Benoît XVI, un pape qui rassure ! |
 |
Rome, le 03 juillet 2007 -
(E.S.M.)
- Le pape Benoît XVI se fait
pédagogue et rappelle des évidences théologiques et ecclésiales : « La
communion et l’unité sont des éléments essentiels et partie intégrante
de l’Eglise catholique.
|
La foi au quatre coin du
monde
-
Pour agrandir l'image:
►
Cliquer
Benoît XVI, un pape qui rassure !
Lettre de Benoît XVI à l’Eglise catholique en Chine
Le Pape Benoît XVI a adressé une lettre aux évêques, prêtres, consacrés et
laïcs de l'Église catholique en République populaire de Chine. Publiée en
chinois, anglais, français et italien, elle se compose de deux parties
("Situation de l'Église. Aspects théologiques", "Orientations pour la vie
pastorale") et d'une conclusion. Elle est accompagnée d’une note explicative
qui retrace, notamment, la situation de l’Église en Chine ces 50 dernières
années.
Quelle est la portée de ce texte ? Dans quel
contexte s’inscrit-il ? Regards croisés du père Charbonnier et de Régis
Anouil, des Missions étrangères de Paris.
Interview du père Charbonnier, Directeur du Service
Relais France Chine aux Missions étrangères de Paris
Quelle est l’importance de cette lettre ?
Elle était attendue depuis janvier puisqu’elle avait été annoncée à la
réunion qui a eu lieu à Rome avec des évêques chinois. Elle a été présentée
au gouvernement chinois un peu à l’avance, ce qui explique peut-être le
délai qu’il y a eu avant publication. C’est un événement important qui
marque une étape historique. C’est une clarification de la part du pape
Benoît XVI, car il y a eu beaucoup de confusion ces dernières années en
Chine du fait de la division entre les catholiques.
Entre l’Église officielle et l’Église clandestine ?
On parlait injustement de deux Églises et un point important de la lettre
est de marquer qu’il n’y a qu’une seule Eglise en Chine. A travers cette
lettre, le Pape s’adresse à tous les évêques, prêtres et fidèles. Il parle
des divisions entre clandestins et officiels, mais il ne parle pas de deux
Églises.
En quoi y a-t-il une clarification ?
La
Lettre indique les voies de coopération avec le gouvernement chinois en
appréciant les progrès qui ont été réalisés ces dernières années, en
souhaitant que les catholiques chinois puissent remplir leur rôle de
citoyens, tout en demandant au gouvernement de leur laisser la liberté
religieuse. Il rappelle au gouvernement que l’Église est gouvernée par les
évêques et que le gouvernement n’a pas à nommer les évêques ni s’ingérer
dans les affaires religieuses. Il souhaite une coopération entre État et
Église dans le respect de l’autonomie de chacun.
Que devient le contentieux sur les nominations
d’évêques ?
Benoît XVI recommande aux évêques secrètement approuvés par Rome de mieux
faire connaître qu’ils sont en union avec le Siège apostolique et aux
évêques clandestins de chercher à être reconnus officiellement par l’État.
Il souligne que les ordinations illicites des évêques qui n’ont pas fait de
demande pour être reconnus, n’en sont pas moins valides, comme sont valides
les sacrements qu’ils administrent. Il rassure ainsi les fidèles «
clandestins » qui craignaient de pêcher en recevant les sacrements
administrés par ces évêques.
Les restrictions antérieures publiées en 1988 sont révoquées et remplacées
par de nouvelles dispositions qui constituent de nouvelles bases pour une
meilleure entente entre les catholiques et entre l’Église catholique et le
gouvernement. Ces directives de 88 portaient notamment sur la communion avec
les évêques non reconnus par Rome. Depuis ils ont été pratiquement tous
reconnus.
Quel peut être l’effet immédiat de cette lettre auprès
des catholiques et du gouvernement chinois ?
Aujourd’hui les choses sont plus claires. Les directives s’adressent à tous
les catholiques en essayant de favoriser leur communion. Le gouvernement n’a
pas opposé de rejet à la lettre du pape. Sa réponse est mesurée. Le
ministère des Affaires étrangères s’abrite encore officiellement derrière la
condition répétée que tout accord passe d’abord par une rupture du Vatican
avec Taiwan. Mais pour Rome c’est une question secondaire. Le Vatican a déjà
annoncé que si le gouvernement de la République populaire de Chine était
d’accord avec sa position sur les nominations d’évêques et pratiquait une
véritable liberté religieuse, l’ambassade serait déplacée de Taiwan à Pékin.
Dans l’ensemble cette Lettre est amicale pour la Chine. C’est une base de
discussion sur des questions précises.
***
Repères sur l’Église en République populaire de
Chine
Bien que les statistiques en la matière restent difficiles à vérifier, les
estimations portent sur un nombre de catholiques oscillant entre 10 et 12
millions. Selon les provinces, les catholiques affiliés à l’Église
officielle représenteraient 60 % et les catholiques clandestins 40 % mais de
nombreux catholiques « clandestins » fréquentent les églises officielles où
le prêtre et l’évêque sont reconnus par le Vatican.
La Chine compte 138 diocèses avec plus de 40 sièges vacants et 60 % des
évêques ont plus de 75 ans. On compte plus de 2 200 prêtres « officiels »
dont les trois quarts ont été ordonnés durant ces 12 dernières années,
tandis que 1 300 séminaristes étudient dans 19 grands séminaires approuvés
par le gouvernement. On estime que près de 800 autres étudient dans une
dizaine de séminaires clandestins.
Sur les 5 200 religieuses, très jeunes pour la majorité d’entre elles, les «
clandestines » sont estimées au nombre de 2 000.
Les répressions contre les catholiques et plus particulièrement les «
clandestins » n’ont jamais cessé ; en dépit des progrès réalisés en matière
de liberté religieuse, les observateurs parlent de 18 évêques et 19 prêtres
incarcérés. La dernière incarcération connue est celle de Mgr Wu Qinjing,
évêque de Zhouzhi, âgé de 38 ans, dans la province de Shaanxi, le 17 mars
dernier.
Pour aller plus loin :
sur le site du Vatican,
note explicative retraçant les 50 dernières années de l’Église en Chine
« Avance au large »
« Duc in altum. » (Luc, 5, 4)
‘Avance au large’. Telle est l’invitation que Benoît XVI a adressée samedi
dernier « aux évêques, aux prêtres, aux personnes consacrées et aux fidèles
laïcs de l’Église catholique en République populaire de Chine ». Sa
Lettre
était attendue depuis plusieurs mois, elle fera date par sa portée – elle
annule « toutes les facultés qui avaient été concédées pour faire face à des
exigences pastorales particulières, nées en des temps spécialement
difficiles » – et par sa signification.
Au fil d’une lettre longue de 24 pages, Benoît XVI n’apporte aucun élément
nouveau ou contraire à ce que son prédécesseur le pape Jean Paul II avait pu dire aux catholiques
de Chine durant son long pontificat. Pas plus qu’il n’indique un changement
de direction dans ce qu’est « la politique » du Saint-Siège vis-à-vis de
Pékin. Non, il se saisit de l’occasion pour rappeler aux catholiques de
Chine, et au premier chef à leurs évêques, l’urgence du temps présent : « la
nouvelle évangélisation ». Si normalisation il doit y avoir au sujet des
questions concernant l’Eglise de Chine, elle est bien là : le pape note que
« le peuple » chinois « s’est mis en marche pour parvenir à des objectifs
significatifs de progrès, dans les domaines économique et social, suscitant
l’intérêt du monde entier » ; ce réveil économique – et « la recherche de
modernité » qu’il induit – s’accompagnent d’un double phénomène : « D’une
part, on note, spécialement parmi les jeunes, un intérêt croissant pour la
dimension spirituelle et transcendante de la personne humaine, avec comme
conséquence un intérêt pour la religion, particulièrement pour le
christianisme. D’autre part, on remarque, en Chine aussi, la tendance au
matérialisme et à l’hédonisme, qui, à partir des grandes villes, est en
train de se répandre à l’intérieur du pays. »
Le constat est informé et lucide : la Chine est arrivée à un stade de
développement où le seul enrichissement matériel ne suffit à nourrir les
Chinois et où ceux-ci se montrent ouverts et curieux des choses de l’esprit
et de la religion ; en même temps, il est urgent d’agir si l’on ne veut pas
que cette ouverture et curiosité soient étouffées par une modernité synonyme
d’athéisme. Les ouvriers pour travailler à cette vigne immense sont peu
nombreux. Benoît XVI parle de l’Eglise catholique en Chine comme d’« un
petit troupeau présent et agissant dans le vaste territoire d’un peuple
immense qui marche dans l’histoire ».
A ce « petit troupeau » (1 % du 1,3 milliard de Chinois), le pape adresse un
message à la tonalité éminemment pastorale. Il revient à grands traits sur
l’histoire de ces cinquante dernières années pour dire sa compréhension de
la complexité de la situation de l’Eglise de Chine d’aujourd’hui. Il
souligne que c’est une communauté qui souffre de fortes oppositions, dues
non pas à des positions doctrinales divergentes mais aux organismes imposés
par le pouvoir pour contrôler cette Eglise. L’Association patriotique des
catholiques chinois n’est jamais nommée, mais c’est bien d’elle dont est
question et qui célèbrera son cinquantième anniversaire ce 15 juillet.
De cette Chine en plein essor, Benoît XVI dit ressentir « l’urgence de
confirmer dans la foi les catholiques chinois et de favoriser leur unité ».
C’est la raison d’être de sa lettre : donner des orientations théologiques
et pastorales aux catholiques de Chine pour leur permettre d’« avancer au
large ». Le pape se fait pédagogue et rappelle des évidences théologiques et
ecclésiales : « La communion et l’unité sont des éléments essentiels et
partie intégrante de l’Eglise catholique. » Dans le contexte chinois de ces
dernières années, « les ministères pétrinien et épiscopal » ont été
dépréciés. Le renouveau passe nécessairement par le retour de la figure du
pape et de l’évêque au centre de la vie de l’Eglise. « Nihil sine
Episcopo. » Rien sans l’évêque. Le principe pastoral et missionnaire
traditionnel est rappelé.
Dans le contexte chinois, ce n’est pas là un rappel rigide à une discipline
purement hiérarchique. Non, c’est bien le principe même de l’Eglise
catholique qui est énoncé. Il ne s’agit pas de rechercher « un conflit
permanent avec les Autorités civiles légitimes », mais il est inacceptable
de se montrer « complaisant » envers ces autorités « quand ces dernières
interfèrent de manière indue dans des matières qui concernent la foi et la
discipline de l’Eglise ». Le projet d’une Eglise « indépendante » du
Saint-Siège, dans le cadre religieux, est incompatible avec la doctrine
catholique, réaffirme le pape.
Dans la Chine de 2007, où des évêques et des prêtres sont encore en prison,
la situation n’est cependant pas identique à celle qui prévalait aux heures
sombres du maoïsme triomphant ni même à celle des réformes de l’ère Deng
Xiaoping. Dans ces années-là, les pressions étaient telles que l’on pouvait
comprendre que certains, dans l’Eglise, cédaient aux autorités
gouvernementales. Aujourd’hui, l’étau s’est desserré et le pape appelle le
corps épiscopal à une unité visible.
« La clandestinité ne rentre pas dans la normalité de la vie de l’Eglise »,
écrit Benoît XVI et c’est aux autorités gouvernementales de reconnaître les
évêques et les fidèles qui ont choisi la clandestinité par qu’ils ne
pouvaient accepter, au nom de l’intégrité de leur foi, « l’ingérence
d’organismes d’Etat dans ce qui touche à l’intime de la vie de l’Eglise ».
Aux évêques « officiels », ordonnés sans l’accord du pape mais qui ont
demandé et obtenu leur légitimation par Rome, le pape demande de poser «
toujours plus de gestes sans équivoque de leur pleine communion avec le
successeur de Pierre ». Et quant aux évêques, « en nombre très réduit »,
ordonnés sans mandat pontifical et non encore légitimés par Rome, il leur
appartient de poser les gestes nécessaires pour parvenir à la communion avec
le pape.
Les statistiques qui accompagnent la lettre le disent : 49 évêques sont
décédés entre 2000 et 2007 ; pour 148 diocèses, l’Eglise de Chine compte une
centaine d’évêques et « plus de 60 % d’entre eux ont plus de 80 ans ».
L’urgence est là : aujourd’hui déjà, demain plus encore, le peuple des
catholiques de Chine se retrouve sans pasteurs. La question des nominations
épiscopales « est un des problèmes les plus délicats dans les relations du
Saint-Siège » avec le gouvernement chinois. Benoît XVI est clair : « La
nomination des évêques de la part du pape est la garantie de l’unité de
l’Eglise et de la communion hiérarchique. » Mais c’est là une prérogative
qui demeure dans le strict domaine religieux et que ne doit pas redouter
Pékin. « Il ne s’agit […] pas d’une autorité politique qui s’introduirait de
manière indue dans les affaires internes d’un État et en léserait la
souveraineté », souligne le pape. Il insiste sur ce point et utilise
toutefois le conditionnel (« Le Saint-Siège aimerait être entièrement libre
de la nomination des évêques. ») pour dire son « souhait » de trouver un
accord avec le gouvernement chinois quant aux modalités que peuvent revêtir
ces nominations.
Benoît XVI reconnaît que l’Église en Chine jouit, en regard du passé, d’une
plus grande liberté religieuse, mais il ajoute aussitôt qu’il est indéniable
que « demeurent de graves limitations qui touchent le cœur de la foi et qui,
dans une certaine mesure, étouffent l’activité pastorale ». Comment accepter
aujourd’hui, écrit-il en substance, que des évêques ne soient pas libres
d’organiser les diocèses dont ils ont la charge ? Comment accepter que les
évêques ne puissent se réunir en une conférence épiscopale maître de son
ordre du jour et libre de ses débats ? Comment accepter que les évêques,
individuellement et collectivement, ne puissent entretenir de rapports
normaux avec Rome et le pape ? C’est donc bien au gouvernement chinois,
celui qui se prépare à accueillir les Jeux olympiques à Pékin et une
exposition universelle à Shanghai, ce gouvernement d’une Chine sûre
d’elle-même, de montrer, par des gestes concrets, qu’il ne craint pas de
respecter « une authentique liberté religieuse ». Quant au reste,
c’est-à-dire notamment la normalisation des relations diplomatiques et le
transfert de la nonciature apostolique de Taipei à Pékin, cela « demande du
temps » et « présuppose la bonne volonté des deux parties ». Pour sa part,
le Saint-Siège demeure toujours ouvert aux négociations, qui sont
nécessaires pour dépasser le difficile moment présent, écrit encore le pape.
Régis Anouil
Rédacteur en chef d’Églises
d’Asie, agence d’information des Missions Étrangères de Paris
►
Sources:
www.vatican.va
- cel.fr
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 02.07.2007 - BENOÎT XVI |