À la veille du synode sur
L’Église catholique au Moyen-Orient, souhaité par Benoît XVI |
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Rome, le 08 octobre 2010 -
(E.S.M.)
- Ils sont baptisés dans l'Église catholique mais ils parlent et
vivent comme les Juifs. Ils ressemblent à la communauté primitive de
Jérusalem. Leur nombre augmente mais ils se sentent négligés, comme dans
un ghetto
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À la veille du synode sur
L’Église catholique au Moyen-Orient, souhaité par Benoît XVI
En Israël les judéo-chrétiens se développent
par Sandro Magister
Le 08 octobre 2010 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
- À la veille du
Synode
sur "L’Église catholique au
Moyen-Orient : communion et témoignage", qui se tiendra au Vatican du 10 au
24 octobre, c’est la présence même des catholiques dans cette région qui
soulève des problèmes.
Beaucoup de membres des communautés indigènes, héritières des anciennes
chrétientés qui y étaient florissantes avant l’arrivée de l'islam,
s’enfuient.
Ceux qui restent vivent çà et là dans la terreur, par exemple dans le nord
de l'Irak, à Mossoul et aux environs. Pour se défendre, ils tendent à former
des ghettos dans la plaine de Ninive.
Ailleurs, toutefois, d’autres catholiques arrivent en grand nombre, pour
travailler. Ils viennent surtout d'Asie et se rendent surtout dans les pays
du Golfe.
Par exemple, rien qu’au Koweït, il y a aujourd’hui 2 millions de
travailleurs immigrés, soit deux fois plus que de citoyens koweïtis. Les
catholiques sont 350 000 et viennent majoritairement des Philippines et
d’Inde. La vague constituée par ces nouveaux venus est si massive, en Arabie
Saoudite et dans les pays du Golfe, que Rome est en train d’étudier une
redéfinition des limites des vicariats de la région, par découpage en
plusieurs parties de l'immense vicariat d'Arabie qui regroupe aujourd’hui
l’Arabie Saoudite, Oman, le Yémen, les Émirats Arabes, le Qatar et Bahrein.
Il y a enfin le cas particulier - lui aussi en pleine mutation - des
catholiques en Israël.
*
À l’intérieur des frontières d’Israël, tout d’abord, le nombre de chrétiens
n’a pas diminué ; au contraire, année après année, il a augmenté en chiffres
absolus : de 34 000 en 1949 à 150 000 en 2008, dernière donnée officielle.
On ne peut parler d’une légère baisse de leur effectif qu’en termes de
pourcentage par rapport à la population totale – ils sont passés de 3 % à 2
% – parce que, pendant la même période, le nombre de citoyens de religion
juive est passé de 1 million à 5,5 millions, grâce à l’immigration, et celui
des musulmans de 111 000 à 1,2 million.
En Israël, les chrétiens sont présents surtout en Galilée et il y en a 15
000 à Jérusalem.
Par conséquent l'exode de chrétiens qui suscite l'inquiétude ne concerne pas
Israël mais plutôt la Terre Sainte, terme géographiquement extensible qui
comprend les territoires palestiniens et certaines parties des pays arabes
voisins, jusqu’à la Turquie et à Chypre.
*
À l’intérieur des frontières d’Israël, la nouveauté la plus intéressante
concerne les catholiques de langue hébraïque.
Pour s’occuper d’eux, le patriarcat latin de Jérusalem dispose d’un vicariat
spécifique confié aujourd’hui au jésuite David Neuhaus, juif israélien
converti au christianisme.
Il y a encore quelques années, en Israël, les catholiques de langue
hébraïque n’étaient que quelques centaines. Mais leur nombre a nettement
augmenté et aujourd’hui ils comptent au moins sept communautés : à
Jérusalem, Jaffa, Be’er Sheva, Haïfa, Tibériade, Latrun et Nazareth.
Le père Neuhaus a expliqué à la revue italienne "Il Regno" que ces
communautés se sont formées grâce à quatre apports.
Le premier apport provient des juifs arrivés en Israël lors des vagues
migratoires successives, parmi lesquels il y avait des catholiques, de
naissance ou convertis, qui sont devenus partie intégrante de la société
israélienne de langue hébraïque. La dernière grande vague migratoire, après
1990, est venue de l’empire soviétique dissous.
Le deuxième apport résulte de l'arrivée de travailleurs étrangers en Israël.
Ils sont aujourd’hui quelque 200 000, originaires d'Afrique, d'Amérique
latine, d'Europe orientale et plus encore d'Asie. Il en est venu 40 000 des
Philippines, principalement de sexe féminin et catholiques. Leurs enfants,
nés et baptisés en Israël, vont à l’école, apprennent l’hébreu et
s’intègrent à la société israélienne.
Le troisième apport est constitué de 2 000 à 3 000 maronites libanais, venus
en Israël quand les Israéliens se sont retirés du sud-Liban, et de réfugiés
africains provenant surtout du Soudan méridional, où les catholiques sont
nombreux. Leurs enfants grandissent aussi en parlant hébreu.
Il y a enfin les palestiniens catholiques présents en Israël dès sa
fondation, qui sont citoyens israéliens mais dont la situation sociale est
médiocre. Ils sont arabophones et on les trouve surtout dans les villages de
Galilée, mais ils ont tendance à s’installer dans des villes plus attirantes
du point de vue économique. Le père Neuhaus cite l'exemple de Be'er Sheva
"où des centaines de familles arabes ont émigré pour travailler dans les
services autour des villages bédouins, mais sans vivre avec les bédouins
parce qu’elles sont d’une classe socialement et économiquement inférieure.
Elles envoient leurs enfants dans des écoles où l’on parle hébreu, ce qui
donne une nouvelle génération d’arabes palestiniens qui ne parlent arabe
qu’à la maison et ne savent plus ni le lire ni l’écrire".
Voilà donc qui sont les catholiques de langue juive - quelques milliers de
personnes d’origines très diverses - dont s’occupe le vicariat, en
particulier des très jeunes, pour lesquels il utilise des catéchismes écrits
pour la première fois en hébreu.
Et le père Neuhaus de commenter : "Nous opérons avec de faibles moyens. Dans
le patriarcat, c’est à la majorité chrétienne palestinienne que l’on accorde
le plus d’attention, ce qui fait que les chrétiens de langue hébraïque sont,
en un certain sens, oubliés. Mais nous sommes également pauvres par le
nombre de gens qui s’en occupent : nous sommes un tout petit groupe avec des
missions trop lourdes pour lui".
*
En 2003 le Saint-Siège avait mis à la tête du vicariat de Jérusalem pour les
catholiques de langue hébraïque un évêque bénédictin de grande valeur,
Jean-Baptiste Gourion, algérien de naissance et lui aussi juif converti.
Une nomination âprement critiquée dans les milieux pro-palestiniens de
l’Église catholique. Dans la revue des jésuites de New-York, "America", le
père Drew Christiansen, qui en est l’actuel directeur, l’avait qualifiée de
"manœuvre visant à diviser l’Église en Terre Sainte".
Malheureusement l’évêque Gourion est mort peu après, prématurément. Et la
dignité épiscopale n’a pas été conférée à ses successeurs.
Le père Neuhaus affirme : "Nous, catholiques de langue hébraïque, sommes
doublement une minorité : au sein de l’état d’Israël et au sein de l’Église.
Nous avons parfois l’impression de vivre dans un tout petit ghetto".
Une lueur d’espérance est apportée par le texte qui servira de base au
synode sur le Moyen-Orient qui va commencer au Vatican, lorsqu’il qualifie
l'existence du vicariat pour les catholiques de langue hébraïque de "grande
aide" au dialogue avec le judaïsme.
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L’article de Maria Chiara Rioli dans "Il Regno" n° 16, 2010, avec
l'interview accordée par le père David Neuhaus :
Medio Oriente. I nuovi cattolici
Les documents du synode, sur le site du Vatican :
Assemblée spéciale pour le Moyen-Orient, 10-24 octobre 2010
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France.
Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 08.10.2010 -
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