 |
Synode, vers le second round. Le réquisitoire du canoniste
|
Le 09 décembre 2014 -
(E.S.M.)
-
Le cardinal Velasio De Paolis ouvre à nouveau le feu contre l’accès
des divorcés remariés à la communion: "Au cas où cette idée serait
approuvée, les conséquences seraient d’une gravité inouïe". Le rébus
du pape François :
|
|
Interview
accordée à Elisabetta Piqué et publiée par le quotidien argentin "La
Nación" le 7 décembre
Synode, vers le second round. Le réquisitoire du canoniste
par Sandro Magister
Le 09 décembre 2014 - E.
S. M. -
Depuis aujourd’hui le document préparatoire pour le prochain synode des
évêques, consacré comme le précédent au thème de la famille, est dans le
domaine public
►
Sinodo
dei vescovi. "Lineamenta" per la XIV assemblea generale ordinaria, 4-25
ottobre 2015 (Lineamenta :"La vocation et la mission
de la famille dans l'Église et dans le monde contemporain" Texte pas encore
traduit en français).
Ce document préparatoire – en latin "lineamenta" – a comme base de départ la
"Relatio" finale du synode qui a eu lieu au mois d’octobre dernier, mais les
différents points de celle-ci ont été reformulés afin d’être présentés sous
forme de questions. Ce questionnaire n’est pour le moment diffusé qu’en
italien, mais il va être envoyé dans les prochains jours, en plusieurs
langues, aux conférences des évêques du monde entier et celles-ci pourront
le soumettre à un nombre de personnes qui pourra être très important.
La finalité du sondage, d’après ce qu’a expliqué le cardinal Baldisseri,
sera "l'approfondissement des questions qui ont été traitées au cours des
débats, toutes les questions, mais surtout celles dont il est nécessaire de
discuter de manière plus détaillée".
En donnant cette information, le cardinal a fait allusion aux deux questions
qui ont effectivement été les plus controversées au cours du synode du mois
d’octobre dernier. Tellement controversées qu’elles n’ont pas recueilli,
dans leur formulation finale, les deux tiers des voix, c’est-à-dire le
nombre nécessaire pour qu’un texte soit approuvé.
Ces questions sont celles qui portent sur l’accès des divorcés remariés à la
communion et sur l'homosexualité.
En effet, sur les 62 paragraphes qui constituent le texte de la "Relatio",
les trois qui sont consacrés à ces questions sont les seuls qui n’aient pas
été approuvés, même si – parce que le pape François a voulu qu’il en soit
ainsi – ils ont tout de même été maintenus dans le texte qui a été publié,
ainsi que le résultat des votes correspondants.
Dans le questionnaire qui a été diffusé aujourd’hui, la question qui
concerne l’accès des divorcés remariés à la communion est la question n° 38
:
"Il est nécessaire d’approfondir davantage la pastorale sacramentelle des
divorcés remariés, en examinant aussi la pratique des églises orthodoxes et
en ayant présente à l’esprit 'la distinction entre situation objective de
péché et circonstances atténuantes'. Dans quelles perspectives peut-on agir
? Quelles sont les démarches possibles ? Quelles suggestions permettraient
de remédier à des formes d’empêchements non dues ou non nécessaires ?".
Quant à celle qui concerne l'homosexualité, c’est la question n° 40 :
"Comment la communauté chrétienne porte-t-elle son attention pastorale sur
les familles où il y a des personnes ayant une tendance à l’homosexualité ?
Comment, en évitant toute discrimination injuste, prendre soin, à la lumière
de l’Évangile, des personnes qui sont dans de telles situations ? Comment
leur présenter les exigences de la volonté de Dieu en ce qui concerne leur
situation ?".
Le thème du synode, bien évidemment, n’est pas traité en totalité dans ces
deux questions, mais il concerne plutôt le destin actuel et futur du mariage
chrétien en tant que tel. Pour s’en rendre compte, il suffit, de penser à la
baisse générale du nombre de mariages, aussi bien civils que sacramentels,
ces derniers connaissant une très forte chute même dans un pays catholique
tel que l'Italie où, au cours du dernier demi-siècle, ils se sont effondrés,
passant de 414 652 (en 1963) à 111 545 (en 2013), à un rythme de diminution
qui laisse présager leur disparition d’ici moins de vingt ans.
Et pourtant il est incontestable que la question de l’accès des divorcés
remariés à la communion continue à être celle qui donne lieu au plus grand
nombre de débats parce que, en dépit du fait qu’elle ne concerne qu’un
nombre très limité de gens, elle met malgré tout en jeu d’une part le sens
ultime du mariage chrétien et d’autre part celui du sacrement de
l'eucharistie, c’est-à-dire de deux colonnes portantes du christianisme.
Le texte que l’on pourra lire ci-dessous constitue une preuve de la très
grande vivacité avec laquelle ce débat se poursuit. Il a été rédigé par le
cardinal Velasio De Paolis, 79 ans, missionnaire scalabrinien, qui est un
canoniste de grande réputation ainsi que le président émérite de la
préfecture des affaires économiques du Saint-Siège.
Avant même le synode du mois d’octobre dernier, De Paolis avait déjà pris
publiquement position contre les thèses favorables à l’accès des divorcés
remariés à la communion, thèses soutenues par le cardinal Walter Kasper plus
que par quiconque.
Il l’avait fait dans une conférence qu’il avait donnée le 27 mars à Pérouse
et qui constituait le discours inaugural pour la nouvelle année judiciaire
du tribunal ecclésiastique d'Ombrie
►
I divorziati risposati e i sacramenti dell'eucaristia e della penitenza
Par la suite cette conférence a fait l’objet d’une nouvelle publication en
Espagne, dans la revue "Ius Communionis" (2, 2014, pp. 203-248), mais aussi
en Italie et aux États-Unis dans un ouvrage à plusieurs auteurs qui a été
publié à la veille du synode et qui contient les interventions de quatre
autres cardinaux qui critiquent, eux aussi, les prises de position de Kasper
►"Permanere nella verità di Cristo. Matrimonio e Comunione nella Chiesa
cattolica", Éditions Cantagalli, Sienne, 2014.
►"Remaining in the Truth of Christ. Marriage and Communion in the Catholic
Church", Ignatius Press, San Francisco, 2014.
Mais voilà que De Paolis est revenu sur ce sujet, en prenant pour cible de
ses critiques précisément ce paragraphe 52 de la "Relatio" finale du synode
du mois d’octobre dernier dans lequel il est question des arguments pour et
contre l’accès des divorcés remariés à la communion.
L’opinion du cardinal De Paolis est que non seulement ce paragraphe est en
soi incohérent et contradictoire, mais que "les nouveautés qui seraient
introduites au cas où il serait approuvé seraient d’une gravité inouïe",
parce qu’elles mineraient les fondements mêmes du dogme et de la morale
catholique.
Voici le lien qui permet d’accéder au texte intégral de sa conférence, qui a
été donnée le 26 novembre à la faculté de droit canonique de l'université
San Dámaso, à Madrid
►Caminos adecuados para la pastoral de los divorciados vueltos a
casar
Et on peut lire ci-dessous la reproduction de sa partie finale.
En gardant présent à l’esprit le fait que les considérations de De Paolis
contre l’accès des divorcés remariés à la communion sont également
appliquées par lui à toutes les autres situations de vie commune
irrégulières, comme il l’explique dans la première partie de sa conférence.
LA PROPOSITION N. 52 DU SYNODE EXTRAORDINAIRE CONSACRÉ À LA FAMILLE
par Velasio De Paolis
La question de l'accès des divorcés remariés aux sacrements, en particulier
celui de l’eucharistie, a fait l’objet de réflexions pendant le synode
extraordinaire des évêques qui a eu lieu au mois d’octobre dernier. C’est à
cette question que fait référence la proposition n° 52 de la "Relatio"
finale, qui dit ceci :
"La réflexion a porté sur la possibilité, pour les divorcés remariés,
d’accéder aux sacrements de la pénitence et de l’eucharistie. Plusieurs
pères synodaux ont insisté pour maintenir la discipline actuelle, en vertu
du rapport constitutif entre la participation à l’eucharistie et la
communion avec l’Église et son enseignement sur le mariage indissoluble.
D’autres se sont exprimés en faveur d’un accueil non généralisé au banquet
eucharistique, dans certaines situations particulières et à des conditions
bien précises, surtout quand il s’agit de cas irréversibles et liés à des
obligations morales envers les enfants qui viendraient à subir des
souffrances injustes. L’accès éventuel aux sacrements devrait être précédé
d’un cheminement pénitentiel sous la responsabilité de l’évêque diocésain.
La question doit encore être approfondie, en ayant bien présente la
distinction entre la situation objective de péché et les circonstances
atténuantes, étant donné que 'l’imputabilité et la responsabilité d’une
action peuvent être diminuées voire supprimées' par divers 'facteurs
psychiques ou sociaux' (Catéchisme de l'Église Catholique, 1735".)
1. Le sens de la proposition synodale
Cette proposition n’a pas recueilli un nombre suffisant d’adhésions,
c’est-à-dire les deux tiers des voix, raison pour laquelle elle n’a pas été
approuvée par le synode ; c’est pourquoi elle ne devrait pas être considérée
comme un texte synodal. Cependant il faut remarquer tout de suite qu’il est
difficile d’évaluer la signification de ce vote. Le texte est composé de
différentes parties, qui sont sans homogénéité et parfois contradictoires ;
certaines d’entre elles ont des motivations inappropriées, ou pas tout à
fait appropriées ou, tout au moins, incomplètes, pour ce qui est de leur
rattachement aux sources doctrinales.
En effet la proposition commence par le rappel d’un fait : il y a eu une
réflexion à propos de cette question. Elle fait ensuite référence à un
groupe de pères qui sont favorables à la discipline actuelle et à d’autres
pères qui sont favorables à un changement dans cette discipline. Le texte se
poursuit en expliquant quels sont les points à propos desquels la discipline
actuelle devrait être changée et en signalant également quelle serait la
responsabilité qui devrait être confiée à l’évêque. Enfin elle se termine
sur un avertissement et sur une invitation à réfléchir de manière plus
approfondie, en suggérant même quelques éléments pour le faire. C’est pour
cette raison que l’on ne sait pas très bien à quoi peut faire référence un
vote éventuellement favorable ou défavorable à cette proposition.
2. Limites de la proposition
La proposition se présente avec une formulation limitée. Elle se réfère à
une catégorie limitée de personnes qui vivent dans une situation d’union
irrégulière : les divorcés remariés. Il s’agit d’une catégorie qui, d’après
la proposition, mériterait de faire l’objet d’une attention particulière et
exceptionnelle, motivée par les situations particulières dignes de
considération que cette catégorie pourrait présenter, comme le texte
l’explique effectivement tout de suite après.
Il n’est pas difficile de trouver dans ces propos quelques éléments
significatifs de la proposition du cardinal Kasper. Mais nous avons déjà eu
l’occasion d’étudier cette proposition et de vérifier qu’elle n’est soutenue
par aucun argument valable. Du reste cette proposition avait déjà été portée
à la connaissance de l'autorité compétente ; celle-ci l'avait étudiée et
repoussée, parce qu’elle n’y avait pas trouvé d’éléments qui puissent la
soustraire à une évaluation réalisée selon les principes doctrinaux contenus
dans les documents de l’Église. Par conséquent, l'hypothèse avancée dans la
proposition synodale avait déjà été étudiée et évaluée de manière
explicite ; cela avait conduit à la conclusion qu’elle n’impliquait pas de
principes exceptionnels mais qu’elle rentrait dans la catégorie des
principes généraux, étant donné que, du point de vue de la gravité morale et
en ce qui concerne l'accès à l'eucharistie, l'hypothèse avancée dans la
proposition constitue, dans tous les cas, une violation grave de la morale
conjugale et de la discipline de l’Église, qui ne peut pas permettre l'accès
à l'eucharistie. Pour cette raison, les documents de l’Église ne font jamais
de distinction entre les différentes catégories de personnes qui vivent
ensemble en situation d’unions irrégulières : les diverses typologies de
personnes qui cohabitent de manière irrégulière ne se distinguent pas les
unes des autres en ce qui concerne la cohabitation conjugale et l'accès à
l'eucharistie.
De plus, les conditions en vertu desquelles on demanderait que les divorcés
remariés bénéficient d’une considération particulière peuvent être trouvées
chez toutes les personnes qui vivent dans des situations irrégulières. Et,
dans certains cas, la situation pourrait même s’aggraver : on pourrait y
voir une récompense et une invitation à établir de nouveaux liens.
On peut d’ailleurs ajouter une remarque supplémentaire. La proposition,
lorsqu’elle restreint l'hypothèse à une catégorie de personnes spécifique,
reconnaît par là même la valeur doctrinale et normative des documents par
lesquels l’Église établit les règles en la matière. Et, étant donné que la
proposition invite à approfondir la question, cela fait naître une certaine
perplexité en ce qui concerne la proposition elle-même. Sur quoi peut donc
porter cet approfondissement ? Pas sur la valeur doctrinale et normative des
documents, mais sur la possible exception qui est contenue dans la
proposition. Et d’où peut naître le doute si ce n’est pas du fait que la
proposition contient en elle-même une exception aux deux conditions qui sont
essentielles pour accéder à l’eucharistie, à partir du moment où l’on
constate l’existence d’une violation grave de la loi morale naturelle et
d’une situation personnelle qui ne convient pas pour avoir accès à
l'eucharistie ?
En effet, on constate que sont également présentes, dans cette catégorie que
constituent les divorcés remariés, les deux conditions qui empêchent l'accès
à l'eucharistie, ce qui a comme résultat que l'autorité ecclésiastique ne
peut pas agir autrement qu’elle ne le fait, étant donné que cette autorité
ne peut pas disposer de la loi naturelle et divine : le respect de la loi
naturelle du mariage et la nécessité de la grâce sanctifiante.
Les situations qui sont décrites pourraient ne pas permettre la séparation
de deux personnes qui vivent ensemble dans le cadre d’une union irrégulière,
mais ne demandent pas nécessairement la vie commune "more uxorio" et l’état
permanent de péché.
3. Discipline, doctrine ou magistère ?
On constate que la rédaction du texte de la proposition fait naître des
équivoques. Il y est question de la "discipline actuelle" et d’une possible
modification de celle-ci, mais cela suscite un doute, qui rend nécessaire un
approfondissement. En réalité, la réglementation en vigueur n’est pas
seulement une "discipline actuelle", comme s’il s’agissait d’une norme
simplement ecclésiastique et non pas de normes divines, sanctionnées par le
magistère, avec des motivations doctrinales et magistérielles qui concernent
les fondements mêmes de la vie chrétienne, de la morale conjugale, du sens
et du respect de l'eucharistie et de la validité du sacrement de pénitence.
Nous nous trouvons face à une discipline qui est fondée sur le droit divin.
On ne souligne pas suffisamment le fait que les documents de l’Église, dans
ce domaine, n’imposent pas d’obligations provenant de l'autorité, mais
qu’ils affirment que l'autorité ecclésiastique ne peut pas agir autrement,
parce que cette "discipline" ne peut pas être modifiée dans ses éléments
essentiels. L’Église ne peut pas agir autrement. Elle ne peut modifier ni la
loi naturelle ni le respect de la nature de l'eucharistie, parce que ce qui
est en question, c’est la volonté divine.
Dans la mesure où elle prévoit la possibilité de permettre aux divorcés
remariés d’accéder à la communion eucharistique, la proposition constitue,
de fait, un changement doctrinal. Et cela contrairement au fait que ses
partisans affirment qu’ils ne veulent pas modifier la doctrine. D'autre
part, la doctrine, de par sa nature même, n’est pas modifiable si elle est
l’objet du magistère authentique de l’Église. Avant de parler et de discuter
d’une éventuelle modification de la discipline qui est actuellement en
vigueur, il est nécessaire de réfléchir à la nature de cette discipline.
Lorsque l’on étudie cette question il faudrait, en premier lieu, réfléchir à
cette doctrine et à son degré de fermeté ; il est nécessaire de bien étudier
ce qui peut être modifié et ce qui ne peut pas l’être. Le doute a été
insinué dans la proposition elle-même lorsqu’elle demande un
approfondissement, qui doit être doctrinal et préalable à toute décision.
Nous pouvons également nous demander s’il est de la compétence d’un synode
des évêques de traiter une question telle que celle-ci : la valeur de la
doctrine et de la discipline actuellement en vigueur dans l’Église, qui se
sont formées au cours des siècles et qui sont sanctionnées par des
interventions du magistère suprême de l’Église. Par ailleurs,
qui est
compétent pour modifier le magistère d’autres papes ? Cela constituerait un
précédent dangereux. D'autre part, les nouveautés qui seraient introduites
au cas où le texte de la proposition serait approuvé seraient d’une gravité
inouïe :
a) la possibilité d’admettre à la communion eucharistique, avec
l’approbation explicite de l’Église, une personne qui est en état de péché
mortel, avec risque de sacrilège et de profanation de l'eucharistie ;
b) en agissant de cette façon, on met en discussion le principe général de
la nécessité d’être en état de grâce sanctifiante pour pouvoir accéder à la
communion eucharistique, en particulier maintenant qu’a été introduite ou
qu’est en cours d’introduction dans l’Église une généralisation de l’accès à
l’eucharistie sans qu’il y ait eu au préalable une confession sacramentelle,
même lorsque l’on a conscience d’être en état de péché grave, avec toutes
les conséquences néfastes que comporte cette pratique ;
c) admettre à la communion eucharistique un fidèle qui cohabite "more uxorio"
signifierait que l’on met également en discussion la morale sexuelle, fondée
en particulier sur le sixième commandement ;
d) de plus, en agissant de cette manière, on donnerait de l’importance au
concubinage ou à d’autres liens, ce qui, de fait, affaiblirait le principe
de l’indissolubilité du mariage.
4. Les motivations présentées pour que soit maintenue la discipline qui est
actuellement en vigueur
En ce qui concerne ce point, la proposition affirme ce qui suit : "Plusieurs
pères synodaux ont insisté pour maintenir la discipline actuelle, en vertu
du rapport constitutif entre la participation à l’eucharistie et la
communion avec l’Église et son enseignement sur le mariage indissoluble".
Ce texte n’est pas très clair et, en tout cas, il est insuffisant parce
qu’il ne met pas l’accent sur la problématique qui est en cause. Il ne
s’agit pas uniquement de mesures disciplinaires qu’il faudrait prendre en
accord avec la majorité, mais également d’une doctrine et d’un magistère qui
sont indisponibles, ce qui va certainement au-delà des compétences d’un
synode extraordinaire des évêques. En réalité, des questions doctrinales
d’une extrême importance sont impliquées dans ce problème, des questions
auxquelles nous avons fait référence. Il est nécessaire de préciser que la
raison première de l’interdiction d’accéder à l'eucharistie est, simplement,
la situation dans laquelle se trouve une personne divorcée qui cohabite
maritalement avec quelqu’un d’autre : il s’agit là, objectivement, d’une
situation de péché grave. Le fait que cette situation ait été provoquée par
un divorce ou par un éventuel nouveau lien civil n’a pas d’importance quant
à la situation morale qui exclut l'eucharistie : se trouver dans un état
permanent de violation de la norme morale de l’Église.
5. Approfondissements
La proposition affirme ce qui suit : "La question doit encore être
approfondie, en ayant bien présente à l’esprit la distinction entre la
situation objective de péché et les circonstances atténuantes, étant donné
que 'L’imputabilité et la responsabilité d’une action peuvent être diminuées
voire supprimées' par divers 'facteurs psychiques ou sociaux' (Catéchisme de
l'Église Catholique, 1735)".
Le texte affirme la nécessité d’un approfondissement et cela à un seul point
de vue qui est assez faible. En effet, il cite le Catéchisme de l’Église
Catholique, avec lequel il n’est pas possible de ne pas être d'accord. Le
problème est de savoir dans quelle mesure ce paragraphe du Catéchisme de
l’Église Catholique a des répercussions sur la problématique qui est traitée
ici. La première source de la moralité est objective. Et c’est de la
moralité objective qu’il est question ici.
ET QU’EN DIT LE PAPE ?
À propos de l’accès des divorcés remariés à la communion, le pape François a
exprimé une dernière fois sa pensée dans une interview qu’il a accordée à
Elisabetta Piqué et qui a été publiée par le quotidien argentin "La Nación"
le 7 décembre :
"Dans le cas des divorcés remariés, que pouvons-nous faire pour eux, quelle
porte pouvons-nous leur ouvrir ? Il y a une inquiétude pastorale : alors
est-ce que nous allons leur donner la communion ? Leur donner la communion,
ce n’est pas une solution. À soi seul, ce n’est pas la solution ; la
solution, c’est l'intégration. Ils ne sont pas excommuniés, certainement
pas. Toutefois ils ne peuvent pas être parrains de baptême, ils ne peuvent
pas lire les lectures à la messe, ils ne peuvent pas distribuer la
communion, ils ne peuvent pas enseigner le catéchisme ; il y a sept choses
qu’ils ne peuvent pas faire, j’en ai la liste ici. Si je les citais, on
aurait l’impression qu’ils sont excommuniés de fait ! Alors, ouvrir un peu
plus les portes".
Dans cette même interview, François a également revendiqué la clarté de ses
formulations :
"Quelqu’un m’a dit un jour : 'Oui, certainement, le discernement c’est très
bien, mais nous avons besoin de choses qui soient plus claires. Je lui ai
répondu : 'Écoutez, j’ai écrit une encyclique et une exhortation
apostolique, je n’arrête pas de faire des déclarations et de prononcer des
homélies ; cela, c’est du magistère. Ce qu’il y a dans ces textes, c’est
cela que je pense, et non pas ce que les médias affirment que je pense.
Reportez-vous à ces textes et vous verrez qu’ils sont bien clairs".
Il n’en demeure pas moins que, dans cette interview, les propos du pape à
propos de l’accès des divorcés remariés à la communion se prêtent une fois
encore à des doutes quand il s’agit de les interpréter. On peut y lire, en
effet, d’une part un refus de la "solution" consistant à leur donner la
communion et d’autre part une approbation de cette même solution, vue comme
faisant partie d’une "intégration" plus globale de ces mêmes personnes.
Le texte complet, en plusieurs parties, de l'interview accordée à "La Nación"
:
►Francisco: "Dios me da una sana dosis de inconsciencia"
►El sínodo: "Los divorciados vueltos a casar parecen excomulgados"
►Sobre la Argentina: "El país tiene que llegar al término del
mandato en paz"
►Cambio en la Guardia Suiza: "Fue una mera renovación…"
►La intimidad de la entrevista: humor y anécdotas
Le site benoit-et-moi a
traduit le texte de cette interview :
►L'interview
de François à la Nacion (I)
►L'interview
de François à la Nacion (II)
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France.
Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 09.12.2014-
T/International |