Célébration des 400 ans de la naissance de Jean-Jacques Olier
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Paris, le 09 Juin 2008 -
(E.S.M.) - Ce dimanche à Saint-Sulpice (Paris), pour
l’anniversaire de la naissance du fondateur de la paroisse, du séminaire
(act. Issy-les-Moulineaux) et de la compagnie des prêtres de
Saint-Sulpice, Homélie du Cardinal André Vingt-Trois.
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L’église St Sulpice
(Paris) -
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Célébration des 400 ans de la naissance de Jean-Jacques Olier
Ce dimanche à Saint-Sulpice, pour l’anniversaire de la naissance du
fondateur de la paroisse, du séminaire (act.
Issy-les-Moulineaux) et de
la compagnie
des prêtres de Saint-Sulpice. Étaient rassemblés une vingtaine d’évêques
dont le cardinal archevêque d’Hochiminhville (Saïgon),
plusieurs des évêques sulpiciens de France (notamment Mgr
Marcus), et de très nombreux prêtres membres de la compagnie de
Saint-Sulpice ou étudiants.
(Dimanche
08 juin 2008, 10e dimanche du temps ordinaire)
Lectures : Osée 6, 3-6 ; Ps 49 ;
Rm 4, 18-25 : Mt 9, 9-13.
Homélie du Cardinal André Vingt-Trois
« Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs. » Cette phrase
du Christ, après l’appel du publicain et le repas pris avec les pécheurs,
éclaire d’une façon particulière, non seulement sa propre mission mais
encore après lui la mission qu’il va confier à ses Apôtres et qui va
constituer la mission de l’Église. L’Église est un peuple de pécheurs
convertis, ramenés à la vie par le baptême, aspirés vers la sainteté par le
don de l’Esprit-Saint, mais qui ne peut jamais oublier le point de départ
duquel elle jaillit qui est le sacrifice du Christ sur la croix, offrant sa
vie pour la rémission des péchés et pour le salut de l’humanité. L’Église
n’est donc jamais plus elle-même que quand elle se mobilise pour devenir
témoin de ce message de miséricorde et de cet appel à la sainteté.
La vie et l’œuvre de Jean-Jacques Olier, dans la première moitié du
dix-septième siècle français, sont une illustration de ce zèle missionnaire
et pastoral de l’Église. Nous ne pouvons imaginer l’ampleur de la tâche
qu’il eut à accomplir si nous n’évoquons pas quelques-uns des personnages
qui ont été avec lui en France les artisans de la mise en œuvre de la
réforme du concile de Trente. Leurs noms nous sont pour la plupart connus :
saint Vincent de Paul, Pierre de Bérulle, fondateur de l’Oratoire,
saint
Jean Eudes, saint Louis-Marie Grignon de Montfort, le P. de Condren et tant
d’autres. Cette brochette d’hommes dont certains sont devenus des grands
saints de notre Église ont été de grands pasteurs ; ils ont été surtout des
partisans résolus de la mise en œuvre de la réforme décidée par le concile
de Trente et si lente à se répandre en notre pays.
L’une des ruptures principales dont Jean-Jacques Olier fut l’un des artisans
et l’un des témoins fut la conversion du clergé. Avant de s’attaquer à la
formation des futurs prêtres, il fallait déjà prendre conscience de l’état
d’abandon dans lequel était le clergé français. En devenant curé de
Saint-Sulpice, Jean-Jacques Olier à la différence de beaucoup d’autres à la
même époque ne prenait pas possession d’un bénéfice pour assurer une étape
de sa carrière : au contraire, il entrait dans une tâche pastorale, destinée
à une population souvent abandonnée et misérable, peu christianisée, peu
catéchisée, même si elle vivait à l’ombre de l’abbaye de Saint-Germain. Curé
de la paroisse Saint-Sulpice, il a commencé par mettre en œuvre les
orientations que nous jugerions aujourd’hui élémentaires d’une vie pastorale
: la visite des paroissiens, la connaissance des paroissiens, la relation
suivie et nourrie avec les enfants, les jeunes, de toutes les catégories de
paroissiens, le développement des catéchismes, l’amélioration de la
célébration liturgique, bref tout ce qui constitue la tâche habituelle d’un
curé telle que nous la comprenons après coup mais qui était si novatrice
lorsqu’il la mit en œuvre.
C’est sur ce fond de réforme de la vie chrétienne et de réforme de la vie
paroissiale, sur ce fond aussi de champ missionnaire car, avec saint Vincent
de Paul, ils ont compris très vite que la diffusion de la réforme du concile
de Trente ne s’accomplirait pas en laissant les choses suivre leur cours et
qu’elle supposait des campagnes missionnaires à travers la France. C’est
ainsi que, comme beaucoup de leurs contemporains, heureusement, ils ont
constitué des équipes de mission qui parcouraient les diocèses, appelaient à
la conversion, remettaient dans la vie sacramentelle, développaient une
catéchèse élémentaire, bref, remettaient en place les éléments fondamentaux
de la vie chrétienne. Ces missions comme le renouveau de la vie paroissiale
supposaient un clergé formé, et un clergé formé selon trois dimensions qui
sont restées constitutives de la formation des prêtres.
Une dimension spirituelle : le don total auquel sont appelés les candidats
au sacerdoce. Ce don total n’est possible que dans une liberté convertie et
renouvelée, ce don total n’est possible que dans la conviction d’être appelé
à tout quitter pour suivre le Christ et annoncer l’Évangile. Dans une
société où l’état clérical constituait souvent une situation sociale
privilégiée, à moins que ce ne soit un moyen de caser des enfants dont on ne
savait que faire, ces objectifs de perfection spirituelle demandaient un
investissement considérable. Cet investissement a commencé modestement par
des retraites proposées avant l’ordination et il a étendu peu à peu non
seulement à des cycles de formation théologique et pastorale mais à des
cycles d’expérience spirituelle.
La deuxième dimension est la dimension théologique. Juste après la
Renaissance, au moment où surgissent les grandes caractéristiques de
l’humanisme qui se croit encore chrétien et qui deviendra vite peu chrétien
puis deviendra non-chrétien au moment où surgissent les prémices de cet
humanisme, il est nécessaire que les prêtres qui se préparent à être les
pasteurs de ces paroisses aient en eux-mêmes l’équipement philosophique et
théologique qui leur permettent non seulement de comprendre le monde dans
lequel ils sont mais encore d’y apporter une contribution et, lorsque c’est
nécessaire, un éclairage qu’ils auront appris à puiser dans leur
connaissance de l’Écriture et de la Tradition chrétienne. Cet investissement
philosophique, théologique et scripturaire constituera peu à peu le cadre
habituel de la formation des prêtres. Nous l’avons reçu comme une tradition.
Il est bon pour nous de nous rappeler que cette tradition a eu un
commencement. Troisième dimension : la formation pastorale que les futurs
prêtres pouvaient acquérir en participant habituellement à la vie de la
paroisse sous la conduite de son curé.
Cet apport original, partagé par différentes compagnies de prêtres qui sont
représentées elles aussi parmi aujourd’hui, comme les Lazaristes, les
Eudistes…., a constitué l’armature d’une Église qui s’appuyait presque
exclusivement sur la solidité de ses cadres ecclésiastiques. Cette armature
a permis à l’Église de former au XIXème siècle un nouveau clergé pour tenir
l’ensemble des campagnes françaises. L’Église a ainsi surmonté, dans la
souffrance et avec fidélité, les épreuves successives rencontrées à travers
les confrontations intellectuelles et théologiques du XXème siècle ; elle
continue de se développer dans un cadre différent, dans une société
différente et en relevant des appels différents. Pour nous, si je puis me
permettre d’associer à mes propres histoires une génération de prêtres et
d’évêques qui sont ici représenté, faire mémoire de Jean-Jacques Olier est
indissociable de la mémoire que nous faisons, pas seulement pour les années
jubilaires, de ceux qui ont été nos formateurs. Je n’ose pas dire mais
peut-être faudrait-il quand même le dire : d’une certaine façon, nos
compagnons spirituels tellement la vie du Séminaire à laquelle nous avons
participé, - du moins, c’était mon cas -, était une communauté dans laquelle
une part importante de la formation ne se diffusait pas par des
enseignements mais surtout par l’exemple et la vie commune. Cette vie
commune, selon les conditions de cette époque, permettait de découvrir les
richesses multiples de la manière de mettre en œuvre le sacerdoce chrétien à
travers des personnalités assez différentes pour que nul ne songe à
s’identifier à aucune. La modestie, la discrétion, l’investissement, le don
total et l’ouverture qui demeurait mystérieuse pour nous, lorsque nous
voyions ces hommes partir rencontrer quelque équipe à travers la ville, nous
donnaient le sentiment que, vraiment, il valait la peine d’être disciples du
Christ. C’est donc avec reconnaissance, non seulement pour M. Olier mais
pour ces générations de sulpiciens qui ont été nos formateurs, que je
m’unis, avec joie et émotion aussi, à l’action de grâce de la paroisse
Saint-Sulpice qui a été aussi de quelque façon une maquette et de la
formation des prêtres et de la révolution pastorale et de l’ardeur
missionnaire. Alors que nous sommes aujourd’hui dans une situation tout à
fait différente, j’espère, je souhaite, et je prie pour cela, que les
paroissiens de Saint-Sulpice, fidèles à leurs devanciers, soient dans
l’Église de Paris, les acteurs d’un renouveau pastoral et d’un renouveau
missionnaire.
Prions le Seigneur pour toutes celles et tous ceux qui ont profité de la
grâce du « siècle des saints », de la grâce de l’« École française », de la
grâce des compagnies de prêtres qui ont marqué cette « École française » et
de la grâce partagée du sacerdoce du Christ venu non pour les justes mais
pour les pécheurs. Amen.
+André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris
Sources : Saint-Sulpice -
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 09.06.08 -
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