Le proximité du pape Benoît XVI avec
les orthodoxes |
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Rome, le 04 juillet 2008 -
(E.S.M.) - Nous le savons le pape Benoît XVI a fait du
rapprochement avec les orthodoxes une priorité de son pontificat. Nous
avons pu constater lors des célébrations d'inauguration de l'année
Paulinienne, la proximité du Saint-Père avec les orthodoxes et en
particulier avec le Patriarche Bartholomée Ier.
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Le patriarche de Moscou
Alexis II avec le cardinal Walter Kasper -
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Le proximité du pape Benoît XVI avec les orthodoxes
Dans l'interview qui suit, il s'agit plus
particulièrement du rapport entre l’Église de Rome et l’Église orthodoxe
russe
«La patience est la petite fille de l’espérance»
Interview du cardinal Walter Kasper, président du Conseil pontifical pour la
Promotion de l’unité des chrétiens: « Pour nous chrétiens, l’espérance est
le grand don pascal; c’est pour cela que pour les chrétiens, l’espérance
n’est pas quelque chose d’utopique, mais la conséquence de la réalité de la
Résurrection. Dans la Bible, l’espérance est toujours liée à la patience. La
patience est la petite fille de l’espérance »
Interview du cardinal Walter Kasper par
Giovanni Cubeddu
Éminence, où en sommes-nous, sur la route qui unit Moscou et Rome ?
WALTER KASPER: On ne peut parler du rapport actuel entre le Patriarcat de
Moscou et l’Église catholique sans rappeler notre longue histoire commune,
parce qu’au fond, même si on ne peut pas parler de pleine communion, nous
sommes une unique Église. Nous partageons les mêmes sacrements, le même
épiscopat et nous reconnaissons aussi tous les sacrements des orthodoxes. À
Mogilev, en Russie, il y avait déjà un archevêché avant la révolution; et on
ne peut oublier que l’impératrice Catherine a reçu les jésuites mis à
l’écart par l’Église catholique. La révolution de 1917 a été une grande
tragédie pour l’Église, qu’elle soit orthodoxe ou catholique, mais elle nous
a fait le don du courageux témoignage de nombreux martyrs. On avait espéré
qu’après la chute du communisme, une nouvelle histoire aurait commencé, mais
de nouveaux malentendus ont malheureusement surgi lorsque l’Église
gréco-catholique en Ukraine, qui avait tant souffert, est sortie des
catacombes. Le document de la Commission pontificale “Pro Russia” de 1992 a
cependant éclairci que l’Église catholique ne veut pas faire de prosélytisme
en Russie mais simplement continuer à exercer son assistance pastorale aux
fidèles locaux en collaborant pleinement avec le Patriarcat de Moscou. Ceci
en vertu du document de Balamand, émis en 1993, qui juge sans ambiguïté
l’uniatisme dépassé en tant que méthode, inutile aujourd’hui et demain pour
le rapprochement des Églises. Chose très importante.
Jusqu’ici, nous avons dépassé au niveau des principes une grande partie des
problèmes qui se sont présentés; nous avons institué par ailleurs à Moscou
une commission mixte pour discuter des différents obstacles concrets qui se
présentent au fur et à mesure, et nous avons obtenu de bons résultats. Nous
avons ainsi réussi a rétablir entre-temps un dialogue avec les Églises
orthodoxes dans leur ensemble et nous sommes très heureux que l’Église
orthodoxe russe y participe, parce qu’elle est un partenaire important à nos
yeux. Il existe actuellement des problèmes intra orthodoxes entre
Constantinople et Moscou en ce qui concerne la reconnaissance de l’Église en
Estonie; mais ce sont des questions dans lesquelles nous préférons ne pas
intervenir, tout en insistant pour que soient trouvés des compromis qui
permettent de poursuivre ce dialogue si important pour l’avenir de l’Église
orthodoxe et pour la nôtre. Dans ce monde globalisé, il n’est plus tolérable
de devoir assister à des polémiques entre les Églises. C’est pour cela qu’il
est nécessaire d’entreprendre – et nous avons commencé à le faire – un
chemin de rapprochement là où le schisme entre Orient et Occident avait
déclenché un long processus d’éloignement. Il est fondamental qu’il y ait un
dialogue théologique entre les deux Églises et j’ai l’impression que nous
sommes sur la bonne voie. Je ne m’attends pas à ce que l’on arrive demain ou
après-demain à la pleine unité entre l’Église catholique et les Églises
orthodoxes. Ce ne sera pas un processus rapide, parce qu’il ne suffit pas
d’un échange au sommet: il est fondamental que le peuple soit impliqué, lui
aussi, or ceci demande du temps.
Dans une interview du
patriarche Alexis II par Giovanni Cubeddu et Fabio Polito, Sa Sainteté le
patriarche Alexis II a aussi mentionné un dialogue "par le bas" qui fait
bien augurer et qui doit être développé. L'interview s'intitule :
quelques pensées d'Alexis II sur Benoît XVI (lire
ici)
KASPER: Bien sûr! Il s’agit de la collaboration pratique dans le domaine des
valeurs éthiques, de la justice sociale, des droits de l’homme, de la
confrontation avec les laïcs et avec le processus de sécularisation qui
investit l’Europe. Sur ces questions, les deux Églises ont des conceptions
presque identiques, elles peuvent et elles veulent donc collaborer. Les
premiers pas ont été faits, l’on pourra se rapprocher encore et se connaître
mieux afin de surmonter quelques-uns des obstacles majeurs qui existent des
deux côtés: les préjugés, qui ne peuvent être dépassés que par des
rencontres personnelles. C’est pour cela que le Patriarcat de Moscou a
commencé - et c’est à son honneur - à nouer des rapports avec les Églises
catholiques locales de Milan, de Paris, de Vienne et d’autres encore. Tout
ceci aide à se connaître mieux et à mieux s’apprécier. Le 18 mai 2006, le
pape Benoît XVI a reçu le Métropolite Kirill de Smolensk et Kaliningrad,
Président du Département des relations extérieures du Patriarcat orthodoxe
de Moscou et de toutes les Russies. (lire
ici)
Un autre élément de cette stratégie est notre Comité pour la collaboration
avec les Églises orthodoxes, à travers lequel nous distribuons des bourses
d’études à de jeunes prêtres – ces derniers nous sont signalés par le
patriarche ou par l’évêque local – pour leur permettre de faire des études à
Rome ou dans d’autres universités catholiques pendant quelques années, ce
qui leur permet de connaître notre Église. Là, les jeunes apprennent une
langue occidentale et, une fois retournés dans leur pays, ils arrivent en
général à occuper une position importante, dans la mesure où ils ont
bénéficié d’une meilleure formation. Cet échange d’étudiants doit
certainement être poursuivi. Ensuite, nous nous occupons de la traduction de
nombreux textes théologiques en cyrillique, et cela aide aussi à mieux se
comprendre.
Je voudrais aussi rappeler les belles amitiés qui s’étaient déjà développées
par le passé! Par exemple, entre le patriarche de Moscou et le cardinal
Etchegaray, une amitié qui est née bien avant la chute de l’Union
soviétique. (En août de l'année dernière, le Card. Etchegaray avait remis au
Patriarche un message cordial du pape Benoît XVI, accompagné d'un présent
personnel
(ici). Ajoutons que les relations entre la KEK
[Conférence des Églises européennes, ndr] et le CCEE
[Conseil des Conférences épiscopales d’Europe, ndr]
ne cessent de se consolider, et qu’aujourd’hui, nous sommes aussi en bons
rapports avec le Département pour les Relations extérieures du Patriarcat
russe, dirigé par le métropolite Kirill. Il s’agit là de petits ruisseaux
qui pourront un jour, nous l’espérons, déboucher dans la grande rivière du
rétablissement d’une pleine communion entre les Églises.
Et vous, comment
imaginez-vous ce moment ?
KASPER: Une pleine union ne signifie pas une unité uniformisante. La
tradition orthodoxe et la tradition latine ont au fond la même foi, mais
avec des expressions différentes, et cette diversité est aussi une richesse.
C’est pour cela que personne ne pense imposer le système latin aux Églises
orthodoxes ou vice versa. L’Esprit de Dieu nous fera don de cette unité
quand il le voudra, mais ce sera une unité dans la diversité, une diversité
dans l’unité. C’est lorsqu’on en sera là que se posera
la question de la primauté de l’évêque de Rome, un problème qui ne
peut être dépassé du jour au lendemain. Il faudra de longues discussions,
déjà entamées au cours de nos rencontres à Belgrade et à
Ravenne, et
nous verrons comment cela se terminera…
Je ne suis pas un optimiste superficiel. C’est l’espérance qui me soutient,
parce que l’unité est pour nous un commandement de
Notre Seigneur, qui a promis que chaque prière en Son nom sera exaucée.
C’est pour cela que nous espérons dans l’aide de Dieu, dans l’aide de
l’Esprit Saint.
En ce qui concerne le
dialogue avec l’orthodoxie, quels sont les résultats les plus manifestes du
chemin parcouru ?
KASPER: À mon avis, si l’on observe les deux Églises, on constate des deux
côtés un renouvellement patristique au cours du siècle dernier. Nous
connaissons mieux les Pères latins, tandis que les orthodoxes insistent plus
sur les Pères grecs, où leur tradition, dont la richesse n’a rien à envier à
la nôtre, trouve sa source. C’est pour cela que nous aurions beaucoup à
apprendre de la patrologie grecque, comme eux de notre patrologie latine. La
patrologie orientale est très sensible au Mystère de Dieu, tandis que la
sensibilité occidentale est plus conceptuelle. De même, leur richesse
liturgique représente un grand patrimoine, et c’est toujours pour moi une
expérience touchante que de participer aux liturgies orthodoxes, en Russie
ou ailleurs.
Voilà: nous pouvons apprendre les uns des autres. Par exemple, la conception
orientale, si enracinée, de la koinonìa, de la communio comme
structure de l’Église – en Russie Sobornost – pourrait nous être
utile, à nous aussi. Certes, nous aussi, nous connaissons le concept de
communio, mais nous nous sommes parfois limités, autrefois, à en
souligner unilatéralement l’aspect de la primauté, qui est fondamental pour
nous. D’autre part, primauté et koinonìa, primauté et collégialité,
ne sont pas contradictoires mais complémentaires dans une sorte de
dialectique interne. L’Église n’est pas un système fermé sur lui-même, mais
ouvert, c’est pour cela qu’est importante la présence en son sein de ces
deux “pôles”. Je pense que nous avons déjà beaucoup appris de leur
conception de koinonìa, mais il y a encore beaucoup à apprendre. Un
autre aspect, lié à ce que je viens de dire, est l’idée, très belle et très
vivante, de l’ecclésiologie eucharistique. On trouve déjà, dans les débats
préparatoires du Concile Vatican II, le nom d’Afanasiev, qu’on estime être
le père de cette ecclésiologie. Son influence s’est donc beaucoup fait
sentir au cours du Concile, et cette théologie, qui s’est renforcée surtout
après le Concile, est désormais un point de référence et de rencontre entre
notre Église et l’Église orthodoxe russe. L’ecclésiologie eucharistique
affirme que là où est célébrée l’Eucharistie, là se trouve l’Église. Non pas
une partie de l’Église, mais l’Église de Jésus Christ. Ceci est un point
très important, qu’il faut approfondir des deux côtés.
Le canon 34 des Canons
apostoliques reste central dans le débat fraternel avec l’Orthodoxie.
KASPER: Le canon 34 est très important parce qu’il affirme qu’un protos,
un primat, doit toujours agir et décider en communion avec les autres
évêques, et vice versa. Je crois que le fait d’appliquer ce canon, y compris
au niveau universel, est l’une des voies possibles pour arriver à une
solution de la question de la primauté de l’évêque de Rome. En effet,
il est clair pour toutes les Églises orthodoxes que
l’évêque de Rome est le premier des évêques,
mais il faut se mettre d’accord sur ce que veut dire concrètement être le
premier au niveau universel. Nous ne sommes qu’au début de cette
discussion. Nous avons posé certaines bases au cours de la dernière
rencontre de Ravenne, en octobre 2007, mais la question est encore ouverte.
Comme je l’ai dit, personne ne pense imposer le système latin aux Églises
orthodoxes, mais espérons qu’un jour peut-être, dans le sillage de ce canon
et avec l’aide de l’Esprit Saint, on pourra trouver une solution qui
respecte les éléments essentiels des deux Églises.
Vous avez parlé, une fois,
de «réalisme de l’espérance».
KASPER: Pour nous chrétiens, l’espérance est un grand don pascal; c’est pour
cela que l’espérance n’est pas pour les chrétiens quelque chose d’utopique,
mais la conséquence de la réalité de la Résurrection. L’espérance, dans la
Bible, est toujours liée à la patience. La patience est la petite fille de
l’espérance. Mais il faut du temps, les choses doivent mûrir. Nous devons
accomplir avec courage les pas qu’il est possible de faire dès aujourd’hui,
tout en continuant à respecter ceux qui, surtout dans l’Église orthodoxe
russe, n’ont pas abandonné leurs soupçons envers l’“œcuménisme”, une
expression qui est considérée comme négative. Il nous suffit d’avancer avec
prudence et en même temps avec courage, parce que la situation mondiale est
telle que le désir d’une voix commune de l’Église se fait insistant, comme
celui de permettre à tous les chrétiens de participer au même calice.
Comment poursuivre le
dialogue théologique ?
KASPER: Il faut partir d’une idée correcte de dialogue, qui ne suppose ni
indifférence et relativisme, ni imposition de ses propres idées, mais au
contraire, respect mutuel pour l’altérité de l’autre. Sur ces bases, le
dialogue n’est pas seulement un échange d’idées, mais de dons; une occasion
pour s’enrichir mutuellement et pour grandir dans sa propre foi. Les dogmes,
qui sont contraignants pour nos Églises, laissent de l’espace à cette
conception du dialogue parce qu’au fond, ils représentent une doxologie vers
Dieu. D’abord, pour les Églises orthodoxes, le dogme n’est pas seulement une
conceptualisation de l’Évangile. L’Évangile est aussi un mystère qui ne peut
pas totalement être conceptualisé. Saint Thomas d’Aquin définit le dogme
comme une perceptio de la vérité divine qui montre Dieu au-delà
d’elle-même, et qui est tournée vers Dieu. Le dogme reconnaît que Dieu est
toujours plus grand que nos concepts, et c’est pour cela que nous chantons
le Credo pendant la messe. On ne peut chanter un système conceptuel. En
revanche, nous chantons le Credo. Ceci signifie qu’il ne s’agit pas
d’un système conceptuel, mais d’une prière, d’une louange adressée à Dieu.
Une louange qui s’ouvre au Mystère.
Sources :
www.vatican.va -
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 04.07.08 -
T/Œcuménisme |