PRÉAMBULE
La
présente instruction qui, par l'intermédiaire des évêques, s'adresse aux
prêtres curés et à leurs confrères collaborateurs dans la « cura
animarum », s'insère de manière conséquente dans le grand contexte
d'une réflexion déjà entreprise depuis quelques années. Avec les
Directoires pour le ministère et la vie des prêtres et des diacres
permanents, avec l'instruction interdicastérielle
Ecclesiae de mysterio, la Lettre circulaire Le
prêtre maître de la Parole, guide de la communauté et ministre des
sacrements, la Congrégation a marché sur les traces des documents du
Concile Vatican II, spécialement Lumen gentium et
Presbyterorum Ordinis, du Catéchisme de l'Église catholique,
du Code de droit canonique et du magistère ininterrompu.
Le présent document, concrètement, est dans le sillon du grand courant
missionnaire du duc in altum, qui marque l'œuvre indispensable de
nouvelle évangélisation du troisième millénaire chrétien. C'est pour
cela, en tenant compte également de nombreuses demandes issues d'une
consultation au niveau mondial, que nous avons saisi l'occasion de
proposer à nouveau une partie doctrinale: pour pouvoir offrir des
éléments de réflexion sur ces valeurs théologiques fondamentales qui
poussent à la mission et qui, quelquefois, sont mises dans l'ombre. On a
cherché aussi à mettre en évidence la relation entre la dimension
ecclésiologico-pneumatologique, qui touche à l'essence du ministère
sacerdotal, et la dimension ecclésiologique, qui aide à comprendre la
signification de sa fonction spécifique.
Cette
instruction entend réserver une attention particulière et affectueuse
aux prêtres qui revêtent le précieux office de curé; en tant que tel,
ils se trouvent constamment au milieu des gens, souvent avec
d'innombrables difficultés. C'est justement cette position, aussi
délicate que précieuse, qui permet d'affronter avec une plus grande
clarté la différence essentielle et vitale entre le sacerdoce commun et
le sacerdoce ordonné, pour faire émerger comme il se doit l'identité des
prêtres et la dimension essentiellement sacramentelle du ministère
ordonné.
Puisqu'on a cherché à suivre les indications, particulièrement riches
jusqu'au plan pratique, que le Saint Père a proposées dans son
allocution aux participants de l'Assemblée Plénière de la Congrégation,
il semble utile de reporter ce texte:
*** ***
***
Messieurs
les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et le sacerdoce,
Très chers frères et sœurs !
1. C'est
avec une grande joie que je vous accueille à l'occasion de l'Assemblée
plénière de la Congrégation pour le Clergé. Je salue cordialement le
Cardinal Darío Castrillón Hoyos, Préfet du dicastère, et je le remercie
pour les paroles courtoises qu'il m'a adressées au nom de toutes les
personnes présentes. Je salue les cardinaux, mes vénérés frères dans
l'épiscopat et les participants à votre Assemblée plénière qui a
consacré son attention à un thème très important pour la vie de
l'Église: le prêtre, pasteur et guide de la communauté paroissiale.
Mettant l'accent sur la fonction du prêtre au sein de la communauté
paroissiale, on met en lumière la place centrale du Christ qui doit
toujours être soulignée dans la mission de l'Église. Le Christ est
présent dans son Église de la façon la plus sublime à travers le
Très-Saint-Sacrement de l'Autel. Le Concile Vatican II enseigne, dans la
Constitution dogmatique Lumen gentium que le prêtre célèbre le
Sacrifice de la Messe et administre les Sacrements in persona Christi
(cf. n. 10). En outre, comme l'observait justement mon vénéré
prédécesseur Paul VI dans son Encyclique Mysterium fidei, à la
suite de la Constitution Sacrosanctum Concilium (n. 7), le Christ
est présent à travers la prédication et la conduite des fidèles, tâches
auxquelles le prêtre est appelé personnellement (cf. AAS 57
[1965] 762 s.).
2. La
présence du Christ, qui, de cette façon, se réalise de manière ordinaire
et quotidienne, fait de la paroisse une authentique communauté de
fidèles. Pour la paroisse, avoir un prêtre qui soit son pasteur propre
est donc d'une importance fondamentale. Le titre de pasteur est
spécifiquement réservé au prêtre. L'Ordre sacré du presbytérat
représente en effet pour lui la condition indispensable et qui doit être
prise en compte pour pouvoir être validement nommé curé (cf. Code de
droit canonique, can. 521, § 1). D'autres fidèles peuvent certes
collaborer activement avec lui, y compris à temps plein, mais, vu qu'ils
n'ont pas reçu le sacerdoce ministériel, ils ne peuvent le remplacer
comme pasteur.
C'est la
relation fondamentale avec le Christ, chef et pasteur, qui définit cette
physionomie ecclésiale particulière du prêtre, en tant qu'il en est la
représentation sacramentelle. Dans l'Exhortation apostolique Pastores
dabo vobis, je notais que « la référence à l'Église est inscrite
dans l'unique et même référence du prêtre au Christ, en ce sens que
c'est la "représentation sacramentelle" du Christ par le prêtre qui
fonde et anime son rapport à l'Église » (n. 16). La dimension ecclésiale
appartient à la substance du sacerdoce ordonné. Il est totalement au
service de l'Église, au point que la communauté ecclésiale a absolument
besoin du sacerdoce ministériel pour avoir le Christ chef et pasteur
présent en son sein. Si le sacerdoce commun est la conséquence du fait
que le peuple chrétien est choisi par Dieu comme pont avec l'humanité et
concerne tout croyant en tant qu'il fait partie de ce peuple, le
sacerdoce ministériel est en revanche le fruit d'une élection, d'une
vocation spécifique: « Jésus appela ses disciples et il en choisit
douze » (Lc 6,13-16). Grâce au sacerdoce ministériel, les fidèles
sont amenés à prendre conscience de leur sacerdoce commun et à le mettre
en œuvre (cf. Ep 4,11-12); le prêtre leur rappelle qu'ils sont
Peuple de Dieu et les rend capables d'« offrir des sacrifices
spirituels » (cf. 1 P 2,5), par lesquels le Christ lui-même fait
de nous un don éternel au Père (cf. 1 P 3,18). Sans la présence
du Christ représenté par le prêtre, guide sacramentel de la communauté,
cette dernière ne serait pas pleinement une communauté ecclésiale.
3. Je
disais auparavant que le Christ est présent dans l'Église de manière
éminente dans l'Eucharistie, source et sommet de la vie ecclésiale. Il
est réellement présent lors de la célébration du saint Sacrifice, ainsi
que dans le pain consacré conservé dans le tabernacle « comme le cœur
spirituel de la communauté religieuse et paroissiale » (Paul VI, lettre
encyclique Mysterium fidei, AAS 57 [1965), 772).
Pour cette
raison, le Concile Vatican II recommande que « les curés veilleront à ce
que la célébration du sacrifice eucharistique soit le centre et le
sommet de toute la vie de la communauté chrétienne » (Déc. Christus
Dominus, n. 30). Privée du culte eucharistique comme de son cœur
battant, la paroisse devient sans vie. Il faut à ce propos se souvenir
de ce que j'écrivais dans la lettre apostolique Dies Domini:
« Parmi les nombreuses activités d'une paroisse, aucune n'est aussi
vitale ou formative pour la communauté que, le dimanche, la célébration
du jour du Seigneur et de l'Eucharistie » (n. 35). Rien ne sera jamais
en mesure de la remplacer. La liturgie de la Parole seule, célébrée
lorsqu'il est réellement impossible d'assurer la présence dominicale du
prêtre est louable de façon à maintenir la foi vivante, mais doit
toujours avoir comme objectif la célébration régulière de l'Eucharistie.
Lorsque le prêtre vient à manquer, on doit supplier Dieu avec foi et de
manière insistante afin qu'il suscite de nombreux et saints ouvriers
pour sa vigne. Dans l'exhortation apostolique Pastores dabo vobis,
je rappelais que « l'attente de nouvelles vocations dans la prière doit
devenir toujours plus une habitude constante et largement partagée par
la communauté ecclésiale tout entière, et par toute réalité ecclésiale »
(n. 38). La splendeur de l'identité sacerdotale, l'exercice intégral du
ministère pastoral qui en découle, ainsi que l'engagement de toute la
communauté dans la prière et dans la pénitence personnelle, constituent
les éléments imprescriptibles d'une pastorale des vocations urgente et
que l'on ne peut remettre à demain. Ce serait une erreur fatale de se
résigner aux difficultés actuelles et de faire comme si l'on devait se
préparer à une Église de demain imaginée presque privée de prêtres. Dès
lors, les mesures adoptées pour pallier aux carences actuelles
finiraient par devenir sérieusement préjudiciables à la Communauté
ecclésiale malgré toute la bonne volonté démontrée.
4. La
paroisse est en outre le lieu privilégié de l'annonce de la Parole de
Dieu. Cette annonce s'articule de diverses manières et chaque fidèle est
appelé à y prendre une part active, spécialement par le témoignage de la
vie chrétienne et la proclamation explicite de l'Évangile, tant aux
non-croyants pour les amener à la foi, qu'à ceux qui sont déjà croyants
afin de les instruire, de les confirmer et de les conduire à une vie
plus fervente. Quant au prêtre, « il annonce la Parole en sa qualité de
“ministre”, qui participe à l'autorité prophétique du Christ et de
l'Église » (Pastores dabo vobis, n. 26). Et pour exercer
fidèlement ce ministère, en correspondant au don reçu, il doit « tout
d'abord acquérir une grande familiarité personnelle avec la Parole de
Dieu » (ibid.). Même s'il devait être dépassé en matière
d'éloquence par d'autres fidèles non-ordonnés, cela n'empêcherait pas
qu'il constitue la représentation sacramentelle du Christ, Tête et
Pasteur, et c'est de là que dérive surtout l'efficacité de sa
prédication. La communauté paroissiale a besoin de l'efficacité de sa
prédication, spécialement au moment le plus caractéristique de l'annonce
de la Parole de la part des ministres ordonnés: c'est pour ce motif que
la proclamation liturgique de l'Évangile et l'homélie qui la suit sont
toutes deux réservées au prêtre.
5. La
fonction de guider la communauté en tant que pasteur, fonction propre du
curé, dérive elle aussi de son rapport particulier avec le Christ, Tête
et Pasteur. C'est une fonction qui revêt un caractère sacramentel. Elle
n'est pas confiée au prêtre par la communauté mais elle provient du
Seigneur par l'intermédiaire de l'évêque. Réaffirmer cela avec clarté et
exercer cette fonction avec une humble autorité constitue un service
indispensable de la vérité et de la communion ecclésiale. La
collaboration d'autres personnes n'ayant pas reçu cette configuration
sacramentelle au Christ est souhaitable et souvent nécessaire. Ceux-ci
ne peuvent toutefois remplacer en aucun cas la tâche de pasteur propre
du curé. En ce qui concerne l'exercice de la charge pastorale d'une
paroisse, les cas extrêmes d'absence de prêtres, qui conseillent une
collaboration plus intense et plus large des fidèles n'ayant pas reçu le
sacerdoce ministériel, ne constituent en aucun cas une exception à ce
critère essentiel pour le soin des âmes tel qu'il est établi de manière
non équivoque par les normes du droit canonique (cf. Code de droit
canonique, can. 517, § 2). Dans ce domaine, aujourd'hui très actuel,
l'exhortation interdicastérielle Ecclesiae de mysterio, que j'ai
approuvée de manière spécifique, constitue la base du chemin à suivre.
En remplissant son rôle de guide, avec une responsabilité personnelle,
le curé bénéficiera de manière évidente des organismes consultatifs
prévus par le droit (cf. Code de droit canonique, can. 536-537),
mais ces derniers organismes devront demeurer fidèles à leur finalité
proprement consultative. Il sera donc nécessaire de se garder de toute
modalité qui, de fait, tendrait à priver de son autorité la conduite du
prêtre curé, dans la mesure où cela dénaturerait la physionomie même de
la communauté paroissiale.
6. J'adresse maintenant une pensée pleine d'affection et de
reconnaissance aux curés présents dans le monde entier, en particulier
ceux qui œuvrent aux avant-postes de l'évangélisation. Je les encourage
à poursuivre leur tâche, difficile mais réellement précieuse pour
l'Église tout entière. Je recommande à chacun d'entre eux de recourir à
l'aide maternelle de la Bienheureuse Vierge Marie dans l'exercice
quotidien du “munus” pastoral, en cherchant à vivre en profonde
communion avec elle. Dans le sacerdoce ministériel, ainsi que je
l'écrivais dans la lettre aux prêtres à l'occasion du Jeudi Saint de
1979, « il y a la dimension merveilleuse et très profonde de notre
proximité avec la Mère du Christ » (n. 11). Quand nous célébrons la
Messe, chers frères prêtres, la Mère du Rédempteur est à côté de nous et
nous introduit dans le mystère de l'offrande rédemptrice de son divin
Fils. “Ad Jesum per Mariam”: que cela soit notre programme
quotidien de vie spirituelle et pastorale! Avec de tels sentiments,
alors que je vous assure de ma prière, je donne à chacun une bénédiction
apostolique particulière que j'étends volontiers à tous les prêtres du
monde.
Jean-Paul
II, audience aux participants
de la Plénière de la Congrégation pour le Clergé, 23 novembre
2001
PREMIÈRE PARTIE
SACERDOCE COMMUN
ET SACERDOCE ORDONNÉ
1. Levez les yeux (Jn 4,35)
1. « Je
vous dis: Levez les yeux et regardez; déjà les champs sont blancs pour
la moisson » ( Jn 4,35). Ces paroles du Seigneur montrent avec
force l'immense horizon de la mission d'amour du Verbe incarné. Le Fils
éternel de Dieu a été envoyé pour que « le monde soit sauvé par lui » (
Jn 3,17) et toute son existence terrestre, existence de totale
identification avec la volonté de salut du Père, manifeste constamment
cette volonté divine que tous soient sauvés, que tous soient rejoints
par le salut éternellement voulu par le Père. Il confie ce projet
historique en dépôt et en héritage à toute l'Église, et d'une manière
particulière, en son sein, aux ministres ordonnés. « Il est vraiment
grand le mystère dont nous avons été faits les ministres. Mystère d'un
amour sans limites, car “ayant aimé les siens qui étaient dans le monde,
il les aima jusqu'au bout” (Jn 13,1) ».
Ayant donc
été habilités, par le caractère et la grâce du sacrement de l'Ordre, et
devenus témoins et ministres de la miséricorde divine, les prêtres comme
ministres de Jésus-Christ se sont volontairement engagés au service de
tous dans l'Église. Quel que soit le contexte social et culturel, dans
toutes les circonstances historiques – y compris celles d'aujourd'hui,
marquées par l'ambiance pesante du sécularisme et de la mentalité de
consommation, ce qui étouffe le sens chrétien dans la conscience de
nombreux fidèles – les ministres du Seigneur sont conscients que « la
victoire qui a vaincu le monde, c'est notre foi » (1 Jn 5,4). Les
conditions sociales actuelles constituent en effet une occasion
opportune pour porter de nouveau l'attention sur la force victorieuse de
la foi et de l'amour dans le Christ et pour rappeler que, malgré les
difficultés et les « froideurs », les fidèles chrétiens – et aussi,
d'une autre façon, tant de non-croyants – comptent beaucoup sur la
disponibilité pastorale active des prêtres. Les hommes désirent trouver
dans le prêtre l'homme de Dieu, qui dise avec Saint Augustin: « Notre
science c'est le Christ et notre sagesse c'est encore le Christ. C'est
lui qui infuse en nous la foi concernant les réalités temporelles et
c'est lui qui nous révèle les vérités concernant les réalités
éternelles ».
Nous sommes à une époque de nouvelle évangélisation: nous devons
apprendre à aller chercher les personnes qui attendent elles aussi de
pouvoir rencontrer le Christ.
2. Dans le
sacrement de l'Ordre le Christ a transmis, à différents degrés, sa
qualité propre de Pasteur des âmes aux évêques et aux prêtres, en les
rendant capables d'agir en son nom et de représenter dans l'Église son
pouvoir de Tête. « L'unité profonde de ce nouveau peuple n'exclut pas la
présence, en son sein, de fonctions différentes et complémentaires.
Ainsi à ces premiers apôtres sont liés d'une manière toute spéciale ceux
qui ont été chargés de renouveler in persona Christi le geste que
Jésus a accompli au cours de la dernière cène, en instituant le
sacrifice eucharistique, “source et sommet de toute la vie chrétienne” (Lumen
gentium, 11). Le caractère sacramentel qui les distingue, en vertu
de l'Ordre reçu, fait que leur présence et leur ministère sont uniques,
nécessaires et irremplaçables ».
La présence du ministre ordonné est une condition essentielle de la vie
de l'Église et pas seulement de sa bonne organisation.
3. Duc
in altum!
Tout chrétien qui perçoit dans son cœur la lumière de la foi et qui veut
cheminer selon le rythme imprimé par le Souverain Pontife, doit chercher
à traduire dans les faits cette invitation pressante qui est résolument
missionnaire. Les pasteurs de l'Église, en particulier, devraient s'en
saisir et la mettre en pratique avec un zèle empressé, puisque c'est de
leur sens surnaturel que dépend la possibilité de bien appréhender les
voies, par lesquelles Dieu veut guider son peuple. « Duc in altum!
Le Seigneur nous invite à repartir au large, en nous fiant à sa parole.
Mettons à profit l'expérience jubilaire et poursuivons dans l'engagement
à témoigner de l'évangile avec l'enthousiasme que suscite en nous la
contemplation du visage du Christ ! ».
4. Il
semble important de rappeler comment les perspectives de fond établies
par le Saint-Père à l'issue du grand jubilé de l'an 2000, ont été
comprises et présentées par lui-même en vue de leur mise en œuvre par
les différentes Églises particulières; le Pape appelle ces dernières à
traduire « en fermes propos et en lignes d'action concrètes »
la
grâce reçue durant l'année jubilaire. Cette grâce met en cause la
mission évangélisatrice de l'Église; en raison de cette mission, la
sainteté personnelle des pasteurs et des fidèles s'impose ; et s'impose
à tous un ardent sens apostolique, qui tienne compte de la spécificité
de chaque vocation particulière – dans la mise en œuvre de leurs propres
responsabilités et de leurs propres devoirs, avec la conscience que le
salut éternel de l'homme dépend de la fidélité à manifester le Christ
par le témoignage de la parole et de la vie. L'urgence apparaît de
donner un plus grand élan au ministère sacerdotal dans l'Église
particulière et spécialement dans la paroisse, sur la base de la
compréhension authentique du ministère et de la vie du prêtre.
Nous autres
prêtres, « nous avons été consacrés dans l'Église pour ce ministère
spécifique. Nous sommes appelés, de diverses façons, à contribuer, là où
la Providence nous place, à la formation de la communauté du Peuple de
Dieu. Notre tâche (...) est de paître le troupeau de Dieu qui nous a été
confié, non par la force mais de bon gré, en ne nous prenant pas pour
des maîtres mais en offrant un témoignage exemplaire (cf. 1 P 5,
2-3) (...). Telle est pour nous la voie de la sainteté (...). Telle est
notre mission au service du peuple chrétien ».
2.
Éléments centraux du ministère et de la vie des prêtres
a) L'identité
du prêtre
5. L'identité du prêtre doit être méditée à partir de la volonté divine
de salut, parce qu'elle est fruit de l'action sacramentelle de l'Esprit
Saint, une participation à l'action salvatrice du Christ, et parce
qu'elle est pleinement orientée au service de cette action dans
l'Église, au cours de son développement tout au long de l'histoire. Il
s'agit d'une identité comportant trois dimensions : pneumatologique,
christologique et ecclésiologique. Il ne faut pas perdre de vue cette
architecture théologique primordiale du mystère du prêtre, qui est
appelé à être ministre du salut, pour pouvoir éclairer ensuite, d'une
manière adéquate, le sens de son ministère pastoral concret dans le
cadre de la paroisse.
Il est le serviteur du Christ pour être, à partir de lui, pour lui et
avec lui, serviteur des hommes. Son être, ontologiquement assimilé au
Christ, constitue le fondement de cet être ordonné au service de la
communauté. L'appartenance totale au Christ, renforcée et rendue
manifeste de façon tellement appropriée par le saint célibat, permet aux
prêtres d'être au service de tous. En effet, le don admirable du célibat
reçoit sa lumière et sa motivation dans l'assimilation à la donation
nuptiale du Fils de Dieu crucifié et ressuscité, à l'égard de l'humanité
rachetée et renouvelée.
L'être et
l'agir du prêtre – sa personne consacrée et son ministère – sont des
réalités théologiquement inséparables, dont le but est de servir au
développement de la mission de l'Église,
c'est-à-dire le salut éternel de tous les hommes. Dans le mystère de
l'Église – qui est révélée comme le Corps mystique du Christ et le
Peuple de Dieu qui chemine dans l'histoire, et qui est établie comme
sacrement universel de salut –,
se trouve et se découvre la raison profonde du sacerdoce ministériel.
« C'est au point que la communauté ecclésiale a un besoin absolu du
sacerdoce ministériel pour avoir le Christ Tête et Pasteur présent au
milieu d'elle ».
6. Le
sacerdoce commun ou baptismal des chrétiens, en tant que
participation réelle au sacerdoce du Christ, constitue une propriété
essentielle du Nouveau Peuple de Dieu.
« Vous êtes la race élue, la communauté sacerdotale du roi, la nation
sainte, le peuple que Dieu s'est acquis... » (1 P 2,9) ; « il a
fait pour nous un royaume, des prêtres pour Dieu son Père » (Ap
1, 6) ; « Tu en as fait, pour notre Dieu, un royaume et des prêtres
(Ap 5,10) ... ils seront prêtres de Dieu et du Christ, et régneront
avec lui » (Ap 20,6). Ces passages rappellent ce que dit l'Exode,
en transférant au nouvel Israël ce qui était affirmé de l'antique
Israël : « parmi tous les peuples... Vous serez pour moi un règne de
prêtres et une nation sainte » (Ex 19,5-6) ; ils rappellent
encore plus ce que dit le Deutéronome : « Tu es un peuple consacré au
Seigneur ton Dieu; c'est toi que le Seigneur ton Dieu a choisi pour
devenir le peuple qui est sa part personnelle parmi tous les peuples qui
sont sur la surface de la terre » (Dt 7,6).
« Si le
sacerdoce commun est la conséquence du fait que le peuple chrétien est
choisi par Dieu comme un pont avec l'humanité, et concerne tout croyant
faisant partie de ce peuple, le sacerdoce ministériel est, en revanche,
le fruit d'une élection, d'une vocation spécifique : Jésus “appela ses
disciples et en choisit douze” (Lc 6,13-16). Grâce au sacerdoce
ministériel, les fidèles sont amenés à prendre conscience de leur
sacerdoce commun et à le mettre en œuvre (cf. Ep 4,11-12); le
prêtre leur rappelle qu'ils sont Peuple de Dieu et les rend capables
d'“offrir des sacrifices spirituels” (cf. 1 P 2,5), par lesquels
le Christ lui-même fait de nous un don éternel au Père (cf. 1 P
3,18). Sans la présence du Christ représenté par le prêtre, guide
sacramentel de la communauté, cette dernière ne serait pas pleinement
une communauté ecclésiale ».
Au sein de
ce peuple sacerdotal le Seigneur a donc institué le sacerdoce
ministériel, auquel sont appelés certains fidèles pour servir tous
les autres avec charité pastorale et au moyen du pouvoir sacré. Le
sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel se différencient l'un de
l'autre par leur essence et non seulement en degré :
il
ne s'agit pas seulement d'une plus grande ou moins grande intensité de
participation à l'unique sacerdoce du Christ, mais d'une participation
essentiellement différente. Le sacerdoce commun se fonde sur le
caractère baptismal, qui est le sceau spirituel de l'appartenance au
Christ qui « rend capable et engage les chrétiens à servir Dieu dans une
participation vivante à la sainte Liturgie de l'Église et à exercer leur
sacerdoce baptismal par le témoignage d'une vie sainte et d'une charité
efficace ».
Le
sacerdoce ministériel, en revanche, se fonde sur le caractère imprimé
par le sacrement de l'Ordre, qui configure au Christ Prêtre, de façon à
pouvoir agir en la personne du Christ Tête avec le pouvoir sacré,
pour offrir
le Sacrifice et pour remettre les péchés.
Ainsi, une mission nouvelle et spécifique a été conférée
sacramentellement aux baptisés qui ont reçu par la suite le don du
sacerdoce ministériel, celle de personnifier au sein du Peuple de Dieu
la triple charge – prophétique, cultuelle et royale – du Christ lui-même
en tant que Tête et Pasteur de l'Église.
Aussi, dans l'exercice de leurs fonctions spécifiques, ils agissent
in persona Christi Capitis et, par conséquent, pareillement
in nomine
Ecclesiae.
7. « Notre
sacerdoce sacramentel est donc à la fois “hiérarchique” et
“ministériel”. Il constitue un “ministerium” particulier, c'est-à-dire
un “service” à l'égard de la communauté des croyants. Il ne tire
cependant pas son origine de cette communauté, comme si c'était elle qui
“appelait” ou “déléguait”. C'est en réalité un don pour cette communauté
et il provient du Christ lui-même, de la plénitude de son sacerdoce.
(...) Conscients de cette réalité, nous comprenons de quelle manière
notre sacerdoce est “hiérarchique”, c'est-à-dire lié au pouvoir de
former et de conduire le peuple sacerdotal (cf. Lumen gentium, n.
10), et par cela même “ministériel”. Nous accomplissons cette fonction,
par laquelle le Christ lui-même “sert” sans cesse le Père dans l'œuvre
de notre salut. Toute notre existence sacerdotale est et doit être
profondément imprégnée de ce service, si nous voulons accomplir comme il
faut le Sacrifice eucharistique “in persona Christi” ».
Dans les
dernières décennies, l'Église a connu des problèmes « d'identité
sacerdotale », provenant parfois d'une vision théologique moins claire
au sujet des deux modes de participation au sacerdoce du Christ. Dans
certains milieux on a fini par rompre ce profond équilibre
ecclésiologique, si spécifique du Magistère authentique et perpétuel.
Aujourd'hui
toutes les conditions sont réunies pour surmonter le danger de la
« cléricalisation » des laïcs
tout
autant que celui de la « sécularisation » des ministres sacrés.
L'engagement généreux des laïcs dans les domaines du culte, de la
transmission de la foi et de la pastorale, y compris dans une période
marquée par le manque de prêtres, a parfois conduit certains ministres
sacrés et certains laïcs à la tentation d'aller au-delà de ce que permet
l'Église, et qui dépasse également leurs capacités ontologiques
sacramentelles. Cela a eu pour effet de sous-évaluer, sur un plan aussi
bien théorique que pratique, la mission spécifique des laïcs, qui est de
sanctifier de l'intérieur les structures de la société.
D'autre
part, cette crise d'identité engendre également la « sécularisation » de
certains ministres sacrés, en obscurcissant leur rôle spécifique,
absolument irremplaçable, dans la communion ecclésiale.
8. Le
prêtre, alter Christus, est dans l'Église le ministre des actions
salvifiques essentielles.
En vertu de son pouvoir sacrificateur sur le Corps et le Sang du
Rédempteur, de son pouvoir d'annoncer avec autorité l'Évangile, de
vaincre le mal du péché par le pardon sacramentel, il est – in
persona Christi Capitis – source de vie et de vitalité dans l'Église
et dans sa paroisse. Le prêtre n'est pas la source de cette vie
spirituelle, mais il est celui qui la distribue à tout le Peuple de
Dieu. Il est le serviteur qui, dans l'onction de l'Esprit, a accès au
sanctuaire sacramentel : le Christ crucifié (cf. Jn 19,31-37) et
ressuscité (cf. Jn 20,20-23), de qui jaillit le salut.
En Marie,
mère du Prêtre Souverain et Éternel, le prêtre prend conscience d'être
avec Elle, « instrument de communication salvatrice entre Dieu et les
hommes », même si c'est d'une façon différente : si la Sainte Vierge est
cet instrument à travers l'incarnation, le prêtre l'est, de son côté,
par les pouvoirs du sacrement de l'Ordre.
La relation du prêtre à Marie n'est pas seulement un besoin de
protection et d'aide ; il s'agit plutôt d'une prise de conscience d'un
fait objectif : « la proximité de Notre-Dame », en tant que « présence
active, en compagnie de laquelle l'Église veut vivre le mystère du
Christ ».
9. En tant
que participant de l'action directrice du Christ Tête et Pasteur envers
son corps,
le prêtre est habilité, d'une manière spécifique, à être, sur le plan
pastoral, « l'homme de la communion »,
de la conduite et du service de tous. Il est appelé à promouvoir et à
maintenir l'unité des membres avec la Tête, et de tous les membres entre
eux. Par vocation, il unit et il sert dans la double dimension de la
fonction pastorale qui est celle même du Christ (cf. Mt 20,28 ;
Mc 10, 45 ; Lc 22,27). La vie de l'Église a besoin, pour
se développer, des énergies que seul ce ministère de la communion, de la
conduite et du service, peut offrir. Elle exige la présence de prêtres
qui, totalement assimilés au Christ, et dépositaires d'une vocation
première à s'identifier pleinement avec le Christ, vivent « en » lui et
« avec » lui l'ensemble des vertus qui se manifestent dans le Christ
Pasteur – et c'est aussi l'assimilation au don nuptial du Fils de Dieu,
crucifié et ressuscité, à l'humanité rachetée et renouvelée, qui éclaire
et donne sens à ces vertus. La vie de l'Église exige qu'il y ait des
prêtres qui veuillent être source d'unité et de donation fraternelle à
l'égard de tous – spécialement des plus nécessiteux –, des hommes qui
reconnaissent dans le bon Pasteur
leur
identité sacerdotale ; elle exige enfin que cette image soit vécue de
l'intérieur et manifestée à l'extérieur, de sorte que tous puissent la
percevoir, en quelque lieu que ce soit.
Le prêtre
rend présent le Christ Tête de l'Église à travers le ministère de la
Parole, qui est une participation à sa fonction prophétique.
In persona et in nomine Christi, le prêtre est ministre de la parole
d'évangélisation, qui invite tout le monde à la conversion et à la
sainteté; il est ministre de la parole cultuelle, qui exalte la grandeur
de Dieu et rend grâce pour sa miséricorde ; il est ministre de la parole
sacramentelle, qui est source efficace de grâce. Au cœur de ces
multiples modalités, le prêtre, avec la force du Paraclet, prolonge
l'enseignement du divin Maître au sein de son Église.
b) L'unité
de vie
10. La
configuration sacramentelle à Jésus-Christ impose au prêtre un nouveau
motif pour parvenir à la sainteté :
en
effet, le ministère qui lui a été confié est saint en lui-même. Cela ne
signifie pas que la sainteté, à laquelle sont appelés les prêtres, soit
subjectivement plus grande que la sainteté à laquelle sont appelés tous
les fidèles chrétiens en raison de leur baptême. La sainteté est
toujours la même,
même si elle revêt des expressions diverses ;
toutefois, le prêtre doit tendre vers elle pour le nouveau motif
suivant : en vue de correspondre à cette grâce nouvelle qui l'a
configuré à la personne du Christ, Tête et Pasteur, pour le représenter,
et en tant qu'instrument vivant dans l'œuvre du salut.34
Il en résulte que dans l'accomplissement de son ministère, celui qui est
« sacerdos in aeternum », doit s'efforcer de suivre en tout l'exemple du
Seigneur, en s'unissant à lui « dans la découverte de la volonté du Père
et dans le don de soi-même pour le troupeau ».
C'est sur ce fondement d'amour pour la volonté divine et de charité
pastorale que se construit l'unité
de vie,
ou, en d'autres termes,
l'unité intérieure
entre vie spirituelle et activité ministérielle. La croissance de cette
unité de vie s'enracine dans la charité pastorale
nourrie par une solide vie de prière, de telle sorte que le prêtre soit
inséparablement témoin de charité et maître de vie intérieure.
11. Toute
l'histoire de l'Église est illuminée par de splendides modèles de
donation pastorale réellement radicale ; il s'agit d'une cohorte
nombreuse de prêtres saints – comme le curé d'Ars, patron des
curés – qui sont parvenus à une sainteté reconnue, par le dévouement
généreux et infatigable dans le soin des âmes, accompagné d'une ascèse
profonde et d'une vraie vie intérieure. Ces pasteurs, dévorés par
l'amour du Christ et par la charité pastorale qui en est la conséquence,
constituent un Évangile vécu.
Un certain
courant de la culture contemporaine met de côté la vertu intérieure, la
mortification et la spiritualité, en les considérant comme des formes
d'intimisme, d'aliénation, et par conséquent d'égoïsme qui rendrait
incapable de comprendre les problèmes du monde et des gens. On a même
constaté, en certains lieux, une multiple typologie de prêtres : du
sociologue au thérapeute, de l'ouvrier au politicien, au manager... et
jusqu'au prêtre « retraité ». À cet égard il faut rappeler que le prêtre
est porteur d'une consécration ontologique à plein temps. Son identité
la plus profonde doit être recherchée dans le caractère que lui confère
le sacrement de l'Ordre, à partir duquel se développe avec fécondité la
grâce pastorale. C'est pourquoi le prêtre devrait savoir faire tout ce
qu'il fait, toujours en tant que prêtre. Comme le disait saint Jean
Bosco, il est prêtre à l'autel et au confessionnal, comme à l'école,
dans la rue et partout. Parfois certaines situations actuelles poussent
les prêtres eux-mêmes à penser que leur ministère se trouve à la
périphérie de la vie, alors qu'en réalité il est situé au cœur même de
la vie, parce qu'il a la capacité d'illuminer, de réconcilier et de
faire toute chose nouvelle.
Il peut
arriver que certains prêtres, après s'être lancés dans le ministère avec
un enthousiasme débordant d'idéaux, éprouvent ensuite du désintérêt, une
désillusion, au point d'en arriver à la faillite. Les causes sont
multiples : cela va d'une formation déficiente au manque de fraternité
dans le presbyterium diocésain, de l'isolement personnel au manque
d'intérêt et de soutien de la part de l'évêque lui-même
et
de la communauté, des problèmes personnels – y compris les problèmes de
santé – jusqu'à l'amertume de ne pas trouver de réponses ni de
solutions, de la défiance envers l'ascèse et de l'abandon de la vie
intérieure jusqu'au manque de foi.
En effet le
dynamisme ministériel, privé d'une solide spiritualité sacerdotale, se
traduirait tôt ou tard par un activisme vide, sans aucun prophétisme. Il
est clair que la rupture de l'unité intérieure dans la personne du
prêtre est avant tout la conséquence du refroidissement de sa charité
pastorale, c'est-à-dire du refroidissement de « cet amour vigilant du
mystère qu'il porte en lui pour le bien de l'Église et de l'humanité ».
Rester dans
une attitude d'adoration face au Bon Pasteur présent dans le
Saint-Sacrement de l'autel, pour s'entretenir intimement avec lui,
constitue une priorité pastorale de loin supérieure à toute autre. Le
prêtre qui est guide d'une communauté doit mettre en place cette
priorité, afin de se prémunir contre l'aridité intérieure, et pour ne
pas devenir un canal asséché, qui ne pourrait plus rien transmettre à
personne.
C'est la
spiritualité qui s'avère décidément l'œuvre pastorale la plus
importante. Tout plan pastoral, ou projet missionnaire, de même que
n'importe quel dynamisme dans l'évangélisation, qui feraient abstraction
du primat de la spiritualité et du culte divin, seraient voués à
l'échec.
c) Un
chemin spécifique vers la sainteté
12. Le
sacerdoce ministériel, dans la mesure où il configure à l'être et à
l'agir sacerdotal du Christ, introduit une nouveauté dans la vie
spirituelle de celui qui a reçu ce don. Sa vie spirituelle reçoit sa
forme de la participation au rôle de tête du Christ envers son Église,
et elle mûrit dans le service ministériel de l'Église : une sainteté
dans le ministère et pour le ministère.
13. L'approfondissement de la « conscience d'être ministre »
est
donc d'une grande importance pour la vie spirituelle du prêtre, et pour
l'efficacité de son ministère lui-même.
La relation
ministérielle avec Jésus-Christ « fonde et exige de la part du prêtre un
autre lien qui est celui de “l'intention”, celui de la volonté
consciente et libre de faire, par l'acte ministériel, ce que l'Église
entend faire ».
L'expression: « avoir l'intention de faire ce que fait l'Église »
illumine la vie spirituelle du ministre sacré en l'invitant à
reconnaître son « instrumentalité » personnelle au service du Christ et
de l'Église, et à la mettre en œuvre dans les actions concrètes de
ministère. « L'intention », en ce sens, comporte nécessairement une
relation avec l'agir du Christ Tête dans et à travers l'Église, une
conformation à sa volonté, une fidélité à ses dispositions, une docilité
à ses gestes : l'agir ministériel est un instrument de l'œuvre du Christ
et de son Corps qu'est l'Église.
Il s'agit
d'une volonté personnelle permanente : « Ce lien tend par sa nature à
devenir le plus ample et le plus profond possible, engageant l'esprit,
les sentiments, la vie, en un mot une série de dispositions morales et
spirituelles correspondant aux gestes ministériels que le prêtre
accomplit ».
La
spiritualité sacerdotale exige de respirer dans un climat de proximité
au Seigneur Jésus, d'amitié et de rencontre personnelle, de mission
ministérielle « partagée », d'amour et de service à sa Personne dans la
« personne » de l'Église, son Corps et son Épouse. Aimer l'Église et se
donner à elle dans le service ministériel requiert d'aimer profondément
le Seigneur Jésus. « Cette charité pastorale découle surtout du
sacrifice eucharistique; celui-ci constitue donc le centre et la racine
de toute la vie du prêtre, de telle sorte que l'esprit sacerdotal veille
à refléter ce qui est réalisé sur l'autel. Mais cela n'est pas possible
si les prêtres ne pénètrent pas toujours plus dans le mystère du Christ
par la prière ».
La Très
Sainte Vierge Marie, associée au Rédempteur, nous aide à pénétrer ce
mystère, tant il est vrai que « lorsque nous célébrons la Sainte Messe,
la Mère du Fils de Dieu se tient au milieu de nous et elle nous
introduit dans le mystère de son offrande de rédemption. De cette
manière, elle devient médiatrice des grâces qui découlent de cette
offrande en faveur de l'Église et de tous les fidèles ».
En effet, « Marie a été associée d'une manière unique au sacrifice
sacerdotal du Christ, partageant sa volonté de sauver le monde par la
Croix. Elle a été la première et la plus parfaite participante
spirituelle de son oblation de Sacerdos et hostia. Comme telle,
elle peut obtenir et donner à ceux qui participent, au plan ministériel,
au sacerdoce de son Fils, la grâce de l'élan pour répondre toujours
davantage aux exigences de l'oblation spirituelle que comporte le
sacerdoce: en particulier, la grâce de la foi, de l'espérance et de la
persévérance dans les épreuves, reconnues comme autant de stimulants à
une participation plus généreuse à l'offrande rédemptrice ».
L'eucharistie doit devenir pour le prêtre « le lieu vraiment central de
son ministère »,
parce que c'est en elle qu'est contenu tout le bien spirituel de
l'Église, et aussi parce qu'elle est elle-même la source et le sommet de
toute l'évangélisation.
D'où l'importance, ô combien remarquable, de la préparation à la Messe,
de sa célébration quotidienne,
de l'action de grâces et de la visite à Jésus-Sacrement, au cours de la
journée !
14. Outre
le Sacrifice eucharistique, le prêtre célèbre aussi chaque jour la
sainte Liturgie des Heures; il l'a librement embrassée comme une grave
obligation. De l'immolation non sanglante du Christ sur l'autel jusqu'à
la célébration de l'Office divin en union avec toute l'Église, l'amour
pour le divin Pasteur grandit au cœur du prêtre, et se manifeste
toujours plus clairement aux yeux des fidèles. Le prêtre a reçu le
privilège de « parler à Dieu au nom de tous, » de devenir « comme la
bouche de toute l'Église » ;
il achève dans l'Office divin ce qui manque à la louange du Christ, et
en tant qu'ambassadeur accrédité, son intercession est parmi les plus
efficaces pour le salut du monde.
d) La
fidélité du prêtre à la discipline ecclésiastique
13. La
« conscience d'être ministre » comporte également la conscience du
fonctionnement organique du Corps du Christ. En effet, la vie et la
mission de l'Église, pour pouvoir se développer, exigent un
ordonnancement, des règles, des codes de comportement, c'est-à-dire un
ordre disciplinaire. Il faut dépasser tout préjugé concernant la
discipline ecclésiastique, à commencer par l'expression elle-même, et
surmonter également toute peur et tout complexe dans le fait de s'y
référer et d'en réclamer l'observance de manière opportune. Quand
l'observance des normes et des critères, qui constituent la discipline
ecclésiastique, est en place, on évite ces tensions qui, dans le cas
contraire, compromettent l'effort pastoral unitaire dont l'Église a
besoin pour accomplir efficacement sa mission d'évangélisation. Pour
assumer avec maturité son engagement ministériel, il faut être vraiment
persuadé que l'Église « a besoin de normes afin de rendre visible sa
structure hiérarchique et organique, et pour permettre l'exercice des
fonctions qui lui sont confiées par Dieu, surtout celles de la sacra
potestas et de l'administration des sacrements ».
De plus, la
conscience d'être ministre du Christ et de son Corps mystique implique
l'engagement à accomplir fidèlement la volonté de l'Église, qui
s'exprime concrètement dans les normes.
La législation de l'Église a pour finalité une plus grande perfection de
la vie chrétienne, en vue d'un meilleur accomplissement de la mission de
salut, et cela doit donc se vivre avec sincérité et bonne volonté.
Parmi tous
ces aspects, celui qui concerne la docilité aux lois et aux dispositions
liturgiques de l'Église mérite une attention particulière; il s'agit de
l'amour fidèle à l'égard d'un ensemble de normes qui ont pour but
d'ordonner le culte en accord avec la volonté du Prêtre Souverain et
Éternel et de son Corps mystique. La sainte Liturgie est considérée
comme l'exercice du sacerdoce de Jésus- Christ,
l'action sacrée par excellence, « le sommet vers lequel tend l'action de
l'Église, et en même temps, la source d'où jaillit toute sa force ».
Par conséquent c'est dans ce domaine que la conscience d'être ministre
doit être la plus grande, ainsi que celle d'agir en conformité avec les
engagements librement et solennellement pris devant Dieu et la
communauté. « Il revient uniquement à l'autorité de l'Église de régler
la sainte Liturgie, et cette autorité réside dans le Saint-Siège, et,
selon la norme du droit, dans l'évêque. (...) Absolument personne
d'autre, même s'il est prêtre, ne doit oser, de sa propre initiative
ajouter, retrancher ou changer quoi que ce soit en matière liturgique ».
Les initiatives arbitraires, les expressions marquées par le
subjectivisme, les improvisations, la désobéissance dans la célébration
eucharistique, constituent autant de contradictions manifestes par
rapport à l'essence même de la très Sainte Eucharistie, qui est le
Sacrifice du Christ. Il faut en dire autant en ce qui concerne la
célébration des autres sacrements, et surtout du sacrement de Pénitence,
par lequel on obtient le pardon de ses péchés – moyennant la contrition
et la résolution de s'amen-der – et on est réconcilié avec l'Église.
On demande
aux prêtres d'être attentifs de la même manière à la participation
authentique et consciente des fidèles à la sainte Liturgie, une
participation que l'Église ne manque pas de promouvoir.
Dans la sainte Liturgie, certaines fonctions peuvent être accomplies par
les fidèles qui n'ont pas reçu le sacrement de l'Ordre; d'autres en
revanche sont propres aux ministres ordonnés et elles leur sont
réservées de façon absolument exclusive.
Le respect à l'égard de l'identité des divers états de vie, ainsi que
leur complémentarité en vue de la mission, exigent que l'on évite toute
confusion en la matière.
e) Le
prêtre dans la communion ecclésiale
16. Pour
servir l'Église – cette communauté organiquement structurée de fidèles
dotés de la même dignité baptismale, mais ayant des charismes et des
fonctions différents – il faut la connaître et l'aimer, non pas telle
que la voudraient les modes de pensée passagères ou les différentes
idéologies, mais telle qu'elle a été voulue par Jésus-Christ, qui l'a
fondée. La fonction ministérielle de service de la communion, à partir
de la configuration au Christ Tête, exige que l'on connaisse et que l'on
respecte la spécificité du rôle des fidèles laïcs, en promouvant de
toutes les manières possibles l'assomption de ses responsabilités
propres de la part de chacun d'entre eux. Le prêtre est au service de la
communauté, mais il est aussi soutenu par sa communauté. Il a besoin de
l'apport du laïcat, non seulement pour l'organisation et
l'administration de sa communauté, mais également dans les domaines de
la foi et de la charité: il existe une sorte d'osmose entre la foi du
prêtre et la foi des autres fidèles.
Les
familles chrétiennes et les communautés ferventes ont souvent aidé les
prêtres dans les moments de crise. Il est tout aussi important, pour le
même motif, que les prêtres connaissent, estiment et respectent les
caractéristiques de la sequela Christi, qui sont propres à la vie
consacrée, et qui constituent un trésor très précieux pour l'Église, et
un témoignage de l'œuvre féconde du Saint-Esprit en son sein.
Plus les
prêtres sont les signes vivants et les serviteurs de la communion
ecclésiale, et plus ils s'insèrent dans l'unité vivante de l'Église dans
le temps, c'est-à-dire dans la sainte Tradition, dont le Magistère est
le gardien et le garant. La référence féconde à la Tradition confère au
ministère du prêtre la solidité et l'objectivité du témoignage de la
Vérité, venue dans le Christ pour se révéler dans l'histoire. Cela
l'aide à fuir ce prurit de nouveautés, qui nuit à la communion et qui
retire toute profondeur et toute crédibilité à l'exercice du ministère
sacerdotal.
C'est le
curé en particulier qui doit être un patient tisserand de la communion
entre sa propre paroisse et son Église particulière, et avec l'Église
universelle. Il devrait être également un vrai modèle d'adhésion au
Magistère perpétuel de l'Église, et à sa grande discipline.
f) Sens
de l'universel dans le particulier
17. « Il
est nécessaire que le prêtre ait conscience que le fait d' être dans une
Église particulière constitue, de soi, un élément déterminant pour vivre
une spiritualité chrétienne. En ce sens le prêtre trouve précisément
dans son appartenance et dans son dévouement à l'Église particulière une
source de sens, de critères de discernement et d'action, qui modèlent sa
mission pastorale et sa vie spirituelle ».60
Il s'agit d'une matière importante, dans laquelle il faut acquérir une
vision ample, qui tienne compte du fait que « l'appartenance et le
dévouement à l'Église particulière ne limitent pas à cette dernière
toute l'activité et la vie du prêtre : elles ne peuvent absolument pas y
être réduites, en raison de la nature même de l'Église particulière et
du ministère sacerdotal ».
Le concept
d'incardination, modifié par le Concile Vatican II et exprimé en
corollaire dans le Code,
permet de dépasser le danger d'enfermer le ministère des prêtres dans
des limites étroites, non pas tant géographiques que plutôt
psychologiques ou même théologiques. L'appartenance à une Église
particulière et le service pastoral en vue de la communion en son
sein – qui sont des éléments d'ordre ecclésiologique – constituent
également le cadre existentiel de la vie et de l'activité des prêtres,
et ils leur donnent une physionomie propre faite d'orientations
pastorales spécifiques, d'objectifs, de donation personnelle dans des
tâches déterminées, de rencontres pastorales, d'intérêts partagés. Pour
comprendre et aimer effectivement l'Église particulière et
l'appartenance et le dévouement à son égard, en la servant et en se
sacrifiant pour elle jusqu'au don de sa propre vie, il est nécessaire
que le ministre sacré soit toujours plus conscient que l'Église
universelle « est une réalité ontologiquement et temporellement
antérieure à toute Église particulière ».
En effet, ce n'est pas la somme des Églises particulières qui constitue
l'Église universelle. Les Églises particulières, dans et à partir de
l'Église universelle, doivent être ouvertes à une réalité constituée par
une vraie communion des personnes, des charismes, des traditions
spirituelles, sans frontières géographiques, intellectuelles ou
psychologiques.
Il doit être bien clair pour le prêtre qu'il n'y a qu'une seule Église !
L'universalité, ou plutôt la catholicité, doit remplir d'elle-même la
particularité. Le lien de communion profond, véritable et vital avec le
Siège de Pierre constitue la garantie et la condition nécessaire de tout
cela. Et le simple fait d'accueillir de façon réfléchie, de diffuser et
d'appliquer fidèlement les documents du Pape et des Dicastères de la
Curie romaine en est une expression.
Nous avons
considéré l'être et l'agir de chaque prêtre en tant que tel. Notre
réflexion se portera maintenant plus spécifiquement sur le prêtre
constitué dans l'office de curé.
DEUXIÈME PARTIE
LA PAROISSE ET LE CURÉ
3. La paroisse et la charge du curé
18. Les
éléments de nature ecclésiologique les plus significatifs contenus dans
la notion théologico-canonique de la paroisse ont été pensés par le
Concile Vatican II à la lumière de la Tradition et de la doctrine
catholique, de l'ecclésiologie de communion, puis ils ont été traduits
en loi par le Code de droit canonique. Ils ont été développés selon
différents points de vue par le Magistère pontifical post-conciliaire,
aussi bien de manière explicite qu'implicite, toujours dans le cadre de
l'approfondissement du sacerdoce ordonné. Il est donc utile de résumer
les principales caractéristiques de la doctrine théologique et canonique
en la matière, surtout en vue de mieux répondre aux défis pastoraux qui
se posent, en ce début du troisième millénaire, au ministère paroissial
des prêtres.
Dans une
large mesure et par analogie, ce que l'on dit du curé, du point de vue
de son engagement pastoral de guide, concerne aussi les prêtres qui
travaillent en paroisse et ceux qui exercent des charges pastorales
spécifiques, par exemple dans les lieux de détention, dans les maisons
de soins, dans les universités, dans les écoles, dans le domaine de
l'assistance aux migrants et aux étrangers, etc.
La paroisse
est une communitas christifidelium concrète, constituée de
manière stable dans le cadre d'une Église particulière, et dont le soin
pastoral a été confié à un curé, qui en est le pasteur, sous l'autorité
de l'évêque diocésain.
Toute la vie de la paroisse, de même que la signification de ses tâches
apostoliques à l'égard de la société, doivent être entendues et vécues
avec un sens de communion organique entre le sacerdoce commun et le
sacerdoce ministériel, de collaboration fraternelle et dynamique entre
les pasteurs et les fidèles dans le respect le plus absolu des droits,
devoirs et fonctions de chacun, avec ses compétences et ses
responsabilités propres. Le curé « en étroite communion avec l'évêque et
avec tous les fidèles, évitera d'introduire dans son ministère pastoral,
aussi bien des formes d'autoritarisme impromptu que des modalités de
gestion pseudo-démocratique étrangères à la réalité la plus profonde du
ministère ».
A cet égard, l'Instruction interdicastérielle Ecclesia de mysterio,
qui fut approuvée sous forme spécifique par le Souverain Pontife,
conserve partout sa pleine vigueur; son application intégrale garantit
une pratique ecclésiale adéquate, dans ce domaine fondamental pour la
vie même de l'Église.
Le lien
intrinsèque avec la communauté diocésaine et avec son évêque, en
communion hiérarchique avec le Successeur de Pierre, assure à la
communauté paroissiale l'appartenance à l'Église universelle. Il s'agit
donc d'une pars diœcesis
animée par un même esprit de communion, par une coresponsabilité
baptismale ordonnée, par une même vie liturgique, centrée sur la
célébration de l'Eucharistie,
et par un même esprit de mission qui caractérise la communauté
paroissiale tout entière. De fait, chaque paroisse « est fondée sur une
réalité théologique, car c'est une communauté eucharistique. Cela
signifie que c'est une communauté apte à célébrer l'Eucharistie, en qui
se trouvent la racine vivante de sa constitution et de sa croissance et
le lien sacramentel de son être en pleine communion avec toute l'Église.
Cette aptitude se fonde sur le fait que la paroisse est une
communauté de foi et une communauté organique, c'est-à-dire
constituée par les ministres ordonnés et par les autres chrétiens, sous
la responsabilité d'un curé qui, représentant l'Évêque du diocèse, est
le lien hiérarchique avec toute l'Église particulière ».
En ce sens,
la paroisse, qui est comme une cellule du diocèse, doit offrir « un
exemple remarquable d'apostolat communautaire, en rassemblant dans
l'unité tout ce qui se trouve en elle de diversités humaines et en les
insérant dans l'universalité de l'Église ».
La communitas christifidelium, dans la notion de paroisse,
constitue l'élément personnel essentiel de base; cette expression a pour
but de souligner la relation dynamique entre les personnes qui la
composent d'une manière déterminée, sous la conduite effective et
indispensable d'un pasteur propre. En règle générale, il s'agit de tous
les fidèles d'un territoire spécifique; ou bien il s'agit seulement de
certains fidèles, dans le cas des paroisses personnelles, qui sont
constituées sur la base du rite, de la langue, de la nationalité ou
d'autres motivations précises.
19. Un
autre élément de base de la notion de paroisse est le soin pastoral
ou soin des âmes (cura animarum), la charge d'âmes propre à l'office
de curé, qui se manifeste principalement par la prédication de la Parole
de Dieu, par l'administration des sacrements et par la conduite
pastorale de la communauté.
Dans la paroisse, qui est le lieu de la charge pastorale ordinaire, « le
curé est le pasteur propre de la paroisse qui lui est remise en
exerçant, sous l'autorité de l'évêque diocésain dont il a été appelé à
partager le ministère du Christ, la charge pastorale de la communauté
qui lui est confiée, afin d'accomplir pour cette communauté les
fonctions d'enseigner, de sanctifier et de gouverner avec la
collaboration éventuelle d'autres prêtres ou de diacres, et avec l'aide
apportée par des laïcs, selon le droit ».
Cette notion de curé manifeste une grande richesse ecclésiologique et
n'empêche pas l'évêque de déterminer d'autres formes de la cura
animarum, selon le droit.
La
nécessité d'adapter l'assistance pastorale dans les paroisses aux
circonstances du temps présent, caractérisé en certains endroits par le
manque de prêtres mais aussi par l'existence de paroisses urbaines
surpeuplées et de paroisses rurales dispersées, ou par un faible nombre
de paroissiens, a conseillé d'introduire certaines innovations dans le
droit universel de l'Église, qui, certes, ne sont pas de principe, en ce
qui concerne le titulaire de la charge pastorale de la paroisse. L'une
d'elles consiste en la possibilité de confier in solidum à
plusieurs prêtres le soin pastoral d'une ou plusieurs paroisses, à la
condition péremptoire que seul l'un d'entre eux en soit le modérateur,
dirige l'activité commune et réponde d'elle personnellement devant
l'évêque.
L'unique office paroissial, l'unique charge pastorale de la paroisse
sont donc confiés à un titulaire multiple constitué de plusieurs
prêtres, qui reçoivent une participation identique à l'office qui leur
est confié, sous la direction personnelle d'un confrère modérateur.
Confier le soin pastoral in solidum se révèle utile pour résoudre
certaines situations dans les diocèses où un nombre restreint de prêtres
doivent organiser leur temps de présence entre des activités
ministérielles diverses, mais cela devient aussi un moyen opportun pour
promouvoir la coresponsabilité pastorale des prêtres et, plus
particulièrement, pour faciliter la vie commune des prêtres, coutume qui
doit toujours être encouragée.
La prudence
interdit cependant d'ignorer certaines difficultés que peut comporter la
charge pastorale in solidum – toujours et exclusivement composée
de prêtres; en effet, il est naturel que les fidèles s'identifient à
leur propre pasteur, et la présence variable de plusieurs prêtres peut
désorienter et être mal comprise, même s'ils sont coordonnés entre eux.
Or il est évident que la richesse de la paternité spirituelle du curé
est comparable à celle d'un « paterfamilias » sacramentel de la
paroisse, il lui faut créer des liens pour engendrer une fécondité
pastorale.
Dans les
cas où les nécessités pastorales le réclament, l'évêque diocésain peut
opportunément confier temporairement plusieurs paroisses aux soins
pastoraux d'un seul curé.
Quand les
circonstances le suggèrent, confier une paroisse à un administrateur
peut
constituer une solution provisoire.
Cependant, il est opportun de rappeler que l'office du curé, étant
essentiellement pastoral, requiert plénitude et stabilité.
Le curé devrait être une icône de la présence du Christ historique.
C'est l'exigence de la configuration au Christ qui souligne cette
obligation prioritaire.
20. Pour
accomplir la mission de pasteur dans une paroisse, ce qui comporte le
soin plénier des âmes, il faut absolument exercer l'ordre sacerdotal.
Par conséquent, en plus de la communion ecclésiale,
la condition explicitement requise par le droit canonique pour que
quelqu'un soit validement nommé curé, est qu'il appartienne à l'Ordre
sacré du presbytérat.
En ce qui
concerne la responsabilité du curé dans l'annonce de la Parole de Dieu
et dans la prédication de la doctrine catholique authentique, le can.
528 mentionne expressément l'homélie et l'instruction catéchétique, la
mise en œuvre d'initiatives visant à diffuser l'esprit évangélique dans
tous les domaines de la vie humaine, la formation catholique des enfants
et des jeunes, ainsi que l'effort pour que, avec la collaboration
ordonnée des fidèles laïcs, le message de l'Évangile puisse atteindre
ceux qui ont abandonné la pratique religieuse ou ne professent pas la
vraie foi,
afin qu'avec la grâce de Dieu ils puissent parvenir à la conversion. Il
est évident que le curé n'est pas obligé de réaliser personnellement
toutes ces fonctions, mais il doit faire en sorte qu'elles soient mises
en œuvre de manière opportune au sein de la paroisse, conformément à la
juste doctrine et à la discipline ecclésiale, en tenant compte des
circonstances, et toujours sous sa propre responsabilité. Plusieurs de
ces fonctions, comme par exemple, l'homélie durant la célébration
eucharistique,
devront être réalisées toujours et exclusivement par un ministre
ordonné. Même s'il devait être dépassé en matière d'éloquence par
d'autres fidèles non-ordonnés, cela n'empêcherait pas qu'il constitue la
représentation sacramentelle du Christ, Tête et Pasteur, et c'est de là
surtout que dérive l'efficacité de sa prédication ».
En revanche, et restant toujours sauve l'obligation du contact
personnel, certaines autres fonctions, comme la catéchèse, pourront être
effectuées même de façon habituelle par des fidèles laïcs – ils doivent
avoir reçu la préparation qui s'impose, selon la juste doctrine, et
mener une vie chrétienne cohérente. Le bienheureux Jean XXIII écrivait
« qu'il est d'une souveraine importance que le clergé soit partout et en
tout temps fidèle à son devoir d'enseigner. “Il importe, disait à ce
propos saint Pie X, de mettre en relief et avec insistance ce point
essentiel: un prêtre quel qu'il soit n'a pas de tâche plus importante,
et il n'est tenu par aucune obligation plus stricte” ».
Le curé est
évidemment tenu, au nom de la charité pastorale effective, d'exercer une
surveillance attentive et prévenante vis-à-vis de tous ses
collaborateurs, et non seulement d'adresser des encouragements. Si, dans
certains pays qui comptent des fidèles appartenant à différents groupes
linguistiques, une paroisse personnelle n'est pas érigée,
ou si une autre solution adéquate n'a pas été trouvée, ce sera le curé
territorial, en tant que pasteur propre,
qui veillera à respecter les besoins particuliers de ses fidèles,
notamment pour ce qui a trait à leurs sensibilités culturelles
spécifiques.
21. Quant
aux moyens ordinaires de sanctification, le can. 528 établit que le curé
doit particulièrement s'efforcer de faire en sorte que la Très Sainte
Eucharistie constitue bien le centre de la communauté paroissiale, et
que tous les fidèles puissent parvenir à la plénitude de la vie
chrétienne grâce à une participation consciente et active à la sainte
Liturgie, à la célébration des sacrements, à la vie d'oraison et aux
bonnes œuvres.
Le fait que
le Code mentionne la réception fréquente de l'Eucharistie et la pratique
tout aussi fréquente du sacrement de Pénitence, mérite une considération
particulière. Cela suggère qu'il est opportun pour le curé, en
établissant les horaires des messes et des confessions dans la paroisse,
de considérer quels sont les moments les plus adéquats pour la majorité
des fidèles, permettant aussi à ceux qui ont des difficultés
particulières d'horaires de s'approcher aisément des sacrements. Les
curés devront réserver un soin tout particulier à la confession
individuelle dans l'esprit et dans la forme établie par l'Église.
Ils doivent également se rappeler qu'elle précède nécessairement la
première communion des enfants.
Il faut aussi avoir présent à l'esprit que, pour des motifs pastoraux
évidents, afin d'aider les fidèles, les confessions individuelles
peuvent être entendues durant la célébration de la messe.
En outre,
il faudra s'employer à « respecter la sensibilité du pénitent concernant
le choix de la modalité de la confession, à savoir face à face ou à
travers la grille du confessionnal ».
Le confesseur peut, lui aussi, avoir des raisons pastorales pour
préférer l'usage du confessionnal muni d'une grille.
Il faudra
également favoriser au maximum la pratique de la visite au
Saint-Sacrement, en disposant et en établissant, de manière fixe, de
laisser l'Église ouverte le plus longtemps possible. Beaucoup de curés,
de manière très louable, encouragent l'adoration grâce à l'exposition
solennelle du Saint-Sacrement et à la bénédiction eucharistique; et ils
font l'expérience des fruits de l'adoration au niveau de la vitalité de
la paroisse.
La Très
Sainte Eucharistie est conservée avec amour dans le tabernacle « comme
le cœur spirituel de la communauté religieuse et paroissiale ».
« Privée du culte eucharistique, comme de son cœur battant, la paroisse
devient sans vie ».
« Si vous voulez que les fidèles prient avec dévotion – disait Pie XII
au clergé de Rome – donnez-leur vous-même d'abord l'exemple, à l'église,
faisant oraison en leur présence. Un prêtre agenouillé devant le
tabernacle, dans une pose digne et dans un profond recueillement, est
pour le peuple un sujet d'édification, un avertissement et une
invitation à l'émulation dans la prière ».
22. Pour sa
part, le can. 529 examine les principales exigences dans
l'accomplissement de la fonction pastorale paroissiale, en présentant
l'attitude ministérielle du curé dans une certaine direction. En tant
que pasteur propre, il s'applique à connaître les fidèles confiés à ses
soins, en évitant de tomber dans le danger du fonctionnalisme : il n'est
pas un fonctionnaire qui joue un rôle et offre des services à qui les
lui demande. En homme de Dieu, il exerce intégralement son ministère,
cherchant les fidèles, visitant les familles, participant à leurs
besoins et à leurs joies; il corrige avec prudence, prend soin des
personnes âgées, des faibles, des délaissés, des malades et se prodigue
pour les moribonds ; il accorde une attention particulière aux pauvres
et aux affligés; il s'engage pour la conversion des pécheurs, de ceux
qui sont dans l'erreur, et il aide chacun à accomplir son devoir, en
encourageant notamment la croissance de la vie chrétienne dans les
familles.
Éduquer à
l'exercice des œuvres de miséricorde spirituelle et corporelle demeure
l'une des priorités pastorales et un signe de vitalité d'une communauté
chrétienne.
Une autre
tâche significative, confiée au curé, est de promouvoir la fonction
propre des fidèles laïcs dans la mission de l'Église ; il s'agit pour
eux d'animer et de perfectionner l'ordre des réalités temporelles grâce
à l'esprit évangélique et, ainsi, de rendre témoignage au Christ, en
particulier dans l'exercice des tâches séculières.
D'autre
part, le curé doit collaborer avec l'évêque et avec les autres prêtres
du diocèse pour que les fidèles, en participant à la communauté
paroissiale, se sentent aussi membres du diocèse et de l'Église
universelle.
La mobilité croissante de la société actuelle impose que la paroisse ne
se ferme pas sur elle-même, mais sache accueillir les fidèles d'autres
paroisses qui la fréquentent ; elle doit aussi éviter de considérer avec
méfiance le fait que certains paroissiens participent à la vie d'autres
paroisses, églises rectorales ou aumôneries.
Revient
aussi tout spécialement au curé le devoir d'encourager avec zèle, de
soutenir et de suivre avec un très grand soin les vocations sacerdotales.
Son exemple personnel pour montrer son identité, de façon visible,
et pour vivre en conséquence, uni à l'attention accordée aux confessions
individuelles et à la direction spirituelle des jeunes, ainsi qu'à la
catéchèse sur le sacerdoce ordonné, rendront réaliste cette pastorale
des vocations à laquelle on ne peut renoncer. « Cela a toujours été un
devoir particulier du ministère sacerdotal de jeter les semences de la
vie totalement consacrée à Dieu et de susciter l'amour de la virginité ».
Les
fonctions qui, dans le Code, sont confiées de façon spécifique au curé
sont les suivantes: administrer le baptême; administrer le sacrement de
la confirmation à ceux qui sont en danger de mort, en vertu du can. 883,
3 ;
administrer le Viatique et l'Onction des malades, en respectant les
dispositions du can. 1003 § 3,
et
impartir la bénédiction apostolique; assister aux mariages et bénir les
noces; célébrer les funérailles ; bénir les fonts baptismaux au temps
pascal, guider les processions et impartir les bénédictions solennelles
hors de l'Église ; célébrer la Très Sainte Eucharistie plus solennelle
les dimanches et les fêtes d'obligation.
Plus que
des fonctions exclusives du curé, ou même plus que des droits exclusifs,
elles lui sont spécialement confiées en raison de sa responsabilité
particulière ; il doit donc les accomplir personnellement, autant que
possible, ou du moins suivre leur déroulement.
23. Là où
les prêtres manquent, on peut envisager l'hypothèse, comme cela arrive
en certains endroits, que l'évêque, ayant tout considéré avec prudence,
confie une collaboration « ad tempus » dans l'exercice de la
charge pastorale de la paroisse à une ou plusieurs personnes n'ayant pas
le caractère sacerdotal, selon les modalités canoniquement permises.
Toutefois, dans ces cas précis, les propriétés originelles de diversité
et de complémentarité entre les dons et les fonctions des ministres
ordonnés et des fidèles laïcs, propres à l'Église que Dieu a voulue
organiquement structurée, doivent être attentivement observées et
protégées. Il existe des situations objectivement extraordinaires qui
justifient une telle collaboration. Toutefois, celle-ci ne peut pas
légitimement dépasser les limites de la spécificité ministérielle et
laïque.
Désireuse
de purifier une terminologie qui pourrait porter à confusion, l'Église a
réservé les expressions qui indiquent un rôle de « tête » – comme celles
de « pasteur », « aumônier », « directeur », « coordinateur » ou des
expressions équivalentes – exclusivement aux prêtres.
En effet,
le Code, dans le titre consacré aux droits et aux devoirs des fidèles
laïcs, distingue les tâches ou les fonctions qui, comme droit et devoir
propre, appartiennent à tout laïc, d'avec
d'autres
tâches qui se situent dans la ligne de la collaboration au ministère
pastoral. Celles-ci constituent une capacitas ou habilitas
dont l'exercice dépend des pasteurs légitimes qui appellent à les
assumer.
Ce ne sont donc pas des droits.
24. Tout
ceci a été exprimé par Jean-Paul II dans son Exhortation apostolique
post-synodale Christifideles laici : « La mission salvifique de
l'Église dans le monde est réalisée non seulement par les ministres en
vertu du sacrement de l'Ordre, mais aussi par tous les fidèles laïcs :
ceux-ci, en effet, en vertu de leur condition de baptisés et de leur
vocation spécifique, participent, dans la mesure propre à chacun, à la
fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ. Les pasteurs, en
conséquence, doivent reconnaître et promouvoir les ministères, les
offices et les fonctions des fidèles laïcs, qui ont leur fondement
sacramentel dans le Baptême, dans la Confirmation, et de plus, pour
beaucoup d'entre eux, dans le Mariage. En outre, lorsque la nécessité ou
l'utilité de l'Église l'exige, les pasteurs peuvent, selon les normes
établies par le droit universel, confier « ad tempus » aux fidéles laïcs
certaines tâches qui, tout en étant liées à leur propre ministère de
pasteurs, n'exigent pas cependant le caractère de l'Ordre » (nº 23). Ce
même document rappelle en outre le principe de base qui régit cette
collaboration et ses limites infranchissables : « Toutefois
l'exercice de ces tâches ne fait pas du fidèle laïc un pasteur: en
réalité, ce qui constitue le ministère, ce n'est pas l'activité en
elle-même, mais l'ordination sacramentelle. Seul le sacrement de l'Ordre
confère au ministre ordonné une participation particulière à l'office du
Christ Chef et Pasteur et à son sacerdoce éternel. La tâche exercée en
tant que suppléant tire sa légitimité formellement et immédiatement de
la délégation officielle reçue des pasteurs, et son exercice concret est
régi par l'autorité ecclésiastique » (nº 23).
Dans les
cas où les fidèles non-ordonnés se voient confier certaines tâches, un
prêtre doit nécessairement être constitué comme modérateur, avec le
pouvoir et les devoirs de curé, pour diriger personnellement la charge
pastorale.
Logiquement, la participation à l'office paroissial est différente dans
le cas du prêtre désigné pour diriger l'activité pastorale – muni des
facultés de curé –, qui exerce les fonctions exclusives du prêtre,
et dans le cas des autres personnes qui n'ont pas reçu l'ordre du
presbytérat et participent de manière subsidiaire à l'exercice des
autres fonctions.
Le religieux non-prêtre, la religieuse, le fidèle laïc, appelés à
participer à l'exercice de la charge pastorale, peuvent remplir des
fonctions de type administratif, ainsi que des fonctions de formation et
d'animation spirituelle, mais ils ne peuvent pas, en toute logique,
exercer des fonctions de plein soin des âmes, dans la mesure où
celles-ci requièrent le caractère sacerdotal. Ils peuvent quand même
suppléer l'absence du ministre ordonné dans les fonctions liturgiques
appropriées à leur condition canonique, énumérées dans le can. 230 §
3 : « Exercer le ministère de la parole, présider aux prières
liturgiques, administrer le baptême et distribuer la sainte Communion
selon les dispositions du droit ».
Les diacres, bien que n'étant pas situés sur le même plan que les autres
fidèles, ne peuvent toutefois pas exercer une pleine
cura animarum.
Il convient
que l'évêque diocésain vérifie avant tout, avec la plus grande prudence
et la plus grande clairvoyance pastorale, l'état authentique de
nécessité, et qu'ensuite il établisse les conditions d'aptitude des
personnes appelées à cette collaboration, et qu'il définisse les
fonctions qui doivent être attribuées à chacune d'elles selon les
conditions de leurs communautés paroissiales respectives. En tout cas,
en l'absence d'une répartition claire des fonctions, il revient au
prêtre modérateur de déterminer ce qu'il convient de faire. Le caractère
exceptionnel et provisoire de ces formules exige qu'au sein de ces
communautés paroissiales soit promue au maximum la conscience de la
nécessité absolue des vocations sacerdotales, que l'on soigne
amoureusement leurs germes, que soit encouragée la prière, tant
communautaire que personnelle, notamment pour la sanctification des
prêtres.
Quand dans
une communauté sont vivaces et répandus les sentiments d'affection
authentique, de profonde estime, d'enthousiasme fort pour la réalité de
ce qu'est l'Église – Épouse du Christ, collaboratrice de l'Esprit Saint
dans l'œuvre du salut –, cela aide beaucoup à ce que les vocations
sacerdotales y fleurissent plus facilement.
Il faudrait
toujours raviver dans l'esprit des croyants cette joie et cette sainte
fierté de l'appartenance ecclésiale, qui est si évidente, par exemple,
dans la première lettre de Pierre et dans l'Apocalypse (cf. 1 P
3,14 ; Ap 2,13.17 ; 7,9 ; 14,1 et suiv. ; 19,6 ; 22,14). Sans la
joie et la fierté de cette appartenance il deviendrait difficile, sur le
plan psychologique, de sauvegarder et de développer la vie de foi elle-
même. Il ne faut pas s'étonner si dans certains contextes, au moins à un
niveau psychologique, les vocations sacerdotales peinent à germer et à
parvenir à maturation.
« Ce serait
une erreur fatale de se résigner aux difficultés actuelles et de faire
comme si l'on devait se préparer à une Église de demain, qui se
trouverait presque privée de prêtres. Dès lors, les mesures adoptées
pour pallier aux carences actuelles finiraient par devenir sérieusement
préjudiciables à la communauté ecclésiale malgré toute la bonne volonté
démontrée ».
25. « Quand
il s'agit de participer à l'exercice de la charge pastorale d'une
paroisse – dans le cas où, faute de prêtres, elle ne pourrait profiter
des soins directs d'un curé – les diacres permanents ont toujours la
préséance sur les fidèles non ordonnés ».
En vertu de l'Ordre sacré, le diacre en effet « est maître, en tant
qu'il proclame et explique la Parole de Dieu; il est sanctificateur, en
tant qu'il administre les sacrements du Baptême, de l'Eucharistie, les
sacramentaux, qu'il participe à la célébration de la Messe comme
"ministre du Sang", qu'il conserve et distribue l'Eucharistie; il est
guide, en tant qu'animateur de communautés ou de secteurs de la vie
ecclésiale ».
Un bon
accueil sera réservé aux diacres, candidats au sacerdoce, qui exercent
leur service pastoral en paroisse. Pour eux, le curé, en accord avec les
supérieurs du séminaire, sera un guide et un maître, conscient que de
son témoignage de cohérence avec son identité, de générosité
missionnaire dans le service et d'amour de la paroisse, pourra également
dépendre le don sincère et total au Christ du candidat au sacerdoce.
26. A
l'image du conseil pastoral du diocèse,
la norme canonique prévoit la possibilité de constituer aussi – si
l'évêque diocésain l'estime opportun, après avoir entendu le conseil
presbytéral – un
conseil pastoral paroissial, dont la finalité fondamentale est de
servir, dans un cadre institutionnel, la collaboration ordonnée des
fidèles dans le développement de l'activité pastorale
propre aux prêtres. Il s'agit d'un organe consultatif constitué
afin que les fidèles, exprimant une responsabilité baptismale, puissent
aider le curé qui le préside,120
grâce à leurs avis concernant la pastorale.
« Les fidèles laïcs doivent être toujours plus convaincus du sens
particulier que prend leur engagement apostolique dans leur paroisse » ;
il faut encourager une « mise en valeur plus convaincue et plus large
des conseils pastoraux paroissiaux ».
La raison est claire et convergente : « Dans la situation actuelles les
fidèles laïcs peuvent et doivent faire énormément pour la croissance
d'une authentique communion ecclésiale à l'intérieur de leurs
paroisses et pour réveiller l'élan missionnaire vers les
incroyants et aussi vers ceux, parmi les croyants, qui ont abandonné ou
laissé s'affaiblir la pratique de la vie chrétienne ».
« Tous les
fidèles ont la faculté, et même parfois le devoir, de donner leur avis
sur les choses qui touchent au bien de l'Église, ce qui peut se faire
aussi au moyen d'institutions établies à cette fin : (...) Le Conseil
pastoral pourra donc apporter (...) une aide très utile, en faisant des
propositions et en donnant des suggestions concernant les initiatives
missionnaires, catéchétiques et apostoliques (...) ; au sujet de la
promotion de la formation doctrinale et de la vie sacramentelle des
fidèles; au sujet de l'aide à apporter à l'action pastorale des prêtres
dans les divers milieux sociaux ou zones territoriales (...) ; au sujet
de la façon de sensibiliser toujours davantage l'opinion publique ».
Le conseil pastoral appartient au contexte des relations de service
mutuel entre le curé et ses fidèles ; cela n'aurait donc pas de sens de
le considérer comme un organe qui remplacerait le curé pour diriger la
paroisse ou qui, adoptant le critère de la majorité, conditionnerait en
pratique le rôle directif du curé.
De même,
les systèmes de délibération concernant les questions économiques de la
paroisse, restant sauve la norme du droit pour une administration
correcte et honnête, ne peuvent conditionner le rôle pastoral du curé,
qui est le représentant légal et l'administrateur des biens de la
paroisse.
4. Les
défis positifs du présent dans la pastorale paroissiale
27. Si
toute l'Église a été invitée au début de ce nouveau millénaire à « un
élan renouvelé pour la vie chrétienne », fondé sur la cons-cience de
la présence du Christ Ressuscité parmi nous,
nous devons savoir en tirer les conséquences pour la pastorale dans les
paroisses.
Il ne
s'agit pas d'inventer de nouveaux programmes pastoraux, puisque le
programme chrétien, centré sur le Christ lui-même, consiste toujours à
le connaître, à l'aimer, à l'imiter, à vivre en lui la vie trinitaire et
à transformer avec lui l'histoire jusqu'à son achèvement : « un
programme qui ne change pas avec la variation des temps et des cultures,
même s'il tient compte du temps et de la culture pour un dialogue vrai
et une communication efficace ».
A l'horizon
aussi vaste qu'exigeant de la pastorale ordinaire : « c'est dans les
Églises locales que l'on peut fixer les éléments concrets d'un
programme – objectifs et méthodes de travail, formation et valorisation
du personnel, recherche des moyens nécessaires – qui permettent à
l'annonce du Christ d'atteindre les personnes, de modeler les
communautés, d'agir en profondeur par le témoignage des valeurs
évangéliques sur la société et sur la culture ».
Tels sont les horizons « de l'œuvre de reprise pastorale enthousiasmante
qui nous attend ».
Guider les
fidèles vers une vie intérieure solide, sur la base des principes de la
doctrine chrétienne tels qu'ils ont été vécus et enseignés par les
saints, est de loin l'œuvre pastorale la plus importante et
fondamentale. Dans les projets pastoraux, cet aspect devrait précisément
être privilégié. Plus que jamais il faut redécouvrir aujourd'hui que la
prière, la vie sacramentelle, la méditation, le silence d'adoration, le
cœur à cœur avec Notre Seigneur, l'exercice quotidien des vertus qui
nous configurent à Lui, sont bien plus productifs que n'importe quelle
discussion. C'est, en tout cas, la condition de son efficacité.
Novo
millennio ineunte
énumère sept
priorités pastorales: la sainteté, la prière, la Très Sainte Eucharistie
dominicale, le sacrement de la Réconciliation, la primauté de la grâce,
l'écoute de la Parole et l'annonce de la Parole.
Ces priorités, que l'expérience du Grand Jubilé a fait particulièrement
apparaître, offrent non seulement le contenu et la substance des
questions sur lesquelles les curés et tous les prêtres impliqués dans la
cura animarum dans les paroisses doivent méditer attentivement, mais
elles résument aussi l'esprit avec lequel il faut affronter cette œuvre
de reprise pastorale.
Novo
millennio ineunte met également l'accent sur
un « autre grand domaine pour lequel il faudra manifester et programmer
un engagement résolu, au niveau de l'Église universelle et des Églises
particulières : celui de la communion (koinonia) qui incarne et
manifeste l'essence même du mystère de l'Église » (nº 42) et invite à
promouvoir une spiritualité de communion. « Faire de l'Église la maison
et l'école de la communion : tel est le grand défi qui se présente à
nous dans le millénaire qui commence, si nous voulons être fidèles au
dessein de Dieu et répondre aussi aux attentes profondes du monde » (nº
43). Le document spécifie en outre : « Avant de programmer des
initiatives concrètes, il faut promouvoir une spiritualité de la
communion, en la faisant ressortir comme principe éducatif partout où
sont formés l'homme et le chrétien, où sont éduqués les ministres de
l'autel, les personnes consacrées, les agents pastoraux, où se
construisent les familles et les communautés » (nº 43).
Une
véritable pastorale de la sainteté dans nos communautés paroissiales
implique une authentique pédagogie de la prière, une catéchèse rénovée,
persuasive et efficace sur l'importance de la Très Sainte Eucharistie
dominicale et même quotidienne, de l'adoration communautaire et
personnelle du Saint-Sacrement, sur la pratique fréquente et
individuelle du sacrement de la Réconciliation, sur la direction
spirituelle, sur la dévotion mariale, sur l'imitation des saints; cette
pastorale comporte encore un nouvel élan apostolique, vécu comme
engagement quotidien des communautés et des individus, une pastorale de
la famille appropriée et un engagement social et politique cohérent.
Une telle
pastorale est impossible si elle n'est pas inspirée, soutenue et ravivée
par des prêtres qui en partagent l'esprit. « Les fidèles peuvent tirer
un grand bénéfice de l'exemple et du témoignage du prêtre (...) en
redécouvrant la paroisse comme une “école” de prière, où la “rencontre
avec le Christ ne s'exprime pas seulement en demande d'aide, mais aussi
en action de grâce, louange, adoration, contemplation, écoute, affection
ardente, jusqu'à une vraie folie du cœur” ».
« Prenons garde d'oublier que “sans le Christ nous ne pouvons rien
faire” (cf. Jn 15,5). La prière nous fait vivre justement dans
cette vérité. Elle nous rappelle constamment le primat du Christ et, en
rapport à lui, le primat de la vie intérieure et de la sainteté. Quand
ce principe n'est pas respecté (...) nous faisons alors l'expérience des
disciples dans l'épisode évangélique de la pêche miraculeuse : “Nous
avons peiné toute la nuit sans rien prendre” (Lc 5,5). Tel est le
moment de la foi, de la prière, du dialogue avec Dieu, qui ouvre le cœur
au flot de la grâce et qui permet à la parole du Christ de passer à
travers nous avec toute sa force: Duc in altum ! ».
Sans
prêtres vraiment saints, il serait bien difficile d'avoir un bon laïcat
et tout serait comme éteint; de même, sans familles
chrétiennes – églises domestiques – il est bien difficile qu'arrive le
printemps des vocations. Il est donc erroné de négliger le sacerdoce
ordonné pour mettre l'accent sur le laïcat car, en agissant de la sorte,
on finit par pénaliser le laïcat lui-même et par rendre stérile toute la
mission de l'Église.
28. La
perspective dans laquelle il faut situer le cheminement et le fondement
de toute la programmation pastorale consiste à aider à redécouvrir dans
nos communautés l'universalité de l'appel chrétien à la sainteté. Il
faut rappeler que l'âme de tout apostolat est enracinée dans l'intimité
divine, dans le fait de ne rien placer au-dessus de l'amour du Christ,
de chercher en toute chose la plus grande gloire de Dieu, de vivre la
dynamique christocentrique de l'expression mariale « totus tuus » ! La
pédagogie de la sainteté situe « la programmation pastorale sous
le signe de la sainteté »
et
constitue le principal défi pastoral dans le contexte du temps présent.
Dans l'Église sainte, tous les fidèles sont appelés à la sainteté.
Une tâche
centrale de la pédagogie de la sainteté consiste donc à savoir
enseigner à tous, et à rappeler inlassablement, que la sainteté
constitue le but de l'existence de tout chrétien. « Tous dans l'Église,
qu'ils appartiennent à la hiérarchie ou qu'ils soient régis par elle,
sont appelés à la sainteté selon la parole de l'apôtre : “Oui, ce que
Dieu veut c'est votre sanctification” (1 Th 4,3; cf. Ep
1,4) ».
C'est le premier élément à développer avec pédagogie dans la catéchèse
ecclésiale, jusqu'à ce que la prise de conscience par chacun de ce que
comporte la sanctification à l'intérieur de sa propre existence devienne
une conviction commune.
L'annonce
de l'universalité de la vocation à la sainteté exige la compréhension de
l'existence chrétienne en tant que sequela Christi, c'est-à-dire
comme une conformation au Christ ; il ne s'agit pas d'incarner d'une
manière extrinsèque des comportements éthiques, mais de se laisser
personnellement impliquer dans l'événement de la grâce du Christ. Cette
conformation au Christ est la substance de la sanctification et
constitue l'objectif spécifique de l'existence chrétienne. Pour y
parvenir, chaque chrétien a besoin de l'aide de l'Église, mater et
magistra. La pédagogie de la sainteté est un défi, aussi
exigeant qu'attrayant, pour tous ceux qui, dans l'Église, occupent des
responsabilités de guide et de formation.
29. L'effort ardemment missionnaire de l'évangélisation représente une
priorité d'une importance singulière pour l'Église, et donc pour la
pastorale paroissiale.
« On doit considérer comme désormais dépassée, même dans les pays
d'ancienne évangélisation, la situation d'une “société chrétienne”, qui,
en dépit des nombreuses faiblesses dont l'humain est toujours marqué, se
référait explicitement aux valeurs évangéliques. Aujourd'hui, on doit
affronter avec courage une situation qui se fait toujours plus
diversifiée et plus prenante, dans le contexte de la mondialisation et
de la mosaïque nouvelle et changeante de peuples et de cultures qui la
caractérise ».
Dans la
société, marquée aujourd'hui par le pluralisme culturel, religieux et
ethnique, partiellement caractérisée par le relativisme,
l'indifférentisme, l'irénisme et le syncrétisme, il semble que certains
chrétiens se soient pratiquement habitués à une sorte de
« christianisme » privé de références réelles au Christ et à son
Église ; on tend ainsi à réduire le projet pastoral à des thématiques
sociales situées dans une perspective exclusivement anthropologique, au
sein d'un rappel générique au pacifisme, à l'universalisme et à une
référence assez peu précise à des « valeurs ».
L'évangélisation du monde contemporain ne se réalisera qu'à partir de la
redécouverte de l'identité personnelle, sociale et culturelle des
chrétiens. Cela signifie surtout la redécouverte de Jésus-Christ, Verbe
incarné, unique Sauveur des hommes !
Cette conviction fait jaillir l'exigence de la mission qui brûle tout
spécialement dans le cœur de chaque prêtre et, à travers lui, qui doit
caractériser toute paroisse et communauté qu'il a la charge de guider.
« Nous considérons qu'une unique méthode pastorale, applicable et
adaptable à tous, est inconcevable; avant nous, Grégoire de Naziance en
avait fait un axiome de son magistère. L'unicité de la méthode est
exclue. Pour édifier tout le monde dans la charité, il sera nécessaire
de varier les façons de toucher les cœurs, mais pas la doctrine. Il
s'agira donc d'une pastorale d'adaptation modale, mais pas d'adaptation
doctrinale ».
Il
reviendra au curé de faire en sorte que les associations, les mouvements
et les divers groupes présents dans la paroisse offrent aussi leur
contribution spécifique à la vie missionnaire de celle-ci. « Le devoir
de promouvoir les divers types d'association revêt une grande importance
pour la communion, que ce soient les formes plus traditionnelles ou
celles plus nouvelles des mouvements ecclésiaux; ces formes continuent à
donner à l'Église une vivacité qui est un don de Dieu et qui constitue
un authentique “printemps de l'Esprit”. Il faut bien sûr que les
associations et les mouvements, aussi bien dans l'Église universelle que
dans les Églises particulières, œuvrent en pleine harmonie ecclésiale et
en obéissance aux directives émanant de l'autorité des Pasteurs ».
Il faut éviter dans l'équipe paroissiale tout exclusivisme et toute
fermeture des différents groupes, car la nature missionnaire repose sur
la certitude, qui doit être partagée par tous, que « Jésus-Christ a une
fonction unique et singulière pour le genre humain et pour son
histoire : cette fonction lui est propre, elle est exclusive,
universelle et absolue. Jésus est en effet le Verbe de Dieu fait homme
pour le salut de tous ».
L'Église
s'en remet à la fidélité quotidienne des prêtres au ministère pastoral,
engagés dans une mission irremplaçable en faveur de la paroisse confiée
à leur conduite.
Certes, les
difficultés pastorales, la lassitude intérieure et physique en raison de
la surcharge de travail, pas toujours équilibrée par de saines périodes
de retraite spirituelle et de juste repos, ne manquent pas aux curés et
aux autres prêtres qui servent les diverses communautés. Que d'amertumes
aussi de devoir constater que souvent le vent de la sécularisation rend
aride le terrain sur lequel on a semé au prix d'efforts remarquables et
continus !
Une culture
largement sécularisée, qui tend à homologuer le prêtre à l'intérieur de
ses catégories de pensée, le dépouillant de sa dimension fondamentale de
mystère et de sacrement, est largement responsable de ce phénomène.
C'est de là que naissent les découragements qui peuvent conduire à
l'isolement, à une sorte de fatalisme dépressif ou à un activisme
dispersif. Cela n'empêche pas que la grande majorité des prêtres, dans
toute l'Église, répondant à la sollicitude de leurs évêques, affrontent
positivement les difficiles défis de la conjoncture historique actuelle
et parviennent à vivre pleinement et avec joie leur identité et leur
généreux engagement pastoral.
Toutefois
les dangers ne manquent pas non plus de l'intérieur, comme, par exemple,
la bureaucratisation, le fonctionnalisme, la pseudo-démocratie, la
planification accomplie davantage à la manière d'un « manager » que d'un
pasteur. Hélas, dans certaines circonstances, le prêtre peut être
opprimé par une accumulation de structures qui ne sont pas toujours
nécessaires et finissent par le surcharger, entraînant des conséquences
négatives aussi bien sur son état psychophysique que spirituel, et donc
au détriment du ministère lui-même.
L'évêque ne
manquera pas de veiller attentivement à de telles situations, lui qui
est le père, avant tout, de ces premiers et plus précieux
collaborateurs. L'union de toutes les forces ecclésiales est extrêmement
actuelle et urgente pour répondre positivement aux embûches dont le
prêtre et son ministère font l'objet.
30. La
Congrégation pour le Clergé, compte tenu des circonstances actuelles de
la vie de l'Église et des exigences de la nouvelle évangélisation, en
considérant la réponse que les prêtres sont appelés à apporter, a voulu
offrir le présent document comme une aide, un encouragement et un
stimulant pour le ministère pastoral des prêtres dans le soin de la
paroisse. De fait, le contact le plus immédiat de l'Église avec tous les
gens a lieu normalement dans le cadre des paroisses. Par conséquent, nos
considérations s'adressent à la personne du prêtre en tant que curé.
Jésus-Christ se fait présent en lui comme Tête de son Corps Mystique, en
tant que Bon Pasteur qui prend soin de chaque brebis. Nous avons voulu
illustrer la nature mystérieuse et sacramentelle de ce ministère.
A la
lumière de l'enseignement du Concile Œcuménique Vatican II et de
l'Exhortation apostolique Pastores dabo vobis, ce document se
situe en continuité avec le Directoire pour le ministère et la vie
des prêtres, avec l'Instruction interdicastérielle Ecclesiae de
mysterio et avec la Lettre circulaire Le prêtre, maître de la
parole, ministre des sacrements et guide de la communauté en vue du
troisième millénaire chrétien.
On ne peut
vivre son ministère quotidien qu'à travers la sanctification
personnelle, et celle-ci doit toujours reposer sur la force surnaturelle
des sacrements de la Sainte Eucharistie et de la Pénitence.
« L'Eucharistie est le point à partir duquel tout rayonne et où tout
conduit. (...) Nombreux sont les prêtres qui, au cours des siècles, ont
trouvé en elle le réconfort promis par Jésus le soir de la dernière
Cène, le secret pour vaincre leur solitude, le soutien pour supporter
leurs souffrances, l'aliment pour reprendre le chemin après chaque
découragement, l'énergie intérieure pour confirmer leur choix de la
fidélité ».
L'approfondissement de la vie sacramentelle et la formation permanente
seront grandement stimulés par une vie fraternelle des prêtres, qui ne
se réduise pas à une simple vie en commun sous le même toit, mais qui
soit communion dans la prière, dans le partage des projets et dans la
coopération pastorale, de concert avec la valeur de l'amitié mutuelle et
avec l'évêque ; tout cela fournit une aide remarquable pour surmonter
les difficultés et les épreuves dans l'exercice du saint ministère. Le
prêtre n'a pas seulement besoin de l'aide ministérielle de ses
confrères, mais il a besoin d'eux en tant que confrères.
On pourrait
prévoir notamment, dans le diocèse, une maison destinée à tous les
prêtres qui, à intervalles réguliers, ont besoin de se retirer en un
lieu qui favorise le recueillement et la prière ; ils retrouveraient
dans cette maison les moyens indispensables à leur sanctification.
Dans
l'esprit du Cénacle, où les Apôtres étaient réunis et priaient d'un même
cœur avec Marie, la Mère de Jésus (cf. Ac 1, 14), c'est à Elle
que nous confions ces pages rédigées avec affection et reconnaissance
envers tous les prêtres en charge d'âmes, dans le monde entier. Que
chacun, dans l'exercice de son « munus » pastoral quotidien, puisse
bénéficier de l'aide maternelle de la Reine des Apôtres et sache vivre
en profonde communion avec Elle. En effet, il y a dans le sacerdoce
ministériel « cette dimension merveilleuse et très profonde de la
proximité avec la Mère du Christ ».
Il est consolant d'être conscient que « la Mère du Rédempteur est à côté
de nous, et qu'elle nous introduit dans le mystère de l'offrande
rédemptrice de son divin Fils. '“Ad Iesum per Mariam” : que cela soit
notre programme quotidien de vie spirituelle et pastorale ! »
Le
Souverain Pontife Jean-Paul II a approuvé cette Instruction et en a
ordonné la publication.
Rome, du
Palais des Congrégations, le 4 août 2002, mémoire liturgique de Saint
Jean-Marie Vianney, Curé d'Ars, patron du clergé en charge d'âmes.
Darío Card.
Castrillón Hoyos
Préfet
+ Csaba
Ternyák
Archevêque titulaire d'Eminenziana
Secrétaire
Prière du curé à la Très Sainte Vierge Marie
Ô Marie,
Mère de Jésus-Christ, Crucifié et Ressuscité,
Mère de l'Église, peuple sacerdotal (1 P 2,9),
Mère des prêtres, ministres de ton Fils :
accueille l'humble offrande de moi-même,
pour que dans ma mission pastorale
je puisse annoncer l'infinie miséricorde
du Grand Prêtre Éternel :
ô « Mère de miséricorde ».
Toi qui as
partagé avec ton Fils,
son « obéissance sacerdotale » (He 10,5-7; Lc 1,38),
et as préparé pour lui un corps (He 10,7)
dans l'onction de l'Esprit Saint,
introduis ma vie sacerdotale dans le mystère ineffable
de ta divine maternité,
ô « Sainte Mère de Dieu ».
Donne-moi
la force dans les heures sombres de la vie,
soutiens-moi dans les peines de mon ministère
que ton Jésus m'a confié,
afin qu'en communion avec Toi, je puisse l'accomplir,
avec fidélité et amour,
ô Mère du Prêtre Éternel,
« Reine des Apôtres, Secours des prêtres ».
Toi qui as
silencieusement accompagné Jésus
dans sa mission d'annonce
de l'Évangile de paix aux pauvres,
rends-moi fidèle au troupeau
que m'a confié le Bon Pasteur.
Fais que je
puisse toujours le guider
avec des sentiments de patience, de douceur,
de fermeté et d'amour,
avec une prédilection pour les malades,
pour les petits, pour les pauvres, pour les pécheurs,
ô « Mère Auxiliatrice du Peuple chrétien ».
Je me
consacre et je me confie à Toi, ô Marie,
Toi qui, près de la Croix de ton Fils,
es devenue participante de son œuvre rédemptrice,
« unie indissolublement à l'œuvre du salut ».
Fais que
dans l'exercice de mon ministère,
je puisse toujours sentir davantage
« la dimension merveilleuse et très profonde
de ta proximité maternelle »
à chaque instant de ma vie,
dans la prière et dans l'action,
dans la joie et dans la douleur,
dans la fatigue et dans le repos,
ô « Mère de la Confiance ».
Accorde-moi, ô Mère, que dans la célébration de l'Eucharistie,
centre et source du ministère sacerdotal,
je puisse vivre ma proximité à Jésus
dans ta proximité maternelle,
car « tu es auprès de nous quand nous célébrons la Messe »
et tu nous introduis dans le mystère
de l'offrande rédemptrice de ton divin Fils,
« ô Médiatrice des grâces qui jaillissent
de cette offrande pour l'Église et pour tous les fidèles »,
ô « Mère du Sauveur ».
Ô Marie :
je désire placer ma personne,
ma volonté de sanctification,
sous ta protection et ton inspiration maternelles
pour que Tu me conduises
à la « conformation au Christ, Tête et Pasteur »
que requiert le ministère de curé.
Fais que je
prenne conscience
que « Tu es toujours à côté de chaque prêtre »,
dans sa mission de ministre
de l'Unique Médiateur Jésus-Christ :
ô « Mère des Prêtres »,
« Secourable et Médiatrice »
de toutes les grâces.
Amen.
Acte d'amour du Saint Curé d'Ars,
Saint Jean-Marie Vianney
Je vous
aime, ô mon Dieu et mon seul désir est de vous aimer jusqu'au dernier
soupir de ma vie.
Je vous
aime, ô Dieu infiniment aimable, et j'aime mieux mourir en vous aimant
que de vivre un seul instant sans vous aimer.
Je vous
aime, ô mon Dieu, et je ne désire le ciel que pour avoir le bonheur de
vous aimer parfaitement.
Je vous
aime, ô mon Dieu, et je n'appréhende l'enfer que parce qu'on n'y aura
jamais la douce consolation de vous aimer.
Ô mon Dieu,
si ma langue ne peut dire à tout moment que je vous aime, du moins je
veux que mon cœur vous le répète autant de fois que je respire.
Ah !
Faites-moi la grâce de souffrir en vous aimant, de vous aimer en
souffrant, et d'expirer un jour en vous aimant et en sentant que je vous
aime.
Et plus
j'approche de ma fin, plus je vous conjure d'accroître mon amour et de
le perfectionner. Ainsi soit-il.
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