Discours de Benoît XVI devant
l'Assemblée plénière du Conseil pontifical pour la Culture |
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Cité du Vatican, le 31 mars 2008 -
(E.S.M.)
- Le pape Benoît XVI recevait au début du mois les
participants à l'assemblée plénière du Conseil Pontifical pour la
Culture, guidée par Mgr Gianfranco Ravasi. Le Vatican publie aujourd'hui
le discours en français.
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Le pape Benoît XVI
DISCOURS DU PAPE BENOÎT XVI
AUX PARTICIPANTS À L'ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE
DU CONSEIL PONTIFICAL POUR LA CULTURE
Salle du Consistoire
Messieurs les Cardinaux,
chers frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Mesdames et Messieurs!
Je suis heureux de vous accueillir, à l'occasion de l'Assemblée plénière du
Conseil pontifical pour la Culture, et je me réjouis du travail que vous
accomplissez et, en particulier, du sujet choisi pour cette session:
"L'Eglise et le défi de la sécularisation". C'est une question fondamentale
pour l'avenir de l'humanité et de l'Eglise. La sécularisation, qui souvent
se transforme en sécularisme en abandonnant le sens positif de sécularité,
met à dure épreuve la vie chrétienne des fidèles et des pasteurs et, durant
vos travaux, vous l'avez interprétée et transformée également en un défi
providentiel afin de proposer des réponses convaincantes aux questions et
aux espérances de l'homme, notre contemporain.
Je remercie Mgr Gianfranco Ravasi, Président depuis quelques mois du
dicastère, pour les paroles courtoises avec lesquelles il s'est fait votre
interprète et a illustré le déroulement de vos travaux. Je vous suis à tous
reconnaissant de votre travail efficace qui vise à ce que l'Eglise entre en
dialogue avec les mouvements culturels de notre temps, et afin de faire
connaître plus largement l'intérêt que le Saint-Siège nourrit pour le vaste
monde de la culture dans toute sa diversité. Aujourd'hui plus que jamais, en
effet, l'ouverture réciproque entre les cultures est un terrain privilégié
pour le dialogue entre les hommes et les femmes engagés dans la recherche
d'un humanisme authentique, au-delà des divergences qui les séparent. La
sécularisation, qui se présente dans les cultures comme une organisation du
monde et de l'humanité sans référence à la Transcendance, gagne tous les
aspects de la vie quotidienne et développe une mentalité où, de fait, Dieu
est absent, entièrement ou en partie, de l'existence et de la conscience
humaine. Cette sécularisation n'est pas seulement une menace extérieure pour
les croyants, mais elle se manifeste depuis longtemps déjà au sein de
l'Eglise elle-même. Elle dénature de l'intérieur et en profondeur la foi
chrétienne et, en conséquence, le style de vie et le comportement quotidien
des croyants. Ceux-ci vivent dans le monde et sont souvent marqués, sinon
conditionnés, par la culture de l'image qui impose ses modèles et ses
sollicitations contradictoires, dans la négation concrète de Dieu: on n'a
plus besoin de Dieu, de penser à Lui, ou de revenir vers Lui. De plus, la
mentalité hédoniste et la culture de la consommation prédominantes
favorisent, chez les fidèles comme chez les pasteurs, une dérive vers la
superficialité et un égocentrisme qui nuit à la vie ecclésiale.
La "mort de Dieu" annoncée, dans les décennies passées par beaucoup
d'intellectuels, cède la place à une culture stérile de l'individu. Dans ce
contexte culturel, on risque de tomber dans une atrophie spirituelle et dans
un vide du cœur, caractérisés parfois par des formes succédanées
d'appartenance religieuse et de vague spiritualisme. Il est plus que jamais
urgent de réagir à de telles dérives par le rappel des valeurs les plus
élevées de l'existence, qui donnent un sens à la vie et peuvent apaiser
l'inquiétude du cœur humain à la recherche du bonheur: la dignité de la
personne humaine et sa liberté, l'égalité entre tous les hommes, le sens de
la vie et de la mort et de ce qui nous attend au terme de notre existence
terrestre. Dans cette perspective mon prédécesseur, le Serviteur de Dieu
Jean-Paul II, conscient des changements radicaux et rapides de la société,
rappela avec insistance l'urgence d'aller à la rencontre de l'homme sur le
terrain de la culture pour lui transmettre le Message évangélique. C'est
justement pour cela qu'il institua le Conseil pontifical pour la Culture,
afin de donner un nouvel élan à l'action de l'Eglise et susciter la
rencontre entre l'Evangile et la pluralité des cultures dans les différentes
parties du monde (cf. Lettre au Cardinal Casaroli, dans: AAS LXXIV, 6, pp.
683-688). La sensibilité intellectuelle et la charité pastorale du Pape
Jean-Paul II le poussèrent à souligner que la révolution industrielle et les
découvertes scientifiques ont permis de répondre à des questions qui
n'étaient auparavant partiellement résolues que par la religion. La
conséquence fut que l'homme contemporain a souvent l'impression de ne plus
avoir besoin de personne pour comprendre, expliquer et maîtriser l'univers,
il se sent au centre de tout, et la mesure de tout.
Plus récemment, la mondialisation, à travers les nouvelles technologies de
l'information, a eu souvent et également comme résultat la diffusion dans
toutes les cultures d'éléments matérialistes et individualistes de
l'Occident. La formule "Etsi Deus non daretur" devient toujours plus un mode
de vie qui tire ses origines dans une sorte de "vanité" de la raison -
réalité pourtant créée et aimée par Dieu - qui se considère suffisante à
elle-même et se ferme à la contemplation et à la recherche d'une Vérité qui
la dépasse. La lumière de la raison, exaltée, mais en réalité appauvrie, par
la philosophie des lumières, se substitue radicalement à la lumière de la
foi, à la lumière de Dieu (cf. Benoît XVI,
Allocution que le Pape aurait dû prononcer à l'Université "La Sapienza",
du 17 janvier 2008). C'est pourquoi, les enjeux que doit affronter
la mission de l'Eglise dans ce domaine sont importants. Tout aussi important
est l'engagement du Conseil pontifical pour la Culture en vue d'un dialogue
entre science et foi. C'est un débat que l'Eglise attend, mais la communauté
scientifique également, et je vous encourage à le poursuivre. Dans ce
dialogue, la foi suppose la raison et la perfection, et la raison, éclairée
par la foi, trouve la force de s'élever à la connaissance de Dieu et des
réalités spirituelles. Dans ce sens, la sécularisation ne favorise pas le
but ultime de la science qui est au service de l'homme, "imago dei". Que ce
dialogue se poursuive dans la distinction des caractéristiques particulières
de la science et de la foi. En effet, chacune a ses propres méthodes, ses
domaines, ses objets de recherche, ses finalités et ses limites, et doit
respecter et reconnaître à l'autre la possibilité légitime de son exercice
autonome selon ses propres principes (cf. Gaudium et spes, n. 36); toutes
deux sont appelées à servir l'homme et l'humanité, en favorisant le
développement et la croissance intégrale de chacun et de tous.
J'invite surtout les pasteurs du peuple de Dieu à une mission inlassable et
généreuse pour affronter, sur le terrain du dialogue et de la rencontre avec
les cultures, sur le terrain de l'annonce de l'Evangile et du témoignage,
l'inquiétant phénomène de la sécularisation, qui affaiblit la personne et
fait obstacle à son désir inné de Vérité tout entière. Puissent les
disciples du Christ, grâce au service rendu en particulier par votre
dicastère, continuer et annoncer le Christ au sein des cultures, car il est
la lumière qui éclaire la raison, l'homme et le monde. Nous sommes nous
aussi placés devant l'avertissement lancé à l'ange de l'Eglise d'Ephèse: "Je
connais ta conduite, tes labeurs et ta constance (...) Mais j'ai contre toi
que tu as perdu ton amour d'antan" (Ap 2, 2-4). Nous faisons nôtre le cri de
l'Esprit et de l'Eglise: "Viens" (Ap 22, 17), et nous laissons notre cœur
être envahi par la réponse du Seigneur: "Oui, mon retour est proche!"
(Ap
22, 20). Il est notre espérance, la lumière de notre chemin, la force pour
annoncer le salut avec un courage apostolique qui rejoint toutes les
cultures jusque dans leur cœur. Que Dieu vous assiste dans l'accomplissement
de votre mission, difficile mais exaltante.
En confiant à Marie, Mère de l'Eglise et Etoile de la Nouvelle
Evangélisation, l'avenir du Conseil pontifical pour la Culture et celui de
tous ses membres, je donne à tous de tout cœur la Bénédiction apostolique.
Texte original du
discours du Saint Père ►
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français
Sources : www.vatican.va -
E.S.M.
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 30.04.2008 -
T/Benoît XVI |