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19 Avril 2005
 

Benoît XVI nous enseigne une théologie aussi discrète que profonde et solide

 

Cité du Vatican, le 15 février 2008  - (E.S.M.) - En ce qui concerne la parenté entre l’enseignement du pape Benoît XVI et les thèses d’"Ingresso alla bellezza", les propos que le pape a tenus lors de sa rencontre du 7 février avec le clergé de Rome sont tout à fait révélateurs.

Le pape Benoît XVI nous enseigne une théologie aussi discrète que profonde et solide

Tout le monde au spectacle du "théâtre sacré des cieux". Un théologien sert de guide
Le théologien est Enrico Maria Radaelli. Son dernier livre, intitulé "Ingresso alla bellezza", est la preuve qu'il existe toujours une grande théologie catholique sous le pontificat du théologien Joseph Ratzinger

par Sandro Magister

Cette année, Benoît XVI a demandé au bibliste .Albert Vanhoye - qu’il définit comme un "grand exégète" et qu’il a créé cardinal - de prêcher les exercices spirituels du Carême à la curie.

L’année dernière, le pape avait fait appel pour cela au cardinal cardinal Biffi, un autre théologien qu’il estime particulièrement.

L’un des ouvrages de théologie les plus importants de ces dernières années est celui de Leo Scheffczyk, "Le monde de la foi catholique. Vérité et forme", publié récemment en plusieurs langues. Scheffczyk, mort en 2005, avait lui aussi été fait cardinal. Son livre débute par une interview de Benoît XVI.

Autant de signes qui témoignent du maintien d’une théologie catholique de qualité sous le pontificat du pape théologien Joseph Ratzinger.

Cette théologie est aussi discrète qu’elle est profonde et solide. Le bruit entoure des œuvres plus excitantes mais confuses, comme le livre de Vito Mancuso "L'anima e il suo destino".

A l’écart de cette agitation, mais avec beaucoup de prévoyance, la maison d’édition Jaca Book est par exemple en train de publier en Italie les imposantes "opera omnia" du plus grand spécialiste mondial en théologie médiévale, Inos Biffi, professeur émérite aux facultés de théologie de Milan et de Lugano. Il n’a aucun lien de parenté avec le cardinal homonyme, mais ce dernier le considère comme un ami et, sans l’ombre d’un doute, comme le plus grand théologien italien vivant.

En ce qui concerne son éditeur, Inos Biffi est en très bonne compagnie. Avant lui, Jaca Book a publié les œuvres complètes de deux autres géants de la théologie catholique du XXe siècle: Henri de Lubac et Hans Urs von Balthasar.

Les "opera omnia" d’un troisième grand théologien de la seconde moitié du XXe siècle, Bernard J.F. Lonergan, sont en cours de publication chez un autre éditeur, Città Nuova.

Mais il y a plus. La théologie catholique est aussi en train de mettre à son actif de nouveaux auteurs et de nouveaux livres de premier ordre.

C’est le cas d’Enrico Maria Radaelli avec son essai "Ingresso alla bellezza".

La thèse centrale d’"Ingresso alla bellezza" est que le Fils de Dieu n’a pas un seul "nom" mais deux. Il est "Logos" mais aussi "Imago". Il est verbe mais aussi image, visage, reflet de la pensée divine. Il est vérité mais aussi beauté du vrai.

"Ingresso alla bellezza" est donc une voie royale pour entrer dans le mystère du Dieu trinitaire et incarné. La beauté est l’apparition de la vérité invisible. Et, à l’inverse, ce qui est indicible dans les mystères divins se manifeste dans les splendeurs de la liturgie, de l’art, de la musique, de la poésie. Sur la couverture du livre figure une peinture de Lorenzo Lotto représentent un jeune Apollon dormant aux frontières du mystère, accompagné de Muses mimant les sublimes réalités.

En revanche l’illustration qui figure en haut de cette page est l’œuvre d’un peintre du XVIIe siècle, le Baciccia. C’est un détail des fresques de la coupole et de la voûte de l’église du Gesù, à Rome, dediée au Très Saint Nom de Jésus, c’est-à-dire, théologiquement, justement au double nom de "Logos" et "Imago". C’est de la vision de ce "théâtre sacré des cieux " que s’inspire un article de l’auteur d’"Ingresso alla bellezza", Enrico Maria Radaelli, publié dans "l’Osservatore Romano" du 4-5 février 2008.

L’article est reproduit ci-dessous dans son intégralité. Il résume très bien l’esprit et le contenu du livre, qui va de la théologie proprement dite à la philosophie, des Saintes Ecritures à la liturgie, de l’histoire à la linguistique, de l’art à la musique. Les pages consacrées au Caravage ou à Monteverdi sont – parmi d’autres – mémorables.

Radaelli n’est pas un théologien académique. Il n’a pas reçu les ordres sacrés. Il ne fait pas partie des effectifs des universités pontificales. Il est cependant le disciple de l’un des plus grands esprits catholiques du XXe siècle, le Suisse Romano Amerio, comme lui simple laïc sans chaire universitaire. L’un et l’autre ont critiqué et critiquent sévèrement les dérives sécularisantes de l’Eglise au siècle dernier, les confusions dans le domaine de l’œcuménisme et du rapport entre les religions, les "dévastations" dans le domaine liturgique. Mais toujours dans l’obéissance au magistère hiérarchique et à cette Grande Tradition sans le souffle de laquelle – nous enseigne Benoît XVI – il n’y a pas de théologie catholique digne de ce nom.

En ce qui concerne la parenté entre l’enseignement de Benoît XVI et les thèses d’"Ingresso alla bellezza", les propos que le pape a tenus lors de sa rencontre du 7 février avec le clergé de Rome sont tout à fait révélateurs.

Répondant à la question d’un prêtre pratiquant la peinture, le pape a dit:

"L'Ancien Testament interdisait toute image; il devait le faire dans un monde plein de divinités. Il vivait dans le grand vide qui était également représenté par l'intérieur du temple, où, à la différence d’autres temples, il n’y avait aucune image, mais seulement le trône vide de la Parole, la présence mystérieuse du Dieu invisible, non défini par nos images.

"Mais ensuite ce Dieu mystérieux [il se fait chair en Jésus,] apparaît avec un visage, un corps, une histoire humaine qui est, en même temps, une histoire divine. Une histoire qui continue dans l’histoire des saints, des martyrs, des saints de la charité et de la parole, qui sont toujours une explication, une continuation dans le Corps du Christ de sa vie divine et humaine, et elle nous donne les images fondamentales dans lesquelles – au delà des images superficielles qui cachent la réalité – nous pouvons ouvrir les yeux sur la Vérité elle-même. A cet égard je trouve excessive la période iconoclaste de l’après-Concile [Vatican II], qui avait toutefois un sens, parce qu’il était peut-être nécessaire de se libérer d’une superficialité de l’excès d’images.

"Maintenant revenons à la connaissance de Dieu qui s’est fait homme. Comme nous le dit la lettre aux Ephésiens, Il est la vraie image. Et dans cette vraie image nous voyons – au delà des apparences qui cachent la vérité – la Vérité elle-même: Qui me voit voit le Père'. En ce sens, nous pouvons retrouver un art chrétien et aussi les grandes représentations essentielles du mystère de Dieu dans la tradition iconographique de l’Eglise. Nous pourrons ainsi redécouvrir l'image vraie, [...] la présence de Dieu dans la chair".

Comment découvrir le visage de l’Eternel dans un édifice sacré

"L'Osservatore Romano", 4-5 février 2008
par Enrico Maria Radaelli


J’ai levé les yeux et je me suis aussitôt trouvé comme au paradis: des saints et encore des saints, des anges, de puissants archanges, des chérubins, des séraphins joyeux, roses, rapides; une fête radieuse, des groupes lointains ou proches; parmi les nuages, des papes pleins de noblesse, de jeunes martyrs, des docteurs sévères, des vierges en extase, des ermites austères. Ils étaient tous là, hommes et anges innombrables, éparpillés dans l’air des cieux jusqu’à en atteindre les cercles les plus élevés. Je voyais les anciens patriarches et Jean-Baptiste, Marie-Madeleine, les Apôtres, la splendeur de la Vierge et, au centre, le cœur éblouissant de la vie: l'éternelle Trinité.

Je n’étais pas "hors de moi", mais sous la voûte de la coupole de l’église du Jésus, à Rome, en train de contempler la grande fresque du Baciccia qui s’appelle justement "La vision du Ciel", l’une des plus belles et des plus riches de toutes celles qui sont disséminées dans la cité des Papes.

Je n’étais donc pas dans un ravissement mystique, mais dans cette admirable extase de masse à laquelle, depuis deux mille ans, les fidèles accèdent par l’adoration, au moment où, pendant les divins mystères, un Dieu descend vraiment et – comme le dit Romano Amerio – ce Dieu, on le prend vraiment. Depuis deux mille ans, dans les catacombes ou les cathédrales, la liturgie trinitaire qui se déroule dans les cieux descend au milieu de ses troupeaux sous la forme des saintes Espèces. La liturgie descend et le Christ se matérialise, prêtre et victime. Et l’Eglise, avec sa sagesse d’épouse du Christ et de mère de ceux qui sont appelés aux mystères sacrés, permet aux fidèles d’en être toujours informés. Non seulement elle leur enseigne la doctrine la plus sûre, mais elle amène aussi leurs sens à toucher presque la réalité qui leur est donnée, à les mettre, comme disait sœur Elisabeth de la Trinité, "face à face, même dans les ténèbres" avec la Gloire de Dieu.

C’est à cause de cette nécessité intime et religieuse que, très rapidement, les murs et les voûtes des locaux sacrés destinés à l'Eucharistie - d'abord ceux qui étaient cachés dans les catacombes, puis les temples païens reconvertis pour le culte rendu à la Trinité et enfin tous les édifices sacrés de toutes tailles et de toutes configurations, éparpillés partout où le christianisme s’était répandu - s’étendent et donnent de l’espace aux saints. C’est pour cela qu’ils disparaissent sous des broderies d’étoiles et s’ouvrent pour faire place au glorieux passé de l’Eglise militante, comme avec les cortèges de vierges et de martyrs des basiliques de Ravenne, mais aussi à l’avenir, déjà présent secrètement, de l’Eglise triomphante, aux ciels joyeux des coupoles que nous voyons, pour signifier, à travers la représentation picturale, leur descente réelle bien que cachée.

Ce qui avait été réellement reçu dans les cœurs, c’était ce qu’il y avait autour des cœurs: la réalité invisible sur l'autel était visible autour de l'autel et les fidèles pardonnaient la délicate illusion suggérée par les artistes. Ils étaient conscients que les yeux voyaient des cieux "simulés" - qui suggéraient des réalités déjà vivantes secrètement - mais pas "faux", c’est-à-dire qu’ils ne présentaient pas des réalités erronées. C’était donc des cieux "annonciateurs" de réalités à venir, tandis que leurs bouches recevaient des cieux "véritables" et que leurs cœurs s’ouvraient à une réalité déjà présente dans toute sa divinité et dans toute son humanité.

La réalité eucharistique, autour de laquelle se réunissent les peuples en faisant Ekklesia, rassemblement des appelés, Eglise, demande tout de suite à être enseignée et, en même temps, à être rendue visible. Si c’était nécessaire, l’Eglise écrirait avec de l’or pur - comme elle le faisait déjà, jadis, dans les manuscrits médiévaux - les caractères des pages de doctrine, pour faire ressortir la grandeur, la supériorité suprême, et même la divinité qu’elles sous-tendent.

D’une certaine manière, la Vérité et la Beauté comportent toutes les deux un besoin: la Vérité, celui de pénétrer complètement dans les cœurs, la Beauté, celui de briller dans toute sa splendeur sur les murs.

L'inspiration qui a conduit à donner aux édifices sacrés la forme d’une croix provient directement de la sacralité de l'Eucharistie. En effet les fidèles ont presque l’impression de s’introduire directement dans le bois de la croix et dans le corps même du Christ - auquel ils accéderont véritablement - comme s’il était vraisemblable qu’ait lieu cette entrée mystique dans le sacrement ecclésial, avant-goût d’éternité.

Au XVe siècle, Filippo Brunelleschi ajoute aux murs, dont la disposition en forme de croix renvoie physiquement au mystère de l'incarnation, la représentation architecturale de l'autre mystère, encore plus grand, la Trinité. A la cathédrale Santa Maria del Fiore de Florence, il réinvente la coupole en tant que "lieu cosmique" par le croisement approprié des bras longitudinal et transversal de la basilique chrétienne à l’endroit précis où bat le cœur du Christ, là où s’accomplit le Sacrifice. Il donne ainsi à l’église la possibilité d’inculquer à ses fidèles d’autres pensées, nécessaires et élevées: là où le Très-Haut descend sur l'autel, "levez les yeux", ô fidèles, et "vous verrez" tout ce qui, à travers l'autel, est entré dans votre cœur.

En ayant recours à la coupole, comme le feront par la suite tous les architectes, grands et moins grands, de la Renaissance et de l’âge baroque, cet architecte de génie permet à l’église de suggérer aux chrétiens une métaphore. Cette métaphore - peut-être la plus accomplie et la plus profonde que, parmi les vestiges de l’art, l’on puisse trouver de la Trinité, tout du moins telle que celle-ci est décrite notamment dans les textes de saint Augustin et de saint Thomas d’Aquin - permet d’illustrer avec la plus grande vraisemblance l’indicible et sublime mystère où bat le cœur du Christ. Le cœur du Christ bat en fait pour le Père, ce Père qui l’a engendré "avant l’aurore" (Psaume 109, 3), ce Père pour lequel il se donne en sacrifice pour faire couler les torrents de sa miséricorde – qui sont en réalité lui-même: le Christ.

Que disent en effet de la Trinité ces grands docteurs de l’Eglise? Saint Thomas, en l’occurrence, fait figurer dans le "De Trinitate" de sa "Summa Theologiæ" (I, 27-43) la formulation la plus accomplie de toutes les vérités écrites par les saints théologiens sur ce sujet. Il nous offre ainsi la synthèse la plus complète et en quelque sorte la plus compréhensible pour nous, pour conclure que la très sainte Trinité est semblable à un esprit qui pense et aime par ses opérations.

Saint Augustin fait référence à la même analogie, en particulier dans son "De Trinitate", X, 10, 18, dont s’inspirera d’ailleurs l’autre docteur, saint Thomas. Naturellement, le mystère trinitaire s’élève au-delà de toute image, au moins parce que ce qui est assimilé à un esprit est en réalité une Personne. Cela vaut aussi pour une pensée, autre Personne, et pour leur "souffle" lui-même, qui est la Troisième personne. Mais l’analogie proposée par les deux docteurs reste au moins utile "pour comprendre – résume Battista Mondin dans son ‘Dizionario enciclopedico del pensiero di san Tommaso d’Aquino’ – comment l’existence simultanée de trois individus distincts et de même nature est possible en Dieu, sans tomber dans le polythéisme".

On pourra apprécier encore mieux l'œuvre maternelle de l’Eglise quand celle-ci, après avoir développé convenablement l’analogie sur le plan théologique, en mettant au travail ses esprits les plus distingués et les plus saints, la transposera des livres aux murs grâce à l’influence qu’elle aura sur ses artistes. Alors l’Eglise ressemblera à une Bibliothèque-Pinacothèque Ambrosienne sans limites, où les livres et les tableaux sont rassemblés en un ensemble unique; la Trinité pourra être adorée non seulement dans les livres, mais aussi quand les hommes lèveront les yeux vers l'ensemble des nombreuses coupoles qui caractérisent le panorama de Rome, vers les courbes puissantes de la coupole de Saint-Pierre, ou quand un curé de village lèvera les yeux vers l'humble coupole de sa petite église de campagne.

Mais essayons de comprendre la relation entre la coupole et le mystère trinitaire et, au préalable, comment celui-ci a été expliqué par saint Thomas.

Un esprit qui comprend - dit saint Thomas - génère ou émet une pensée, qui est le "logos", le "verbum". L’esprit est le principe - avant lequel il n’y a rien d’autre - de la pensée qui en émane; c’est pourquoi la Personne divine par qui est généré le Fils Unique s’appelle "Père": parce qu’un esprit a la paternité de la pensée qui en provient.

Mais la pensée - ce qui naît de l’esprit - serait en soi non pas une pensée mais un rien si elle ne reflétait pas en soi l’esprit dont elle procède, si elle n’en reflétait pas la nature. Il n’y aurait pas de pensée si celle-ci n’était pas l’image parfaite de l’esprit dont elle émane.

C’est ainsi que, à côté du "Logos" ou "Verbum", émerge avec force le concept d’"Imago": le nom, le miroir, le visage. Ce n’est que grâce à lui qu’est parfaitement soutenue la ressemblance entre le Fils et le Père. Comme l’explique saint Thomas: "Le Fils procède comme Verbe et le concept de verbe implique la ressemblance de forme avec le sujet dont il procède [et qui est le Père]" ("Summa Theologiae" I, 35, 2).

Dans le cas de la Trinité, la pensée générée par l’esprit du Père est la pensée qui dit tout de l’esprit dont elle naît et dont elle est le reflet fidèle et complet. C’est la pensée de l'"être", en conformité avec ce que Dieu dit de Lui-même quand, à la question de savoir qui Il est, quel est son Nom, Il répond: "Je suis Celui qui suis" (Exode 3, 14). L’esprit est la réalité forte de l'être et la pensée générée par l’esprit exprime l'"être", c’est-à-dire qu’elle en est le Verbe, elle est la Parole infinie, positive, forte, de "Je suis Celui qui suis".

Cela se comprend mieux si l’on revient à notre coupole, que nous pouvons aussi trouver assez semblable, notamment, à une tête d’homme. La coupole se dresse haut dans le ciel, se courbant vers le centre, vers la lanterne d’où elle reçoit la lumière. Ses pierres répercutent leurs forces le long de ses nervures. Celles-ci les répercutent puissamment vers le bas, de telle sorte que, recevant plus bas, sous la tour de croisée, les poussées contraires des bras des nefs sur lesquelles repose la tour, elles soient corrigées dans leur trajectoire et restent à l’intérieur de la zone d’appui. Il faut le noter, parce que toute cette puissante construction en vient ainsi à constituer en quelque sorte l’équivalent architectural de ce qui, dans la Trinité est donné par la personne du Père: la puissante permanence de l'"Etre". Ce n’est pas un hasard. En effet, depuis toujours, la pierre a été appelée par l’homme à témoigner de la solide fermeté de l'éternité; il suffit de penser, par exemple, à toutes les fois où Jacob dresse de grandes pierres pour assurer que là, à tels endroits précis, le Seigneur qui lui a parlé sera rappelé "pour toujours".

Dans sa puissance, la voûte de la coupole est donc le Père et elle est comme le Père. Et elle l’est puissamment, transformant le ciel en une immensité soutenue par des piliers colossaux. Et voici que, encore comme le Père, la voûte de la coupole fait jaillir de la puissance des pierres la fresque des cieux, c’est-à-dire qu’elle émet le Fils, elle génère sur l’étendue infinie de son "être" la Pensée qui reflète le Père et sa puissance. Comment la génère-t-elle? Par la manifestation la plus exhaustive de son essence, c’est-à-dire de tout ce que le Père contemple en lui-même. Ce que nous voyons, presque comme si nous étions dans l’Esprit du Père, c’est le Logos, c’est la vision de la Gloire de Dieu comme Dieu la voit en lui-même. Cela se produit par une sorte de transsudation de figures et de couleurs provenant des pierres de la coupole - voilà l'action de l’Esprit Saint - parce que les pierres de la coupole "parlent", et révèlent en quoi consiste la béatitude de son firmament céleste.

Structure architecturale et fresques ne font qu’un, puisque la coupole émet et produit presque les fresques et que celles-ci expriment et manifestent la voûte de la coupole. On voit les fresques, pas la coupole, comme lorsque Jésus dit: "Qui Me voit voit le Père" (Jean 14, 9). Qui voit le "Logos", "Imago" et Fresque du Père, voit le Père qui l'a généré, voit la divine Coupole que l'Etre donne à lui-même et à son émanation intellectuelle.

L'analogie de la coupole met en œuvre avec force ce qui constitue certainement l’une des découvertes théologiques les plus significatives de saint Thomas d'Aquin, qui n’a pourtant jamais été creusée, par la suite, dans ses très remarquables implications scientifiques et philosophiques. Je parle du second Nom du Fils, "Imago", que saint Thomas, s’appuyant sur la base pertinente que constituent les Saintes Ecritures (Jean 14, 9; Colossiens, 1, 15; Hébreux 1, 3), place avec autorité à côté du premier nom, "Logos", de la même façon que la représentation d’une pensée se place à côté de cette pensée, l’aspect d’un concept à côté du concept, l'expression d’une notion à côté de la notion. En effet comment une pensée pourrait-elle s’exprimer – c’est-à-dire, étymologiquement, "se presser hors d’elle-même" – si ce n’est à travers son aspect, son effigie, son image? En fait, on peut même déduire de saint Thomas qu’une pensée n’existerait même pas si elle ne s’exprimait pas dans une représentation: ce serait du noir, un gribouillis, un bruit.

A notre époque de relativisme, de faiblesse et de dissociation de l'art et de la religion, le fait que le Fils ait deux Noms et non pas un seul, c’est-à-dire que le Fils soit autant l’"Imago" que le "Verbum" du Père, permet de rétablir un lien fort, surnaturel, entre Beauté et Vérité.

La comparaison de la coupole n’est certes pas satisfaisante à tous égards. Elle semble être néanmoins la meilleure représentation que l’on puisse associer à la Trinité en architecture et – ce n’est pas un hasard – elle indique avec une force expressive sans égale la catholicité d’un bâtiment.

Ce serait donc aussi un geste à caractère nettement religieux que de réinventer la coupole selon des modalités actuelles, puisque nous disposons aujourd’hui de beaucoup de matériaux élastiques presque faits exprès pour se plier aux exigences que j’appellerai "trinitaires". L'important est que la coupole conserve son caractère sacré de "théâtre des Cieux", que soit respecté le nombre d’or - mesure quasi sacrée, en raison de son étroite relation au "Logos" -, que soit exalté le mystère doré de la Trinité, dont la sublime liturgie peut inspirer l’art le plus magnifique. Un véritable art "trinoliturgique", pour rendre à la Vérité la Beauté divine la plus appropriée.

Le livre:
Enrico Maria Radaelli, "Ingresso alla bellezza", Fede & Cultura, Verona, 2007, pp. 404, euro 30,00.

 

Sources: La chiesa.it

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 15.02.2008 - BENOÎT XVI

 

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