Le pape Benoît XVI profondément
marqué par Romano Guardini |
 |
Le 02 octobre 2008 -
(E.S.M.)
- Ces lignes sont librement inspirées de "L’Esprit de la liturgie", de Romano Guardini,
le grand philosophe et théologien allemand dont l'enseignement a
profondément marqué la pensée du pape Benoît XVI. Puissent-elles nous
aider à mieux saisir la pensée du Saint-Père.
|
Romano
Guardini
Le pape Benoît XVI profondément marqué par Romano Guardini
La liturgie au croisement de la vérité et de la culture
Le 02 octobre 2008 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
-
Romano Guardini, un grand intellectuel italo-allemand qui a disparu depuis
plus de quarante ans, a eu une forte influence sur notre pape actuel, Benoît
XVI. Le texte du site "Pro Liturgia" qui suit, a été librement inspiré par "L’Esprit de la
liturgie", de Romano Guardini, le grand philosophe et théologien
allemand dont l'enseignement a profondément marqué la pensée du pape Benoît
XVI.
La santé et la croissance de toute vie spirituelle - aussi bien naturelle
que surnaturelle - sont soumises à des conditions précises. Il arrive que
ces conditions soient transgressées dans des cas individuels et des
conditions particulières. Ces transgressions, même si elles peuvent être
excusables pour différentes raisons, ne sont pas, à la longue, sans danger
pour notre foi. Par contre, dès qu'on entre dans un cadre qui dépasse celui
de l'individu, un cadre qui donc concerne directement et collectivement un
grand nombre de personnes, alors la transgression n'est plus permise. A ce
niveau-là, en effet, les individus ont besoin de se retrouver dans une
institution stable capable d'exercer de façon permanente une influence
bénéfique sur les âmes.
Puisque les hommes ont des tempéraments divers et des appartenances sociales
variées, l'institution qui exerce une influence sur les âmes ne peut pas
rester prisonnière de cas ou d'intérêts particuliers: l'attitude spirituelle
qui naît de l'adhésion à cette institution doit être et doit rester
objective, positive. Le moyen achevé dont se sert l'Église en tant
qu'institution pour communiquer et nourrir une vie spirituelle objective se
trouve être la liturgie. La liturgie de l'Église est elle-même objective
dans la mesure où elle s'est développée selon toutes les modalités d'une
civilisation authentiquement humaine: elle s'est ainsi rendue capable
d'exprimer l'ordre essentiel de la foi et de la piété collective. Le but
premier de la liturgie n'est donc pas le culte rendu à Dieu par l'individu,
mais le culte rendu à Dieu par la communauté croyante qui, comme telle,
dépasse l'addition numérique des individus. Cette communauté, c'est
l'Église. La liturgie est et ne peut être que le culte public et officiel de
l'Église: c'est bien à ce titre qu'elle obéit à une forme de piété d'une
objectivité et d'une ritualité strictes.
En vertu de sa spécificité, la liturgie ne peut pas se confondre avec une
forme de piété populaire: la liturgie et les exercices de piété populaire
ont chacun leur valeur et leur légitimité, mais ont des buts différents. Et
c'est toujours au culte liturgique que doit sans conteste être accordé le
primat.
En étudiant la liturgie, il apparaît clairement que c'est la "pensée" qui
est le support de la prière collective. Ainsi la prière liturgique ne
peut-elle être dominée et vivifiée que par le dogme et non par les
sentiments ou les états d'âme de tel ou tel croyant. Ceci ne veut pas dire
que dans la prière liturgique les sentiments ne puissent pas trouver leur
place; mais ceci signifie que le coeur qui se tourne vers Dieu doit prendre
la pensée comme guide: la pensée qui soutient et clarifie les émotions pour
éviter que la liturgie soit transformée en un prétexte à la simple
émotivité.
La pensée seule - en tant qu'aspiration à la vérité - à le privilège d'être
une valeur universelle: dès lors, la pensée illuminée par le dogme libère de
la servitude du sentiment et donne aux idées une réelle clarté ainsi qu'une
efficacité pratique. Pour autant, la liturgie ne saurait être calquée sur un
aspect particulier de la pensée dogmatique: elle se doit de demeurer
attachée au dogme pris dans sa totalité. En effet: une liturgie dont la base
ne serait constituée que par un seul aspect de la vérité ne parviendrait à
satisfaire que des tempéraments en affinité avec ce seul aspect. Il faut
donc considérer avec une légitime précaution certains groupes de fidèles
dont les célébrations liturgiques, souvent en raison d'une certaine
sensibilité, portent à n'accentuer que tel aspect du dogme, souvent au
détriment de tel autre aspect tout aussi important. En effet, la liturgie
est par nature destinée à satisfaire les besoins spirituels de tous les
croyants, et à cet effet elle se doit de présenter la totalité de la vérité
dogmatique dans la plénitude de sa richesse. La liturgie n'est donc
véritablement éducatrice de notre foi que si elle intègre dans sa prière
toute l'ampleur du dogme: c'est à cette seule condition qu'elle devient la
manifestation de la Vérité dans le vêtement de la prière. La liturgie n'est
donc féconde que si elle ne s'enferme pas dans une partie de la vérité
révélée mais qu'au contraire, elle expose la plénitude de l'enseignement
divin.
Affirmer - comme cela a été fait plus haut - que la pensée est essentielle
en liturgie ne doit pas conduire à imaginer ou à vouloir des célébrations où
la pensée en viendrait à dominer froidement le culte: la chaleur du
sentiment doit pénétrer la forme que revêt la prière et, dans une certaine
mesure aussi, la vie affective doit pouvoir se refléter dans le culte
liturgique en veillant cependant à ne pas l'asservir. C'est ici que doit
intervenir la nécessaire "discipline de l'âme"; car une prière destinée à
tous et faite pour nourrir une vie entière doit obligatoirement respecter
les lois de la juste mesure.
Ainsi, la prière qui ne veut rien perdre de sa fécondité et qui veut être
accessible à tous se doit-elle de veiller à ce que les fidèles ne soient pas
conduits à évaluer la qualité d'une célébration liturgique à l'aune de leur
émotion religieuse: l'expression "c'était une belle messe" n'a donc aucun
sens du point de vue liturgique. Une messe est catholique ou elle n'est pas.
Et si elle est catholique, alors elle est nécessairement "belle". Pas
"belle" au sens esthétique du terme, mais plutôt "belle" comme l'est
fondamentalement la vérité divine. Cette "beauté" reflet de la vérité divine
se manifeste dans toute liturgie authentiquement catholique, qu'elle soit
célébrée dans la majesté d'une cathédrale, dans le calme d'un monastère, ou
encore dans l'humilité d'une chapelle isolée.
Mais pour que la liturgie demeure l'expression d'une vie spirituelle
s'alimentant à la vérité dogmatique, il faut veiller à ce que coule dans
l'Église une culture de haut niveau: la culture donne à la religion le moyen
de s'exprimer; elle aide à voir clair, à distinguer l'essentiel de
l'accessoire, à déterminer le but à poursuivre, la route à prendre. "La
Grâce suppose la Nature": la vie spirituelle exige, pour demeurer saine,
le substrat de la nature, de la nature libérée de sa brutalité et de sa
sauvagerie grâce à la culture. Dès que manque un fond de noble et riche
culture, on voit la spiritualité s'arrêter, se figer en se desséchant; dès
que disparaît la base de la saine nature on assiste à la dégénérescence de
la spiritualité dans la fadeur, dans l'insincérité, dans l'absence de
naturel et finalement dans la stérilité. Dès que baisse le niveau culturel
qui alimente la prière, on voit la pensée s'appauvrir, les images perdre de
leur souplesse, les sentiments devenir grossiers et monotones; dès que la
nature n'est plus là pour faire circuler son sang chaud et vivant dans la
prière, on voit la pensée se vider, le sentiment s'étioler ou se raffiner à
l'excès, les symboles et les images s'anémier. L'absence des deux, de la
culture et de la nature, réalise très exactement la Barbarie, l'antipode
absolu de cette Scientia Vocis qui s'atteste dans la liturgie et que
cette même liturgie révère d'ailleurs comme un privilège direct et
magnifique de l'Esprit créateur.
Le fidèle qui participe à la liturgie doit immédiatement sentir que l'action
cultuelle est tout entière tissée d'une culture: non pas d'une culture qui
prendrait la liturgie comme un prétexte pour s'étaler orgueilleusement, mais
d'une culture qui permet la maîtrise interne de la pensée, de la volonté, de
l'émotion.
Observons nos messes actuelles: regardons comment elles sont célébrées, où
elles sont célébrées, ce qu'on y dit, ce qu'on y chante... Et
interrogeons-nous: sont-elles l'expression de la vérité dogmatique?
ont-elles une portée universelle? Sont-elles le reflet d'une culture
authentique?
(Ces lignes sont librement inspirées de "L’Esprit de la liturgie", de Romano Guardini, le grand philosophe et théologien allemand dont l'enseignement a
profondément marqué la pensée du pape Benoît XVI. Puissent-elles nous aider
à mieux saisir la pensée du Saint-Père.)
►
Benoît XVI a un père, Romano Guardini
Sources : PRO LITURGIA
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 02.10.2008 -
T/Liturgie |