La visite de Benoît XVI en Australie,
quand les médias vont au-delà des préjugés |
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Cité du Vatican, le 29 juillet 2008 -
(E.S.M.)
- L'unique motif d'intérêt de certains médias à l'égard de
l'imminente JMJ était de savoir si le Pape se serait excusé pour les
abus sexuels commis par certains membres du clergé local, de la même
façon que Benoît XVI l'avait fait aux Etats Unis.
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La visite de Benoît XVI en Australie, quand les médias vont au-delà des
préjugés
Il y a de nombreuses années, lorsque les immigrés italiens en Australie
commencèrent à célébrer les fêtes des saints patrons dans les rues des
villes australiennes, la déception qu'ils suscitèrent dans certains secteurs
de la société locale avait une cause précise: avec leurs manifestations
publiques de religiosité populaire, les Italiens défiaient ouvertement une
séparation consolidée entre sacré et profane, profondément enracinée dans
la mentalité australienne, qui relègue la religion dans le domaine
strictement privé. La persistance de ces attitudes explique également
l'hostilité envers la Journée mondiale de la Jeunesse (JMJ) manifestée par
certains médias australiens au cours des semaines qui l'ont précédé. L'un
des quotidiens nationaux les plus importants, "The Sydney Morning Herald",
avait critiqué à plusieurs reprises le soutien financier offert par le
gouvernement de Nouvelle Galles du Sud à l'archidiocèse de Sydney, prévoyant
en outre des conséquences catastrophiques pour la circulation en ville et de
graves problèmes d'ordre public.
Outre cela, l'unique motif d'intérêt de certains médias à l'égard de
l'imminente JMJ était de savoir si le Pape se serait excusé pour les abus
sexuels commis par certains membres du clergé local, de la même façon que
Benoît XVI l'avait fait aux
Etats
Unis. L'insistance sur ce thème avait
atteint son sommet sur les écrans de la principale chaîne de télévision
publique, l'Australian Broadcasting Corporation (Abc). Quelques jours avant
l'arrivée du Pape, les journaux télévisés et l'émission du soir "Lateline"
avaient ressorti un cas d'abus sexuels commis il y a vingt-cinq ans par un
prêtre sur un homme de 29 ans, arrivant à demander la démission du cardinal
George Pell pour la façon dont il avait géré cette affaire en 2003.
L'affaire était ensuite retombée, mais que Abc ait conduit une campagne pour
faire démissionner l'archevêque de Sydney, précisément à la veille de la
JMJ, fait clairement comprendre l'attitude de certains médias australiens à
l'égard de l'Eglise catholique.
Au lendemain de la JMJ, le ton dominant dans les médias est en revanche très
positif, soit parce que les prévisions négatives du "Sydney Morning Herald"
ont été démenties de manière éclatante, soit en raison des paroles fortes de
condamnation prononcées par Benoît XVI à l'égard des abus sexuels. C'est
précisément sur ces paroles que s'arrête Andrew Hamilton dans un article
publié par "Eureka Street", une revue jésuite: "Les excuses prononcées par
le Pape, en insistant sur la justice et la compassion, ont offert une
orientation exemplaire. Si les catholiques australiens parlent et agissent
selon l'esprit de ces paroles, les médias cesseront progressivement
d'examiner l'Eglise catholique uniquement à la lumière de la question des
abus du clergé".
Le quotidien "The Australian" a lui aussi accueilli positivement les
expressions de douleur et de solidarité pour les victimes des abus
prononcées par le Pape dans la cathédrale de Sydney. Dans un éditorial du 21
juillet, le journal a enfin défini la JMJ comme l'"un des grands succès du
XXI siècle: bien organisée, sûre et positive". Pour "The Australian", la JMJ
a consacré la maturité atteinte par l'Eglise australienne, exprimée
symboliquement par cette comparaison: "Alors que l'Australie reste jeune en
terme d'héritage chrétien, les stations de la via crucis représentées dans
les lieux les plus extraordinaires de la ville ont représenté une expérience
religieuse émouvante et intense comme celles suscitées par les antiques
sanctuaires européens". Avoir montré au monde des aspects de la culture et
de l'art aborigène est également l'un des mérites de la JMJ selon
l'éditorial, qui se concluait par ces mots: "Beaucoup de temps, vraiment
beaucoup de temps s'écoulera avant que l'Australie puisse à nouveau voir une
semaine comme celle de la JMJ".
En citant les données d'un sondage de la société "Galaxi", sur le quotidien
"The Daily Telegraph", Brooke New-stead et Kate Sikora ont écrit: "C'est
officiel. Sydney a aimé la JMJ. Après avoir protesté avant l'événement, la
plupart des habitants de Sydney a changé d'idée". Selon le sondage, 71% des
interviewés a jugé en effet comme positive pour la ville la masse des
pèlerins arrivés du monde entier.
Neil Ormerod, professeur de théologie à l'Australian Catholic University, a
lui aussi déclaré à l'"Herald Sun" que l'issue "triomphale" de la JMJ a
dépassé les prévisions les plus optimistes: "Malgré mes craintes,
l'organisation et la mise en oeuvre de la JMJ nont été excellentes.
L'événement a engendré beaucoup de bonne volonté et des sentiments positifs
de la part des jeunes envers l'Eglise et son chef. Mais seul le temps nous
dira si tout cela se traduira par un changement durable dans les attitudes à
l'égard de l'Eglise".
Certains commentaires suggèrent que l'action suscité par la JMJ et par la
visite de Benoît XVI poussera l'Eglise catholique australienne à se
présenter de manière différente au reste de la société: le 22 juillet,
Catherine Smibert a rapporté sur le site www.catholic.org, les paroles
prononcées par le cardinal Pell, immédiatement après le départ du Pape:
"Peut-être par le passé, nous catholiques, avons été trop intéressés
uniquement par nous-mêmes. A présent, nous disons très clairement que nous
avons quelque chose à offrir au reste de la population australienne".
Egalement pour Tony Abbott, ancien ministre de la santé et catholique
pratiquant, la JMJ peut représenter un tournant pour l'Eglise australienne,
traditionnellement accusée d'avoir peu de conscience sociale et d'être trop
préoccupée par des questions intraecclésiales. Dans un article publié par le
quotidien "The Australian" le 22 juillet, Abbott a écrit: "Pendant quelques
jours, les catholiques sont sortis du ghetto mental dans lequel un grand
nombre s'était retiré et, à partir de maintenant, il est improbable que nous
restions sur la défensive et timides comme auparavant". Abbott a également
vu dans la JMJ l'occasion pour débattre à nouveau de l'attitude des médias à
l'égard de la religion: "Si les bonnes nouvelles sur la religion réussissent
à dominer les premières pages des journaux pendant toute une semaine,
peut-être certains médias devraient-ils reconsidérer la manière
condescendante avec laquelle ils traitent invariablement les matière
religieuses. Au moins pendant une semaine, les Australiens semblent avoir
accepté que la curiosité envers Dieu soit "gravée dans nos âmes" comme l'a
dit Benoît XVI. Pendant une semaine, la religion a été associée avec le fait
de conduire à la lumière le meilleur des êtres humains".
Un éditorial du 21 juillet du "Sydney Morning Herald", dont le ton est très
différent des nombreux articles publiés sur ce même journal avant et au
cours de la JMJ, pourrait laisser apparaître qu'un changement d'attitude a
commencé. Selon l'auteur de l'éditorial, "au cours de cette dernière semaine
Sydney, probablement la plus matérialiste et mondaine des villes
australiennes, a été transformée par un pèlerinage [...] La JMJ est bien sûr
un festival catholique, mais grâce à ses dimensions, elle a touché la
communauté tout entière et, à son tour, la communauté a embrassé la JMJ".
Enfin, selon cet éditorial, la JMJ a fait apparaître une image différente de
Benoît XVI, un Pape qui a offert à l'Eglise locale une opportunité
historique de renouveau: "Benoît XVI est arrivé à la papauté avec la
réputation d'un intellectuel conservateur. La JMJ de 2008 à Sydney l'a
montré s'adoucir dans son rôle: à ses jeunes disciples, il a révélé un
visage ouvert et expansif, et ces derniers lui ont manifesté en retour une
affection authentique. Ses excuses pour les abus sexuels du clergé semblent
être une nouvelle expression de cette capacité croissante d'atteindre et de
toucher les cœurs des croyants. Ses paroles offrent à l'Eglise catholique
australienne l'occasion d'une nouveau début face à cette question
difficile".
Stefano GIROLA
Université de Queensland (Australie)
Tous les articles parus avant
l'envoi des JMJ de Sydney 2008
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Sources : www.vatican.va
-
E.S.M.
(©L'Osservatore Romano - 29 juillet 2008)
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 29.07.2008 -
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