Le Motu proprio - applications et
ambiguïtés |
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Rome, le 15 novembre 2007 -
(E.S.M.) -
Le document du pape Benoît XVI réclame des évêques une grande
générosité et une grande intelligence de l’unité, que l’on ne peut que
souhaiter voir se développer davantage. Mais ce n’est pas sans
contrepartie. (Sur le très bon site Hermas.info).
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Le Saint-Père Benoît XVI -
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Le Motu proprio - applications et ambiguïtés
La France est décidément une drôle de contrée. En certains pays d’Europe, la
lettre apostolique du pape Benoît XVI n’était pas plutôt publiée que les
épiscopats locaux, sans calcul ni retard, en faisaient application, allant
jusqu’à devancer les desiderata des fidèles. Puisque l’ordo du Bx Jean XXIII
et celui de Paul VI constituent un unique rite latin, en deux formes
appelées à se nourrir l’une l’autre, pourquoi ne pas les appliquer ensemble
? C’est la volonté manifestée par le pape, successeur de Pierre, et c’est ce
que la raison commande, tant au regard des divisions existant dans l’Église
que des carences que les plus objectifs s’accordent à constater dans les
deux formes liturgiques, à des degrés certes divers. Que faut-il de plus ?
Eh bien non, chez nous, cela ne suffit pas.
Cela ne suffit pas parce que, chez nous, rien ne doit être pareil
qu’ailleurs. Un évêque français expliquait que notre contexte est spécial, à
cause de notre propre histoire. Bien sûr. Mais si nous ne nous trompons pas,
tout conflit s’exprime en histoire, et en histoires. Où que ce soit. Le
propre d’un document comme celui que le pape a promulgué
est d’en surmonter les logiques insidieuses, les
raidissements, les fermetures irrationnelles. C’est à l’intelligence
et au cœur qu’il s’adresse, à la bonne volonté et à la volonté bonne,
c'est-à-dire orientée, voire traînée, si nécessaire, par la charité, et
au-delà des contentieux. Est-ce toujours le cas ? A l’évidence, loin s’en
faut puisqu’on observe ici ou là des réactions pastorales qui tendent à
interpréter le document pontifical comme s’il ne s’agissait que d’un calque
du Motu proprio de 1988 (Ecclesia
Dei Adflicta) – entendez par là le Motu proprio tel que les
pasteurs en question l’ont alors souvent interprété pour le vider de sa
substance. Le pape Benoît XVI a beau rappeler qu’ainsi ont été manquées des
occasions manifestes de réconciliation, rien n’y fait. A qui ne veut pas se
résoudre à aimer, rien ne le presse, pas plus pour le présent que par le
passé. Cela aussi fait partie de l’histoire, et d’une histoire douloureuse
pour beaucoup. Une histoire malheureuse et, pourquoi ne pas le dire : une
histoire souvent évangéliquement honteuse.
Mais il faut être juste. Pour l’être il faut d’abord reconnaître ce fait :
bien des pasteurs, qui se sont montrés initialement très hostiles au projet
du pape, s’y sont finalement rangés. Parfois, sans doute, parce qu’ils
pensaient, rassurés, que cela ne changerait rien à la situation acquise. Ils
ne prenaient donc aucun risque à accepter un texte qui trouverait sa place
en leur bibliothèque, où il pourrait gentiment vieillir à côté du Motu
proprio de feu le pape Jean-Paul II… Parfois, aussi, par vertu, au sens où
ils ont choisi loyalement, contre leur inclination première, d’entrer dans
l’intention pacificatrice du Saint-Père. A ceux-là, qu’anime un esprit
d’apôtre du Christ, va notre profonde gratitude.
Être juste, c’est aussi reconnaître que la tâche n’est pas aisée. Bien sûr,
sur le papier, tout est simple. Il suffit de s’en rapporter au paragraphe 5
de
la lettre apostolique. Vous disposez d’un « groupe stable » pour assister
à la messe selon la forme extraordinaire ? Très bien, vous l’aurez !
Cependant, la pratique est plus complexe. L’histoire, puisqu’elle est
invoquée, apporte sa leçon de choses. Et elle n’est pas forcément
rassurante. Bien des groupes traditionalistes, on le sait, ne se sont
séparés de Mgr Lefebvre, en 1988, que pour cette seule raison : non pas
parce qu’il a eu tort, mais parce qu’il a été trop loin. Partir avec lui à
l’aventure, en rupture déclarée avec le pape, sacrer des évêques, c’était
trop. Mais sur le fond, bien des traditionalistes d’alors n’ont pas bougé
d’un iota dans leurs positions intellectuelles. Il suffit de parcourir les
pages du symptomatique Forum catholique, par exemple, dont on s’étonne
autant du titre que des précautions qu’il prend pour le justifier, pour s’en
convaincre. Près de 20 ans plus tard, on y rencontre les mêmes ingrédients :
volontarisme forcené, libre examen élevé au rang de discipline olympique,
injures et hérésies, zèle haineux, on rencontre de tout – au milieu, il est
vrai, de saines et réconfortantes exceptions – dans un pot commun de
critiques systématiques et d’inintelligences obstinées mettant librement en
cause la réforme liturgique, la hiérarchie et le concile.
Dans l’entretien de Mgr Ricard, que nous avons rapporté il y a peu, celui-ci
déclarait : « Par santé spirituelle, je ne consulte jamais les sites
intégristes. Leur violence me ferait douter qu’une réconciliation soit
possible… ». En vérité, pour parler ainsi, il paraît au moins nécessaire
de les avoir consultés une fois. L’expérience est alors instructive, et le
doute évoqué malheureusement justifié. Il est toujours difficile de
s’exprimer sur ce sujet parce qu’il y a bien sûr de nombreux
traditionalistes loyaux, ce que les évêques savent bien eux-mêmes, qui ne
vivent plus dans les étroites catégories mentales de leurs aînés. Il y a
aussi beaucoup de gens, qui, sans être traditionalistes, souhaitent accéder
aux richesses de la forme liturgique extraordinaire. Mais il y aussi
beaucoup d’hypocrisies, de doubles langages, volontaires ou non, parce que
les esprits sont profondément déformés. Ce n’est pas sans dommage que l’on
se laisse convaincre, dès l’enfance, que l’on est dépositaire exclusif de la
vérité ecclésiale – de la fameuse Église de toujours – et d’une Tradition
dont on se réserve de définir soi-même les contours.
Le pape, en promulguant la lettre apostolique que nous
évoquons, a pris soin de souligner fortement qu’il allait de soi qu’on ne
pouvait prétendre à l’usage de l’ordo du Bx Jean XXIII si l’on ne
reconnaissait pas aussi la sainteté de celui de Paul VI. Comment pourrait-il
rationnellement en être autrement si l’on admet que les deux ordos sont deux
formes d’un unique rite latin ? Admettre l’ordo du Bx Jean XXIII comme rite
extraordinaire, pour en bénéficier comme tel, c’est nécessairement
reconnaître la pleine valeur du rite ordinaire comme tel. Personne n'est
obligé d'admettre cette articulation des deux rites, ni les qualifications
qui en découlent, qu'il est permis de juger volontaristes à certains égards.
Mais si on les admet, alors il faut en tirer les conséquences rationnelles
et théologiques.
D’aucuns se sont jetés, clercs ou laïcs, sur la lettre apostolique qui leur
ouvre cet usage, en vantant la gloire d’un pape si généreux et si
clairvoyant, si bien de chez eux en somme. Cependant,
dans le même temps, ils ignorent superbement l’exigence énoncée par ce même
pape au sujet de la forme ordinaire du rite, comme ils n’entendent rien
savoir du concile, cause toujours supposée de tous les maux. Ils vont réclamer leur droit à, en bons
modernes, sans se sentir liés par rien, sans concevoir seulement la
duplicité de leur langage et de leur comportement. Ils continuent de
diffuser le fameux Bref examen critique des cardinaux Ottaviani et Bacci
(1), qui présentait la messe “de
Paul VI” comme éloignée dans l’ensemble comme dans le détail de la théologie
catholique de la messe, et certains prêtres pourtant gagnés de papolâtrie
rejettent toute éventualité de jamais la célébrer, en s’abritant derrière
des arguties à quatre sous, parce que cette célébration constituerait à
leurs yeux une faute morale. On a beau avoir l’esprit large, où est l’honnêté
intellectuelle en tout cela, et l’élémentaire loyauté naturelle qu’un évêque
est parfaitement en droit d’attendre soit de clercs, soit de fidèles qui se
présentent à lui ?
Très récemment, l’évêque d’Amiens, Mgr Jean-Luc Bouilleret, a opposé une fin
de non-recevoir à des traditionalistes de la Fraternité Saint-Pie X, qui
réclamaient l’application de la Lettre apostolique du pape Benoît XVI à leur
profit, en leur rappelant que ce document « était
destiné aux fidèles catholiques en communion avec le Saint Siège ».
On peut juger cette réaction très sévère et inadéquate, parce que le
document à appliquer vise à provoquer une unité qui, par hypothèse, n’existe
pas, et que cette réaction la rend impossible. De fait, cette réaction
semble davantage être raisonnée, encore une fois, et c’est très regrettable,
dans le cadre du Motu proprio de 1988 plutôt que dans celui de 2007.
Cependant, pour sévère qu’elle soit, cette réaction typique n’en est pas
moins compréhensible. Comment peut-on avoir la naïveté de penser qu’un
évêque accueillera favorablement une telle demande quand ceux qui la
présentent estiment que la messe qu’il célèbre n’est pas vraiment catholique
? De qui se moque-t-on ? Et si l'on continue ainsi, comment espérer que les
choses s'arrangent jamais ?
Il faut cesser ce jeu de dupes. Le document du pape réclame des évêques une
grande générosité et une grande intelligence de l’unité, que l’on ne peut
que souhaiter voir se développer davantage. Mais ce n’est pas sans
contrepartie. Il est inconcevable de penser qu'il entre dans l’intention du
pape qu’un traditionaliste puisse bénéficier de l’avantage offert sans
contrepartie. Le pape ne propose pas aux intégristes déclarés ou refoulés de
l’être au-dedans plutôt qu’au-dehors, avec un vernis de communion
ecclésiale. Il invite à une conversion commune dans l’approfondissement de
la lex orandi, pour le bien commun de l’Église. Aucun traditionaliste
n’est obligé de s’atteler à cette œuvre-là. Mais s’il l’accepte, ce n’est
pas trop demander qu’il le fasse avec loyauté. Il y a tout lieu de penser
que l'application du motu proprio à laquelle il aspire s'en trouverait
grandement facilitée.
(1) Il convient de rappeler, une fois encore,
que le cardinal Ottaviani a rétracté ce document en termes tout à fait
explicites et a énergiquement protesté contre l’exploitation qui en était
faite. Cette diffusion, sous couvert de l’autorité du grand prélat,
constitue donc une escroquerie morale.
► Le Motu proprio de Benoît XVI, réponse aux commentaires - 17.11.07
Le Motu
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Sources: HERMAS
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 13.11.2007 - BENOÎT XVI
- T/M.P. |