Ci-dessus moteur de recherche


ACCUEIL

BENOÎT XVI

LÉON XIV

CHRIST MISERICORDIEUX

L'EVANGILE DU JOUR

LA FAMILLE

TEXTES DU VATICAN

JEAN PAUL II

FARNESE LOUIS-CHARLES

ACTUALITE DE L'EGLISE

CATECHESES

LITURGIE

LES JEUNES

FIDELES LAICS

JOUR DU SEIGNEUR

SERVANTS DE MESSE

SPIRITUALITE

THEOLOGIE

VOCATIONS

VOYAGE APOSTOLIQUE

GALERIE PHOTOS

TV VATICAN

MEDITATIONS

QUI SOMMES NOUS

NOUS CONTACTER
 
BIBLIOTHEQUE
.
STATISTIQUES
 
Ouverture du site
19 Avril 2005
 

Ce qu’il y a de plus important, de plus nécessaire, c’est de prier pour comprendre

 

Le 27 novembre 2008 - (E.S.M.) - La prière, unie à une lecture éclairée par le Credo des apôtres, sont pour saint Augustin les deux grands critères qui permettent de comprendre les Saintes Écritures.

Saint Augustin - Pour agrandir l'image Cliquer

"Ce qu’il y a de plus important, de plus nécessaire, c’est de prier pour comprendre"

Interview de Nello Cipriani par Lorenzo Cappelletti

Le 27 novembre 2008 -  Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - La raison de notre entretien avec le père Cipriani, que nous trouvons dans son bureau de l’Institut Augustinianum, en deçà de la colonnade de Saint-Pierre, c’est le sujet du récent Synode des évêques convoqué par le pape Benoît XVI : “La Parole de Dieu dans la vie et dans la mission de l’Église”.

Comme toujours, nous trouvons le père Cipriani au travail, plongé dans des recherches entamées depuis longtemps, recherches qui non seulement tendent à démentir l’opinion commune selon laquelle l’empreinte néoplatonicienne serait restée dominante chez saint Augustin, même après sa conversion, mais qui sont aussi en mesure de démontrer qu’Augustin utilise parfois, sans l’ombre d’un doute, une terminologie aristotélicienne, qu’il emprunte à Varron et à d’autres auteurs. Dans ce procédé, qui le voyait recourir à une tradition philosophique non univoque, mais éclectique, Augustin était justement guidé par le sensus fidei acquis grâce à sa conversion, nous dit le père Cipriani.

Nous sommes désolés d’arracher le père Cipriani à son travail, mais son exquise gentillesse nous tire d’embarras.

Quelle est, fondamentalement, l’attitude de saint Augustin par rapport aux Saintes Écritures ?
NELLO CIPRIANI: Saint Augustin tenait les Saintes Écritures en très haute considération, il les considérait comme une lettre que Dieu avait envoyée aux hommes pour qu’ils puissent connaître la voie du salut. Il pensait qu’elles étaient un grand et véritable don de Dieu fait aux hommes et, qu’en tant que don de Dieu, elles étaient inspirées par l’Esprit Saint, au point qu’elles pouvaient enseigner ce qui est nécessaire au salut sans l’ombre d’une erreur. Cette nature de don rendait justement indispensable à ses yeux, pour lire et pour comprendre les Saintes Écritures, une bonne disposition intérieure: en d’autres termes, il estimait que la prière était nécessaire, pour les savants comme pour les autres. Il écrit dans son De doctrina christiana: « Il faut exhorter ceux qui s’appliquent aux Saintes Lettres non seulement à savoir reconnaître les différents genres littéraires dans les Écritures, mais aussi – et c’est la chose la plus importante et la plus nécessaire – à prier pour comprendre
(praecipue et maxime orent ut intelligant) » (III, 37, 56). Comprendre les Écritures, ce n’est pas seulement le résultat d’une étude scientifique, comme dans d’autres arts, mais c’est avant tout le fruit recueilli par celui qui se met devant la Parole de Dieu avec docilité, avec humilité et, je le répète, dans l’attitude de celui qui supplie, qui invoque. Augustin écrit dans les Confessions: « Vraiment, nous ne connaissons pas d’autres livres qui brisent si bien l’orgueil, qui jugulent si bien l’adversaire qui se défend, hésitant à se réconcilier avec Toi parce qu’il défend ses péchés. Je ne connais pas, Seigneur, je ne connais pas d’expressions aussi pures et capables de m’encourager à la confession, capables de plier ma nuque sous ton joug et de me pousser à un culte désintéressé. Fais en sorte que je les comprenne, ô bon Père; accorde-le moi, puisque je me suis soumis à Toi, puisque Tu les as rendues solides comme de la roche (solidasti) pour ceux qui se soumettent à Toi » (XIII, 15, 17).

Augustin a-t-il commencé à connaître le christianisme à travers les Écritures ou, au contraire, a-t-il appris à connaître celles-ci au fur et à mesure, après sa conversion ?
CIPRIANI: Augustin s’est tourné vers les Saintes Écritures pour la première fois à la suite de la lecture du dialogue cicéronien Hortensius, qu’il a fait dans ses années de jeunesse. Ce livre, qui allait à la recherche de la sagesse, l’avait enthousiasmé et Augustin a immédiatement associé la recherche de la sagesse au Christ, dont il avait sucé le nom, dit-il dans les Confessions, avec le lait de sa mère lorsqu’il était enfant. Mais en même temps que du nom du Christ, il s’est souvenu des Saintes Écritures. Ceci est le signe qu’il avait reçu de sa mère non seulement l’amour pour le nom du Christ, mais aussi pour les Saintes Écritures. Il avait déjà reçu, naturellement comme un enfant peut la recevoir, une éducation marquée par cette ouverture au Christ et aux Écritures.

Avait-il déjà un certain pressentiment de l’accomplissement des Écritures dans le Christ ?
CIPRIANI: Dans ses œuvres de la maturité, saint Augustin dit souvent que les Saintes Écritures dans leur ensemble, l’Ancien Testament comme le Nouveau, parlent du Christ. « Toute notre attention, quand nous écoutons un psaume, un prophète, la Loi […] tend à y voir le Christ, à y reconnaître le Christ »
(Enarrationes in psalmos 98, 1). Les Écritures tout entières sont Parole de Dieu, Parole qui s’est faite chair dans le Christ. C’est dans sa pleine maturité que pour Augustin, la Parole de Dieu et le Christ sont devenus indissolubles. Certes, il faisait déjà étroitement cette association au temps de sa première jeunesse, mais elle n’était pas encore aussi développée.

Dans cette évolution du rapport avec les Saintes Écritures, quel changement produit son ordination sacerdotale d’abord, épiscopale ensuite ?
CIPRIANI: Les Saintes Écritures ont déjà joué un rôle décisif dans sa conversion. La lecture de Paul, surtout, lui a révélé « cette charité qui édifie sur le fondement de l’humilité, c’est-à-dire Jésus-Christ »
(Confessions VII, 20, 26). Mais pendant toute la période au cours de laquelle il est resté laïc, et dans tous les Dialogues qu’il a écrits au cours des années précédant 393-394, Augustin ne s’est jamais appliqué de manière approfondie et critique aux Écritures. Il voulait faire une philosophie chrétienne qui se fasse guider et éclairer, certes, par la foi chrétienne, mais qui résolve ses problèmes sur le plan de la rationalité: à l’époque, il s’entretenait essentiellement, et toujours sur le plan de la rationalité pure, avec les philosophes de l’antiquité; les Saintes Écritures restaient complètement en marge. Dans ses Dialogues, il n’en appelle presque jamais à l’autorité des Écritures pour prouver une de ses thèses. Avec l’ordination sacerdotale, en revanche, Augustin a compris qu’il était devenu dispensator Verbi et sacramenti et il a donc tout de suite senti le besoin d’approfondir tout le contenu des Écritures pour pouvoir enseigner la voie chrétienne aux fidèles. C’est justement pour cette raison qu’il a demandé à son évêque une brève période d’étude au cours de laquelle il a mûri une nouvelle conception de la connaissance parfaite de Dieu. Avant son ordination sacerdotale, Augustin pensait qu’il pouvait arriver immédiatement à cette connaissance à travers la raison éclairée par la foi. Avec l’ordination, il comprend que l’approfondissement critique des Écritures constitue une étape irremplaçable. Il écrira dans De civitate Dei: « Nous prêtons foi aux Écritures que l’on appelle canoniques et qui ont une très grande autorité en ce qui concerne ces choses que l’on ne doit ignorer et que d’ailleurs nous ne pouvons atteindre par nous-mêmes » (XI, 3). À partir de ce moment, les Écritures sont au centre de toute la réflexion et de l’étude d’Augustin, non seulement lorsqu’il écrit des œuvres exégétiques, mais aussi dans tous ses autres écrits: c’est toujours des Saintes Écritures qu’il tire son inspiration; les Écritures deviennent la base de ses échanges avec les donatistes, avec les pélagiens, avec tous. À partir de son ordination sacerdotale, Augustin devient un tractator divinarum Scripturarum, c’est-à-dire un commentateur des Écritures au sens large du terme. Cette science, comme il l’appelait, devait servir à renforcer la foi chez les fidèles, à l’approfondir et à la défendre de toutes les objections que pouvaient faire les païens ou encore des erreurs des hérétiques. C’est justement sur la base de la définition de la théologie comme science des Écritures que saint Thomas, au début de sa Somme, appellera la théologie sacra doctrina, en citant les mots de saint Augustin, tirés du De Trinitate. En général, on fait remonter la distinction entre philosophie et théologie à saint Thomas ou à la scholastique. En réalité, saint Thomas s’inspirait de saint Augustin.

Quels critères suit saint Augustin du point de vue de l’interprétation des Écritures ? S’inspire-t-il de quelqu’un en particulier ?
CIPRIANI: Il faut avant tout mettre l’accent sur le fait que le respect, la vénération pour les Écritures se transforment, chez Augustin, en une attitude de prière face à celles-ci. Pour comprendre les Écritures, il prie Dieu de l’éclairer. Cette attitude d’humilité, de prière, de docilité est fondamentale. Il écrit, dans les Enarrationes in psalmos: « Si tu ne comprends pas une chose, si tu comprends peu ou si tu ne pénètres pas à fond, honore les Écritures de Dieu, honore la Parole de Dieu, même si elle n’est pas claire pour toi. Remets-en la compréhension à plus tard, avec dévotion. Ne t’entête pas à accuser les Écritures d’obscurité, voire de fausseté. Il n’y a là rien de faux. S’il y a quelque chose d’obscur, ce n’est pas pour te le refuser, mais pour que tu te disposes à l’accueillir. Donc, lorsqu’il y a quelque chose d’obscur, c’est le Médecin qui l’a fait, de sorte que tu frappes à la porte; il l’a voulu pour que tu te disposes à frapper »
(146, 12). Et puis, justement parce qu’Augustin est sûr que les Écritures sont la Parole de Dieu et parlent toujours et seulement du Christ, il met en évidence l’importance du fait qu’elles soient lues à la lumière de la foi de l’Église telle qu’elle est exprimée dans le Symbole de foi. Il parle de la regula fidei comme critère herméneutique pour lire l’Ancien et le Nouveau Testament, et après ce double critère fondamental, il offre quelques autres règles d’interprétation. Mais je m’empresse de dire que, d’après Augustin, il y a certes de nombreux textes difficiles dans les Écritures (de manière voilée, l’Ancien Testament recèle en quelque sorte un peu tout le Nouveau Testament, le Christ et l’Église: en ce sens, les Écritures forment un livre difficile à comprendre), mais qu’il n’en pensait pas moins que celles-ci contenaient de très nombreux passages parfaitement clairs et que ce sont justement ceux-ci qui parlent des principales vérités de la foi chrétienne, au point que le Credo n’est autre que leur fruit, formulé avec autorité par l’Église sur la base de l’enseignement des Écritures. En somme, il y a une partie des Écritures qui n’a pas besoin de grands efforts d’interprétation. Naturellement, Augustin mettait l’accent sur la nécessité de lire les Écritures dans leur ensemble: on ne peut pas prendre un texte en le séparant de tout le reste pour en retirer une vérité en opposition avec d’autres affirmations qu’elles contiennent ailleurs. Augustin jugeait également que, pour lire les Écritures avec profit, il faut se servir des connaissances de toutes les sciences, y compris celles du monde physique, du monde végétal et animal, et recourir, plus généralement, à tous les instruments scientifiques qu’offrait la culture de son temps. Je pense que pour Augustin, ouvert à tous les apports, à toutes les contributions de la culture de son temps, il n’aurait pas été difficile d’accepter la méthode historico-critique. Par exemple, Augustin n’éprouve aucune difficulté à accepter, d’un donatiste comme Ticonius, certaines indications méthodologiques pour l’exégèse des Écritures, même s’il en critique certains aspects.

On constate certaines analogies avec notre temps. La méthode historico-critique ne naît pas dans un milieu catholique.
CIPRIANI: Il y a encore un aspect que je voudrais souligner, parce qu’il me semble particulièrement actuel. Dans la période où il avait été manichéen, saint Augustin avait pu constater l’absurdité des livres manichéens, qui prétendaient expliquer tous les phénomènes naturels, y compris ceux de l’astronomie, comme les phases lunaires, les éclipses de la lune, du soleil et d’autres encore, en recourant au mythe de la lutte entre le bien et le mal. Il s’est rendu compte que ces soi-disant explications non seulement n’expliquaient pas tout, mais qu’elles étaient en contradiction avec celles, beaucoup plus sérieuses et documentées, des savants de l’antiquité et des philosophes naturalistes qu’il avait lus. Cette expérience négative a justement été l’une des raisons pour lesquelles il a abandonné le manichéisme. Il s’est rendu compte que ce dernier, qui lui avait promis de le conduire à la vérité sans la soumission à la foi, l’avait trompé, parce qu’il lui avait fait croire à un tas d’histoires déraisonnables. Et donc, lorsqu’il a commencé à lire et à expliquer les Écritures, et surtout la Genèse, il s’est souvenu de cette leçon et il est parvenu à des affirmations qui ont été très utiles à Galilée lorsque celui-ci a voulu présenter ses théories, ses découvertes comme n’étant pas contraires à la foi chrétiennes. Augustin disait en substance que les Écritures n’ont pas la prétention d’enseigner aux hommes comment le monde est fait, et qu’elles ne veulent pas se substituer à la science. Les Écritures veulent nous enseigner la voie du salut, ce qui est nécessaire pour vivre avec droiture et pour être sauvé. Lorsque les Écritures parlent du ciel, de la terre, de la création, on ne doit pas les lire comme si elles voulaient se substituer à la science. Cette leçon me semble très importante. Et il aurait été très important qu’au XVIIème siècle, les théologiens ou ceux qui ont condamné Galilée en aient tenu compte. Mais elle est utile aujourd’hui pour nous aussi, qui nous trouvons dans cette crise entre science et Écritures, entre science et foi, à propos par exemple de la théorie de l’évolution. Je crois qu’Augustin prendrait une attitude de dialogue, et non pas de refus a priori de cette théorie.
 

Nouveau : S'inscrire à la newsletter ! Voir menu de gauche.


Sources : Interview de Nello Cipriani -  (E.S.M.)
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M. sur Google actualité)  27.11.2008 - T/Synode

 

 » Sélection des derniers articles  
page précédente haut de page page suivante