La façon de distribuer la Communion |
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Le 07 janvier 2009 -
(E.S.M.)
- Le Pape Jean-Paul II, quand il parlait de la réception de la Sainte
Communion, constatait « des déplorables manques de respect à l'égard
des espèces eucharistiques, des manquements qui accablent aussi
(...) les pasteurs de l'Église, qui se seraient montrés moins
vigilants sur l'attitude des fidèles envers l'Eucharistie.
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L’institution de l’Eucharistie, Fra Angelico. Vers 1441 -
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La façon de distribuer la Communion
(2)
Dominus est
Préface :
Recevoir l'Eucharistie signifie se mettre en attitude d'adoration
Se nourrir de l'Eucharistie est un événement spirituel, qui touche toute
la réalité humaine :
(1)
Le 07 janvier 2009 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
-
La façon de distribuer la Communion - dont on ne mesure pas toujours
l'importance - revêt en réalité une importance significative et a des
conséquences pour la foi et la dévotion des fidèles,
dans la mesure où
elle reflète de manière visible la foi, l'amour et la délicatesse avec
laquelle l'Église traite Son divin Époux et Seigneur, dans les humbles
espèces du pain et du vin.
Cette conscience que se cache réellement dans les humbles espèces
eucharistiques toute la majesté du Christ, Roi des cieux, devant lequel
se prosternent en adoration tous les anges, fut très vive à l'époque des
Pères de l'Église. Parmi tant de voix en présence, il suffit de citer cette admonition émouvante de saint Jean
Chrysostome :
« Déjà par ce mystère, la terre ici-bas devient le ciel. Ouvre donc les
portes du ciel et regarde : non pas simplement du ciel, mais des cieux
des cieux, et tu pourras alors voir tout ce qui t'a été dit. Car s'il
est vrai que, dans un palais de roi, ce qu'il y a de plus auguste, ce ne
sont ni les murs, ni les lambris d'or, mais la personne même du roi,
assis sur son trône, ainsi en va-t-il, pour la personne du Roi qui est
dans le ciel. Eh bien ! ce corps, tu peux le voir, aujourd'hui sur la
terre. En effet, ce ne sont ni les anges, ni les archanges, ni le ciel,
ni les cieux des cieux que je te montre, mais le Maître de tout cela
(ln 1 Cor. hom. 24, 5)
».
Les Pères de l'Église se sont vivement préoccupés de ne pas perdre la
moindre petite parcelle de pain eucharistique. C'est ce que nous redit saint
Cyrille de Jérusalem de manière si suggestive :
« Sois vigilant pour ne rien perdre du corps du Seigneur. Si jamais tu
laissais tomber quelque chose, tu devrais le regarder comme un membre de
ton propre corps que tu aurais taillé. Dis-moi, je t'en prie, si
quelqu'un te donnait des pépites d'or, ne le garderais-tu pas par hasard
avec la plus grande précaution et le plus grand soin, attentif à ne rien perdre ? Ne devrais-tu pas soigner avec une attention et une vigilance
encore plus grande le corps du Seigneur, afin que rien, pas même une
parcelle, ne tombe à terre, puisque ce corps est infiniment plus
précieux que l'or et les pierres précieuses ?
(CYRILLUS HIER., Catech. Myst., 5, 21) ».
Tertullien aussi témoignait l'angoisse et la douleur de l'Église
(du II
et du IIIe siècle) pour ne pas perdre le moindre fragment :
« Nous éprouvons de l'angoisse afin que rien, ni du calice ni du pain,
ne tombe à terre
(TERTULLIANUS, De corona, 3,4) ».
Le soin extrême et la vénération accordés aux fragments du pain
eucharistique étaient un phénomène caractéristique de la communauté
chrétienne du IIIe siècle, déjà connu d'Origène :
« Vous, qui d'habitude assistez aux divins mystères, quand vous recevez
le corps du Seigneur, veillez à le regarder avec tout le soin et la
vénération possible, afin que pas un fragment ne tombe à terre et que
rien ne se perde du don consacré
(In Ex. hom. 13, 3) ».
Saint Jérôme considérait le fait qu'un fragment eucharistique soit tombé
à terre comme une préoccupation et un danger spirituel :
« Quand nous allons recevoir le corps du Christ - celui qui a la foi le
comprend - et que nous laissions tomber un fragment à terre, nous nous
mettons en danger »
(In PS. 147, 14).
Dans la tradition liturgique de l'Église copte, on peut trouver
l'admonition suivante :
« II n'y aucune différence entre les plus grands et les plus petits
morceaux du pain eucharistique, même les plus infimes qui ne peuvent
être vus par le regard le plus
perçant ; ils méritent la même vénération et possèdent la même dignité
que le pain tout entier ».
Dans certaines liturgies orientales, le pain consacré est désigné par le
mot « perle »
(margarita). C'est le cas dans les
Collectiones Copticae :
« Dieu ne veut pas qu'aucune perle ou fragment consacré adhère au doigt
ou tombe à terre ! ».
Dans la tradition de l'Église syriaque, le pain eucharistique était
assimilé au feu de l'Esprit Saint. Il y avait une foi vive en la
présence du Christ jusque dans les moindres parcelles du pain
eucharistique, comme l'atteste saint Ephrem :
« Jésus a rempli le pain de lui-même et de son Esprit et il l'a appelé
Son corps vivant. Ce que je viens de vous donner, disait Jésus, ne le
considérez pas comme du pain, et ne piétinez pas non plus les moindres
de ses fragments. La plus petite parcelle de ce pain peut sanctifier des
millions d'hommes et suffire à donner la vie à tous ceux qui en
mangeront
(Sermones in hebdomada sancta, 4, 4)
».
À l'époque où l'on administrait la Communion seulement dans la bouche et
que l'on utilisait même le plateau de Communion, le Pape Pie XI ordonna
de publier cette sévère exhortation : « Dans l'administration du
sacrement eucharistique, il faut faire preuve d'un zèle particulier,
afin de ne perdre aucune parcelle d'hostie consacrée, étant donné qu'en
chacune d'elle est présent le corps entier du Christ. C'est pourquoi, il
faut prendre le maximum de précaution pour que les fragments ne se
séparent pas facilement de l'hostie et ne tombent pas à terre, où - horribile dictu !
- elles pourraient se trouver mêlées à la poussière et
être piétinées
(Instruction de la Sainte Congrégation pour la discipline
des sacrements, 26 mars 1929) ».
Dans un moment d'aussi grande importance de la vie de l'Église comme est
celui de la réception du sacrement du Corps du Seigneur, il est
nécessaire de lui accorder un soin, une vigilance et une attention qui
lui correspondent. Le Pape Jean-Paul II, quand il parlait de la
réception de la Sainte Communion, constatait « des déplorables manques
de respect à l'égard des espèces eucharistiques, des manquements qui
accablent aussi
(...) les pasteurs de l'Église, qui se seraient montrés moins vigilants
sur l'attitude des fidèles envers l'Eucharistie
(Lettre apostolique Dominical cenae du 24.02.1980, n. 11)
».
Pour cette raison, il est nécessaire de tenir compte des circonstances
particulières et historiques qui concernent ceux qui communient, afin
que rien ne se produise qui puisse causer dommage au respect envers ce
sacrement, tout comme nous l'en avait averti saint Thomas
(Cf. Summa theol., III, q. 80, a. 12c).
Tout sacrement possède un aspect double et inséparable : le culte de
l'adoration divine de Dieu et le salut de l'homme. La forme du rite doit
par conséquent garantir de la manière la plus sûre possible le caractère
sacré de l'Eucharistie
(Cf. Summa theol., III, q. 60, a. 5c, ad. 3).
C'est précisément cet aspect de l'unité entre la disposition intérieure
et sa manifestation dans l'attitude extérieure qu'expliquait le
Bienheureux Columba Marmion avec des paroles si impressionnantes et si
pleines de foi, dans cette prière adressée à Jésus eucharistique :
« Seigneur Jésus, par amour pour nous, pour nous attirer à vous, pour
devenir notre aliment, vous voilez votre majesté. Plus vous dérobez à
nos yeux votre divinité, plus aussi nous voulons vous adorer, plus aussi
nous voulons nous prosterner devant vous avec respect et amour »
(Le Christ dans ses mystères, Paris, 1937, XVIII, p. 399-400).
Le Bienheureux Columba Marmion explique la cause de la vénération
extérieure des espèces eucharistiques à
partir de la prière de l'Église : « Seigneur, donne-nous la grâce de
vénérer les saints mystères de Ton corps et de Ton sang ». Pourquoi vénérer ? Parce que le Christ est Dieu, parce que la réalité des espèces
consacrées est une réalité sainte et divine. Celui qui se cache dans
l'Eucharistie, c'est Celui qui est, avec le Père et l'Esprit Saint,
l'Être infini, le Tout-puissant :
« O Christ Jésus, réellement présent sur l'autel, je me prosterne à vos
pieds ; que toute adoration vous soit rendue dans le sacrement que vous
avez voulu nous laisser la veille de votre Passion, comme témoignage de
l'excès de votre amour!
(Cf. ibid., p. 401) ».
Dans l'Église ancienne, les hommes, avant de recevoir le pain consacré,
devaient se laver la paume de la main
(cf. JUNGMANN, op.
cit., p. 461, n. 43.). En outre, le fidèle s'inclinait
profondément en recevant le Corps du Seigneur qu'il portait directement
dans la bouche, avec la paume de la main droite et non de la main
gauche
(THEODORUS MOPS., Catech.
hom., 16, 27. Dans le rite de la Communion dans la main, qui se pratique
dans les églises de Rite romain à partir plus ou moins de 1968,
l'habitude est de recevoir le pain eucharistique dans la main gauche au
lieu de la main droite comme c'était de règle dans l'antiquité. En plus,
dans l'actuel rite de la Communion dans la main, le fidèle lui-même
prend le Corps du Seigneur qui lui est donné dans la main et, après, il
le porte avec les doigts à sa bouche). La paume de la main servait, pour ainsi dire, de patène ou de
corporal (en particulier pour les femmes). C'est ce que nous pouvons
lire dans un sermon de saint Césaire d'Arles (470-542) :
« Tous les hommes qui désirent communier, doivent se laver les mains. Et
toutes les femmes doivent porter un voile de lin, sur lequel elles
recevront le corps du Christ
(Sermo 227, 5) ».
De manière habituelle, on purifiait la paume de la main ou bien on la
lavait après la réception du pain eucharistique comme c'est encore la
règle aujourd'hui, pour la Communion des clercs, dans le rite byzantin.
L'Église antique veillait à ce que la réception du Corps du Seigneur
dans la main fût accompagnée d'une attitude extérieure de profonde
adoration, comme on peut le constater dans cette homélie de Théodore de
Mopsueste :
« Que chacun de nous s'approche pour communier, comme s'il payait une
sorte de dette par son adoration, en faisant une profession de foi en
recevant le Corps du Roi. Toi, pourtant, après avoir reçu le Corps du
Christ dans tes propres mains, adore-le avec grand amour et sincérité,
fixe-le de tes yeux et embrasse le !
(Hom. Catech. 16, 27) ».
Dans le rite chaldéen et syro-malabar, il y a une particularité qui
exprime bien le profond respect dans la manière de traiter le pain
consacré : avant que le prêtre, durant la liturgie eucharistique, ne
touche avec ses doigts le corps du Seigneur, on lui encense les mains.
Le cardinal Joseph Ratzinger avait fait cette remarque : le fait que le
prêtre prenne lui-même le Corps du Seigneur non seulement le distingue
du laïc, mais doit le pousser à être conscient de se trouver devant le
mysterium tremendum et d'agir dans la personne du Christ
(Cf. Kirche, Ökumene, Politik. Neue Versuche zur Ekklesiologie,
Einsiedeln, 1987, 19).
Le fait qu'un mortel prenne le Corps du Seigneur directement dans ses
mains exigeait, selon saint Jean Chrysostome, une attitude de grande
maturité spirituelle :
« Continuellement, le prêtre touche Dieu avec ses mains. Quelle pureté,
quelle piété cela exige-t-il de lui ! Réfléchis seulement un tout petit
peu... comment doivent être ces mains qui touchent des réalités aussi
saintes !
(De sacerdotio, VI, 4) ».
Dans l'ancienne Église syriaque, le rite de la distribution de la
Communion était comparé à l'épisode de la
purification du prophète Isaïe par un des séraphins. Dans un de ses
sermons, saint Ephrem met ces paroles, dans la bouche du Christ :
« Le charbon, apporté à Isaïe, a sanctifié ses lèvres. Maintenant, c'est
Moi, présent dans le pain qui vous a été apporté, qui vous ai
sanctifiés. Les pincettes que le prophète a vues et qui servirent à
prendre le charbon sur l'autel, représentaient Ma figure dans le grand
sacrement. Isaïe m'a vu, de la même manière que vous Me voyez maintenant
quand j'étends ma main droite pour porter à votre bouche le pain vivant.
Les pincettes représentent Ma main droite. Quant à Moi, j'exerce la
fonction de séraphin. Le charbon, c'est mon corps. Et vous tous, vous
êtes Isaïe
(Sermones in hebdomada sancta, 4, 5) ».
Cette description permet de conclure que dans l'Église syriaque au temps
de saint Ephrem, la Sainte Communion était distribuée directement dans
la bouche. On peut également constater cela dans la liturgie dite de
saint Jacques, encore plus ancienne que celle de saint Jean
Chrysostome
(Cf. L. MALDONADO, La Plegaria Eucaristica, Madrid, 1967, 422-440). Dans la liturgie de saint Jacques, avant de distribuer
aux fidèles la Sainte Communion, le prêtre récitait cette prière :
« Que le Seigneur nous bénisse et qu'il nous rende digne de prendre avec
des mains immaculées le charbon ardent pour le mettre dans la bouche des
fidèles ».
Dans le rite syro-occidental, le prêtre, au moment de distribuer la
Communion, récite cette formule :
« Que le charbon propitiatoire et vivifiant du Corps et du Sang du
Christ, notre Dieu, soit donné au fidèle pour le pardon des offenses et
la rémission des péchés ».
Il existe un témoignage semblable de saint Jean Damascène :
« Nous recevons le charbon divin pour être enflammés et divinisés par
notre participation au feu divin. Isaïe a vu ce charbon. Maintenant, le
charbon n'est pas simplement du bois, mais c'est du bois uni au feu.
D'une manière comparable, le pain de la Communion n'est pas du simple
pain, mais du pain uni à la Divinité ».
Sur la base de cette expérience des premiers siècles, de la
compréhension théologique croissante et organisée du mystère
eucharistique et du développement du rite, l'habitude de distribuer la
Communion sur la main fut réservée, à la fin de l'époque patristique, à
un groupe qualifié, c'est-à-dire le clergé, comme c'est encore le cas
dans les rites orientaux. On commence par conséquent à distribuer le
pain eucharistique
(qui est, dans les rites orientaux, trempé dans le
vin consacré) directement dans la bouche. Dans les rites orientaux, on
distribue dans la main seulement le pain non consacré, appelé «
antidoron
(le cérémonial de la
communion eucharistique dans les rites orientaux, Gregorianum 41,1961, p.
30-62)
». Cela nous montre aussi de manière évidente la différence
entre le pain eucharistique et le pain simplement béni.
II y a un certain nombre d'années, le cardinal Joseph Ratzinger faisait
cette remarque préoccupante à propos du moment de la Communion, dans
différentes localités :
« Nous ne nous élevons plus à la grandeur de l'événement de la
Communion, car nous rabaissons le don du Seigneur au niveau ordinaire de
notre bon vouloir, au niveau de la banalité
(Cf. Das Fest des Glaubens. Einsiedeln, 1981, p. 131) ».
Ces paroles de l'ex-cardinal Joseph Ratzinger sont presque un écho des
réflexions des Pères de l'Église concernant le moment de la Communion.
La preuve en est, par exemple, dans ces expressions de saint Jean
Chrysostome, docteur eucharistique :
« Imagine quelle sainteté tu dois avoir, dès l'instant où tu as reçu des
signes encore plus grands de ceux que les Juifs reçurent dans le Saint
des Saints ? Car ce qui habite en toi, en effet, ce ne sont pas les
Chérubins, mais le Seigneur des Chérubins ; tu n'as ni arche, ni manne,
ni table de pierre, ni même la verge d'Aaron, mais le corps et le sang
du Seigneur, l'Esprit à la place de la lettre : tu as un don ineffable.
Eh bien, plus grands sont les signes et plus vénérables sont les
mystères par lesquels tu as été honoré, plus grande est la sainteté dont
tu dois rendre compte
(Hom. in PS. 133, 2 - PG 55, 386) ».
Le lien véritable et étroit qui unit l'âge patristique avec l'Église
actuelle dans ce domaine, c'est le souci du respect du Corps du Christ,
même dans les plus petits
fragments. Le Saint-Siège, dans une récente Instruction pour les
Églises orientales catholiques, lorsqu'il parle de la manière de
distribuer la Communion et en particulier de l'habitude que les prêtres
seuls touchent le pain eucharistique, évoque un critère qui est, en soi,
valide pour la pratique liturgique de toute l'Église :
« Même si cela exclut la mise en valeur d'autres critères, même
légitimes, et implique de renoncer à certaines commodités, une
modification de la pratique traditionnelle a pour risque de comporter
une intrusion non structurelle au regard du cadre spirituel dont il
s'est revendiqué
(Congrégation pour les Églises d'Orient, Instruction Le Père
inestimable pour l'application des prescriptions liturgiques du Code des
Canons des Églises orientales, 6 janvier 1996, n. 58) ».
(à suivre)
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Sources : Dominus est -
(E.S.M.)
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M. sur Google actualité)
07.01.2009 -
T/Liturgie
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