L’Indonésie, pays où le dialogue interreligieux
fonctionne et porte du fruit |
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Rome, le 29 novembre 2007 -
(E.S.M.) - En Indonésie, pays musulman le plus
peuplé au monde, le dialogue interreligieux fonctionne et porte du
fruit. Les bonnes relations entre les leaders sont consolidées et les
chrétiens sont estimés et appréciés dans la société, malgré certains
épisodes négatifs, qui n’invalident pas le cadre positif général.
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Les sœurs
dominicaines en Indonésie
(Sœurs et laïcs lors d'une
lecture)
L’Indonésie, pays où le dialogue interreligieux fonctionne et porte du fruit
“L’Indonésie, pays où le dialogue interreligieux
fonctionne et porte du fruit” Interview du père jésuite Ignazio Ismartono
SJ, coordinateur du “Service de crise et de réconciliation” de la Conférence
épiscopale indonésienne
En Indonésie, pays musulman le plus peuplé au monde, le dialogue
interreligieux fonctionne et porte du fruit. Les bonnes relations entre les
leaders sont consolidées et les chrétiens sont estimés et appréciés dans la
société, malgré certains épisodes négatifs, qui n’invalident pas le cadre
positif général. C’est ce qu’a déclaré dans une interview à l’Agence Fides
le père jésuite Ignazio Ismartono Sj, coordinateur du “Service de crise et
de réconciliation “ de la Conférence épiscopale de l’Indonésie, et
Vice-président de la Commission pour la Dialogue Interreligieux. Le P.
Ismartono, infatigable tisseur des rapports islamo-chrétiens, présente un
cadre de la situation de l’Indonésie et explique les fondements et les
perspectives de dialogue.
Après le virage démocratique de 1998, comment est
la situation politique et sociale en Indonésie aujourd’hui ?
Politiquement nous sommes au début d’un processus de décentralisation, qui
se configure dans l’ère post-Suharto, le dictateur qui a gouverné le pays
pendant plus de trente ans. Mais il faut veiller à ce qu’au centralisme
étatique ne se substitue pas un ‘centralisme local’, avec des hommes forts
qui imposent un modèle de pouvoir absolu dans les différentes régions. La
jeune démocratie indonésienne doit faire des pas de participation effective
vers le gouvernement, de protagoniste de la société civile au niveau local.
Certes, la démocratie n’est pas la panacée à tous les maux, et doit
favoriser le développement économique et social. Autrement, dans un pays
aussi diversifié comme l’Indonésie, on risque la fragmentation. Dans les
zones de la nation considérées ‘chaudes’ les problèmes sont divers et variés
entre eux. Dans le Nord de Sumatra, à Aceh, où je suis allé de nombreuses
fois, on parle de l’établissement de la sharia, la loi islamique. Mais la
société civile n’en veut pas. Les instances de séparatisme ne dépendent pas
de la religion, mais plutôt de la pauvreté. En Papouasie indonésienne
également, dans l’extrême Est de l’archipel, la population indigène est
tenue en marge du développement, elle a un niveau infime d’instruction,
tandis que l’exploitation des grandes ressources naturelles, à travers les
multinationales, n’a pas de retombées de croissance pour les communautés
locales rechutes. Aux Iles Moluques et à Sulawesi (théâtre de conflits
interreligieux en 1999-2002) la situation s’est améliorée et nous espérons
qu’elle demeure stable. Mais, en général, aujourd’hui en Indonésie le
problème majeur est le manque de travail : nous avons quarante-deux millions
de chômeurs, ce qui produit pauvreté, misère et tensions sociales.
Comment se situe actuellement le facteur “religion”
dans la vie nationale ?
Les deux organisations principales islamiques, “Nahdlatul Ulama” et “Muhammadiyah”
(qui comptent au total environ 70 millions de disciples) continuent à
déterminer le scénario. Si elles agissent de manière éclairée, elles
apportent des valeurs et des batailles justes, encouragent la concorde, le
pays emprunte la voie de l’harmonie sociale. Le gouvernement comprend le
rôle-clé qu’elles réalisent, par conséquent elle l’implique. Certes, il
existe de petits groupes qui veulent la violence. Le paradoxe est
l’existence de facteurs et d’éléments non religieux qui créent des problèmes
religieux : la répartition des ressources naturelles, les mass media, la
globalisation qui crée la marginalisation. D’un autre côté il existe encore
en Indonésie l’utilisation instrumentale de la religion pour des raisons
politiques. C’est pourquoi il faut rendre les personnes conscientes de ce
risque. De notre côté, en tant que chrétiens, nous cherchons à conjurer de
toutes les façons le soulèvement de conflits : nous cherchons toujours à
tisser de bonnes relations avec les musulmans et à encourager des
manifestations et des campagnes communes, pour éviter ces dangers.
Quelle est la base, le cadre qui fait bien
fonctionner le dialogue interreligieux en Indonésie ?
Le cadre qui garantit le dialogue est la “Pancasila”, la philosophie
qui est à la base de l’état, sanctionnée par la Constitution. Telle est la
philosophie des cinq principes (panca = cinq, sila = principe): foi en un
Dieu suprême unique ; humanité juste et civile ; unité de l’Indonésie ;
démocratie menée par la sagesse ; justice sociale. La Pancasila indique ce
qu’il y a de bon en chaque religion, les principes communs comme la
solidarité, le respect, la justice, et donc apporte de l’aide dans un
parcours de dialogue. La Pancasila est un instrument pour servir, non pour
dominer : elle sert à répéter l’unité de l’Indonésie et l’engagement commun
de la population indonésienne à respecter et à promouvoir certaines valeurs
fondamentales, qui garantissent la paix et la stabilité.
Dans la mesure où nous croyons au Christ, nous devons développer dans la
nation un esprit de fraternité, d’égalité entre communautés de culture,
d’ethnie et de foi diverse, comme base de repère pour une cœxistence
pacifique. Nous devons faire grandir chez chacun une attitude positive et
ouverte, dans la connaissance réciproque, l’écoute, la compréhension et le
dialogue.
Pensez-vous que le modèle de dialogue entre leaders
en Indonésie puisse être exportable, et peut-être puisse représenter un
paradigme pour d’autres régions du monde ?
Pour un homme comme moi qui cherche à comprendre les localismes (et
l’Indonésie est une nation dense de particularisme, langues, cultures, races
et religions), c’est difficile de parler de comparaisons ou de paradigmes.
Il faut toujours considérer l’arrière-plan historique et culturel : quand
l’islam parvint en Indonésie, il trouva une culture modelée par l’esprit
indo-bouddhiste ; de plus il arriva grâce aux commerçants et non par la
violence. Les marchands arabes respectèrent les traditions et les usages
locaux : ainsi l’islam s’introduisit petit à petit dans la société et la
tradition culturelle de Java avec discrétion, et sans éliminer la tradition.
Les modalités du dialogue sont toujours influencées par l’arrière-plan
historico-culturel. Le Moyen-Orient, par exemple, a une histoire
socio-politique complètement différente. Peut-être peut-on dire que depuis
le Moyen-Orient on peut regarder au-delà, vers l’Extrême-Orient, pour
comprendre certaines dynamiques et stratégies, sur la façon de promouvoir un
dialogue et une rencontre fructueuse entre religions et cultures,
spécialement sur le versant islamo-chrétien. Il est intéressant que le
gouvernement indonésien se fasse le promoteur d’un forum interreligieux et
d’un modèle de bonnes relations entre leaders et communautés de foi
différente.
Comment est considérée l’Eglise en Indonésie ?
L’Église (les catholiques sont au nombre de six millions) très bien
considérée par les personnes parce qu’elle fait beaucoup dans le domaine de
l’instruction et de la santé. Ces œuvres ont été très appréciées surtout
dans les zones rurales, où souvent il n’existe pas d’autres structures
étatiques. Nous voulons servir les personnes de la meilleure façon, en
assistant surtout les pauvres. Les hôpitaux catholiques ont une section
spéciale pour les indigents, qui n’ont même pas l’assistance sanitaire de
base. Les évêques construisent la Caritas indonésienne qui s’appelle
“Karina”: un beau pas en avant pour le mouvement de solidarité que l’Église
a toujours assuré au peuple indonésien, comme on l’a vu également à
l’occasion du tsunami ou des derniers désastres naturels à Java.
Sources: www.vatican.va
- Agence Fides
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 29.11.2007 - BENOÎT XVI
- T/International/Indonesie |