
Benoît XVI et le grand défi de l'Eglise en
Amérique
PAROLES DU PAPE BENOÎT XVI
LORS DE LA PRÉSENTATION DU CALICE
À L'ARCHEVÊQUE DE LA NOUVELLE ORLÉANS
Sanctuaire de l'Immaculée Conception de Washington, D.C.
Mercredi 16 avril 2008
Avant de prendre congé, je voudrais m'arrêter un instant et évoquer
l'immense souffrance endurée par le peuple de Dieu dans l'archidiocèse de
Nouvelle-Orléans suite au passage de l'ouragan Katrina, tout comme de son
courage pour affronter les travaux de reconstruction. Je voudrais offrir à
Mgr Alfred Hughes un calice, dans l'espoir qu'il soit accueilli comme un
signe de ma solidarité dans la prière envers les fidèles de l'archidiocèse
et de ma reconnaissance personnelle pour l'activité inlassable dont celui-ci
a fait preuve, ainsi que NN.SS. Philip Hannan et Francis Schulte, à l'égard
du troupeau qui a été confié à leurs soins.
Le premier rendez-vous était avec les évêques américains dans la crypte du
Sanctuaire national de l’Immaculée Conception. Regarder
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Benoît XVI aux Etats Unis - du 15 au 20 avril
2008
Sources : www.vatican.va -
E.S.M.
© Copyright 2008 - Libreria Editrice Vaticana
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 17.04.2008 -
T/USA |