Comme Benoît XVI l’a rappelé, l’Évangile nous
engage jusqu’à la mort |
 |
Rome, le 05 novembre 2007 -
(E.S.M.) - Dans les décennies qui ont suivi le
Concile Vatican II, la parole « défi » a remplacé celle de « tribulation
», c’est-à-dire d’épines douloureuses métaphoriques ou matérielles. De
manière subtile, certains s’efforcent de parvenir à entamer le concept
chrétien de martyre.
|
Le
relativisme attaque le concept de martyre -
Pour agrandir l'image:
►
C'est ici
Comme le pape Benoît XVI l’a rappelé, l’Évangile nous engage jusqu’à la
mort.
Défis ou tribulations ? Le relativisme attaque le concept de martyre
Une parole se retrouve sans cesse dans de nombreux écrits, y compris dans
des écrits ecclésiastiques: “défi”, pour indiquer en substance les
provocations du monde vis-à-vis de l’Église. Le terme indique une invitation
à se battre en duel ou à concourir dans des épreuves sportives ou dans
d’autres épreuves toujours faites à armes égales. Par extension, inviter
quelqu’un à dire ou à faire quelque chose que l’on pense être faux ou
impossible. Vous semble-t-il que le monde défie l’Église à armes égales ?
C’est un exemple de l’optimisme idéologique qui a caractérisé et qui
continue à marquer, le regard de nombreux chrétiens vis-à-vis du rapport
entre le monde et l’Église. Jésus n’a-t-il pas dit : « Dans le monde vous
aurez à souffrir (Jean 16, 33)
? » Saint Paul n’a-t-il pas invité à être « joyeux dans
l’espérance, forts dans la tribulation »
(Romains 12, 12) ?
Dans les décennies qui ont suivi le Concile Vatican II, la parole «
défi » a remplacé celle de «
tribulation », c’est-à-dire d’épines
douloureuses métaphoriques ou matérielles. De manière
subtile, certains s’efforcent de parvenir à entamer le concept chrétien de
martyre. Voyons pourquoi.
Le martyre est avant tout le témoignage porté à la vérité du premier
commandement : « Je Suis le Seigneur Dieu », et la résistance à cette
« tentation constante de la foi » qui « consiste à diviniser ce
qui n’es pas Dieu » (Catéchisme
de l'Eglise catholique,
n° 2113). Aujourd’hui, comme
dans le passé, la tentation de l’idolâtrie se présente sous des formes
antiques et nouvelles : du satanisme, au pouvoir, au plaisir, à l’Etat. Une
forme inusitée est celle de l’absolutisation des valeurs comme la paix, la
solidarité, qui se rapportent tout à fait au premier commandement : « Je
Suis le Seigneur … ». Autrement, elles se transforment en idoles
absolutistes, dans la « Bête » de l’Apocalypse
(cf. Apocalypse, 13-14). « De
nombreux martyrs sont morts pour ne pas adorer ‘la
Bête’, en refusant même de simuler le culte demandé. L’idolâtrie
repousse l’unique Seigneurie de Dieu, et pour cela, elle est incompatible
avec la communion divine » (Catéchisme
de l’Eglise Catholique, ibid.)
Une deuxième réflexion aide à comprendre que le concept de martyre est
univoque : comme Jésus devant Pilate, le chrétien sait qu’il est devant le
monde, qu’il est appelé avant tout à rendre témoignage à la vérité
(cf. Catéchisme…. n°2471), qu’il
ne doit pas rougir du Christ. Nous savons que,
aujourd’hui, de nombreux chrétiens, et notamment plusieurs associations,
dirigés souvent par des ecclésiastiques, défilent dans les rues au nom des
valeurs, organisent des manifestations pour soutenir de nombreuses réalités,
mais ne nomment jamais Jésus-Christ ou la foi ou la prière, comme
étant l’unique instrument efficace pour vaincre le monde, considéré comme la
réalité qui adore la Bête et s’oppose à Dieu. C’est un autre effet de
l’idéologie relativiste qui tend à confondre le martyre avec le héros, et à
les mettre en commun dans « des martyrologes
œcuméniques ».
Cela nous permet de comprendre la définition que la Catéchisme donne du
Martyre : « Le témoignage suprême rendu à la vérité de la foi ; le martyr
est un témoin qui va jusqu’à la mort. Il rend témoignage au Christ, mort et
ressuscité, auquel il est uni par la charité qui consiste à l’Aimer
au-dessus de toute chose » (n° 2473).
L’amour pour lequel le chrétien meurt, est avant tout l’amour envers Dieu -
ce que l’on cherche à découvrir dans les causes des saints -. De cet amour
dépend l’amour du prochain, que l’on aime comme soi-même, sinon on pourrait
le prendre pour un élan de générosité qui découle en dernier ressort de
l’affirmation de son propre « moi ». Cela permet de comprendre que le martyr
chrétien « rend témoignage à la vérité de la foi et de la doctrine
chrétienne. Il affronte la mort comme un acte de force. ‘Laissez-moi
devenir la pâture des bêtes fauves’ déclare Saint Ignace d’Antioche. - C’est
seulement ainsi qu’il me sera accordé d’arriver à Dieu » (ibid.)
ndlr : Dans une catéchèse dédiée à
St Ignace, le pape Benoît XVI rappelle que Ignace supplie les chrétiens
de Rome de ne pas empêcher son martyre, car il est impatient d’être «
uni au Christ ».
Et ainsi, c’est la vérité qui rend libres, et non pas les «
valeurs » conçues de manière abstraite et
idéologique. Contrairement à ce que pensent certains, l’Église Catholique,
après le Concile Vatican II, n’a apporté aucun « renouveau » du concept
ecclésial de martyre, qui amènerait éventuellement à penser que l’on peut
être des martyrs chrétiens en mourant pour la paix, ou pour la libération de
la patrie, ou pour la charité séparée de la foi.
La raison unique du martyre chrétien reste « la haine envers la foi en
Jésus-Christ ». Le persécuteur y concourt en infligeant le martyre matériel,
c’est-à-dire la torture et la mort ; le persécuté le subit en pardonnant,
comme Jésus. La « paix » pour laquelle et dans laquelle les premiers
chrétiens mouraient, était la « communio » de l’Église à laquelle ils
appartenaient et qu’ils ne voulaient pas renier, car elle est le Corps dont
le Christ est la Tête. Il en a été ainsi pour les 498 martyrs d’Espagne
béatifiés par le Pape Benoît XVI. Le chrétien sait « qu’il est nécessaire
de traverser de nombreuses tribulations pour entrer dans le Royaume de Dieu
» (Actes 14, 22). Et donc,
ce ne sont pas des « défis », mais des tribulations. Nous reviendrons
prochainement sur cette question.
A propos des
498 bienheureux martyrs espagnols de la Foi
Environ cinquante mille pèlerins se sont rassemblés dimanche dernier sur la
place Saint-Pierre pour participer à la cérémonie de béatification de 498
martyrs assassinés pendant les premiers mois de la guerre civile espagnole
et l’insurrection révolutionnaire d’octobre 1934 qui en fut en quelque sorte
le prélude. Cette cérémonie est un véritable événement dans l’histoire de
l’Église : c’est la première fois que cette dernière procède à des
béatifications en aussi grand nombre. Il semblerait que des actes d’une
telle importance soient appelés à se répéter : selon le porte-parole de l’Eglise
espagnole, Juan Antonio Martínez Camino, 2 000 dossiers sont actuellement
instruits sur les quelque 10 000 personnes qui ont été
martyrisées pendant la guerre civile espagnole en raison de leur Foi
et qui de ce fait, ont vocation à être béatifiées.
Certes, l’assistance ne fut pas aussi nombreuse que l’espéraient certains
évêques espagnols lorsque l’événement fut annoncé officiellement. Au moment
où les tensions avec le gouvernement socialiste de José Luis Zapatero
étaient les plus fortes, l’objectif d’un million de participants avait même
été envisagé par une Église espagnole décidée à envoyer un signal fort dans
un contexte d’hostilité inédit depuis la Seconde République.
La démarche des évêques espagnols est devenue moins offensive ces dernières
semaines coïncidant ainsi avec une attitude plus conciliatrice de la part du
gouvernement espagnol représenté par Miguel Angel Moratinos, son ministre
des Affaires étrangères. Cette présence marque-t-elle le début d’une
normalisation des relations de l’exécutif espagnol avec le Vatican ? Elle
suscite la méfiance de certains journalistes catholiques qui l’interprètent
comme une tentative d’affaiblir les membres les plus combatifs de la
Conférence épiscopale espagnole. Au cours d’un dîner qui s’est tenu samedi
soir à l’ambassade d’Espagne à Rome, le ministre a souligné en présence du
cardinal Antonio María Rouco Varela, président de la Conférence des évêques
d’Espagne et de ses membres les plus éminents « le caractère noble » et «
réconciliateur » de la béatification des martyrs espagnols du XXe siècle
en raison du pardon qu’ils ont accordé à leurs
bourreaux et sur lequel l’Église espagnole n’a cessé d’insister. Au
moment où José Luis Zapatero présente son projet de loi de « récupération
(sic) de la mémoire historique » excluant les victimes de la répression des
Républicains, et où les médias de gauche présentent la béatification des 498
martyrs comme la contre-offensive de l’Église, Miguel Angel Moratinos a
reconnu que la cérémonie de dimanche était « le résultat de plusieurs années
de préparation » et qu’elle n’allait à l’encontre de quoi que ce soit.
La Conférence des évêques d’Espagne, a simplement voulu rappeler la terrible
persécution dont elle fut l’objet à travers le martyre de 498 des siens et
actualiser leur sacrifice en délivrant, à travers une cérémonie des plus
bouleversantes, un message pour notre temps. Ses adversaires s’attendaient,
par effet boomerang, à encaisser un coup politique dans un « conflit
mémoriel » qu’ils ont eux-mêmes impulsé à travers une démarche historique
sélective excluant les victimes de l’autre Espagne. Mais c’est à une
démonstration de force d’une tout autre nature à laquelle nous avons assisté
dimanche matin : celle des vertus héroïques déployées
dans leur faiblesse par d’humbles serviteurs du Christ qui, livrés à la
populace, abandonnés de tous, soumis pour un grand nombre d’entre eux aux
tortures les plus effroyables, et qui ont puisé dans leur Foi et leur
amour inébranlable pour le Seigneur, la force de porter leur croix
jusqu’à leur Golgotha personnel.
L’émotion était palpable dès le début de la cérémonie, lorsque le cardinal
Rouco Varela, selon le rite établi, a demandé au cardinal José Saraiva
Martins, préfet de la Congrégation pour la cause des saints, que soient
proclamés bienheureux ces hommes et femmes qui « ont supporté leurs
souffrances avec courage et sont morts en pardonnant à leurs bourreaux et en
priant pour eux ». Prenant ensuite la parole en sa qualité de
représentant du Saint-Père, le cardinal José Saraiva Martins a lu le décret
pontifical de proclamation. Une affiche où figuraient les visages des 498
bienheureux a été déroulée sur la façade de la basilique Saint-Pierre tandis
que retentissaient de longs et puissants applaudissements accompagnés du
Christus Vincit. Saisis à la fois par la compassion à l’égard des
souffrances des martyrs et la joie de les voir ainsi glorifiés, beaucoup
d’entre nous ne purent alors contenir davantage leur émotion : ce fut un
moment d’une intensité inouïe, de communion à la radicalité de ce que ces
hommes et ces femmes de Dieu ont vécu par amour pour Lui.
La presse « bien-pensante » des deux côtés
des Pyrénées a traité de cet événement avec un dédain qui va bien
au-delà de la cathophobie cultivée par les plumitifs qui tiennent le haut du
pavé médiatique : il s’agit là d’une véritable insulte à tout principe
élémentaire d’humanité. Cette attitude déshonore ceux qui, dans les médias,
par paresse ou mauvaise foi, ont en quelque sorte nié ou relativisé cette
tragédie par détestation de l’Église. Car derrière l’histoire personnelle de
chaque martyr, il y a bel et bien un crime contre l’humanité : on ne peut
qualifier autrement le traitement inhumain subi par chacun d’entre eux.
Plutôt que de relayer des poncifs vieux d’un demi-siècle et de gloser sur le
prétendu jeu politique des évêques espagnols ou leur crypto-franquisme, nos
belles âmes de la presse du soir devraient lire quelques biographies
contenues dans l’imposant ouvrage édité par la Conférence épiscopale
espagnole pour l’occasion. Ils découvriraient ce qui est arrivé à Apolonia
Lizárraga y Ochoa de Zabalegui, supérieure générale des carmélites, âgée de
69 ans, conduite à la checa (1) d’un quartier de Barcelone où elle fut sciée
vivante et son corps jeté en pâture à un élevage de porcs voisin. Autre fin
édifiante, celle de Felix Echevarria, franciscain de Cordoue, à qui ses
bourreaux ont arraché les yeux, coupé les oreilles et arraché la langue
avant de l’achever après quatre heures d’agonie parce qu’il refusait de
blasphémer. Où encore celle de Francisco Magin, frère salésien : alors qu’il
était conduit dans un cimetière pour y être exécuté, une milicienne
communiste lui fait des avances. Celle-ci, furieuse de se voir repoussée,
émascule le jeune homme qui, en se vidant de son sang, trouve encore la
force de crier à la face de ses bourreaux : « Vive
le Christ Roi ! »
Ce cri devant la mort fut celui de la plupart des prêtres, religieux,
religieuses et laïcs béatifiés dimanche dernier. D’autres martyrs ont choisi
de témoigner de leur espérance face au peloton d’exécution par l’éclat d’un
sourire et en bénissant Dieu telles la sœur Luisa Perez Adriá et 23 autres
moniales qui furent fusillées contre un mur du cimetière de l’Almudena à
Madrid. La hiérarchie ecclésiastique ne fut pas moins épargnée. Les évêques
surent eux aussi faire preuve du même héroïsme tel Mgr Cruz Laplana y Laguna,
évêque de Cuenca. Alors que le maire de la ville lui proposait de revêtir un
uniforme devant lui permettre de s’évader au milieu d’une escouade de la
garde civile, le courageux prélat répondit qu’il n’avait qu’un uniforme, sa
soutane, et un devoir : rester auprès des âmes qui lui étaient confiées. Ses
dernières paroles furent pour ses bourreaux : « Que Dieu vous pardonne,
comme je vous pardonne et vous bénis. » En faisant désormais mémoire le
6 novembre de ces 498 bienheureux, l’Église donne à nos contemporains
l’opportunité de méditer ces nouveaux exemples de vies vécues dans le Christ
jusqu’au don le plus absolu. L’histoire de ces martyrs doit nous conduire,
selon les mots du cardinal Saraiva Martins à « examiner nos vies avec
courage et prendre des résolutions concrètes, pour voir si cette foi et cet
amour se manifestent de façon héroïque dans notre vie ». Comme le
Saint-Père Benoît XVI l’a rappelé avant l'Angélus
du dimanche 28 octobre : « L’Évangile nous engage jusqu’à la mort.
»
David Fontey
(1) Checa : adaptation en espagnol par les
Républicains eux-mêmes du terme russe Tchéka pour désigner les centres
d’interrogatoire des milices de gauche de Madrid et Barcelone.
Article extrait du n° 6456 du Samedi 3 novembre 2007
Sources: www.vatican.va
- par l’Abbé Nicola Bux et l’abbé Salvatore Vitiello
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 05.11.2007 - BENOÎT XVI
- T/Doctrine |