Seigneur, tu as voulu me séduire, et
je me suis laissé séduire ;tu m'as fait subir ta puissance, et tu l'as
emporté. A longueur de journée je suis en butte à la raillerie, tout le
monde se moque de moi. Chaque fois que j'ai à dire la parole, je dois
crier, je dois proclamer : « Violence et pillage ! » A longueur de journée, la
parole du Seigneur attire sur moi l'injure et la moquerie. Je me disais
: « Je ne penserai plus à lui, je ne parlerai plus en son nom. »Mais il y
avait en moi comme un feu dévorant, au plus profond de mon être. Je
m'épuisais à le maîtriser, sans y réussir.
Psaume 63,2.3-4.5-6.8-9.
Dieu, tu es mon Dieu, je te
cherche dès l'aube : mon âme a soif de toi ; après toi languit ma chair,
terre aride, altérée, sans eau. Je t'ai contemplé au sanctuaire, j'ai vu
ta force et ta gloire. Ton amour vaut mieux que la vie : tu seras la
louange de mes lèvres ! Toute ma vie je vais te bénir, lever les mains
en invoquant ton nom. Comme par un festin je serai rassasié ; la joie sur
les lèvres, je dirai ta louange. Oui, tu es venu à mon secours : je crie
de joie à l'ombre de tes ailes. Mon âme s'attache à toi, ta main droite
me soutient.
Lettre de saint Paul Apôtre
aux Romains 12,1-2.
Je vous exhorte, mes frères, par la
tendresse de Dieu, à lui offrir votre personne et votre vie en sacrifice
saint, capable de plaire à Dieu : c'est là pour vous l'adoration véritable.
Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en
renouvelant votre façon de penser pour savoir reconnaître quelle est la
volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui
est parfait.
Évangile de Jésus-Christ selon
saint Matthieu 16,21-27.
A partir de ce moment, Jésus le
Christ commença à montrer à ses disciples qu'il lui fallait partir pour
Jérusalem, souffrir beaucoup de la part des anciens, des chefs des prêtres
et des scribes, être tué, et le troisième jour ressusciter. Pierre, le
prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches : « Dieu t'en garde,
Seigneur ! cela ne t'arrivera pas. » Mais lui, se retournant, dit à
Pierre : « Passe derrière moi, Satan, tu es un obstacle sur ma route ; tes
pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. » Alors Jésus
dit à ses disciples : « Si quelqu'un veut marcher derrière moi, qu'il
renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix et qu'il me suive. Car celui
qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la
gardera. Quel avantage en effet un homme aura-t-il à gagner le monde
entier, s'il le paye de sa vie ? Et quelle somme pourra-t-il verser en
échange de sa vie ? Car le Fils de l'homme va venir avec ses anges dans
la gloire de son Père ; alors il rendra à chacun selon sa conduite.
Saint Augustin (354-430), évêque d'Hippone (Afrique du Nord) et docteur de
l'Église Sermon 96 (§1-4.9, trad. Brésard, 2000 ans B, p.248 rev)
Renoncer à soi-même, prendre sa croix et suivre le Christ Ce que le
Seigneur a commandé : « Si quelqu'un veut marcher à ma suite, qu'il renonce
à lui-même » semble dur et pénible. Mais ce n'est ni dur ni pénible, parce
que celui qui commande est celui qui aide à réaliser ce qu'il commande. Car
si la parole du psaume « à cause des paroles de tes lèvres, j'ai suivi des
chemins difficiles » (Ps 16,4) est vraie, elle est vraie aussi, la parole
que Jésus a dite : « Mon joug est facile à porter, et mon fardeau léger »
(Mt 11,30). Car tout ce qui est dur dans le commandement, l'amour fait en
sorte qu'il soit doux. Nous savons de quels prodiges l'amour est capable.
Parfois l'amour est de mauvais aloi et dissolu ; mais que de difficultés
endurent les hommes, que de traitements indignes et insupportables
souffrent-ils pour parvenir à ce qu'ils aiment !... Comme la grande affaire
de la vie doit être de bien choisir ce que l'on doit aimer, est-il
surprenant que celui qui aime Jésus Christ et qui veut le suivre se renonce
à lui-même pour l'aimer ?...
Que signifie ce qui suit : « Qu'il
prenne sa croix » ? Qu'il supporte ce qui est pénible et qu'ainsi il me
suive. Car lorsqu'un homme commencera à me suivre en se conduisant selon mes
préceptes, il aura beaucoup de gens pour le contredire, beaucoup pour
s'opposer à lui, beaucoup pour le décourager. Et cela de la part de ceux qui
se prétendent compagnons du Christ. Ils marchaient avec le Christ, ceux qui
empêchaient les aveugles de crier (Mt 20,31). Qu'il s'agisse de menaces, de
flatteries ou d'interdictions, si tu veux suivre le Christ, change tout cela
en croix ; endure, supporte, ne te laisse pas accabler...
Vous aimez
le monde ; mais il faut lui préférer celui qui a fait le monde... Nous
sommes dans un monde qui est saint, qui est bon, réconcilié, sauvé, ou
plutôt qui doit être sauvé, mais qui est sauvé dès maintenant en espérance.
« Car nous sommes sauvés, mais c'est en espérance » (Rm 8,24). Dans ce monde
donc, c'est-à-dire dans l'Église, qui tout entière suit le Christ, celui-ci
dit à tous : « Celui qui veut marcher à ma suite, qu'il renonce à lui-même
».