Benoît XVI et le "journal du pape"
mettent en valeur saint Jean-Marie Vianney, Curé d'Ars |
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Rome, le 10 août 2009 -
(E.S.M.)
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Cet été, trois éléments figurent au premier plan de l'agenda du pape Benoît
XVI :
l'exemple du Curé d'Ars, le sacrement de la confession, la fête de la
Transfiguration. Voici comment et pourquoi :
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La merveilleuse
mosaïque de l’abside de la basilique Sant'Apollinare in Classe, construite à
Ravenne au VIe siècle
Benoît XVI et le "journal du pape"
mettent en valeur saint Jean-Marie Vianney, Curé d'Ars
Août sur le mont Thabor, pour les saints et les pécheurs
Le 10 août 2009 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
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Ces jours-ci, le pape et le "journal du pape" ont mis en valeur, de
manière forte et coordonnée, un saint, un sacrement, et une fête liturgique
habituellement minimisés ou négligés.
Le saint est Jean-Marie Vianney, le Curé d'Ars.
Le sacrement est celui du pardon des péchés.
La fête est celle du 6 août, la Transfiguration de Jésus sur le mont Thabor,
l’une des douze grandes fêtes du calendrier byzantin, méconnue par beaucoup
de gens dans l’Eglise latine.
1. LE SAINT CURÉ D'ARS
Benoît XVI a consacré au
Curé d'Ars toute sa catéchèse du mercredi 5 août,
pour le 150e anniversaire de la mort du saint.
Le pape a surtout voulu le proposer comme modèle aux prêtres, pour lesquels
il a ordonné une Année Sacerdotale spéciale. Un modèle qui n’est pas confiné
au passé mais qui est doté d’une extraordinaire force prophétique.
Voici comment Benoît XVI a expliqué l’actualité durable du saint Curé d'Ars,
même à notre époque de "dictature du relativisme" :
"Au lieu de réduire la figure de saint Jean-Marie Vianney à un exemple,
même admirable, de la spiritualité dévotionnelle du XIXe siècle, il faut
saisir la force prophétique qui caractérise sa très actuelle personnalité
humaine et sacerdotale. Dans la France d’après la révolution, qui subissait
une sorte de 'dictature du rationalisme' visant à éliminer de la société la
présence même des prêtres et de l’Eglise, il a d’abord vécu – dans sa
jeunesse – une clandestinité héroïque, parcourant de nuit des kilomètres
pour participer à la sainte messe. Puis – en tant que prêtre – il s’est
distingué par une exceptionnelle et féconde créativité pastorale, tendant à
montrer que le rationalisme alors dominant était en réalité loin de
satisfaire les vrais besoins de l’homme et qu’en définitive il n’était donc
pas vivable.
"Chers frères et sœurs, 150 ans après la mort du saint Curé d’Ars, les
défis de la société actuelle ne sont pas moins exigeants, ils sont peut-être
même devenus plus complexes. De son temps, il y avait la 'dictature du
rationalisme' ; aujourd’hui on constate dans beaucoup de milieux une sorte
de 'dictature du relativisme'. Toutes les deux apparaissent comme des
réponses inadaptées au juste désir de l’homme d’utiliser pleinement sa
raison comme élément distinctif et constitutif de son identité. Le
rationalisme était inadapté parce qu’il ne tenait pas compte des limites de
l’homme et voulait élever la raison seule au rang de mesure de toutes
choses, la transformant en divinité ; le relativisme contemporain blesse la
raison parce que, en fait, il en arrive à affirmer que l’être humain ne peut
rien connaître avec certitude au delà du domaine scientifique positif. Mais
aujourd’hui comme alors, l’homme 'mendiant en quête de sens et
d’accomplissement' recherche sans cesse des réponses exhaustives aux
questions de fond qu’il ne cesse de se poser".
Mais en quoi la sainteté de ce "curé anonyme d’un village perdu du sud de
la France" a-t-elle surtout brillé ? Dans sa manière de célébrer la
messe et de confesser, a répondu Benoît XVI. La vie du saint Curé d'Ars
était toute entière vouée à l’eucharistie et au sacrement de la
réconciliation. Il vivait "entre l'autel et le confessionnal".
Il y a de l’audace à reproposer un tel modèle aujourd’hui. Mais le fait
qu’il coïncide avec le cœur de la foi chrétienne, et pas avec un de ses
aspects marginaux, est confirmé par un article publié dans "L'Osservatore
Romano" le jour même de la catéchèse du pape sur le saint Curé d'Ars.
2. LE SACREMENT DE LA RÉCONCILIATION
Cet article concerne un autre saint, un Père de l’Eglise parmi les plus
illustres, évêque de Milan au IVe siècle, saint Ambroise. L'auteur, le
théologien Inos Biffi, grand connaisseur des Pères et de la théologie
médiévale, commence ainsi :
"Selon saint Ambroise, le Christ miséricordieux, ou la miséricorde qui
vient de lui, est la raison pour laquelle Dieu a créé le monde et en
particulier l’homme. Le pardon est le premier et le dernier mot du monde et
de son histoire".
Il dit plus loin :
"Le texte le plus étonnant et le plus révélateur de la théologie
d’Ambroise sur la miséricorde comme substance et motif de la création se
trouve à la fin de son commentaire sur l’ouvrage des six jours : 'Le
Seigneur notre Dieu – écrit-il – a créé le ciel et je ne lis nulle part
qu’il se soit reposé. Il a créé la terre et je ne lis nulle part qu’il se
soit reposé. Il a créé le soleil, la lune et les étoiles et je ne lis même
pas alors qu’il se soit reposé. Mais je lis qu’il a créé l’homme et qu’alors
il s’est reposé, ayant quelqu’un à qui remettre ses péchés'
(Exameron VI, IX, 10, 76).
"L'homme est créé par Dieu, dès l’origine, comme un être 'à qui
pardonner'. C’est pourquoi lorsque la miséricorde s’exerce, c’est fête dans
le ciel : la création atteint son but et sa gloire. Saint Ambroise ne
cessera de rappeler ce dessein divin, qui apparaîtra comme la raison pour
laquelle l’Eglise et ses ministres doivent être les signes de la pitié. Plus
que tous les autres Pères de l’Eglise, il a senti la puissance de la grâce
qui recrée et par laquelle la faute se dissout".
Et comment le pardon de Dieu atteint-il le pécheur repentant, sinon dans le
geste liturgique, sacramentel ?
A la page de "L'Osservatore Romano" où se trouve l'article d’Inos Biffi sur
saint Ambroise "confesseur miséricordieux", un autre article, dû à
l’historien d’art Timothy Verdon, présente un chef d’œuvre de l'art
liturgique : la merveilleuse mosaïque de l’abside de la basilique Sant'Apollinare in Classe, construite à Ravenne au VIe siècle.
3. LA FÊTE DE LA TRANSFIGURATION
La mosaïque représente la Transfiguration mais, à la place de Jésus, il y a
une croix ornée de pierres précieuses. Sous la croix, on voit l’évêque et
martyr Apollinaire habillé pour célébrer la messe et qui lève les mains dans
un geste de prière, entouré des brebis de son troupeau. Encore plus bas, il
y a l’autel de la véritable célébration. Liturgie terrestre et liturgie
céleste ne font qu’un, dans la lumière du Christ transfiguré. Le sens des
gestes de la liturgie terrestre est donné par les images qui la surplombent
:
"L'artiste anonyme a en effet ajouté au sens du 'vêtement d’une blancheur
éblouissante' décrit par le récit évangélique le sens de l’'exode' qui va
suivre – la mort de Jésus qui est déjà 'élévation' – dans l’unique image de
la croix ornée de pierres précieuses, qui sert de clé de lecture de
l'identité communautaire dans le contexte liturgique, révélation d’une
future 'transfiguration' du peuple qui prie, due au mystère présent dans le
pain et le vin changés en corps et sang du Christ".
Mais ce n’est pas tout. Toujours dans "L'Osservatore Romano" du 5
août, un commentaire en première page, écrit par le théologien américain
Robert Imbelli, prend aussi la Transfiguration comme clé de lecture de
l'encyclique "Caritas
in Veritate" et donc du sens ultime de l'homme et du cosmos.
Ce commentaire commence ainsi :
"La Transfiguration, l’une des fêtes les plus riches théologiquement, révèle
le vrai visage du Seigneur, Fils aimé du Père, et le destin auquel ses
disciples et nous, tous les hommes, sommes appelés, en dévoilant la vérité
du Christ et de l’humanité tout entière, comme le raconte saint Marc : 'Six
jours plus tard, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean, eux seuls, et
les conduisit à l’écart sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant
eux' (9, 2).
"Certains Pères de l’Eglise ont compris les mots 'six jours plus tard'
comme une annonce de l’accomplissement de la création. C’est-à-dire que la
création d’Adam et Eve par Dieu s’accomplit dans la révélation du vrai
homme, du nouvel Adam, Jésus-Christ, en qui la gloire de Dieu demeure
physiquement".
Et il poursuit de la manière suivante :
"On peut donc, à la lumière de ce que nous venons de voir, célébrer la
Transfiguration comme la fête où l’Eglise proclame sa vision de l'humanisme
intégral. La contemplation de la beauté du Christ transfiguré fait que ses
disciples désirent que le monde entier soit baigné par la lumière
transfigurée et agisse avec audace en fonction de ce saint désir".
Imbelli cite le passage suivant de "Caritas
in Veritate":
"Le développement suppose une attention à la vie spirituelle, une
sérieuse considération des expériences de confiance en Dieu, de fraternité
spirituelle dans le Christ, de remise de soi à la Providence et à la
Miséricorde divine, d’amour et de pardon, de renoncement à soi-même,
d’accueil du prochain, de justice et de paix. Tout cela est indispensable
pour transformer les 'cœurs de pierre' en 'cœurs de chair'
(Ez 36, 26), au point de rendre la vie sur
terre 'divine' et, par conséquent, plus digne de l’homme".
Et tout de suite après, il écrit :
"Paul VI a manifesté ce mystère dans sa vie. L'image du Seigneur
transfiguré a mis de l’énergie au cœur de sa spiritualité et de son
espérance pour l’Eglise et l'humanité. C’est une grâce merveilleuse de la
Providence que ce pape soit mort le soir de cette fête, le 6 août 1978".
Le procès de béatification du "serviteur de Dieu" Paul VI - autre
grande figure souvent sous-estimée et incomprise, surtout en ce qui concerne
son encyclique "Humanae
Vitae" - est en cours. Chaque année, le jour de la Transfiguration, qui
fut celui de sa mort, on célèbre sa mémoire. Dans "Caritas in veritate"
Benoît XVI a dit de lui :
"Paul VI a éclairé le grand thème du développement des peuples de la
splendeur de la vérité et de la douce lumière de la charité du Christ [...]
Poussé par le désir de rendre l’amour du Christ pleinement visible à ses
contemporains, Paul VI affronta avec décision d’importantes questions
morales, sans céder aux faiblesses culturelles de son temps".
Rien d’autre que ce que fit aussi le saint Curé d'Ars contre la "dictature
du rationalisme" de son temps. En offrant le pardon de Dieu. Dans la lumière
de la Transfiguration.
La catéchèse de Benoît XVI le mercredi 5 août 2009 ►
Saint Jean-Marie Vianney, curé d'Ars
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France.
Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 10.08.2009 -
T/International |