Le prêtre doit être avant tout un
"homme de Dieu" rappelait Benoît XVI |
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ROME, le 12 Juin 2007 -
(E.S.M.) -
Lettre publiée par le Card. Claudio HUMMES, Préfet de la Congrégation
pour le clergé et S. Exc. Mgr Mauro PIACENZA, Archevêque titulaire de
Vittoriana, Secrétaire à l'occasion de la Journée mondiale de Prière
pour la Sanctification des Prêtres.
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Le prêtre, nourri par la
Parole de Dieu, est le témoin universel de la charité du Christ
Lettre aux prêtres - Congrégation pour le Clergé
Chers amis prêtres,
La Journée mondiale de Prière pour la Sanctification des Prêtres, qui sera
célébrée lors de l'imminente Solennité du Sacré-Cœur de Jésus, nous offre
l'occasion de réfléchir ensemble sur le don de notre ministère sacerdotal,
en partageant votre sollicitude pastorale pour tous les croyants et pour
l'humanité tout entière, et de manière spécifique pour la portion du Peuple
de Dieu qui est confiée à vos Evêques respectifs, dont vous êtes les plus
précieux collaborateurs.
Le thème qui est proposé cette année, «Le prêtre, nourri par la Parole de
Dieu, est le témoin universel de la charité du Christ», est en harmonie avec
le récent Magistère de Benoît XVI et, de manière particulière, avec
l'Exhortation apostolique post-synodale
Sacramentum Caritatis
(22 février 2007). Dans celle-ci, le Saint-Père écrit: «Nous ne
pouvons garder pour nous l'amour que nous célébrons dans ce Sacrement. II
demande de par sa nature d'être communiqué à tous. Ce dont le monde a
besoin, c'est de l'amour de Dieu, c'est de rencontrer le Christ et de croire
en lui. C'est pourquoi l'Eucharistie n'est pas seulement source et sommet de
la vie de l'Église; elle est aussi source et sommet de sa mission: "Une
Église authentiquement eucharistique est une Église missionnaire"
(Propositîo 42)» (n. 84).
1.Homme de Dieu, homme de la mission
Apporter Dieu aux hommes: telle est la mission essentielle du prêtre, une
mission que le saint ministre est rendu apte à réaliser car, étant choisi
par Dieu, il vit avec Lui et pour Lui. Le Saint-Père,
dans son discours à la session d'inauguration de la Ve Conférence
générale de l'épiscopat latino-américain et des Caraïbes
(13 mai 2007; cf. ORLF n. 22 du 29 mai 2007),
ayant pour thème «Disciples et missionnaires de Jésus Christ, afin que nos
peuples aient la vie en Lui», a dit, en s'adressant aux prêtres: «Les
premiers promoteurs de la condition de disciple et de la mission sont ceux
qui ont été appelés "pour être avec Jésus et être envoyés prêcher"
(cf. Me 3, 14),.. Le prêtre doit
être avant tout un "homme de Dieu" (I Tm
6, I I) qui connaît Dieu directement, qui a une profonde amitié
personnelle avec Jésus, qui partage avec les autres les sentiments du Christ
lui-même (cf. Pli 2, 5). C'est
uniquement de cette manière que le prêtre sera capable de conduire les
hommes à Dieu, incarné en Jésus Christ, et d'être le représentant de son
amour» (n. 5).
Cette vérité est exprimée dans le verset d'un psaume sacerdotal, qui faisait
autrefois partie du rite d'admission à l'état clérical: «Seigneur, mon
partage et ma coupe: de toi dépend mon sort»
(Ps 16, 5). Nous savons par le
Deutéronome (cf. 10, 9)
qu'après la prise de possession de la Terre promise, chaque tribu était
bénéficiaire — par tirage au sort — d'une portion de celle-ci, accomplissant
ainsi la promesse divine faite à Abraham. Seule la tribu de Lévi ne recevait
aucune terre, car sa terre était Dieu lui-même. Cette affirmation avait
certainement aussi une raison pratique: les prêtres ne vivaient pas, comme
les autres tribus, de la culture de la terre, mais des offrandes. Toutefois,
cette assertion du psalmiste est le signe et le symbole d'une réalité plus
profonde: le véritable fondement de la vie sacerdotale, la base de
l'existence du prêtre, la terre de sa vie est Dieu lui-même. L'Église a vu
dans cette interprétation vétéro-testamentaire l'explication de ce que
signifie la mission sacerdotale, à la suite des apôtres et dans la communion
avec le Christ lui-même.
Benoît XVI a dit à ce propos: «Le prêtre peut et doit dire aujourd'hui
également avec le Lévite: "Dominas pars hereditatis meae et calicis mei".
Dieu lui-même est ma part de terre, le fondement extérieur et intérieur de
mon existence. Ce théocentrisme de l'existence sacerdotale est nécessaire
précisément dans notre monde totalement fonctionnel, dans lequel tout est
fondé sur des prestations qui peuvent être calculées et vérifiées. Le prêtre
doit véritablement connaître Dieu de l'intérieur et l'apporter ainsi aux
hommes: tel est le service prioritaire dont l'humanité a besoin aujourd'hui»
(Discours
à la Curie Romaine à l'occasion des vœux de
Noël, du 22 décembre 2006; cf. ORLF n. 1 du 2 janvier 2007).
Si un prêtre, dans sa vie, perd de vue le caractère central de Dieu, tout le
fondement de l'action pastorale disparaît et, dans l'excès de l'activisme,
il risque de perdre le contenu et le sens du service pastoral.
C'est alors que pourraient se développer la volonté de se mettre en avant et
des extravagances déplacées. Au lieu de donner la substance, ce sont des
succédanés qu'il transmettrait. Il s'agiterait en vain, s'épuisant sans
progresser.
Seuls ceux qui ont appris «à rester avec le Christ», sont prêts pour être
«envoyés évangéliser» par Lui avec authenticité
(cf. Me 3, 14). Un amour passionné
pour le Christ est le secret d'une annonce convaincue du Christ. «Sois un
homme de prière avant d'être un prédicateur», disait saint Augustin
(De Doctrina christiana, 4, 15, 32: PL 34,
100), en exhortant les ministres ordonnés à être des disciples de
prière à l'école du Maître.
L'Église, en célébrant la Solennité du Très Saint Cœur de Jésus, invite tous
les croyants à élever le regard de la foi «vers Celui qu'ils ont transpercé»
(Jnl9, 37), vers le Cœur du Christ, signe vivant et éloquent de l'amour
invincible de Dieu et source intarissable de grâce. Elle le fait, en
exhortant les prêtres à rechercher en eux-mêmes ce signe, en tant que
dépositaires et administrateurs des richesses du Cœur du Christ, et à
diffuser l'amour miséricordieux du Christ sur les autres, sur tous.
Véritablement, «l'amour du Christ nous saisit»
(2 Co 5, 14), écrit saint Paul.
«Si tu veux aimer le Christ, étends ta charité à toute la terre, car les
membres du Christ se trouvent dans le monde entier», nous rappelle saint
Augustin (Commentaire à la 1ère Lettre de
saint Jean 10, 5).
C'est pourquoi chaque prêtre doit avoir un esprit missionnaire; ou plutôt,
un esprit véritablement «catholique», il doit «repartir du Christ» pour
s'adresser à tous, en se rappelant de ce que notre Sauveur a affirmé, Lui
qui désire que «tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître
pleinement la vérité» (1 Tm 2, 4-6).
Le prêtre est appelé à rencontrer le Christ dans la prière, et à le
connaître et l'aimer également sur le chemin de la Croix, qui est le chemin
actif et rempli d'abnégation du service de la charité. Ce n'est qu'ainsi
qu'est prouvée et témoignée l'authenticité de son amour pour Dieu et que se
reflète sur tous le Visage miséricordieux du Christ. «La beauté de cette
image resplendit en nous qui sommes dans le Christ, lorsque nous nous
montrons des hommes bons dans les œuvres», nous rappelait saint Cyrille
d'Alexandrie (Tractatus ad Tiberium
Diaconum socioque, II, in divi Johannis Evangelium).
2.Pour être un authentique témoin de la charité du
Christ dans la société
La mission que le prêtre reçoit dans l'Ordination n'est pas un élément
extérieur et juxtaposé à la consécration, mais elle en constitue la
destination intrinsèque et vitale: «La consécration est pour la mission»
(Jean-Paul II, Exhort. ap.
Pastores Dabo Vobis, n. 24).
«L'amour de Dieu et l'amour du prochain se fondent l'un dans l'autre: dans
le plus petit, nous rencontrons Jésus lui-même et en Jésus nous rencontrons
Dieu», a écrit le Saint-Père
(Lett. enc.
Deus Caritas est,
n. 15). Dans l'Eucharistie — qui est un trésor inestimable de
l'Église —, en particulier en devenant de généreux ministres du Pain de vie
éternelle, nous sommes invités à contempler sans cesse la beauté et la
profondeur du mystère de l'amour du Christ et à reverser l'élan de son Cœur
amoureux sur tous les hommes sans distinction, en particulier sur les
pauvres et sur les plus faibles, sur les pauvres d'entre les pauvres que
sont les pécheurs, à travers un service de charité constant, humble et le
plus souvent caché.
La tension missionnaire représente une part constitutive de l'existence
sacerdotale. Le Saint-Père
écrit à ce sujet: «La mission première et fondamentale qui nous vient des
saints Mystères que nous célébrons est de rendre témoignage par notre vie.
L'émerveillement pour le don que Dieu nous a fait dans le Christ imprime à
notre existence un dynamisme nouveau qui nous engage à être témoins de son
amour. Nous devenons témoins lorsque, par nos actions, nos paroles et nos
comportements, un Autre transparaît et se communique»
(Exhort. ap. post-synodale
Sacramentum Caritatis,
n. 85).
Le prêtre est appelé à se faire «pain rompu pour la vie du monde», à servir
chacun avec l'amour du Christ qui nous a aimés «jusqu'au bout»: ainsi,
l'Eucharistie devient dans la vie sacerdotale ce qu'elle signifie dans la
célébration. Le Sacrifice du Christ est un mystère de libération qui nous
interpelle et nous provoque continuellement.
Que chaque prêtre ressente en lui-même l'urgence d'être réellement un
artisan de justice et de solidarité au milieu des hommes: devant eux, le
prêtre est appelé à témoigner du Christ lui-même. Nourri de la Parole de
vie, les prêtres ne peuvent pas demeurer en marge du combat pour la défense
et la proclamation de la dignité de la personne humaine et de ses droits
universels et inaliénables. Benoît XVI a écrit à cet égard: «C'est
précisément en vertu du Mystère que nous célébrons qu'il nous faut dénoncer
les situations qui sont en opposition avec la dignité de l'homme, pour
lequel le Christ a versé son sang, affirmant ainsi la haute valeur de toute
personne» (ibid, n. 89).
Nous découvrirons le sens véritable de l'amoris officium, de cette
charité pastorale dont nous parle saint Augustin
(In lohannis Evangelium Tractatus 123, 5: CCL
36, 678): l'Eglise comme Épouse du Christ, veut être aimée par le
prêtre de la manière totale et exclusive avec laquelle le Christ lui-même,
Tête et Époux, l'a aimée. Nous comprendrons la motivation théologique de la
loi ecclésiastique sur le célibat dans l'Église latine et de son lien de
coexistence très profonde avec l'Ordination sacrée: comme un don inestimable
de Dieu, comme la participation singulière à la paternité de Dieu et à la
fécondité de l'Église, comme une formidable énergie missionnaire, comme
amour plus grand, comme un témoignage au monde du Royaume eschatologique. Le
célibat, accueilli dans une décision libre pleine d'amour, devient don de
soi, dans et avec le Christ, à son Église et exprime le service du prêtre à
l'Église dans et avec le Seigneur
(cf. Cône. Œcum. Vat. II, Décr.
Presbyterorum ordinis, n. 16; Jean-Paul II, Exhort. ap.
Pastores Dabo Vobis
, n. 29).
Nous pouvons nous demander: mais quels sont ces domaines du témoignage
sacerdotal de la charité du Christ ?
a.Tout d'abord, la mission, le kérygme et la catéchèse; catéchèse des
jeunes et des adultes, des personnes proches et lointaines. En elle, le
message du Christ est transmis sous une forme complète et claire. A l'époque
actuelle, une connaissance adaptée de la foi est urgente, telle qu'elle est
synthétisée dans
le Catéchisme de l’Église Catholique , ainsi que
dans son
Compendium .
Il s'agit de ne pas épargner les efforts pour aller à la recherche des
catholiques qui se sont éloignés et de ceux qui ne connaissent rien ou
presque rien du Christ. En s'adressant aux Évêques du Brésil, Benoît XVI a
dit récemment à ce propos: «L'éducation aux vertus personnelles et sociales
du christianisme fait elle aussi partie de la catéchèse essentielle, ainsi
que l'éducation à la responsabilité sociale... nous devons être de fidèles
serviteurs de la Parole, sans vision réductrice ni confusion dans la mission
qui nous est confiée. Il ne suffit pas d'observer la réalité à partir de la
foi personnelle; il est nécessaire de travailler avec l'Évangile à la main,
en étant ancrés à l'authentique héritage de la Tradition apostolique, sans
interprétations motivées par des idéologies rationalistes» (Discours
du Saint Père
lors de la Rencontre et de la
Célébration des Vêpres avec les Évêques du Brésil, du 11 mai 2007, nn. 4-5;
cf. ORLF n. 21 du 22 mai 2007).
Dans ce domaine, les lieux traditionnels de la catéchèse — les leçons, les
conférences ou les cours de Bible ou de théologie — ne sont pas suffisants,
mais il est nécessaire de s'ouvrir aux autres nouveaux aréopages de la
culture mondialisée: non seulement à la presse, à la radio et à la
télévision, mais il faudra également avoir recours davantage au courrier
électronique, aux sites Internet, aux pages, aux vidéoconférences et à tant
d'autres systèmes récents, pour transmettre efficacement le kérygme à un
grand nombre de personnes. La présence même du pasteur, également
extérieure, avec une attitude adaptée à son «être» doit constituer une
catéchèse pour tous. Nous avons peut-être, parfois, trop sous-évalué cet
aspect que les personnes apprécient et qui, si elle exprime des contenus, ne
constitue pas un formalisme mais une forme en mesure de véhiculer de la
substance.
(fin de la
première partie, nous publierons la suite demain, mercredi 13.06)
Voir également la rubrique :
►
Vie sacerdotale
Sources:
www.vatican.va
-
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 12.06.2007 - BENOÎT XVI -
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