La Déclaration de Manhattan: le
manifeste qui secoue l'Amérique |
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Rome, le 25 novembre 2009 -
(E.S.M.)
- Elle a été signée par des leaders catholiques, protestants,
orthodoxes, unis pour défendre la vie et la famille. Avec la
Maison-Blanche ans dans le collimateur. En Europe elle aurait été
qualifiée d'"ingérence" politique de l’Eglise.
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National Press Club de
Washington
La "Déclaration de Manhattan": le manifeste qui secoue l'Amérique
Le 25 novembre 2009 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
-
De ce côté-ci de l'Atlantique, l’information est
passée presque inaperçue: un vigoureux appel public pour défendre la vie, le
mariage, la liberté religieuse et l'objection de conscience, lancé
conjointement – c’est rare – par des personnalités de tout premier plan de
l’Eglise catholique, des Eglises orthodoxes, de la Communion anglicane et
des communautés évangéliques des Etats-Unis.
Parmi les leaders religieux qui ont présenté l'appel au public, vendredi 20
novembre au National Press Club de Washington, il y avait le
cardinal Justin Rigali, archevêque de Philadelphie, Donald W. Wuerl,
archevêque de Washington, et Charles J. Chaput, évêque de Denver.
Et parmi les 152 premiers signataires de l'appel, il y a 11 autres
archevêques et évêques catholiques des Etats-Unis : le cardinal Adam Maida,
de Detroit, Timothy Dolan, de New York, John J. Myers, de Newark, John
Nienstedt, de Saint-Paul et Minneapolis, Joseph F. Naumann, de Kansas City,
Joseph E. Kurtz, de Louisville, Thomas J. Olmsted, de Phoenix, Michael J.
Sheridan, de Colorado Springs, Salvatore J. Cordileone, d’Oakland, Richard
J. Malone, de Portland, David A. Zubik, de Pittsburgh.
L'appel, un texte de 4 700 mots, est intitulé : "Manhattan Declaration : A
Call of Christian Conscience [Déclaration de Manhattan. Un appel de la
conscience chrétienne]" et tire son nom du quartier de New-York où en fut
discutée et décidée la publication, en septembre dernier.
La rédaction finale du texte a été confiée au catholique Robert P. George,
professeur de droit à la Princeton University, et aux évangéliques Chuck
Colson et Timothy George, ce dernier étant professeur à la Beeson Divinity
School de la Samford University à Birmingham, en Alabama.
Parmi les autres signataires figurent le métropolite Jonah Paffhausen,
primat de l’Eglise orthodoxe en Amérique, l'archiprêtre Chad Hatfield, du
séminaire théologique orthodoxe Saint-Wladimir, le révérend William Owens,
président de la Coalition of African-American Pastors, et deux éminentes
personnalités de la Communion anglicane : Robert Wm. Duncan, primat de
l’Anglican Church in North America, et Peter J. Akinola, primat de
l’Anglican Church in Nigeria.
Parmi les catholiques, en dehors des évêques, les signataires de l’appel
sont le jésuite Joseph D. Fessio, disciple de Joseph Ratzinger/pape Benoît
XVI et fondateur
de la maison d’édition Ignatius Press, William Donohue, président de la
Catholic League, Jody Bottum, directeur de la revue "First Things", George
Weigel, membre de l'Ethics and Public Policy Center.
La "Déclaration de Manhattan" ne tombe pas dans le vide, elle survient à un
moment critique pour la société et la vie politique américaines : celui où
le gouvernement de Barack Obama est très occupé à faire passer un plan de
réforme de l'assurance-maladie aux Etats-Unis.
En défendant la vie humaine dès la conception et le droit à l'objection de
conscience, l'appel conteste deux points mis en danger par le projet de
réforme actuellement en discussion au Sénat.
Au Congrès, une vive action de lobbying menée au grand jour par l'épiscopat
catholique a contribué à éventer le danger. Le vote final ayant garanti à la
fois le droit à l'objection de conscience et le blocage de tout financement
public en faveur de l'avortement, la conférence des évêques a présenté ce
résultat comme un "succès". Mais maintenant, au Sénat, la bataille repart de
zéro, sur un texte initial que l’Eglise juge à nouveau inacceptable. La
conférence des évêques a déjà adressé aux sénateurs une lettre indiquant les
modifications qu’elle souhaite voir apporter à tous les points litigieux.
Mais maintenant, il y a, en plus, l'œcuménique "Déclaration de Manhattan",
dont le dernier chapitre, intitulé "Lois injustes", s’achève sur cette
annonce solennelle :
"Nous ne nous laisserons pas contraindre au silence, à l'acquiescement, à la
violation de nos consciences par quelque pouvoir que ce soit, culturel ou
politique, quelles que puissent être les conséquences pour nous".
Et tout de suite après :
"Nous rendrons à César ce qui est à César, pleinement et sans rechigner.
Mais en aucun cas nous ne rendrons à César ce qui est à Dieu".
Dans un passage au début du texte, l'appel dit aussi :
Alors que l'opinion publique prend une direction pro-life, des forces
puissantes et déterminées agissent en faveur de l'avortement, de la
recherche destructrice d’embryons, du suicide assisté et de l'euthanasie.
Et c’est vrai. D’après les plus récentes enquêtes, l'opinion publique
américaine est en train de virer sensiblement vers une plus grande défense
de la vie de l’enfant conçu.
De 1995 à 2008, toutes les études ont montré que les pro-choice étaient plus
nombreux que les pro-life, avec un écart net entre les deux groupes : 49%
pour le premier, 42% pour le second.
Mais aujourd’hui les positions sont inversées. Les pro-choice, descendus à
46%, sont dépassés par les pro-life, qui sont montés à 47%.
Les leaders religieux qui harcèlent Obama sur les terrains minés de
l'avortement, du mariage entre homosexuels, de l'euthanasie, savent donc
qu’une partie large et croissante de la société américaine est avec eux.
Le lancement de la "Déclaration de Manhattan" a eu un fort écho dans les
médias américains, sans que personne n’ait protesté contre cette "ingérence"
politique des Eglises.
Mais les Etats-Unis sont ainsi faits. Il y a depuis toujours une rigoureuse
séparation entre les religions et l’Etat. Il n’existe pas de concordats et
ils ne sont même pas concevables. Mais c’est justement pour cela que la
liberté de parler et d’agir dans le domaine public est reconnue aux Eglises.
En Europe le paysage est très différent. Ici la "laïcité" est pensée et
appliquée en conflit, latent ou explicite, avec les Eglises.
C’est peut-être un des motifs du silence qui en Europe, en Italie, à Rome, a
accueilli la "Déclaration de Manhattan", vue comme un phénomène typiquement
américain, étranger aux critères européens de jugement.
Même différence de vision quant au refus de donner la communion
eucharistique aux hommes et femmes politiques catholiques favorables à
l’avortement. La controverse est très vive aux Etats-Unis, pas de ce côté-ci
de l'Atlantique. Cette différence de sensibilité divise aussi la hiérarchie
de l’Eglise catholique : en Europe et à Rome la question ne se pose
pratiquement pas, elle est laissée à la conscience de chacun.
Il faut cependant noter que, sur ce point, quelque chose est en train de
changer, même en Europe. Et pas seulement parce qu’il y a un pape comme
Benoît XVI qui affirme sa préférence pour le modèle américain de relations
entre les Eglises et l’Etat.
Il y a quelques jours, un signal est venu d’Espagne, où l’Eglise catholique
est aux prises avec un gouvernement hostile idéologiquement, celui de José
Luis Rodríguez Zapatero, et où une loi libéralisant encore davantage
l'avortement est en cours d’élaboration.
Selon des informations reprises par "L'Osservatore Romano", l’évêque Juan
Antonio Martínez Camino, secrétaire général de la conférence des évêques
d’Espagne, n’a pas hésité à avertir les hommes et femmes politiques
catholiques que, s’ils votent cette loi, ils ne pourront être admis à la
communion eucharistique, car ils se seront mis en situation objective de
“péché public”.
Ce n’est pas tout. Mgr Martínez Camino a ajouté que ceux qui disent qu’il
est moralement légitime de tuer un enfant à naître se mettent en
contradiction avec la foi catholique et risquent donc de tomber dans
l’hérésie et d’être excommuniés “latae sententiae”, c’est-à-dire
automatiquement.
C’est la première fois qu’en Europe un dirigeant de conférence d’évêques
tient des propos aussi "américains".
Mais revenons à la "Déclaration de Manhattan". Son texte intégral,
avec la liste des 152 premiers signataires, se trouve sur la page web ►
Manhattan Declaration- A Call of Christian Conscience
Et voici ci-dessous la traduction du texte abrégé qui a été diffusé avec le
texte intégral de la "Déclaration":
Manhattan Declaration Executive Summary
Le 20 novembre 2009
Les chrétiens, quand ils ont vécu conformément aux idéaux les plus élevés de
leur foi, ont défendu les faibles et les vulnérables et travaillé
inlassablement pour protéger et renforcer les institutions vitales de la
société civile, à commencer par la famille.
Nous sommes des chrétiens orthodoxes, catholiques et évangéliques, unis en
ce moment pour réaffirmer les vérités fondamentales de la justice et du bien
commun et lancer un appel à nos concitoyens, croyants ou non, pour qu’ils
s’unissent à nous afin de les défendre. Ces vérités sont (1) le caractère
sacré de la vie humaine, (2) la dignité du mariage comme union conjugale
entre mari et femme, et (3) les droits de la conscience et de la liberté
religieuse. Ces vérités, dans la mesure où elles fondent la dignité de
l’homme et le bien-être de la société, sont inviolables et non négociables.
Comme elles sont de plus en plus attaquées par des forces puissantes dans
notre culture, nous sommes obligés, aujourd’hui, de parler fort pour les
défendre et de nous engager à les honorer pleinement, quelles que soient les
pressions exercées sur nous et sur nos institutions pour qu’elles soient
abandonnées ou fassent l’objet de compromis. Nous prenons cet engagement non
comme partisans d’un groupe politique mais comme disciples de Jésus-Christ,
le Seigneur crucifié et ressuscité, qui est la Voie, la Vérité et la Vie.
Vie humaine
La vie des enfants à naître, des handicapés et des personnes âgées est de
plus en plus menacée. Alors que l'opinion publique prend une direction
pro-life, des forces puissantes et déterminées agissent en faveur de
l'avortement, de la recherche destructrice d’embryons, du suicide assisté et
de l'euthanasie. Bien que la protection des faibles et des personnes
vulnérables soit le premier devoir d’un gouvernement, aujourd’hui le pouvoir
du gouvernement est souvent appelé à faire la promotion de ce que Jean-Paul
II appelait "la culture de mort". Nous nous engageons à travailler sans
cesse pour une égale protection de tout être humain innocent, à tous les
stades de son développement et dans toutes les situations. Nous refuserons
notre implication ou celle de nos institutions dans la destruction de vies
humaines et nous soutiendrons de toutes les façons possibles ceux qui, en
conscience, feront de même.
Mariage
L'institution du mariage, déjà attaquée par la promiscuité, l’infidélité et
le divorce, risque d’être redéfinie et donc subvertie. Le mariage est
l'institution originelle et la plus importante pour assurer la santé,
l'éducation et le bien-être de tous. Là où le mariage se dégrade, les
pathologies sociales se développent. La tendance à redéfinir le mariage est
un symptôme, plus que la cause, d’une érosion de la culture du mariage. Elle
reflète une perte de compréhension du sens du mariage tel qu’il est
incorporé dans notre droit civil et dans nos traditions religieuses. Or il
est essentiel de résister à cette tendance, car y céder serait renoncer à la
possibilité de recréer une juste conception du mariage et, par là, à
l’espoir de reconstruire une saine culture du mariage. Cette résistance
bloquerait l’idée fausse et destructrice que ce qui est important, dans le
mariage, c’est le romanesque et autres satisfactions pour adultes et non
pas, intrinsèquement, le caractère unique et la valeur d’actes et de
relations dont le sens est donné par la capacité à créer, promouvoir et
protéger la vie. Le mariage n’est pas une "construction sociale", c’est
plutôt une réalité objective – l'union scellée par un accord entre un mari
et une femme – que la loi a le devoir de reconnaître, d’honorer et de
protéger.
Liberté religieuse
La liberté religieuse et les droits de la conscience sont en grand danger.
Ces principes fondamentaux de justice sont menacés de manière évidente par
les efforts faits pour affaiblir ou éliminer l'objection de conscience du
personnel et des institutions de santé, ainsi que par les dispositions
anti-discrimination qui sont utilisées comme armes pour obliger les
institutions religieuses, organismes caritatifs, entreprises et prestataires
de services à accepter (et même à faciliter) des activités et des rapports
qu’ils jugent immoraux, sous peine de perdre leur activité. Les attaques
contre la liberté religieuse menacent gravement non seulement des individus,
mais aussi des institutions de la société civile, notamment des familles,
des organismes caritatifs et des communautés religieuses. Le bon état de ces
institutions constitue une indispensable protection contre les excès
gouvernementaux et il est indispensable au bon fonctionnement de toutes les
institutions, gouvernement compris, sur lesquelles s’appuie la société.
Lois injustes
En tant que chrétiens, nous croyons aux lois et nous respectons l'autorité
des gouvernants terrestres. Nous considérons comme un privilège spécial de
vivre dans une société démocratique où le poids moral de la loi sur nous est
encore plus fort à cause du droit de tous les citoyens à participer au
processus politique. Mais, même dans un régime démocratique, les lois
peuvent être injustes. Et dès les origines notre foi nous a enseigné que la
désobéissance civile est un devoir face à des lois gravement injustes ou à
des lois qui impliquent que nous fassions ce qui est injuste ou immoral. De
telles lois n’ont pas le pouvoir de contraindre en conscience parce qu’elles
ne peuvent revendiquer d’autre autorité que celle de la simple volonté
humaine.
Nous proclamons donc que nous ne nous soumettrons à aucun texte qui nous
forcerait, nous ou les institutions que nous dirigeons, à accomplir ou à
faciliter des avortements, des recherches destructrices d’embryons, des
suicides assistés, des euthanasies ou tout autre acte violant les principes
de la profonde, intrinsèque et égale dignité de tout membre de la famille
humaine.
De plus nous proclamons que nous ne nous laisserons pas contraindre au
silence, à l'acquiescement, à la violation de notre conscience par quelque
pouvoir que ce soit, culturel ou politique, quelles que puissent être les
conséquences pour nous.
Nous rendrons à César ce qui est à César, pleinement et sans rechigner. Mais
en aucun cas nous ne rendrons à César ce qui est à Dieu.
Le site officiel de la "Déclaration de Manhattan", avec possibilité de la
signer ►
manhattandeclaration.org
***
La lettre du 20 novembre 2009 envoyée par la conférence des évêques des
Etats-Unis aux sénateurs, à propos de la loi réformant le système de santé ►
"Dear
Senator..."
Avec un mémorandum sur la discussion précédente au Congrès ►
"What
does the Stupak amendment really do-"
A propos des critiques de la hiérarchie catholique américaine contre le
gouvernement Obama et de ses divergences avec la curie de Rome ►
La hache de l'évêque frappe Obama. Et la curie au Vatican(8.10.2009)
*
A propos de la communion donnée ou refusée aux hommes et femmes politiques
catholiques pro avortement et de la note écrite à ce sujet en 2004 par celui
qui était alors le cardinal Joseph Ratzinger :
►
Le candidat à la vice-présidence choisi par Obama est catholique. Mais les
évêques lui refusent la communion (27.8.2008)
►
Un problème américain : faut-il ou non donner la communion aux hommes et
femmes politiques catholiques pro avortement ? (2.5.2008)
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France.
Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 25.11.2009 -
T/International |