Le pape Benoît XVI et la musique
liturgique |
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Rome, le 03 décembre 2008 -
(E.S.M.)
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L'Orchestre Philarmonique de Vienne et d'autres très grands interprètes ont
joué dans les basiliques de Rome, dont une fois devant le pape Benoît
XVI.
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La basilique
Sainte-Marie-Majeure -
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Le pape Benoît XVI et la musique liturgique
Grande musique dans les églises de Rome. Mais au Vatican ils sont sourds
Le 03 décembre 2008 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
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L'Orchestre Philarmonique de Vienne et d'autres très grands interprètes ont
joué dans les basiliques de Rome, dont une fois devant le pape Benoît XVI.
Mais à la
curie c'est la paralysie. L'accompagnement musical des messes pontificales
continue à être d'une désolante médiocrité.
Le Festival International de Musique et d’Art
Sacré, qui a lieu chaque automne dans les basiliques pontificales de Rome,
s’est achevé dimanche dernier, le premier de l’Avent.
Organisé par la Fondazione Pro Musica e Arte Sacra, le Festival cherche à
rendre à la grande musique sacrée son véritable cadre, les églises. Un cadre
qui n’a pas toujours l’acoustique parfaite d’une salle de concert mais qui
est le bon pour rendre pleinement vie à des musiques créées à l’origine pour
la liturgie.
"Mon rêve – déclare Hans-Albert Courtial, président de la Fondazione –
c’est
que, chaque dimanche de l’année, il y ait dans une église de Rome une messe
où des chefs d’œuvre de la musique sacrée, grégorienne et polyphonique,
soient joués par des interprètes de très haut niveau".
C’est ce qui est arrivé, le 26 novembre dernier, à la basilique
Saint-Pierre. Le cardinal Angelo Comastri a célébré la messe tandis que
Helmuth Rilling dirigeait magnifiquement la Harmonienmesse en si bémol
majeur de Franz-Joseph Haydn.
Mais le Festival n’a pas proposé que de la musique liturgique. Le premier et
le dernier jour ont été centrés respectivement sur l'Art de la Fugue et
l'Offrande Musicale de Jean-Sébastien Bach, génialement redécouverts et
reproposés, dans leur profondeur métaphysique d’une sublime harmonie
cosmique, par Hans-Eberhard Dentler.
Autre sommet du Festival de cette année, l'exécution, à la basilique
Sainte-Marie-Majeure (photo), du Requiem Allemand de Johannes Brahms. Comme
les deux autres, cette œuvre n’est ni liturgique ni catholique mais
intensément spirituelle. Elle a été magistralement dirigé par Marek Janowski,
avec l'Orchestre de la Suisse Romande et le Rundfunkchor Berlin.
Il y a aussi eu une mémorable Sixième Symphonie d’Anton Bruckner,
interprétée par l’Orchestre Philharmonique de Vienne dirigé par Christoph
Eschenbach, à la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, le 13 octobre. Benoît
XVI était au premier rang.
* * *
La présence du pape Joseph Ratzinger à un concert n’a pas été la seule
nouveauté du Festival de cette année.
Au concert de
Saint-Paul-hors-les-Murs il y avait avec Benoît XVI les 250
cardinaux et évêques du synode mondial sur la Parole de Dieu, qui avait lieu
ces jours-là. Pour beaucoup d’entre eux, Bruckner n’est pas un compositeur
facile, mais l'exemple du pape les a amenés à assister, au moins une fois, à
un grand concert. La sensibilité musicale n’est pas le point fort du monde
ecclésiastique : aux autres concerts du Festival, les hauts prélats se
comptaient sur les doigts d’une seule main.
Autre nouveauté : la place faite à l'orgue. Quatre soirs de suite, du 17 au
20 novembre, l’instrument-roi de la musique liturgique a dominé le programme
du Festival, avec des œuvres anciennes ou contemporaines interprétées dans
diverses églises romaines par des organistes réputés. De plus, les concerts
de Rome étaient le couronnement d’un cycle plus vaste de récitals d'orgue
dans neuf pays d'Europe, commencé en juin en Bavière: un "Euro Via Festival"
qui a lieu chaque année depuis 2005 sous la direction artistique de Johannes Skudlik.
Au même moment, à Rome, on finissait de restaurer deux orgues magnifiques,
ceux de la Salle Académique de l’Institut Pontifical de Musique Sacrée et de
l’église Saint-Antoine-des-Portugais. Celui de l’église Saint-Ignace,
également l’un des plus beaux de Rome, sera restauré dans les mois à venir
par les soins de la Fondazione pro Musica e Arte Sacra et à nouveau utilisé
lors du Festival de 2009.
Brutalement remplacé par les guitares dans tant d’églises de par le monde,
l'orgue a récemment donné de petits signes de renaissance. C’est ainsi que
la conférence des évêques d’Italie a organisé, le mois dernier, un séminaire
d’études pour organistes et liturgistes, intitulé : "L'orgue à tuyaux. Des
siècles de cheminement au service de la liturgie".
Mais le cheminement reste très ardu. Non seulement l'orgue est largement
absent des rites liturgiques, mais on le néglige même à d’autres moments où
il serait tout à fait adapté. La basilique Saint-Pierre elle-même donne le
mauvais exemple. A chaque célébration liturgique où le pape est présent, la
basilique est pleine de fidèles bien avant l’heure. Le moment serait idéal
pour utiliser l’orgue, qui créerait une atmosphère plus recueillie de
préparation au rite liturgique. Il n’en est rien. L'orgue est là, les
organistes aussi, des milliers de fidèles seraient heureux d’écouter une
bonne musique qui leur élèverait l’âme. Seule manque la volonté de décider
quelque chose d’aussi simple.
A Rome, une sorte de paralysie musicale affecte les célébrations du pape.
Les idées de Benoît XVI en matière de musique liturgique sont archiconnues
grâce à ses écrits, très critiques envers la dégradation qui a eu lieu.
Mais, après plus de trois ans de pontificat, presque rien n’a changé. Au
Vatican, il n’y a toujours pas d’organisme ayant autorité pour la musique
sacrée. La Chapelle Sixtine, que dirige Mgr Giuseppe Liberto, est l'ombre de
son glorieux passé. Et quand ce n’est pas la Chapelle Sixtine qui chante aux
messes papales, c’est le règne du style "comédie musicale" de Mgr Marco Frisina, maître de chapelle à Saint-Jean-de-Latran, la cathédrale de Rome.
Sur ce point aussi, le Festival International de Musique et d’Art Sacré a
donné une leçon. Le chœur du sanctuaire de l’Immaculée Conception de
Washington, dirigé par Peter Latona, est venu des États-Unis, celui de la
cathédrale de Spire, dirigé par Leo Krämer, d’Allemagne, pour interpréter
les messes et les motets de Giovanni Pierluigi da Palestrina, Tomás Luis de
Victoria, Luca Marenzio, Claudio Monteverdi, les grands maîtres de chapelle
des cathédrales de Rome et d'Europe aux XVIe et XVIIe siècles.
Rome et l’Italie ne manquent pourtant pas de bons exécutants pour cette
grande musique polyphonique. En fait, le plus génial interprète de
Palestrina au monde est sûrement Mgr Domenico Bartolucci. Mais, justement,
il dirige Palestrina dans des salles de concert et non plus lors des messes
papales avec la Chapelle Sixtine, qu’il a dirigée et dont il a été exclu
sans ménagements en 1997. Aujourd'hui, il est difficile de trouver, à Rome
et en Italie, un chœur d’église capable d’interpréter ces compositeurs au
cours d’une célébration liturgique.
S’il faut un Festival pour faire redécouvrir de telles merveilles, cela veut
dire qu’il reste beaucoup de chemin à parcourir.
Le site trilingue – italien, anglais, allemand – du Festival de musique
sacrée qui a lieu chaque automne dans les basiliques pontificales de Rome,
et des restaurations d’œuvres d’art réalisées grâce à lui:
►
Festival Internazionale di Musica e Arte Sacra
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France.
Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 03.12.2008 -
T/Musique Sacré |