Mgr Léonard, nouvel archevêque de
Malines-Bruxelles : « Mes priorités : la liturgie et le social » |
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Le 29 janvier 2010 -
(E.S.M.)
- L’arrivée de Mgr Léonard à l’archevêché de Malines-Bruxelles
fait des vagues
en Belgique. Le
nouveau primat
de Belgique,
dont le ton
tranche avec les
habitudes
consensuelles de
ses concitoyens,
a donné un
programme
pastoral qui va
au-delà des
querelles de
chapelle.
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Mgr André-Joseph
Léonard
Mgr Léonard, nouvel archevêque de Malines-Bruxelles : « Mes priorités : la
liturgie et le social »
Le 29 janvier 2010 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
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L’évêque de Namur, Mgr André-Joseph Léonard – qui a collaboré à Famille
Chrétienne dans les années 1980 –, a été nommé archevêque de
Malines-Bruxelles par le pape Benoît XVI. Le nouveau primat de Belgique se refuse à entrer dans les
schémas qui voudraient l’opposer à son prédécesseur, le cardinal Godfried
Danneels, et aborde sa nouvelle mission avec une impressionnante sérénité.
C’est une nomination qui n’est pas passée
inaperçue en Belgique. Avant même son officialisation lundi 18 janvier,
l’arrivée de Mgr Léonard à la tête de l’archevêché de Bruxelles a fait les
gros titres dans la presse, comme il y a dix-neuf ans lorsqu’il a été nommé
évêque de Namur.
Mgr André-Mutien Léonard, qui vient d’annoncer son intention de s’appeler
désormais André-Joseph, se plaçant ainsi sous la protection du saint patron
du pays, est surtout connu pour ses déclarations médiatiques en faveur de la
vie et de la dignité humaine. Ce qui lui a valu une étiquette de «
conservateur » dans un pays sérieusement sécularisé, où bon nombre de
catholiques eux-mêmes montrent des distances vis-à-vis du Magistère.
Le nouveau primat de Belgique nous a reçus simplement à Namur, dans son
évêché de pierre blanche. Celui qu’on présente comme bilingue néerlandais/
francophone – une nécessité dans un pays comme la Belgique – parle en
réalité sept langues. Chaleureux, sans emphase, il fêtera ses 70 ans en mai.
Succédant au cardinal Danneels, qui a passé trente ans à la tête de
l’archidiocèse de Bruxelles, Mgr Léonard sera officiellement installé les 27
et 28 février. Lors de leur conférence de presse commune, son prédécesseur
n’a pas passé sous silence leurs différences, mais a mis l’accent sur leur
communion : « Dans un restaurant, ce n’est pas parce que le menu est servi
par d’autres garçons que le plat est changé ». Une formule que le nouvel
archevêque reprend volontiers à son compte.
Dans quel état d’esprit avez-vous accueilli votre nomination ?
Pour être honnête, je ne l’ai pas apprise avec une totale surprise. Mais
j’ai été très impressionné quand on me l’a annoncée. L’archidiocèse de
Malines-Bruxelles est très grand – il comprend le Brabant wallon, le Brabant
flamand, et une petite partie de la province de Malines – et je le
connaissais très peu. C’est très différent de mon arrivée au diocèse de
Namur, que je connaissais déjà très bien puisque j’en faisais partie.
C’est impressionnant et, en même temps, stimulant. J’y vois l’occasion d’un
rajeunissement pour ma pastorale et pour moi-même.
Votre nomination n’a laissé personne indifférent. Certains y voient
l’occasion d’une remise en ordre, d’autres ont peur d’un retour en arrière.
Comment pacifier les esprits ?
En un sens, je comprends la tentation de m’opposer au cardinal Danneels. La
presse est soumise à des contraintes d’Audimat. Il faut pimenter l’actualité
!
Bien sûr, nous avons un style et un tempérament différents ; mais nous
sommes tous les deux des évêques catholiques, nous avons dans le cœur la
même foi, le même amour de Dieu et la même espérance. Je dois éviter tout ce
qui donnerait l’impression que Rome m’a nommé pour faire le contraire de mon
prédécesseur. Ce ne serait pas une bonne entrée en matière, et ce n’est pas
mon sentiment.
Mais tout cela, je sais qu’il ne suffit pas que nous le disions.
L’expérience devra le montrer.
Quel regard portez-vous sur l’Église en Belgique ?
Pour l’essentiel, elle connaît les mêmes difficultés que dans beaucoup de
pays d’Europe occidentale. Mais elle les vit peut-être d’une manière plus
vive parce qu’il y a quelques décennies, la Belgique était une sorte de
citadelle catholique, surtout pour la partie flamande. Les institutions
catholiques étaient omniprésentes : écoles, cliniques, hôpitaux, syndicats,
mutuelles…
Je crois que, quand la sécularisation s’insinue dans une telle société, la
prise de distance est plus radicale et plus corrosive. En France, vous avez
vécu une moindre compénétration de la vie de l’Église dans la société. La
sécularisation n’a pas les mêmes retombées.
En Belgique règne aujourd’hui comme un esprit de revanche envers une Église
qui a, par le passé, peut-être trop fait la pluie et le beau temps. C’est
donc une situation éprouvante, mais il y a aussi de belles « pousses » et
des lieux d’espérance, comme les communautés nouvelles. Certaines viennent
de chez nous, d’autres de France ou du Canada. Nous avons des paroisses
vivantes, parmi d’autres qui mériteraient de se réveiller.
Le cardinal Danneels avait organisé à Bruxelles le congrès d’évangélisation
« Toussaint 2006 ». Allez-vous continuer cette entreprise de nouvelle
évangélisation ?
Je n’ai pas de plan détaillé. Mais l’expérience de « Toussaint 2006 » a été
révélatrice. Comme au moment de la visite de Jean-Paul II en Belgique en
1985, cela nous a donné un coup de fouet. Le feu de l’amour de Dieu et le
désir du témoignage sont toujours là. Ils couvent. Si l’Esprit Saint souffle
– et si nous l’aidons un peu –, il peut y avoir un réveil.
J’ai déjà rédigé quelques priorités. Quelques-unes sont reprises du cardinal
Danneels, qui a personnellement exprimé son désir d’une liturgie soignée
dans la ligne de ce que demande l’Église : qui soit digne du mystère de Dieu
et proche du cœur des gens. Il a eu l’audace de demander que notre Église
prie et adore davantage. Je ferai tout ce que je peux pour que ce souhait
soit exaucé, et que nous connaissions un renouveau de ce côté-là.
Par ailleurs, mon prédécesseur a mis en place ces dernières années le projet
« Bethléem », tout un réseau pour aider à se loger ceux qui n’y arrivent
pas. Je crois qu’en conjuguant ce souci social et l’esprit de contemplation,
nous aurons les moyens d’aider nos concitoyens à retrouver le chemin de
l’Évangile.
L’autre grand défi pour notre pays concerne les vocations. Déjà en France,
on dit que la crise est grave. Ici, nous avons proportionnellement deux fois
moins de futurs prêtres… Je n’ai pas de recette : on ne tire pas de
solutions de sa mitre ! Mais le Seigneur veut nous donner ce dont nous avons
besoin. Faisons ce que nous pouvons pour l’y aider.
J’y suis très sensible parce que j’ai moi-même été très engagé dans la
formation des futurs prêtres. Ici, en tant qu’évêque, j’ai vécu une belle
expérience, avec le séminaire diocésain Notre-Dame. J’ai aussi fondé le
séminaire Redemptoris Mater, avec des jeunes qui ont grandi dans le Chemin
néocatéchuménal. Cela m’a donné de très bons prêtres. J’ai aussi fondé une
maison d’études d’excellent niveau, le Studium. Il est un peu inspiré par la
pédagogie de l’Institut d’études théologiques, qui forme beaucoup de prêtres
français à Bruxelles. Tout cela s’est très bien développé, et m’a permis
d’ordonner quatre-vingt cinq nouveaux prêtres pendant mon épiscopat. Par
rapport au passé, ce n’est pas beaucoup, mais c’est une expérience
encourageante, qui me remplit de confiance et d’espérance.
La Belgique connaît aussi des querelles intérieures entre les différentes
communautés linguistiques. Quelle doit être la parole de l’archevêque ?
La Belgique est un pays de compromis. On doit mutuellement faire des
concessions. L’Église ne doit pas prendre d’initiatives, mais se couler dans
l’évolution politique, et respecter ce qui est décidé par ceux qui en sont
responsables. Dans ce contexte-là, elle peut être le facteur d’une meilleure
compréhension mutuelle.
Déjà, lors de la crise il y a deux-trois ans ici j’ai beaucoup plaidé pour
que du coté francophone, mes diocésains attachés à l’unité de la Belgique
manifestent le sérieux de cet attachement en ayant un intérêt véritable pour
la culture de leurs voisins. Il faut avoir assez de cœur pour connaître,
apprendre et aimer la langue de ses voisins.
L’un des rôles qu’un évêque wallon peut jouer, c’est apporter sa
contribution pour que, du côté francophone, il y ait un respect pour la
Flandre – la plus grande partie du pays –, ainsi que pour la petite
communauté germanophone.
En tant que primat de Belgique, vous serez l’interlocuteur principal des
autorités civiles et politiques. Comment l’Église peut-elle faire entendre
sa voix ?
Récemment, il y a eu de l’émotion lorsqu’une ministre du Parti socialiste a
exprimé de l’inquiétude sur mon arrivée parce que j’avais manifesté de la
distance avec certaines lois votées par le passé. Mais, fort heureusement,
plusieurs interventions, notamment de personnes de sa mouvance, ont rappelé
que ce n’est pas parce qu’une loi est votée démocratiquement qu’on ne peut
pas avoir un avis !
Dans sa position nouvelle, l’Église catholique ne doit pas s’ériger en juge
souverain de la politique. Mais elle doit participer aux débats de société.
En France, l’Église a suscité une multitude de forums à l’occasion de la
révision des lois de bioéthique. En Belgique, nous devrions promouvoir cette
culture du débat. Nous devons faire entendre la voix de l’Église de manière
respectueuse et ferme quand nous jugeons que certaines lois compromettent
des valeurs fondamentales de l’être humain ou de la société.
Sources : Famille
chretienne
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 29.01.2010 -
T/International
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