Ci-dessus moteur de recherche


ACCUEIL

BENOÎT XVI

LÉON XIV

CHRIST MISERICORDIEUX

L'EVANGILE DU JOUR

LA FAMILLE

TEXTES DU VATICAN

JEAN PAUL II

FARNESE LOUIS-CHARLES

ACTUALITE DE L'EGLISE

CATECHESES

LITURGIE

LES JEUNES

FIDELES LAICS

JOUR DU SEIGNEUR

SERVANTS DE MESSE

SPIRITUALITE

THEOLOGIE

VOCATIONS

VOYAGE APOSTOLIQUE

GALERIE PHOTOS

TV VATICAN

MEDITATIONS

QUI SOMMES NOUS

NOUS CONTACTER
 
BIBLIOTHEQUE
.
STATISTIQUES
 
Ouverture du site
19 Avril 2005
 

Le pape Benoît XVI et les droits de l'homme

 

Le 13 janvier 2009 - (E.S.M.) - Les droits de l'homme sont aujourd'hui le théâtre d'une lutte sans merci pour les reformuler et renverser leur fondement... en attaquant la vie.

La Révolution française - Pour agrandir l'image Cliquer

Le pape Benoît XVI et les droits de l'homme

Le 13 janvier 2009 -  Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - Protéger et promouvoir les droits de l'homme, telle fut la mission assignée à l'ONU au lendemain de la barbarie nazie. S'adossant à la dignité inaliénable de tout être humain, ils revendiquent par là même une portée universelle et sont reconnus antérieurement à toute ratification. Découverts, non pas inventés, les droits fondamentaux s'imposent à tous par la force même de leur vérité. Comme l'a rappelé Benoît XVI le 18 avril dernier devant l'assemblée générale des Nations Unies, la « Déclaration universelle a réaffirmé avec force la conviction que le respect des droits de l'homme s'enracine avant tout sur une justice immuable sur laquelle la force contraignante des proclamations internationales est fondée » (Benoît XVI, Discours devant les représentants des Nations Unies à New York, 18 avril 2008).

Clé de voûte de l'édifice, le droit à la vie est conçu pour protéger ce processus biologique concret et réel qui conditionne l'existence même de l'être humain. L'homme est bénéficiaire de droits fondamentaux par sa dignité naturelle; de fait, sans la protection inconditionnelle de sa vie qui en est le support, tous les autres droits s'évanouissent et périssent ensemble. C'est cette conception réaliste et objective qui vole aujourd'hui en éclats par un double mouvement de subversion provenant d'une part des États, d'autre part du sein même de l'ONU. Nous assistons de fait à une attaque en règle contre le droit à la vie, vidé de sa substance et qui, sous les coups de boutoir du relativisme et de l'utilitarisme, laisse place à une cohorte de nouveaux droits « compromettant l'unité interne de la Déclaration pour favoriser la satisfaction de simples intérêts, souvent particuliers » (
Ibid).

Emblématique de ce phénomène, la promotion des droits sexuels et reproductifs dont le droit à l'avortement est le fer de lance. À l'échelon étatique, c'est la procédure juridique de la dérogation qui en a permis progressivement l'émergence depuis trois décennies. En France, la loi Veil de 1975 en est le paradigme, introduisant une dérogation exceptionnelle au principe de respect de la vie de l'être humain affirmé solennellement dans son premier article. Notre loi de bioéthique s'inscrit dans cette filiation, posant l'interdiction de recherche sur l'embryon tout en ouvrant un régime dérogatoire suspendant la protection qui lui est due. Toutes les lois modernes attentant à la vie humaine sont bâties de la sorte, c'est pourquoi jusqu'à présent les juristes ont toujours parlé de dépénalisation et non de légalisation. Or, notre époque est justement celle où les concessions de jadis sont en passe d'être érigées en nouveaux droits.

C'est ici qu'entre en jeu l'ONU, dont plusieurs de ses institutions travaillent à transmuer les anciennes dérogations en droits coercitifs qui assujettiraient les États. La dérogation est en définitive révélatrice de la honte et de la mauvaise conscience du législateur qui ne peut s'empêcher de rappeler le principe de respect de la vie pour camoufler sa volonté de transgression et donner l'illusion à ses citoyens que la morale est sauve.

Plusieurs instances ou groupes de pression onusiens ne se contentent plus de cette éthique de façade : ce sont des droits opposables qu'ils revendiquent haut et fort. Avec en contrepartie un devoir de tutelle du politique sur ceux-ci. Benoît XVI a parfaitement compris le danger de cette mutation idéologique qui conduirait à une situation d'irréversibilité des atteintes à la vie humaine. C'est à un effort sans pareille de refondation des droits de l'homme qu'il nous convie depuis qu'il a été élu pape. Ainsi a-t-il rappelé à Vienne devant les autorités politiques et l'ensemble du corps diplomatique que « c'est l'Europe qui a formulé pour la première fois le concept des droits humains. Le présupposé de tous les autres droits est le droit à la vie elle-même. Ceci vaut pour la vie de la conception à sa fin naturelle. En conséquence, l'avortement ne peut être un droit humain - il est son contraire » (
Benoît XVI, Discours aux autorités politiques et au corps diplomatique à Vienne, 7 septembre 2007). Benoît XVI développe ce thème avec insistance dans d'innombrables documents, au premier chef dans ses lettres pour la Journée mondiale de la Paix, ses rencontres avec le monde politique ou sa leçon de droits au palais de verre à New York. Un patrimoine philosophique et juridique de première main.

Mais plus encore, il convoque tous les chrétiens et les hommes de bonne volonté à oublier les années de compromis vers le bas pour choisir un dialogue vers le haut. Les hommes peuvent en effet à nouveau se rencontrer pour créer « un consensus éthique fondamental » selon l'expression qu'il a proposée au président Sarkozy le 12 septembre dernier, avec à la clé la reconnaissance des « droits inaliénables de la personne humaine depuis sa conception à sa mort naturelle ».

Pierre-Olivier Arduin

« La dignité de chaque homme est véritablement garantie uniquement lorsque tous ses droits fondamentaux sont reconnus, protégés et promus. Depuis toujours, l'Église rappelle que les droits fondamentaux, au-delà des différentes formulations et importances qu'ils peuvent prendre dans le cadre des diverses cultures, sont un fait universel, parce qu'inhérents à la nature même de l'homme. La loi naturelle, inscrite par le créateur dans la conscience humaine, est un dénominateur commun à tous les hommes et à tous les peuples; c'est un guide universel que tous peuvent connaître et sur la base desquels tous peuvent s'entendre. Les droits de l'homme sont donc, finalement enracinés en Dieu créateur, lequel a donné à chacun l'intelligence et la liberté. Si l'on fait abstraction de ce fondement éthique, les droits humains demeurent fragiles car privés d'un fondement solide. [...] Un long chemin a sans aucun doute été parcouru, mais une bonne partie reste encore à parcourir: des centaines de mil/ions de nos frères et sœurs voient aujourd'hui encore leurs droits à la vie, à la liberté, à la sécurité, menacés; l'égalité entre tous n'est pas toujours respectée ni la dignité de chacun, alors que de nouvelles barrières sont élevées pour des raisons liées à la race, à la religion, aux opinions politiques et à d'autres convictions. Que ne cesse donc pas l'engagement commun à promouvoir et mieux définir les droits de l'homme, et que s'intensifient les efforts pour en garantir le respect »
(Benoît XVI, le mercredi 10 décembre 2008 à l'occasion des 60 ans de la signature de la Déclaration universelle des droits de l'homme - les droits de l'homme sont enracinés en Dieu Créateur)

La position de l'Église

Bien qu'ayant condamné certains aspects de la Déclaration des droits de l'homme de 1789, l'Église a fini par reprendre à son compte cette notion. Explication de cette évolution.

par Thibaud Collin

Qui veut saisir la position de I l'Église par rapport aux droits de l'homme doit la considérer dans l'histoire politique et intellectuelle de ces derniers siècles. Réfléchir de manière abstraite est possible mais présente des difficultés méthodologiques propres dont un des effets fréquents est la mise à jour de soi-disant contradictions dans le Magistère de l'Église. Ainsi dans cette délicate question de l'appréciation des droits de l'homme se rejoignent ceux qui condamnent le « modernisme » de l'Église d'aujourd'hui au nom de celle d'hier et ceux qui accablent l'« obscurantisme » de l'Église d'hier au nom de sa supposée ouverture actuelle. Comme le dit le père Bertrand de Margerie, « il n'y a pas de fidélité à la tradition apostolique sans explicitation circonstancielle des doctrines à transmettre, bref sans développement doctrinal » (
Liberté religieuse et Règne du Christ, Cerf, 1988, p. 16). Cela ne veut pas dire qu'une approche historique d'une telle question légitime l'historicisme (relativisme fondé sur l'histoire), bien au contraire. La mesure ultime de la réflexion est toujours la totalité de la Révélation de Dieu. Toute hérésie est un rétrécissement de la doctrine catholique à telle de ses parties tendant à exclure les autres. La prise en compte des développements doctrinaux a toujours pour matrice la vérité totale sur Dieu. « L'Église tend constamment vers la plénitude de la divine vérité jusqu'à ce que soient accomplies en elle les paroles de Dieu » (Dei Verbum, n. 8.).

La Révolution française

La déclaration des droits de l'homme et du citoyen participe de la reconfiguration sociale et politique que le peuple français effectue dans ce qu'il est convenu d'appeler la Révolution. La première déclaration du Pape sur cet événement est datée du 10 mars 1791. Dans le bref Quod aliquandum, examen de la Constitution civile du clergé, Pie VI condamne vigoureusement l'article X de la déclaration de 1789 portant sur la liberté d'opinion même religieuse. « On établit comme un droit de l'homme en société, cette liberté absolue, qui non seulement assure le droit de n'être point inquiété sur ses opinions religieuses, mais qui accorde encore cette licence de penser, de dire, d'écrire et même de faire imprimer impunément en matière de religion, tout ce que peut suggérer l'imagination la plus déréglée; droit monstrueux, qui paraît cependant à l'Assemblée résulter de l'égalité et de la liberté naturelles à tous les hommes. Mais que pouvait-il y avoir de plus insensé, que d'établir parmi les hommes cette égalité et cette liberté effrénée qui semble étouffer la raison, le don le plus précieux que la nature ait fait à l'homme et le seul qui le distingue des animaux ? [...] Ce droit chimérique n'est-il pas contraire aux droits du Créateur suprême à qui nous devons l'existence et tout ce que nous possédons ? »

II est remarquable que le pape invoque ici en même temps comme critères d'appréciation le Dieu créateur et la raison. D'emblée il pointe l'impossibilité d'une liberté de pensée absolue. Certes l'article X souligne que « la manifestation des opinions ne doit pas troubler l'ordre public ». Mais Pie VI va plus loin en soulignant que de telles limites restent extrinsèques à l'ordre propre de la raison. La pensée ne doit pas être simplement limitée en aval quant à ses applications pratiques mais aussi dans son développement interne. La raison humaine cherche la vérité et le bien ; elle ne peut sans absurdité se couper de sa source. Est donc rappelée sa dépendance à Celui dont elle se reçoit. Considérer la liberté comme l'indifférence de l'être humain envers son bien et son salut, c'est mettre en danger tout l'ordre humain.

Cette condamnation de l'indifférentisme sera réitérée quelques décennies après par Grégoire XVI dans Mirari Vos
(1832). L'indifférentisme est « cette opinion funeste répandue partout par la fourbe des méchants, qu'on peut, par une profession de foi quelconque, obtenir le salut éternel de l'âme, pourvu qu'on ait des mœurs conformes à la justice et à la probité. [...] De cette source empoisonnée de l'indifférentisme découle cette maxime fausse et absurde ou plutôt ce délire : qu'on doit procurer et garantir à chacun la liberté de conscience; erreur des plus contagieuses, à laquelle aplanit la voie cette liberté absolue et sans frein des opinions qui, pour la ruine de l'Église et de l'État, va se répandant de toutes parts ». Là encore est affirmé que l'homme ne peut être considéré de manière abstraite comme un individu en soi. Il n'est pas sa propre mesure ; il est causé par Dieu et par la nature et ne peut se découvrir lui-même dans sa vérité que s'il reconnaît cette double causalité. Proclamer par principe un droit à une liberté absolue dans les champs moral, intellectuel et spirituel, c'est attaquer à la racine la dignité de l'esprit humain. Le sens même de l'esprit est, en effet, de se tourner vers autre chose que lui : l'intelligence vers la connaissance du vrai et la volonté libre vers la fruition du bien. Imaginer que ces facultés sont indifférentes à leur objet propre est non seulement contraire à l'expérience mais injurie l'humanité.

On peut donc estimer que les papes ont immédiatement eu un diagnostic pertinent sur les enjeux métaphysiques et moraux d'une telle déclaration des droits de l'homme, symbole d'une culture se coupant de sa source. Cette coupure peut être appelée la modernité. Ce qui est fascinant est de constater l'aspect prophétique du diagnostic. En effet, le « délire » de l'indifférentisme n'annonce-t-il pas le nihilisme dont Nietzsche fera le portrait quelques décennies plus tard et dont les totalitarismes du XXe siècle seront l'expression la plus vive mais non l'unique ? C'est comme si les papes de l'époque révolutionnaire avaient eu les bons outils pour percevoir à leur juste profondeur et expliciter les principes anthropologiques et métaphysiques des droits de l'homme ; l'outil principal utilisé par le Magistère est la Parole de Dieu lue dans la Tradition.

La position de Pie VI

En effet, dès 1791 Pie VI comprend la Déclaration des droits de l'homme à partir de la Genèse et de l'Exode. « Dieu, après avoir créé l'homme, après l'avoir établi dans un lieu de délices, ne le menaça-t-il pas de mort, s'il mangeait du fruit de l'arbre de la science du bien et du mal ? Et par cette première défense ne mit-il pas des bornes à sa liberté ? Lorsque dans la suite sa désobéissance l'eût rendu coupable, ne lui imposa-t-il pas de nouvelles obligations par l'organe de Moïse ? Et quoiqu'il eût laissé à son libre arbitre le pouvoir de se déterminer pour le bien ou pour le mal, ne l'environna-t-il pas de préceptes et de commandements qui pouvaient le sauver, s'il voulait les accomplir ? » C'est l'antique tentation de rébellion envers Dieu consistant pour l'homme à déterminer lui-même le bien et le mal, le vrai et le faux. « Vous serez comme des dieux ». Si la liberté de l'homme est effectivement absolue alors l'homme n'est pas créé par Dieu qui le gouverne en lui communiquant sa loi. On peut alors affirmer que l'homme peut vivre comme si Dieu n'existait pas; de là à conclure qu'il n'existe pas, ce n'est plus qu'une formalité.

Histoire et nouveautés

Ces papes, de Pie VI à Pie IX, qui passent pour des nostalgiques de l'Ancien Régime ne sont pas des réactionnaires. Ils sont éminemment conservateurs au sens strict du terme ; en effet, ils se savent dépositaires d'un dépôt, la foi de l'Église, dont ils ne sont pas la mesure et ils cherchent à être fidèles à leur mission : rappeler à temps et à contretemps à leurs contemporains la divine vérité sur leur condition et sur leur destinée. Ces papes conservent un savoir dont l'époque moderne se détache; d'où l'impression qu'ils ne font que réagir au mouvement de l'histoire alors qu'ils ne cessent d'enseigner et de transmettre la même foi que leurs prédécesseurs. Sans exagération on peut dire qu'ils mettent déjà en pratique la fameuse phrase de Paul VI sur l'Église « experte en humanité »
(Populorum Progressio, n. 13). Réfléchir sur la manière dont l'Église a perçu les droits de l'homme permet de saisir le rapport que le Magistère entretient avec l'histoire et la nouveauté.

La mentalité moderne valorise l'histoire comme ce au sein de quoi l'homme se libère de toutes les tutelles. La déclaration des droits de l'homme est prise dans cette matrice. Mais à bien y réfléchir le terme déclaration signifie la mise en mots d'une réalité antérieure à sa reconnaissance explicite. Ici c'est bien la dignité de l'être humain qui est en jeu. Donc la modernité historique ne peut être tout au plus que le progrès dans la conscience de ce qu'est l'homme, c'est-à-dire de ce qui n'est pas nouveau mais immuable. Elle est donc elle aussi à la recherche de la vérité sur la nature de l'homme et de son bien. Aucun « homme nouveau » ne peut sortir normalement d'un tel moment historique. De plus, la seule nouveauté pour l'Église, et elle est radicale, c'est le Christ, vrai Dieu et vrai Homme. Or les papes ont bien identifié dans le mouvement moderne, dont la déclaration des droits de l'homme représente la quintessence, la volonté d'accomplir enfin la promesse chrétienne que l'Église aurait occultée. C'est ce qui donne aux droits de l'homme tels qu'ils sont énoncés par les révolutionnaires français une résonance universelle, tel un nouvel Évangile proclamé à tous les hommes. Pie VI réplique en faisant mémoire du don de la Loi au Sinaï que la nouvelle charte du monde moderne ne peut ignorer. Dieu a parlé dans l'histoire des hommes et comme II est aussi Créateur et Sauveur, sa Parole est la mesure de la vérité et du bien pour tout homme quel que soit le développement des temps. Cette relecture ecclésiale de la Déclaration des droits de l'homme va être explicitée de Pie XII à Benoît XVI dans une parfaite continuité avec le diagnostic des papes du XIXe siècle.

Lorsque la promesse moderne de bonheur va accoucher du cauchemar de l'aliénation, les papes ne cesseront pas de parler au nom du respect de la dignité humaine fondée et garantie par Dieu. Ils pourront ainsi rappeler aux hommes d'aujourd'hui les véritables principes d'une déclaration des droits digne de l'humanité créée à l'image de Dieu. Si « l'homme passe infiniment l'homme »
(Pascal), sa mesure ne peut être prise qu'en Dieu.

Jean-Paul II dans Mémoire et identité (
Flammarion, 2005) réfléchit sur les idéologies du mal que sont les totalitarismes. Mais certaines lois démocratiques actuelles (le pape cite la dépénalisation de l'avortement, la légalisation des unions homosexuelles) n'ont rien à envier à ces régimes. « On peut et même on doit se poser la question de savoir qu'il ne s'agit pas, ici encore, d'une nouvelle "idéologie du mal", peut-être plus insidieuse et plus occulte, qui tente d'exploiter, contre l'homme et contre la famille même, les droits de l'homme. [...] Quelle est la racine de ces idéologies de l'après-Lumières ? En définitive, la réponse est simple: cela arrive parce que Dieu en tant que Créateur a été rejeté, et du même coup la source de toute détermination de ce qui est bien et de ce qui est mal. On a aussi rejeté la notion de ce qui, de manière plus profonde, nous constitue comme êtres humains, à savoir la notion de "nature humaine" comme "donné réel", et à sa place, on a mis un "produit de la pensée" librement formée et librement modifiable en fonction des circonstances » (p. 25). Jean-Paul II a bien perçu le retournement des droits de l'homme contre l'homme, ou plutôt l'exploitation idéologique de ces droits pour outrepasser l'ordre humain véritable. Il ne cesse de rappeler au régime démocratique libéral que la sphère du politique ne peut pas autoriser des pratiques inhumaines. Cette version permissive et libertaire du politique rejoint paradoxalement la version totalitaire antérieure dans la violation de la dignité humaine. Ce qui est en jeu dans les deux cas, c'est le refus par le politique des limites inhérentes à l'ordre humain aussi bien dans la sphère morale que dans la sphère intellectuelle et spirituelle.

La position de l'Église

Jean-Paul II et Benoît XVI, dans la ligne de Pie XII et de Vatican II, développe donc une compréhension enveloppante des droits de l'homme. La Déclaration de 1789 reste abstraite parce qu'elle tronque la réalité totale dans laquelle l'homme s'inscrit. Dans un chapitre de Mémoire et identité au titre éloquent « De bons fruits sur le terrain des Lumières », Jean-Paul II réaffirme que « la clé pour se comprendre lui-même, l'homme la trouve en contemplant le Prototype divin, le Verbe incarné, Fils éternel du Père. La Sainte Trinité est donc source première et décisive pour comprendre la nature intime de l'être humain » (p. 136).

Face au constructivisme actuel qui utilise les droits de l'homme pour promouvoir une vision indifférenciée de l'homme, Jean-Paul II approfondit la signification de ce mot homme afin de saisir ce qui en fait la dignité inaliénable. Dieu donne aux hommes, personne individuelle et communauté politique, leur nature inclinée à la vérité et au bien; ils doivent librement y adhérer au terme d'une recherche honorant leur dignité. Les droits de l'homme ont donc un fondement divin puisque l'homme n'est homme que parce qu'il est créé par Dieu à son image et ressemblance. Seule une société qui s'ouvre à la vérité chrétienne peut se limiter dans ses actes en les orientant vers son vrai bien. La nouveauté chrétienne apparaît alors comme rendant l'homme pleinement à lui-même après l'aliénation due à la chute originelle.

Le défunt pape exhorte les régimes reconnaissant la Déclaration des droits de l'homme comme fondement à remonter jusqu'à la racine des dits droits. C'est le lien vivant à la racine divine qui permettra à la liberté humaine de ne pas détruire l'homme. La Révolution française, les totalitarismes et certaines lois démocratiques actuelles permettent de se rappeler ce qu'il advient lorsque les peuples oublient de vivre de ce lien. Dans une belle continuité avec la critique de Pie VI, Jean-Paul II peut ainsi tranquillement affirmer : « Les Lumières européennes n'ont pas seulement produit les atrocités de la Révolution française: elles ont eu des fruits positifs comme les idées de liberté, d'égalité et de fraternité, qui sont aussi des valeurs enracinées dans l'Évangile. Même si elles ont été proclamées indépendamment de lui, ces idées révélaient à elles seules leur origine »
(p. 136).

Thibaud Collin
 

Nouveau : S'inscrire à la newsletter ! Voir menu à gauche.


Sources : La Nef/N°200 -  (E.S.M.)
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M. sur Google actualité)  13.01.2009 - T/Église

 

 » Sélection des derniers articles  
page précédente haut de page page suivante